Séance en hémicycle du 3 février 2015 à 9h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 29 janvier 2015 a été publié sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Pierre Médevielle, auteur de la question n° 953, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Médevielle

Ma question porte sur un sujet qui n’est certes pas original, mais le problème est hélas ! récurrent : je veux parler du défaut de couverture en téléphonie mobile dans certains territoires, notamment dans mon département de la Haute-Garonne. Néanmoins, la question intéresse également tous les départements voisins, en particulier ceux du Sud-Ouest, voire certains départements du Sud-Est.

Nous avons écouté avec beaucoup d’intérêt les annonces faites au Sénat, en salle Médicis, par Mme la secrétaire d’État concernant l’avenir du numérique, avec des programmes très ambitieux – et qui le sont de plus en plus. Comme vous le savez, nos prétentions sont beaucoup plus modestes en la matière, car nous ne bénéficions même pas d’une couverture mobile correcte ! J’en ai récemment encore eu la preuve lors de la dernière campagne sénatoriale : dans le sud de mon département, comme dans les Hautes-Pyrénées, les Pyrénées-Atlantiques ou les Pyrénées-Orientales, il est quasiment impossible de bénéficier d’un accès normal à un réseau de téléphonie mobile.

Il est souhaitable que le Gouvernement fasse pression sur les opérateurs de téléphonie mobile afin que l’on réfléchisse en pourcentage du territoire couvert et non en pourcentage de la population. Il s’agirait d’un changement d’unité de mesure important, car on « trompe » en quelque sorte nos concitoyens en raisonnant en pourcentage de la population.

Nos communes, déjà situées dans des territoires enclavés et éloignés des pôles d’activités, sont d’autant plus pénalisées que l’accès aux télécommunications est un facteur indispensable pour leur développement économique et touristique dont nous avons en ce moment plus que jamais besoin.

Par ailleurs, cette carence ne manque pas de poser de sérieux problèmes dans le domaine de l’organisation des secours et des soins médicaux d’urgence, notamment en montagne. Je peux en témoigner en tant que professionnel de santé.

Madame la secrétaire d’État, quelles mesures pouvons-nous prendre, en concertation avec le Gouvernement, afin de pousser les opérateurs vers la mise en place d’une meilleure couverture du territoire français, à défaut d’une couverture intégrale, ce qui semblerait un projet un peu utopiste ?

Debut de section - Permalien
Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique

Monsieur le sénateur Pierre Médevielle, vous l’avez souligné, avec le plan France Très Haut Débit, le Gouvernement s’est doté d’un instrument ambitieux de déploiement de nouveaux réseaux fixes – internet – dans les territoires.

Ces nouveaux réseaux à très haut débit correspondent à une réelle attente de nos concitoyens et des entreprises installées en France. Leur déploiement rend plus évidents encore les défauts de couverture en téléphonie mobile. Or il ne faudrait pas que l’on oppose un type de réseau à un autre. L’heure est de plus en plus à la convergence des réseaux, y compris en matière d’offres commerciales proposées par les opérateurs de téléphonie. Il nous faut entendre la colère qu’expriment parfois nos concitoyens ne bénéficiant pas d’une bonne couverture mobile, notamment lorsqu’il s’agit pour eux de joindre les services d’urgence ou les services médicaux en cas de situation problématique.

J’estime donc qu’il faut construire un second pilier de l’action du Gouvernement en faveur de la couverture de nos territoires en infrastructures numériques afin qu’aucune zone ne soit oubliée et que la généralisation de l’accès à internet ne devienne pas une double peine pour les territoires ruraux.

En matière de mobile, nous disposons d’une couverture plutôt meilleure que celle de tous nos voisins européens. Les chiffres figurant sur le site de l’ANFR, l’Agence nationale des fréquences, sont clairs. Les opérateurs mobiles couvraient, fin 2013, en métropole, plus de 99, 9 % de la population en téléphone mobile de deuxième génération, ou 2G – bas débit mobile –, et plus de 99 % de la population en téléphonie mobile de troisième génération, ou 3G – haut débit mobile. Seule une proportion de 1, 5 % de la surface du territoire métropolitain n’est couverte par aucun opérateur en 2G.

Cependant, ces chiffres ne correspondent pas toujours au ressenti des utilisateurs, surtout lorsque les conversations téléphoniques sont coupées lors des déplacements. Le nouveau président de l’autorité de régulation sectorielle, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, récemment nommé par le Président de la République, a confirmé sa volonté de travailler à la définition d’indicateurs traduisant mieux la réalité vécue par nos concitoyens.

Mais changer le thermomètre ne modifie en rien l’état du malade. C’est pourquoi j’ai annoncé mon intention de reprendre l’initiative en matière de couverture mobile des zones rurales, qui n’ont plus fait l’objet d’intervention de l’État depuis 2008.

Des travaux sont désormais en cours pour définir un mécanisme qui exige la mobilisation des services de l’État et l’ensemble des acteurs concernés, avec trois objectifs.

Premièrement, il s’agit d’ouvrir les cent soixante-dix communes identifiées, au-delà des précédents programmes zones blanches, qui ne disposent d’aucune couverture mobile.

Deuxièmement, il s’agit de répondre à un manque évident des programmes précédents, qui ne permettaient pas d’assurer la couverture de l’ensemble de la population des communes puisqu’ils ne visaient que les centres-bourgs. Il faut en effet pouvoir répondre aux besoins des communes les plus mal couvertes.

Troisièmement, au-delà du service téléphonique de base, il convient de s’assurer que les territoires ruraux disposent de l’accès à l’internet mobile en 3G. Un programme de couverture en 3G de 3 900 communes par l’ensemble des opérateurs devait être achevé fin 2013. Or il ne l’a pas été. Le Gouvernement travaillera avec l’ARCEP pour que l’objectif de ce programme soit atteint, ce qui permettra aussi de limiter les zones grises de la 3G.

Nous sommes donc au travail et souhaitons aboutir le plus rapidement possible à une proposition. Cette dernière sera discutée avec les représentants des collectivités et les opérateurs afin que cette situation inacceptable ne se prolonge pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Médevielle

Je suis ravi, madame la secrétaire d’État, que vous fassiez le distinguo entre les arguments commerciaux des opérateurs, qui annoncent une couverture en 2G, parfois en 3G, et le ressenti dans la réalité de nos concitoyens, car les deux ne coïncident pas. Il est important que le Gouvernement ait bien pris la mesure de ce problème, qui ne manque pas – j’insiste sur ce point – de poser de sérieuses difficultés pour l’organisation des secours et des gardes, nuisant à la qualité et à la proximité de l’offre de santé pour nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Gisèle Jourda, auteur de la question n° 960, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Jourda

Madame la secrétaire d’État, ma question est similaire à celle que vient de soulever mon collègue. Elle porte sur le défaut de couverture en téléphonie mobile, mais dans certaines communes du département de l’Aude, département voisin de celui de Pierre Médevielle…

Depuis 2004, de nombreuses initiatives départementales, régionales et intercommunales – il faut le souligner – ont permis de résorber la majorité des « zones blanches résiduelles de téléphonie mobile 2G » selon la définition retenue par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, dans le département de l’Aude.

Je tiens notamment à saluer l’investissement plein et entier du conseil général de l’Aude dans le programme national de résorption des zones blanches de téléphonie mobile engagé en 2003 par la délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale, la DATAR.

Le premier rapport du comité interrégional pour le développement et l’aménagement des Pyrénées a ainsi identifié en 2012 dix-sept communes en « zone blanche » de non-réception. Mais nous savons d’expérience, et grâce aux contacts que nous avons avec les maires, que le chiffre réel est largement supérieur à celui-ci puisqu’une quarantaine de communes environ, voire plus, seraient concernées.

Toujours en 2012, le syndicat audois d’énergies a été chargé d’achever le programme départemental de résorption des « zones blanches » de téléphonie mobile. L’opération de conception et de réalisation des infrastructures de téléphonie mobile est prête, mais elle est suspendue à l’acceptation des opérateurs de téléphonie d’exploiter le site.

Sur la commune de Marquein, les travaux d’alimentation électrique du site ont été engagés et permettront de couvrir treize autres communes, soit près de 2 000 habitants de plus. Néanmoins, à ce jour, les négociations avec l’opérateur historique sur le département de l’Aude – SFR pour ne pas le citer – n’ont pas abouti à un accord permettant de répondre aux forts besoins en téléphonie mobile ni de respecter le modèle et les principes.

Madame la secrétaire d’État, le défaut de couverture en téléphonie mobile est d’autant plus problématique que la distribution de la téléphonie fixe est régulièrement déficiente, tout particulièrement dans l’arrière-pays rural, que ce soit dans les Corbières, le Minervois, la montagne Noire ou en Pyrénées audoises.

En effet, l’absence constante d’entretien des lignes téléphoniques fixes – pour ne pas dire leur abandon quasi complet – provoque très régulièrement des coupures prolongées – quinze jours, voire trois semaines. Dans ces secteurs ruraux, cela peut s’apparenter à une mise en danger d’autrui, notamment en cas d’accident, de maladie ou de soins pour les personnes âgées souvent maintenues à domicile.

Un tel désengagement peut avoir des conséquences extrêmement graves pour les populations vivant dans ces zones. La disposition des moyens élémentaires de communication étant devenue un facteur évident et incontournable de développement du territoire et de sécurité pour les habitants, il importe de tout mettre en œuvre pour répondre pleinement à l’ensemble de ces besoins.

Madame la secrétaire d’État, quelles mesures entendez-vous prendre pour que les opérateurs téléphoniques mettent un terme à ces situations et répondent enfin aux obligations afférentes à leurs activités ?

Lors des conclusions des Assises des ruralités, la ministre de l’égalité des territoires, Sylvia Pinel, a annoncé un plan pour la résorption des zones blanches et grises de téléphonie mobile dont les détails devraient être connus dans le courant du mois de février. Les élus de l’Aude saluent cette volonté et je profite de cette occasion pour rappeler au Gouvernement, madame la secrétaire d'État, à quel point nos attentes sont grandes.

Debut de section - Permalien
Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique

Madame la sénatrice Gisèle Jourda, vous avez raison de souligner à quel point les attentes et les préoccupations de nos concitoyens au sujet de la couverture fixe et mobile de nos territoires sont grandes. Le Gouvernement les entend ; il en a fait une priorité de son action.

Avec le plan France Très Haut Débit, nous avons souhaité engager le plus rapidement possible, avec les moyens budgétaires afférents, le chantier qui doit être structurant pour nos infrastructures numériques de demain.

Toutefois, cela ne suffit pas ; il faut d’abord entretenir un réseau qui ne l’est pas toujours puis s’interroger sur la qualité du réseau mobile à l’heure où les opérateurs formulent des propositions commerciales convergentes et où le ressenti de la population en matière de qualité de couverture ne correspond pas aux chiffres affichés.

Je vous répondrai tout d’abord sur la qualité des services du réseau téléphonique. Orange, en tant que prestataire du service universel, doit respecter un cahier des charges qui comporte des exigences fortes en matière de qualité du service fixe, notamment concernant le temps de réparation d’une défaillance téléphonique. Nous avons été alertés, de même que l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, d’une dégradation de ce réseau au début de l’année dernière. C’est dans ce contexte que deux enquêtes administratives ont été ouvertes le 27 mai 2014.

À l’issue de ces enquêtes, le 28 novembre 2014, la société Orange s’est engagée à respecter un plan d’amélioration de la qualité des services offerts sur ses réseaux fixes, articulé autour de trois mesures permettant de répondre aux problèmes constatés.

La première consiste à accorder des moyens supplémentaires aux unités d’intervention, notamment pour résoudre le stock de défaillances en instance. La deuxième concerne l’anticipation des dégradations futures de la qualité de service. La troisième a trait au renforcement de l’information des collectivités territoriales, notamment sur les évolutions du réseau, et à l’intensification de la collaboration avec celles-ci et avec les élus locaux sur les détections et le traitement des dysfonctionnements, particulièrement en cas de crises – tempête, inondation… – qui exigent une information rapide à l’adresse de la population. Mes équipes ont particulièrement insisté auprès de l’opérateur sur ce dernier point. Des lignes téléphoniques dédiées aux élus locaux ont été mises en place. Encore faut-il pouvoir les utiliser, grâce à la téléphonie mobile ; or celles-ci ne sont pas toujours opérationnelles. Il est tout de même formidablement paradoxal qu’à l’heure du numérique tous les moyens destinés à assurer une information en temps réel sur l’état de dégradation d’un réseau ne soient pas mis à disposition.

Ce plan d’amélioration de la qualité doit désormais se mettre en œuvre. J’y serai particulièrement vigilante, car je partage vos conclusions, madame la sénatrice : il s’agit effectivement d’un service essentiel pour nos concitoyens, en particulier pour les personnes âgées.

S’agissant des réseaux mobiles, comme je l’ai indiqué à votre collègue M. Médevielle, des travaux sont désormais en cours pour définir un nouveau programme de couverture. Sa conception prend un certain temps puisqu’il s’agit d’inclure désormais dans l’action du Gouvernement un programme dédié à la couverture mobile parallèlement au programme concernant le réseau fixe.

Vous avez souligné l’engagement du département ces dernières années en vue d’assurer une bonne qualité de couverture mobile. Cet engagement ne saurait suffire ; les opérateurs téléphoniques et l’État doivent pleinement jouer leur rôle.

Le programme que je souhaite mettre en place répondra à trois objectifs.

Il faut d’abord couvrir les 170 communes qui ont été identifiées comme ne disposant d’aucune couverture mobile, y compris de deuxième génération.

Il importe ensuite de répondre à un manque évident des programmes précédents sur les zones blanches : ces programmes visaient exclusivement les centres-bourgs et ne permettaient donc pas d’assurer la couverture de l’ensemble de la population des communes. Il faut en effet pouvoir répondre aux besoins des communes les plus mal couvertes.

Enfin, au-delà du service téléphonique de base, il faut s’assurer que les territoires ruraux disposent de l’accès à l’internet mobile de troisième génération. Un programme de couverture en 3G concernant 3 900 communes aurait dû être achevé par les opérateurs à la fin de l’année 2013 ; cela n’a pas été le cas. Le Gouvernement travaillera avec l’ARCEP pour que l’objectif de ce programme soit atteint, ce qui aurait pour effet de limiter les zones grises de la 3G.

Ce programme devrait permettre de répondre aux difficultés que vous décrivez dans l’Aude, madame la sénatrice, une situation dont j’ai été personnellement informée, en particulier par vous-même. Les différentes démarches qui ont été effectuées à l’issue de vos interventions n’ont pas permis d’aboutir, faute d’obligation des opérateurs concernés d’assurer la couverture des sites qui ont été identifiés dans ce département.

C’est la raison pour laquelle le programme que j’entends désormais proposer devra répondre à ce type de situation.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Jourda

Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État. Je forme le souhait que les communes concernées soient non pas uniquement celles qui ont été identifiées par l’ARCEP, mais également celles qui ont été répertoriées par l’étude.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Roland Courteau, auteur de la question n° 942, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Madame la secrétaire d’État, voilà quelques années, nous découvrions, sans trop mesurer les conséquences sur le long terme, que certains platanes longeant le canal du Midi étaient touchés par la maladie du chancre coloré. On nous indiquait alors que, cette maladie étant extrêmement contagieuse, la seule solution, en l’absence de tout traitement possible, était l’abattage.

Or, l’abattage, s’il n’a pu endiguer la maladie, a eu des effets ravageurs. Depuis 2011, pas moins de 10 000 platanes ont été abattus, dont près de 4 000 pour la seule année passée. Les faits sont là ; nous n’arrivons pas à endiguer cette maladie, en conséquence de quoi, en de nombreux endroits, la très appréciée voûte végétale du canal du Midi, lequel est inscrit par l’UNESCO au patrimoine mondial de l’humanité, est ainsi détruite tandis que, parallèlement, l’on constate la progression rapide de ce champignon en d’autres lieux.

Depuis plusieurs mois, nous défendons, au moins à titre d’expérimentation, le procédé de micro-injection développé à Toulouse par le Centre d’expertise en techniques environnementales et végétales, le CETEV, comme solution alternative à l’abattage massif des platanes touchés par ce mal.

La direction générale de l’alimentation, la DGAL, était favorable, sur le principe, à ce type d’expérimentation si les modalités d’application et les risques associés étaient évalués au préalable. Or ces modalités ont été définies dans le protocole élaboré conjointement par le CETEV et la DGAL, qui a été soumis à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, le 20 octobre 2014.

Nous attendons toujours, en ce qui nous concerne, que les services du ministère de l’agriculture donnent le feu vert.

Je me réjouissais, voilà quelques mois, que le principe d’une expérimentation de ce nouveau protocole de traitement préventif ou curatif précoce par micro-injection ait été retenu ; mais, depuis, nous attendons...

Or, il devient extrêmement urgent d’agir. Il devient urgent de lancer cette expérimentation et de tester le traitement. Ou alors, les mois et les années passant, si nous attendons trop, il n’y aura plus un seul arbre à sauver lorsqu’on lancera le traitement, les 40 000 platanes ayant déjà été abattus !

Ma question est donc simple : le ministère de l’agriculture va-t-il rapidement donner son feu vert à cette expérimentation ?

Debut de section - Permalien
Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique

Monsieur le sénateur Roland Courteau, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence du ministre de l’agriculture, Stéphane Le Foll, qui est retenu à l’Assemblée nationale pour une séance de questions orales sans débat se tenant parallèlement à celle-ci.

Vous parlez du chancre coloré, une maladie grave due à un champignon qui cause chaque année la mort de nombreux platanes. C’est un organisme nuisible réglementé, contre lequel la lutte est obligatoire. Il est présent dans tout le sud de la France – Aquitaine, Languedoc-Roussillon, Midi-Pyrénées, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Rhône-Alpes. Les régions limitrophes ont effectué un suivi qui n’a conduit à aucun signalement en 2014.

Malgré les mesures de lutte obligatoire, cette maladie continue à progresser sur les territoires déjà affectés, notamment le long du canal du Midi en Midi-Pyrénées et récemment sur la commune d’Arcachon, en Aquitaine.

Le ministère de l’agriculture est très attentif au suivi de ce phénomène et à l’émergence de solutions innovantes de traitement. Pour réduire le nombre d’arbres abattus de manière préventive, plusieurs projets d’expérimentation – vous y avez fait référence – visant à favoriser la pénétration de produits phytosanitaires efficaces ont été élaborés en France et dans d’autres pays. Ainsi, une méthode qui consiste à injecter un fongicide directement dans le tronc est en cours de développement.

Les résultats préliminaires obtenus sont encourageants d’un point de vue scientifique mais, à ce jour, aucune stratégie de lutte vraiment efficace pour soigner les arbres atteints n’a encore été mise au point. Si les traitements cités semblent freiner le développement de la maladie, ils ne parviennent pas à tuer complètement le ravageur et n’empêchent donc pas la dissémination ultérieure de la maladie. C’est la raison pour laquelle il a été estimé, à ce stade, que les expérimentations devaient continuer.

Nous partageons naturellement votre sentiment d’urgence, monsieur le sénateur. Cependant, avant d’amplifier la prévention et la lutte, il faut s’assurer de l’efficacité du dispositif.

À l’heure actuelle, l’abattage des arbres infestés et environnants demeure donc la seule méthode efficace pour lutter contre le ravageur. La poursuite des abattages est indispensable, malheureusement, pour éviter une trop forte progression du chancre coloré dans les régions infestées.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, qui ne me satisfait pas pour autant. Je suis même plutôt irrité ! Vous n’y êtes pour rien, madame la secrétaire d'État, mais cela fait plus d’un an que nous attendons le feu vert pour lancer avec le CETEV l’expérimentation sur le canal du Midi et que l’on nous répond la même chose. Or, dans votre réponse, vous n’avez pas mentionné la moindre date, le moindre délai de mise en œuvre de celle-ci. « C’est une question de semaines », nous avait-on dit il y a un an ! Et, pendant ce temps, l’abattage des arbres se poursuit… Restera-t-il des platanes sur les 30 000 encore en place avant que l’expérimentation n’ait lieu ?

Je ne comprends pas cette attente, ces durées excessives alors que la maladie progresse à grands pas. Je pensais que l’on avait compris qu’une course de vitesse était engagée contre cette maladie : 40 000 platanes menacés le long du canal du Midi, lui-même inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, cela mériterait, à mon sens, un peu plus de rapidité et un maximum d’attention !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Michel Le Scouarnec, auteur de la question n° 952, adressée à M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, de nombreuses activités industrielles sont liées à l’identité maritime du département du Morbihan, à l’image du port de pêche de Lorient, mais aussi des chantiers STX de Lorient.

Ces chantiers traversent une situation délicate puisque la direction de STX France a engagé une procédure de licenciement collectif de quarante-sept salariés, soit 50 % de l’effectif actuel, qui compte quatre-vingt-dix-sept personnes.

Cette déclaration a légitimement accablé l’ensemble du personnel, qui a porté une volonté ambitieuse de poursuite des activités avec la construction de sept navires en un peu plus d’un an. Tous ces projets se sont révélés à l’équilibre malgré un effectif en constante diminution, ce qui prouve que le savoir-faire de ces travailleurs et leurs compétences ne sont plus à démontrer.

Alors que la société STX Lorient dispose d’une main-d’œuvre qualifiée et expérimentée, sa situation difficile s’explique par le manque de commandes.

Les récentes annonces de la direction ne permettent pas d’envisager sereinement l’avenir, d’autant que le service commercial et le service projets ne sont plus présents sur le site, ce qui complexifie encore plus la visibilité et la reconnaissance de l’entreprise par d’éventuels commanditaires.

Les salariés de STX Lorient connaissent leur potentiel de production. Ils demandent non pas des moyens inconsidérés pour sauvegarder leur outil de travail, mais simplement une reconnaissance de leurs compétences, qui peuvent être plus qu’utiles dans la bataille de la compétitivité industrielle à laquelle notre pays est confronté.

Ainsi, les salariés portent un projet alternatif au plan social de l’entreprise, axé sur l’anticipation des travaux sur les bateaux, la formation professionnelle pour accroître la polyvalence des compétences, le prêt de personnels ou encore la construction de panneaux armés pour les paquebots ou d’une barge. Ce dernier projet rapporterait à lui seul 15 000 heures de travail et coûterait moins cher à mettre en œuvre que le plan social.

Le chantier STX de Lorient est important pour l’ensemble du Morbihan, car 250 sous-traitants dépendent également de la pérennité de ses activités. La région Bretagne, consciente du potentiel de l’entreprise, est prête à accorder des moyens à la formation professionnelle, après avoir déjà investi 50 millions d’euros pour le port de Lorient, dont 5 millions d’euros spécifiquement pour STX avec l’aménagement du quai de transport de chalands de débarquement, sur la rive gauche du Scorff.

Par ailleurs, les autres chantiers seraient à saturation, ce qui prouve que, si l’on s’en donnait les moyens, des solutions et des perspectives existeraient.

Après la rencontre avec une délégation du personnel le 8 janvier dernier à Matignon et au ministère de la défense, il serait opportun de s’interroger sur les dispositions que l’État pourrait prendre pour venir en aide à toutes les entreprises qui, à l’image de STX Lorient, possèdent un dispositif aguerri de production, malheureusement ralenti par un manque de projets ou de commandes.

Madame la secrétaire d'État, quels engagements concrets pouvez-vous prendre aujourd’hui afin d’apporter un peu d’espoir aux salariés de STX Lorient ?

Debut de section - Permalien
Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique

Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord d’excuser M. le ministre de l’économie, qui est actuellement mobilisé sur le projet de loi pour la croissance et l’activité, en discussion à l’Assemblée nationale. Il m’a chargée de vous transmettre sa réponse.

La société STX France Lorient est une filiale de STX France SA. Elle est spécialisée dans la construction navale, notamment de patrouilleurs militaires et de petits ferries, et emploie 94 salariés, dont 4 personnes en détachement de STX France SA ou mises à disposition par un groupement d’employeurs.

Depuis la création de STX France Lorient en 1993, ce sont plus de 30 navires qui sont sortis des cales de cette entreprise. Le site combine à la fois la taille humaine, la flexibilité, l’écoute du client. C'est la raison pour laquelle il a pu devenir une référence pour certains segments du marché, notamment les patrouilleurs et les prototypes. Ce résultat s’explique aussi par l’excellence de ses travailleurs, que vous avez eu raison de souligner.

Le chantier fait toutefois face depuis plusieurs années à des difficultés financières, avec des prises de commandes insuffisantes sur un marché très concurrentiel. Aucune commande n’a été engrangée depuis juillet 2013, en dépit des annonces concernant le plan de charge de STX. Celui-ci se limite à la construction d’un patrouilleur pour la marine du Sénégal, dont la livraison était prévue en janvier dernier, et la fabrication de cheminées pour STX France SA, qui doivent être livrées en mai 2015.

Dans ce contexte, l’adaptation d’une stratégie industrielle et la restructuration paraissent indispensables pour éviter le pire. La chaudronnerie et la fabrication de coques en sous-traitance vont ainsi aider à améliorer la remise en situation du chantier, qui a bénéficié d’apports en liquidités de la part de sa maison mère à hauteur de 18 millions d’euros au début de l’année 2014.

Cette stratégie implique malheureusement la suppression de 47 postes chez STX Lorient. Tout sera toutefois mis en œuvre pour en limiter les effets, notamment en travaillant sur le reclassement interne, qui devra limiter au maximum le nombre de licenciements effectifs.

La société a répondu à un appel d’offres passé par le conseil général du Morbihan pour la construction d’un navire de desserte de l’île de Groix. La réponse est prévue en mars 2015. Si l’État ne peut pas interférer dans la commande publique d’une collectivité, il sait le conseil général du Morbihan, autorité en matière de transport maritime, soucieux de l’enjeu industriel lié à cette commande.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

Madame la secrétaire d'État, vous n’avez pas vraiment apporté de réponse à la question que j’ai posée. Je suis déçu que la qualité et la compétence de la main-d’œuvre ne soient pas davantage prises en compte.

S’agissant de la commande du conseil général du Morbihan, je suis déjà intervenu l’an dernier auprès de cette collectivité pour lui demander d’accélérer le dossier. Néanmoins, il n’est pas certain que STX Lorient remporte le marché. Les travailleurs n’ont donc aucune certitude que le licenciement de personnels, que vous reconnaissez être très bien formés, performants et compétents, puisse être limité.

La situation est extrêmement douloureuse. Ces travailleurs auraient voulu des assurances pour leur avenir ; ils n’en ont pas aujourd'hui. Le reclassement n’est pas une solution, car cela revient à des pertes d’emploi. Alors que, comme vous l’avez rappelé, 30 navires ont été construits depuis 1993 et que STX a été reconnue comme une entreprise de qualité, à taille humaine, 47 suppressions de poste sont prévues.

Les travailleurs de STX Lorient ne peuvent qu’avoir peur du lendemain, alors que d’autres chantiers débordent de commandes. L’État n’a-t-il pas comme mission de sauver des entreprises ? En tout cas, je le redis, le reclassement n’est pas une solution.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Pierre Laurent, auteur de la question n° 965, adressée à M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur la situation de l’entreprise Sanofi.

Vous le savez, Sanofi représente de 30 % à 40 % du potentiel national de l’industrie pharmaceutique française et a une importante activité internationale. Le résultat net de ses activités a été de 6, 8 milliards d’euros en 2013, et les projections sur 2014 laissent envisager une progression de 5 % de celui-ci. Les économistes estiment que la rentabilité financière de Sanofi est l’une des meilleures de l’industrie pharmaceutique mondiale. L’entreprise fait partie des premières capitalisations boursières au CAC 40.

Or, rien qu’en 2013 Sanofi a reçu 136 millions d’euros d’aides publiques, au titre du CICE, le crédit d’impôt compétitivité emploi, et du CIR, le crédit d’impôt recherche : j’ajoute que l’industrie pharmaceutique est financée en France au travers de la sécurité sociale. Le montant des aides sera très certainement du même niveau en 2014 et en 2015.

Pourtant, Sanofi continue de redistribuer la plus grande part de ses bénéfices aux actionnaires. En même temps, elle a supprimé en France, depuis 2008, plus de 5 000 emplois. Ces dernières années, ces suppressions ont été grandement facilitées par la loi du 14 juin 2013 prétendument relative à la sécurisation de l’emploi. La direction de l’entreprise vend, ferme et cède des sites et des activités sans se soucier ni des salariés, ni de la sécurité sanitaire, ni même de l’indépendance thérapeutique du pays et du maintien de son potentiel scientifique.

Face à cette situation préoccupante, de très nombreux salariés et leurs représentants syndicaux exigent un véritable contrôle des fonds publics versés à cette entreprise, notamment par le CICE et le CIR. Au vu de la situation et des fonds publics reçus, ils estiment également à juste titre que les pouvoirs publics doivent s’opposer aux suppressions d’emplois décidées par la direction.

La loi dite de sécurisation de l’emploi a finalement des effets contraires à ses objectifs affichés : ses dispositions paraissent en effet de plus en plus favorables aux groupes qui licencient, et non l’inverse – Sanofi en est un triste symbole. Ne serait-il pas souhaitable, à la lumière de l’expérience, de revenir sur cette loi et d’inscrire rapidement à l’ordre du jour du Parlement un projet de loi interdisant, comme nous l’avons plusieurs fois proposé, les licenciements boursiers, c'est-à-dire les suppressions d’emploi pour les entreprises largement bénéficiaires qui reversent l’essentiel de leurs dividendes à leurs actionnaires, tout en touchant des aides publiques massives ?

Les besoins de santé dans le monde et en France sont énormes. Plus de 50 % des maladies n’ont pas de thérapie adaptée. Au lieu de fragiliser encore notre potentiel, comme c’est le cas aujourd’hui, en supprimant des milliers de postes de travail pour le profit des actionnaires financiers, ne faudrait-il pas s’engager dans une réelle politique de sauvegarde et de développement du potentiel scientifique et industriel de Sanofi ?

Madame la secrétaire d'État, que compte faire le Gouvernement pour faire cesser cette situation qui revient à verser des fonds publics à des entreprises persistant à entamer notre potentiel scientifique et industriel dans un secteur aussi stratégique que celui de la pharmacie ?

Debut de section - Permalien
Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique

Monsieur le sénateur Pierre Laurent, Sanofi est une entreprise multinationale française, troisième groupe mondial dans son secteur. Alors que 80 % de la production des sites français est tournée vers l’exportation, la France concentre un tiers de la production mondiale et près de 40 % de la recherche et développement.

La stratégie du groupe mise en œuvre depuis 2012 est fondée sur un projet de réorganisation à l’horizon de la fin de cette année des activités vaccins, des fonctions support et de la recherche et développement en France. Pour les entités Sanofi Pasteur, qui est la division vaccins, Sanofi-Aventis Groupe, Genzyme, Merial et Sanofi Winthrop, toutes les procédures engagées sont terminées.

Nous resterons attentifs aux engagements pris par Sanofi quant à la pérennité de deux sites de production en France.

Le premier est celui de Toulouse. Dès le début, le Gouvernement a été très proactif pour que le plan initial soit revu dans une logique de départs volontaires, de mobilités internes et de contreparties données aux salariés et aux territoires concernés.

Conformément à ses engagements avec les pouvoirs publics, Sanofi a annoncé, à la fin de l’année dernière, être en négociation exclusive avec la société allemande Evotec pour reprendre les plateformes de recherche et technologie, avec un transfert des salariés, et créer un bioparc. Afin de garantir la pérennité de ce partenariat franco-allemand, l’entreprise Sanofi s’est engagée à hauteur de 250 millions d’euros sur cinq ans.

Nous suivons ce dossier de très près avec le préfet et la commission de suivi territorial, dans laquelle siègent également les partenaires sociaux.

Le second site est celui de Quetigny, en Côte d’Or, cédé au façonnier Delpharm. Le médicament produit dans l’usine a perdu son brevet en 2012, suscitant la concurrence des génériques. Un programme d’investissement significatif est prévu par Delpharm, alors que Sanofi s’engage par un contrat de commandes d’une durée de sept ans. L’État restera attentif à ce transfert, qui permet de garantir l’emploi de 350 salariés employés directement sur ce site de production.

Une entreprise pharmaceutique se doit d’être innovante et de préparer l’avenir. Nous souhaitons que Sanofi prépare son avenir de la France et en France, où nous avons de formidables atouts à faire valoir dans le domaine de la santé et des biotechnologies. L’entreprise a annoncé que dix-huit produits allaient être lancés d’ici à 2020, représentant 30 milliards d’euros de ventes potentielles. On peut donc espérer que ces perspectives auront une incidence positive sur son activité en France.

Nous veillerons à travailler avec les dirigeants de Sanofi pour que le « site France » contribue de manière positive et significative à la réussite de ce beau groupe français de dimension mondiale.

Plus généralement, monsieur le sénateur, vous proposez d’abroger la loi relative à la sécurisation de l’emploi, que vous estimez néfaste.

L’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 a, en effet, réformé la procédure de licenciement collectif pour motif économique en donnant la priorité au dialogue social pour définir les mesures sociales d’accompagnement et rompre avec les dérives du cadre juridique antérieur. Celui-ci encourageait les acteurs à recourir de manière dilatoire aux juges, qu’il s’agisse du tribunal de grande instance ou du conseil des prudhommes, et faisait prévaloir une culture du conflit sur une culture de la recherche d’un compromis social.

Nous pouvons désormais dresser un premier bilan de l’application de ce dispositif. Près de deux ans après la signature de l’accord national interprofessionnel, les nouvelles règles, négociées par les partenaires sociaux et intégrées en totalité dans la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, ont réellement favorisé un nouvel espace de négociation.

J’en veux pour preuve le fait que 75 % des entreprises négocient les conditions d’un plan de sauvegarde de l’emploi. En outre, hors des procédures collectives pour lesquelles les délais sont contraints, 61 % des décisions administratives concernent des accords collectifs majoritaires, et ce indépendamment de l’appartenance syndicale. Enfin, seuls 7 % des plans de sauvegarde de l’emploi décidés en interne, au sein des entreprises, font l’objet d’un contentieux. Dans deux cas sur trois, la décision est favorable à l’administration.

Éviter le conflit et favoriser le dialogue, dans l’intérêt de tous, en particulier des salariés, tel est le choix du Gouvernement, et c’est un choix qui porte ses fruits ! La culture du conflit n’aide pas l’économie !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je vous remercie de ces éléments de réponse, madame la secrétaire d’État, mais je ne vous étonnerai pas en expliquant qu’ils ne me satisfont absolument pas, voire qu’ils m’inquiètent au plus haut point !

Je vous parle d’engager une politique sérieuse de contrôle des aides publiques accordées aux entreprises ; vous me répondez que l’État doit accompagner les restructurations engagées par la direction de Sanofi. J’évoque la préservation de notre potentiel industriel ; vous vous déclarez satisfaite de voir que l’on va aider les salariés à se reclasser, alors même que – les faits le montrent – les chiffres officiels annoncés en la matière recouvrent une réalité bien plus complexe. Vous m’expliquez que l’État aurait pour rôle d’aider l’entreprise Sanofi à organiser, en quelque sorte, la vente de ses actifs à des entreprises étrangères et d’accompagner cette démarche. Tout comme l’ensemble des salariés, c’est évidemment l’inverse que je souhaitais entendre !

En outre, vous ne répondez absolument pas à l’un des aspects de ma question : quels dispositifs d’évaluation le Gouvernement met-il en œuvre pour mesurer l’efficacité des fonds publics alloués par le biais du CICE et du CIR ? Pour notre part, nous avons demandé et obtenu du Sénat qu’une commission d’enquête, présidée par ma collègue Brigitte Gonthier-Maurin, soit créée sur l’utilisation du CIR. Nous disposerons ainsi d’évaluations sérieuses, très éloignées des annonces faites par les entreprises.

Vous m’expliquez qu’il faut favoriser l’innovation… Or c’est précisément à notre potentiel de recherche que les suppressions d’emploi s’attaquent chaque jour un peu plus. Nous laissons donc des groupes comme Sanofi entamer notre potentiel de recherche, au lieu de le développer.

Enfin, vos propos sur les bienfaits de la loi relative à la sécurisation de l’emploi ne convaincront personne. Il suffit d’aller discuter avec des représentants syndicaux et des représentants des salariés pour se voir confirmer que l’adoption de cette loi a accéléré les procédures de licenciement et privé les salariés de moyens de contre-expertise, face aux plans qui leur sont opposés par les entreprises.

Le pays a besoin non pas que l’on organise un peu mieux la mise en application des plans de sauvegarde de l’emploi, mais que l’on mette enfin un terme à l’hémorragie industrielle.

Pour toutes ces raisons, madame la secrétaire d’État, la réponse que vous m’avez apportée, au nom du Gouvernement, m’inquiète plus qu’elle ne me rassure !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Yannick Vaugrenard, auteur de la question n° 957, adressée à M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Vaugrenard

Depuis quelques années, le terme burn-out a fait une entrée fracassante dans le vocabulaire lié aux conditions de travail. Ce que l’on s’accorde à décrire comme l’épuisement professionnel des salariés ne dispose toutefois pas de définition officielle. À l’heure actuelle, il est donc impossible de savoir ce que recouvre cette pathologie, ni de décrire ses affections, ni de promouvoir leur reconnaissance en tant que maladie professionnelle.

Aujourd’hui, seulement quelques dizaines de cas par an sont effectivement reconnus comme maladie professionnelle au titre de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale.

Au gré des études publiées sur le sujet, le nombre de personnes touchées n’est pas le même, mais il est toujours beaucoup plus important que ces quelques cas reconnus !

Je citerai une étude réalisée par un cabinet spécialisé dans la prévention des risques professionnels. Aux termes de celle-ci, il est estimé que plus de 3 millions d’actifs présentent un risque élevé d’épuisement professionnel, appelé couramment burn-out. À la suite de cette étude, ce même cabinet a lancé un appel à la reconnaissance du burn-out en tant que maladie professionnelle, estimant établi le lien « direct et essentiel » avec le travail : les pathologies développées par les personnes atteintes de cette maladie ne concernent effectivement que la sphère professionnelle.

Au cours de l’année passée, de nombreuses voix allant dans le même sens se sont élevées pour demander la reconnaissance de cette maladie professionnelle. Une proposition de résolution a été déposée par notre groupe en juillet dernier au Sénat et, au début du mois de décembre, c’est une trentaine de députés de la majorité qui ont publié une tribune demandant la reconnaissance du burn-out comme maladie professionnelle.

Pour l’heure, ces initiatives n’ont pas permis de dissiper le flou sur la nature des pathologies visées, les facteurs de risques et le nombre de personnes concernées. Il est donc particulièrement difficile d’organiser une nécessaire prévention, mais il est avéré que le stress et la souffrance psychique au travail touchent plus de salariés aujourd’hui qu’hier.

Dans les prochains jours, M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social recevra le rapport du groupe de réflexion sur les risques psychosociaux et le burn-out mis en place par ses soins au début de l’année 2014. Nous souhaiterions d’ores et déjà être éclairés sur les conclusions de ce groupe de travail, ainsi que sur les orientations que prendra le ministère.

De plus, il est question que le département chargé des études et des statistiques au sein du ministère du travail lance, conjointement avec l’INSEE, une grande enquête sur les risques psychosociaux, comme cela avait été demandé par le collège d’expertise sur le suivi statistique des risques psychosociaux au travail en 2011. Le lancement de cette enquête peut-il nous être confirmé ? Dans quels délais celle-ci sera-t-elle menée ?

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Je vous prie tout d’abord, monsieur le sénateur, de bien vouloir excuser l’absence de François Rebsamen, qui reçoit aujourd'hui les partenaires sociaux pour tirer le bilan des négociations sur la modernisation du dialogue social.

La question du burn-out est bien évidemment une problématique importante et difficile. Le ministre du travail est très sensible aux interpellations portées par certains acteurs – la vôtre, en particulier - et à l’écho que ces dernières suscitent dans le grand public.

Cet écho montre à quel point le travail et la place du travail doivent être au cœur de nos réflexions.

De nombreuses interpellations portent effectivement sur la reconnaissance de l’origine professionnelle du burn-out ou, plus précisément, de certaines pathologies psychiques telles que les dépressions, le burn-out n’étant pas actuellement conçu comme une pathologie en tant que telle, au sens des classifications médicales de référence.

Des travaux sont en cours entre les partenaires sociaux au sein de la commission des pathologies professionnelles du Conseil d’orientation sur les conditions de travail, le COCT, pour élaborer des typologies médicales et des recommandations permettant de faciliter la reconnaissance du burn-out au niveau du système dit « complémentaire ». L’impact de ces travaux dans le cadre du fonctionnement actuel des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles, les C2RMP, doit maintenant être examiné de près, à l’aune des revendications et inquiétudes s’exprimant sur le sujet.

Toutefois, la priorité est bien évidemment la prévention.

Cette préoccupation rejoint les orientations proposées par les partenaires sociaux, ces derniers ayant souhaité que la prévention des risques psychosociaux figure dans les priorités resserrées du troisième plan Santé au travail, le PST3.

Des travaux sont en cours associant l’administration, des experts et les principaux organismes de prévention pour produire un premier document visant à mieux caractériser le syndrome du burn-out et, surtout, à produire des recommandations. Au-delà, le ministre du travail souhaite que le PST3 définisse un cadre d’action stratégique nous permettant de faire significativement progresser, dans les entreprises, et au plus près des situations de travail, la prise en compte de cet enjeu majeur en termes de prévention.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Vaugrenard

Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État.

D’une certaine manière, le burn-out est la nouvelle maladie des temps modernes. Comme vous l’avez reconnu, c’est une question extrêmement sérieuse. Il faut traiter les effets – une thématique à examiner avec beaucoup d’attention –, mais également les causes, qui peuvent naître de l’organisation du travail, dans les bureaux ou encore dans les ateliers.

Vous avez apporté un certain nombre d’éléments de réponse. Mais j’aimerais que, à un moment ou à un autre, nous ayons connaissance des délais dans lesquels le burn-out pourrait véritablement être reconnu, en particulier par la sécurité sociale. Qu’en est-il, donc, des délais effectifs ?

Par ailleurs, je partage votre point de vue quant à l’absolue nécessité d’imaginer des modalités de prévention. Bien entendu, ce sujet doit être discuté avec les organisations professionnelles concernées.

Mais s’il faut prévenir, il faut également guérir. Or pour permettre la guérison, il est important que cette pathologie soit reconnue comme une maladie professionnelle.

C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, je souhaite que nous puissions être informés, dans des délais extrêmement raisonnables, de la réalité effective de cette reconnaissance en tant que maladie professionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Alain Joyandet, auteur de la question n° 947, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Joyandet

Les trains d’équilibre du territoire, ou TET, en permettant à plus de 100 000 voyageurs de bénéficier quotidiennement de quarante liaisons ferroviaires dans notre pays, assument une mission d’intérêt général incontestable et incontestée. Ils constituent un élément essentiel de la politique de l’État en matière de transport ferroviaire et d’aménagement du territoire national.

En outre, ils offrent une alternative économique intéressante aux usagers ne pouvant pas, pour des raisons financières évidentes, prendre un train à grande vitesse. Les tarifs varient effectivement du simple au double.

La ligne d’équilibre du territoire 4, usuellement dénommée « Paris-Bâle », puis « Paris-Mulhouse » et, aujourd'hui, « Paris-Belfort », est particulièrement emblématique à cet égard. Elle permet de relier à Paris plusieurs départements situés dans l’est de la France, dont certains, à l’image de mon département de la Haute-Saône, sont dépourvus de toute ligne à grande vitesse, et ce pour un coût et un temps de transport raisonnables et supportables pour les usagers.

Toutefois, si des éléments positifs et encourageants sont à noter concernant cette ligne, comme, par exemple, une régularité supérieure à 89 % en décembre dernier, des indices de propreté en nette progression ou l’arrivée, en 2017, des « Coradia Liner » d’Alstom, de nombreuses zones d’ombre persistent au sujet de son avenir et, de façon plus globale, de celui des trains d’équilibre du territoire.

La constitution en novembre dernier, à la demande du secrétaire d’État chargé des transports, d’une commission sur l’avenir des trains d’équilibre du territoire présidée par le député Philippe Duron témoigne de l’intérêt porté à ces lignes. Mais la volonté de l’État de transférer leur gestion, partiellement ou en totalité, aux régions est de nature à susciter une inquiétude légitime chez les usagers, leurs associations, ainsi que chez les élus.

Par définition et par essence, les lignes d’équilibre du territoire ne sont pas de même nature que les lignes express régionales. Traversant géographiquement plusieurs régions, elles revêtent un intérêt national indéniable. De plus, on peut aisément pressentir toutes les difficultés techniques, mais également financières, que rencontreront les régions si, demain, elles doivent assumer cette nouvelle mission.

En conséquence, le transfert de la gestion des trains d’équilibre du territoire de l’État aux régions fragilisera assurément leur pérennité et, de là, leur propre existence.

Par ailleurs, la libéralisation de l’offre de service de transport par autocar sur le territoire national, plus particulièrement pour les trajets interrégionaux, telle que prévue par le projet de loi pour la croissance et l’activité, risque de concurrencer frontalement les trains d’équilibre du territoire. Si pour le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, Emmanuel Macron, l’ouverture du transport par autocar n’entraînera pas la mort du train, elle affectera nécessairement l’activité ferroviaire, la fréquentation des lignes d’équilibre du territoire par les usagers et, à plus ou moins long terme, leur raison d’être.

En 2016, une nouvelle convention d’exploitation des trains d’équilibre du territoire sera proposée. Elle s’appuiera sur les recommandations rendues par la commission présidée par le député Philippe Duron. Si les conclusions de cette commission auront vocation à éclairer le Gouvernement sur les décisions qu’il devra prendre à ce sujet, je souhaiterais que M. le secrétaire d’État puisse dès aujourd'hui nous apporter des précisions quant aux intentions du Gouvernement s’agissant du maintien et de la préservation des lignes d’équilibre du territoire, en général, et de la ligne 4 dite « Paris-Belfort », en particulier.

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Monsieur le sénateur, vous avez interrogé Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur les trains d’équilibre du territoire. Ne pouvant être présent, il m’a chargé de vous répondre.

Depuis la signature, le 13 décembre 2010, d’une convention d’exploitation avec la SNCF, l’État est devenu autorité organisatrice des trains d’équilibre du territoire.

Cette évolution a concrétisé l’engagement de l’État en faveur des dessertes en cause, dont la qualité et le modèle économique se dégradaient, risquant à terme de remettre en cause un service essentiel pour les populations concernées.

Cependant, l’offre des TET est aujourd’hui très hétérogène, ce qui la prive d’une véritable cohérence commerciale. La forte imbrication existant entre certains services rendus par les TET et des dessertes de TER est notamment source d’inefficacité et de manque de lisibilité pour les voyageurs.

Le besoin de clarification de ces services est donc réel, ce dans un contexte de ressources contraintes. C'est la raison pour laquelle mon collègue chargé des transports a confié une mission d’analyse et de propositions sur l’avenir des trains d’équilibre du territoire à une commission composée de parlementaires, d’élus régionaux et d’experts. Comme vous l’avez souligné, il a demandé à Philippe Duron, député du Calvados, d’en assurer la présidence.

Les travaux de cette commission devront permettre de clarifier l’articulation des TET avec non seulement les autres services de transport ferroviaire – notamment les TER des nouvelles régions –, mais aussi les alternatives que peuvent représenter les autres modes de transport et les nouvelles formes de mobilité que vous avez évoquées et qui seront facilitées dans le cadre de la future loi Macron.

Les conclusions de cette commission, rendues d’ici au mois de mai, pourront utilement contribuer à l’élaboration du schéma national des services de transport, dont la création a été décidée sur l’initiative des parlementaires lors de l’examen du projet de loi portant réforme ferroviaire.

Les décisions qui en découleront porteront sur l’ensemble des lignes des trains d’équilibre du territoire, par conséquent également sur la ligne 4, qui assure aujourd’hui la liaison entre Paris, Troyes et Belfort.

Par ailleurs, je vous rappelle que le Gouvernement s’était engagé dès 2013 à financer l’acquisition par la SNCF de trente-quatre rames Régiolis pour un montant de 510 millions d’euros. Ces nouvelles rames seront notamment déployées sur la ligne Paris-Troyes-Belfort dès leur livraison.

L’instance de suivi de la qualité de service de cette ligne qui réunit régulièrement, depuis 2012, l’ensemble des élus locaux, des parlementaires et des représentants des usagers a récemment permis de faire un point sur cette situation. Sa prochaine réunion se tiendra à l’issue des travaux de la commission sur l’avenir des TET – vous y serez de nouveau convié – et sera l’occasion d’une présentation de ses conclusions.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Joyandet

Monsieur le secrétaire d’État, la disparition des 800 millions d’euros – à la suite de l’annulation de l’écotaxe – destinés à financer les travaux indispensables nous inquiète. L’avenir de ces lignes, autrement dit leur maintien à long terme, passe par leur électrification et leur modernisation.

Je vous remercie de votre réponse, qui ne me rassure toutefois pas vraiment. J’ai posé cette question, car les populations sont anxieuses. Nous sommes particulièrement attachés à la ligne Paris-Bâle.

Je vous parlais à l’instant des tarifs : aujourd'hui, un billet Vesoul-Paris coûte environ cinquante euros, alors que le tarif d’un billet de TGV vers Paris – on doit se rendre à environ trente kilomètres de Vesoul pour prendre ce train – coûte à peu près le double. Pour l’avenir d’un département rural tel que la Haute-Saône, il est vraiment très important de maintenir cette ligne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Bernard Fournier, auteur de la question n° 962, adressée à Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Fournier

Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite appeler votre attention, ainsi que celle du Gouvernement, sur la nécessité de maintenir une véritable offre de services publics et de services au public en zone rurale.

En effet, cette question est au cœur de la politique d’aménagement du territoire. Il faut stopper le délitement et l’éloignement des services publics, qui constituent l’ossature de nos territoires.

Regrouper à l’échelon supérieur est un processus sans fin qui se déroule systématiquement au détriment de la qualité du service rendu, sans pour autant conduire à la réduction, quoi qu’on en dise, des coûts directs ou indirects.

Depuis plusieurs décennies, les politiques successives de « modernisation » de nos territoires ruraux ont détricoté et déshumanisé toujours un peu plus les services publics.

Il est désormais indispensable de repenser totalement cette question qui participe aussi de l’attractivité de nos communes et nos campagnes. Le service public a un coût qu’il faut assumer si l’on veut maintenir une égalité entre les citoyens et permettre à ceux-ci de vivre en milieu rural.

Je souhaite illustrer mon propos d’exemples survenus dans mon département au cours de ces quatre dernières années. Ainsi, dans la Loire, des trésoreries, qui constituaient pourtant le réseau de proximité, ont été fermées – je songe à celle de la commune de Belmont-de-la-Loire – ou sont grandement menacées, comme celle de Saint-Jean-Soleymieux.

Les bureaux de poste sont aussi concernés : ceux de Saint-Georges-en-Couzan et de Sail-sous-Couzan ont disparu. Certes, quelques-uns sont parfois remplacés par des agences postales communales, mais les conditions des services sont modifiées pour les usagers et les municipalités.

Les antennes locales de la caisse d’allocations familiales, la CAF, ne sont pas épargnées, notamment avec la suppression prochaine de l’antenne de la commune de Charlieu. Et pourtant, la CAF doit aider les familles dans leur vie quotidienne et développer la solidarité envers les plus vulnérables.

En outre, la désertification médicale en milieu rural dans mon département est particulièrement inquiétante.

Enfin, il convient de promouvoir une école rurale de qualité, laquelle, au-delà du seul domaine scolaire et de l’intérêt premier des enfants, est au cœur de la dynamique des territoires. Il s’agit d’un critère déterminant dans le choix d’installation des familles.

Ainsi, le monde rural et ses élus demandent aujourd’hui que soient repensées la proximité et l’accessibilité aux services publics avant de toucher au maillage territorial. C’est bien l’équilibre trouvé localement entre ces deux aspects qui garantira un service efficace et de qualité pour les habitants des communes rurales.

En conséquence, monsieur le secrétaire d’État, je souhaite connaître votre position sur ce sujet et vous demande de bien vouloir me préciser les intentions du Gouvernement en la matière.

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen

Monsieur le sénateur, vous interrogez Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité sur la nécessité de maintenir une véritable offre de services publics et de services au public, tout particulièrement en zone rurale.

Tout d’abord, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme Pinel, retenue à l’Élysée pour la remise du rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre. Je vais donc vous transmettre sa réponse.

L’accès aux services publics est un aspect déterminant de la politique d’aménagement du territoire. Dans ce cadre, le Gouvernement favorise le développement du dispositif des maisons de services au public, les MSAP.

Ces maisons délivrent une offre de proximité et de qualité à l’attention de tous les publics, dans les zones rurales et périurbaines, afin de répondre aux besoins des habitants et de compléter le maillage des services au public.

Ainsi, elles rassemblent, dans un lieu unique, non seulement des agents qualifiés et formés à l’accueil et à l’orientation du public, mais aussi des outils de visioconférence permettant d’améliorer l’efficacité des services au public et d’abolir les distances.

D’une durée de trois ans, l’expérimentation « Plus de services au public » s’est achevée le 31 décembre 2013 : elle a permis la montée en puissance du réseau des MSAP qui compte désormais 363 sites.

À l’horizon 2017, l’objectif du Gouvernement est de faire en sorte que 1 000 maisons de services au public soient ouvertes. Le financement de cette politique publique devra être assuré, une fois la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République adoptée, sous la forme d’un fonds de développement alimenté par des contributions de l’État et des opérateurs de service, tout en préservant les moyens des collectivités territoriales.

Concernant la lutte contre la désertification médicale, le plan de financement d’équipement engagé par le comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire du 11 mai 2010 a déjà permis de financer plus de 300 maisons de santé pluri-professionnelles dans les zones fragiles en termes d’offre de soins, sur la période 2010-2013, pour un montant de 30 millions d’euros.

En outre, le pacte territoire-santé, lancé au mois de décembre 2012 par la ministre de la santé afin de lutter contre les déserts médicaux, met en œuvre, dans ces zones, des contrats de praticiens territoriaux de médecine générale permettant aux médecins d’être salariés ou consistant à accorder une bourse aux internes en médecine en contrepartie de leur engagement à s’installer en zone fragile pour une durée donnée.

De nouvelles mesures destinées à renforcer ces dispositifs seront annoncées lors du comité interministériel à l’égalité des territoires organisé très prochainement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Fournier

Monsieur le secrétaire d’État, je prends note de votre réponse, quelque peu décevante au regard des enjeux que j’ai abordés.

Le monde rural devrait tenir une place importante dans les préoccupations de l’État. Des millions de Français sont tout de même concernés par ces sujets. La ruralité soutenue pourrait être, et doit être, une chance pour notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la question n° 970, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Roux

Monsieur le secrétaire d'État, je ne vous apprendrai rien en vous rappelant aujourd’hui que la filière lavandicole est plus qu’inquiète pour sa production et son avenir.

Dans mon département, les Alpes-de-Haute-Provence, les différents acteurs de la filière doivent faire face à deux grandes difficultés.

Vous avez déjà été alerté sur les conséquences préoccupantes du règlement européen d’enregistrement, d’évaluation, d’autorisation et de restriction des substances chimiques, dit « REACH », sur la production de plantes à parfum françaises, notamment sur celle de lavande et de lavandin.

Les acteurs et producteurs d’huile essentielle de lavande se mobilisent. Une pétition nationale contre ce projet de réglementation des huiles essentielles a déjà recueilli près de 20 000 signatures.

Bien que protéger avec efficacité la santé des consommateurs soit évidemment notre priorité à tous, il ne s’agirait pas en l’occurrence de laisser la théorie l’emporter sur un savoir-faire et une production de très haute qualité.

Recenser, évaluer et contrôler les substances chimiques fabriquées, importées, mises sur le marché européen se comprend parfaitement. Prévoir que chaque substance chimique existante ou nouvellement produite ou importée soit enregistrée auprès de l’Agence européenne des produits chimiques et que les producteurs ou importateurs de produits chimiques soient obligés de fournir des données toxicologiques relatives aux produits se conçoit également.

Réduire la présence de produits potentiellement allergènes dans les cosmétiques et les parfums, nous le comprenons tous.

Mais qualifier les huiles essentielles, issues des plantes, donc naturelles, de produits chimiques me paraît excessif et irraisonné.

S’agissant de l’huile essentielle de lavande, le linalol – une molécule naturellement présente dans la lavande – est pointé du doigt puisqu’il serait potentiellement allergène. Certes, j’en conviens, l’huile essentielle de lavande placée sous l’œil irritera ce dernier… Mais revenons à la raison et au bon sens : il convient de faire la distinction entre le linalol conçu chimiquement par les usines pour la fabrication de produits tels que la lessive ou les désodorisants, et celui qui est contenu de manière naturelle dans la plupart des huiles essentielles, comme l’huile essentielle de lavande ou même l’extrait d’orange. Notre méfiance à l’égard des substances chimiques ne doit pas conduire à un amalgame grossier.

L’une des conséquences de la réglementation en question est l’apposition de pictogrammes sur le flacon. Les répercussions économiques d’un tel étiquetage sont évidemment dramatiques !

Il est inconcevable que les plantes et les huiles essentielles soient considérées comme des produits chimiques et que les distillateurs soient assimilés aux fabricants de produits chimiques, voire dangereux et toxiques.

Par ailleurs, les dossiers que doivent constituer les lavandiculteurs en application de cette réglementation, afin de mettre en évidence les caractéristiques physico-chimiques, toxicologiques et éco-toxicologiques de leur production, ont un coût non négligeable : c’est la double peine !

Dernière précision sur cette réglementation : pour une huile essentielle, il est quasiment impossible de fournir les données demandées puisqu’elles varient en fonction du sol et du soleil. Exiger une « carte d’identité » pour chaque huile essentielle est une aberration.

Cela étant, un autre danger réel menace la lavande dans les Alpes-du-Sud : un insecte, la cicadelle, qui se nourrit de sève et ravage des champs entiers, transporte, ce faisant, une bactérie, le stolbur, qui ronge les pieds de lavande et de lavandin. La plante dépérit rapidement et meure.

Pour tenter d’endiguer les dégâts causés par la maladie, un programme d’investigation et d’expérimentation visant à mieux cerner les causes de l’épidémie et à trouver des solutions afin de faire baisser l’incidence de la maladie a été mené entre 2011 et 2013 ; il a été financé par le compte d’affectation spéciale pour le développement agricole et rural, ou CASDAR, France AgriMer, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, le Comité interprofessionnel des huiles essentielles françaises, le CIHEF, et l’Occitane.

La sélection variétale est l’une des méthodes préconisées pour enrayer la maladie, mais il faudra attendre plusieurs années pour obtenir des résultats. À l’heure actuelle, nous disposons vraiment de peu de moyens de lutte adaptés.

La lavande est l’arbuste phare de la Provence : 500 tonnes de lavande sont produites chaque année dans les Alpes-de-Haute-Provence, soit la moitié de la production nationale. Les répercussions économiques de sa culture sont multiples : du tourisme à l’industrie de la parfumerie, en passant par la gastronomie La lavande et le lavandin sont à l’origine de 2 milliards d’euros en termes de consommation touristique. En Provence, les plantes à parfum sont cultivées sur plus de 22 000 hectares et concernent plus de 2 000 producteurs ; 80 % de la production est exportée, et il s’agit souvent de produits prestigieux.

Les conséquences induites du règlement européen REACH, à l’horizon 2018, couplées aux pertes causées par la cicadelle, pourraient porter un coup fatal à la production de lavande et de lavandin.

Amalgamer par l’étiquetage, dans l’esprit des consommateurs, production naturelle et production chimique pure est préjudiciable. Monsieur le secrétaire d’État, quelle stratégie préconisez-vous pour sauvegarder ce secteur si précieux ?

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Ne pouvant être présente, elle m’a chargé de vous répondre.

Je tiens tout d’abord à vous remercier de vous mobiliser en faveur des producteurs français d’huiles essentielles de lavande et de lavandin. Comme vous l’avez à juste titre souligné, ces productions sont importantes pour tout le sud-est de la France sur les plans à la fois paysager, touristique et agricole. Elles sont également très utilisées par les industries de la parfumerie et du luxe, fers de lance du savoir-faire français et composantes majeures de notre commerce extérieur.

Tout en étant d’origine naturelle, ces huiles essentielles peuvent malheureusement s’avérer nocives pour la santé, notamment en provoquant des réactions allergiques. C’est pourquoi le règlement REACH, adopté en 2006, prévoit que, au même titre que les fabricants de produits chimiques, les distillateurs d’huiles essentielles de lavande doivent évaluer ces huiles et les enregistrer avant le mois de mai 2018.

Cependant, vous l’avez indiqué, un certain nombre de PME peuvent rencontrer des difficultés dans l’application de ce règlement. C’est la raison pour laquelle le ministère de l’écologie a mis en place, dès 2008, de nombreux outils pour aider toutes les entreprises françaises à appliquer le règlement REACH : pour ne citer qu’un exemple, le helpdesk – vous le constatez, mesdames, messieurs les sénateurs, on s’exprime dans un français parfait...

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État

Non, monsieur le président, je le reconnais !

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État

Pourquoi pas, ma chère collègue !

Je disais donc que le helpdesk REACH de l’Institut national de l’environnement industriel et des risques assure une hotline – le gag continue ! – quotidienne pour répondre à toutes les questions des entreprises et a réalisé des tournées d’information dans toute la France.

Dans le cas des huiles essentielles de lavande et de lavandin, Mme Ségolène Royal a instauré, aux côtés de M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, un plan d’action afin d’aider spécifiquement les producteurs. Ce plan prévoit non seulement une sensibilisation des instances européennes aux difficultés particulières rencontrées par ce secteur, mais aussi un soutien technico-financier à la filière et la mise en place d’un comité de pilotage regroupant services de l’État et acteurs professionnels.

Grâce à l’engagement de toutes les parties prenantes, l’application du règlement REACH permettra aux distillateurs français d’huiles essentielles de lavande et de lavandin de mettre sur le marché des produits sûrs et de valoriser l’origine naturelle de leurs produits, ce qui est le sens de votre combat, monsieur le sénateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Roux

Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État. Les producteurs de lavande étant très inquiets, je tenais à ouvrir ce débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Delphine Bataille, en remplacement de M. Claude Haut, auteur de la question n° 955, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Bataille

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Claude Haut, retenu au Conseil constitutionnel.

Je le représente à l’occasion de cette question orale, qui porte sur la situation de l’hôpital d’Apt à la suite de la décision de l’agence régionale de santé, l’ARS, de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur de transformer la maternité en centre de périnatalité et de fermer le service de chirurgie.

Les élus de la ville d’Apt et le comité des usagers pour le soutien et la défense du centre hospitalier du Pays d’Apt considèrent cette décision comme incohérente et infondée, du point de vue tant économique que géographique, ainsi que sur le plan humain.

Économiquement, tout d’abord, cet établissement a pu rester en équilibre financier malgré tous les obstacles et en dépit des incertitudes qui pèsent sur lui et qui sont responsables des fuites vers d’autres établissements. Alors que le coût du transport en région PACA reste de 26 % supérieur à la moyenne nationale, cette décision ne fera qu’accentuer ce différentiel.

Géographiquement, ensuite, il est impossible à l’heure actuelle que les 300 accouchements réalisés dans le centre hospitalier puissent être assurés ailleurs dans les mêmes conditions de sécurité. Le centre hospitalier d’Apt demeure le dernier hôpital de l’est du département et de l’ouest des Alpes-de-Haute-Provence, avec la maternité de Manosque, elle-même menacée de fermeture. Tout autre choix à l’égard des accouchements porterait le temps d’accès des parturientes à l’établissement considéré – critère essentiel dans la prise de décision – à plus de trente minutes.

Madame la secrétaire d’État, au moment où le Gouvernement et les collectivités locales réfléchissent aux moyens de combattre la désertification médicale, cette fermeture risque de porter un coup très sérieux à la médecine de ville et un coup fatal au dynamisme du territoire en cause.

À court terme, le service de maternité apparaît le plus menacé de fermeture, alors que des solutions médicales de coopération inter-hospitalière, notamment entre Avignon, Cavaillon et Apt, sont en train d’être mises en place et pourraient être étendues aux médecins-obstétriciens.

Comment comptez-vous intervenir auprès de l’ARS de la région PACA pour assurer la pérennisation de la maternité et du service de chirurgie de l’hôpital d’Apt ?

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie

Madame la sénatrice, la question de l’éventuelle transformation de la maternité du centre hospitalier d’Apt en centre périnatal de proximité est effectivement, et je le conçois, une source d’inquiétude pour la population et ses représentants. Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, comprend la préoccupation dont vous vous faites le porte-parole, à savoir le maintien d’une offre de proximité dans le territoire de M. Claude Haut

La question du temps d’accès à une maternité est en effet centrale. Pour autant, l’exigence de sécurité et de qualité dans les maternités, quelle que soit la taille de celles-ci, n’est pas négociable.

Il est de notre responsabilité d’être attentifs aux éventuels facteurs de fragilisation des équipes médicales qui pourraient mettre en cause la continuité de la prise en charge des patientes.

C’est au cas par cas que nous devons rechercher la meilleure solution pour concilier sécurité des parturientes et maintien d’une offre de proximité.

Ainsi, concernant la maternité d’Apt, Marisol Touraine, soucieuse d’atteindre les deux objectifs de sécurité et d’accessibilité aux soins, a confié une mission d’expertise à deux professeurs de médecine, l’un spécialiste en gynécologie-obstétrique, l’autre en réanimation néonatale. Cette mission est en cours, et les experts remettront leur rapport et leurs propositions au deuxième trimestre de cette année.

Les conclusions de ces travaux doivent permettre d’assurer une réponse durable à la question de la pérennité de l’accès aux soins de la population du Pays d’Apt.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Bataille

Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de ces précisions qui devraient être de nature à rassurer Claude Haut.

Il est vrai que la Cour des comptes a récemment publié un rapport dans lequel elle préconise une recomposition du réseau des maternités en ciblant essentiellement les structures les plus petites et les plus isolées. Ce rapport recommande de fermer sans délai l’ensemble des petites maternités en cas d’absence de mise en conformité immédiate.

Pour autant, comme vous l’avez compris, madame la secrétaire d’État, il n’est pas opportun de remettre en cause la nécessité de renforcer ces petites structures. Il est clair qu’il faut s’opposer à des recommandations qui auraient pour conséquence d’aggraver les inégalités territoriales en matière d’accès aux soins, que ce soit à Apt, dans le Vaucluse, ou dans les Alpes-de-Haute-Provence.

Le temps de trajet entre le domicile et certaines maternités pourrait atteindre quarante-cinq minutes en certains points du territoire. Certes, vous avez précisé que le critère temporel n’était pas le seul à prendre en considération, mais la qualité de l’accès aux soins reste un élément déterminant dans le soutien à une démographie dynamique.

Je le rappelle, les petites structures doivent rester une composante essentielle de l’offre de soins sur notre territoire. J’ai pris bonne note de la mission en cours, qui devrait permettre d’apporter une réponse en matière de sécurité et d’accessibilité d’ici au trimestre prochain, ce qui, je pense, satisfera pleinement Claude Haut.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Delphine Bataille, auteur de la question n° 937, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Bataille

La réforme de la formation des masseurs-kinésithérapeutes accessible sur concours, soit directement après le baccalauréat, soit après une année d’études universitaires, et qui, jusqu’à présent, se déroulait sur trois années dans l’un des quarante-deux centres de formation, est en cours depuis plusieurs années.

En 2013, Mmes les ministres chargées d’une part, des affaires sociales et de la santé et, d’autre part, de l’enseignement supérieur et de la recherche se sont engagées conjointement à reprendre les travaux de réingénierie de la formation initiale de kinésithérapeute sur les bases d’un cursus de quatre ans, reconnu comme un master 1, dont une première année préparatoire qui serait, à terme, universitaire, tout en laissant les universités proposer une offre de formation complémentaire de niveau master 2.

Cependant, l’ensemble de la profession ainsi que les étudiants se sont mobilisés massivement contre ce projet : ils demandent l’instauration d’un niveau master 2 pour le métier socle comprenant quatre ans de formation précédés d’une année de préparation universitaire.

L’objectif recherché par ces professionnels et étudiants est de valoriser les années d’études pour permettre à la profession de disposer d’une recherche universitaire spécifique.

Les professionnels cherchent ainsi à acquérir une validité scientifique et une amélioration de leurs techniques, de manière à prendre en charge, en première intention, certaines pathologies et à simplifier le parcours de soins de leurs patients. Cela doit leur permettre, également, d’améliorer leur statut au regard de l’harmonisation européenne des formations.

Depuis le dépôt de cette question, le 20 novembre dernier, un nouvel arbitrage interministériel rendu au début du mois de décembre a permis de réelles avancées, qui vont dans le sens d’une revalorisation de la profession.

Les évolutions prévues permettent ainsi une quatrième année de formation en institut de formation en masso-kinésithérapie, ou IFMK, dès 2015 et la fin du recrutement par concours physique-chimie-biologie, le concours PCB, à partir de la rentrée 2016.

Toutefois, les professionnels et les étudiants concernés, tout en soulignant les évolutions significatives de ce nouvel arbitrage, souhaitent poursuivre le travail de réingénierie de leur formation, afin d’obtenir l’attribution du grade de master 2 de l’université.

Madame la secrétaire d’État, quelle suite comptez-vous donner à la revendication de ces acteurs sociétaux, dont le rôle au quotidien auprès des Français est essentiel pour satisfaire les besoins évolutifs en matière de santé de la population ?

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie

Madame la sénatrice, dès 2012, le Gouvernement s’est engagé à poursuivre le processus d’intégration des formations sanitaires et sociales dans le cursus licence-master-doctorat.

S’agissant de la formation des masseurs-kinésithérapeutes, il a présenté, au mois de janvier 2013, une première feuille de route avec pour objectif l’élaboration d’un nouveau référentiel de formation. Les travaux menés sur cette base ont révélé la difficulté de dispenser en trois ans la formation spécifique en masso-kinésithérapie.

C’est pourquoi, en novembre dernier, en concertation avec l’ensemble des acteurs concernés, le Gouvernement a proposé la mise en place d’un nouveau schéma, qui s’appuiera sur des travaux collaboratifs pilotés par les ministères de la santé, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Les nouvelles bases de travail sont les suivantes.

Tout d’abord, une formation spécifique en quatre ans attribuant 240 crédits ECTS – european credit system transfert – au sein des instituts de formation en masso-kinésithérapie sera mise en place dès la rentrée 2015.

Ensuite, il est prévu une admission en institut de formation précédée d’une année universitaire pouvant prendre des formes différenciées : première année commune aux études de santé, première année en licence de sciences et techniques des activités physiques et sportives, licence dite « STAPS », ou en licence de biologie.

Au terme de cette année universitaire, les étudiants obtiendront 60 crédits ECTS qu’ils pourront faire valoir dans le cadre de la poursuite éventuelle d’un parcours universitaire au-delà du diplôme de masseur-kinésithérapeute.

Enfin, le concours de physique-chimie-biologie sera remplacé par de nouvelles modalités d’admission devant être définies par les travaux en cours et qui entreront en vigueur au mieux en 2016.

Madame la sénatrice, vous le constatez, le Gouvernement est convaincu de la nécessité de déployer une formation de qualité permettant aux masseurs-kinésithérapeutes de prendre toute leur part dans la prise en charge des patients dans le cadre de la stratégie nationale de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Bataille

Je vous remercie de cette réponse très claire, madame la secrétaire d’État.

Vous avez rappelé que le cadrage de cette réforme de la formation présentait plusieurs avancées notoires, notamment l’apparition d’une quatrième année de formation spécifique en IFMK dès 2015 et la fin du recrutement par concours PCB à partir de la rentrée 2016.

Cet arbitrage, que vous avez contribué à rendre, constitue un réel progrès ; il envoie un signal fort de valorisation et de reconnaissance de la profession. Il faudra toutefois rester vigilant sur l’équivalence du diplôme d’État, notamment avec les diplômes européens.

À travers cette réponse, vous montrez, madame la secrétaire d’État, que le Gouvernement a pris pleinement conscience, ces derniers temps, qu’il était impossible de faire tenir en trois années la formation spécifique de masso-kinésithérapie.

Il s’agit donc, je le répète, d’une avancée importante, indispensable à l’élaboration d’un cursus de formation de qualité, qui permette aux masseurs-kinésithérapeutes de répondre aux nouvelles exigences des patients et de remplir les missions qui leur sont confiées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Philippe Kaltenbach, auteur de la question n° 995, transmise à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Ma question porte sur la situation de l’hôpital Foch de Suresnes, situé dans le beau département des Hauts-de-Seine.

Cet établissement est une structure privée à but non lucratif qui participe largement au service public hospitalier du département, grâce à un personnel extrêmement dévoué et très qualifié. Les usagers en sont d’ailleurs tout à fait satisfaits.

Au mois de septembre 2012, une mission a été confiée à l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, ainsi qu’à l’Inspection générale de l’administration, l’IGA. L’objet de cette mission portait sur l’état précis des rapports entretenus par la fondation Foch, propriétaire de l’hôpital, avec l’association Foch, chargée de sa gestion. Ces deux structures ont été dirigées durant quinze années par le même président.

À la suite de la remise des conclusions du rapport conjoint de l’IGAS et de l’IGA, un administrateur provisoire a été nommé, en février 2013, à la tête de l’association, dans l’attente de la réorganisation et de la refonte des statuts, préconisées par le ministre de l’intérieur de l’époque.

Depuis, malheureusement, les choses n’avancent pas. Les agents de l’hôpital n’ont aucune nouvelle ; ils sont dans l’expectative. Ils aimeraient savoir quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour régler ces difficultés de fonctionnement et de gouvernance au sein de l’hôpital Foch.

Aussi, madame la secrétaire d’État, pouvez-vous me dire si la réorganisation institutionnelle de cette structure interviendra bien prochainement, conformément aux recommandations formulées dans le rapport que je viens d’évoquer ?

Il convient en effet d’apporter rapidement des réponses aux inquiétudes des agents de l’hôpital, qui demeurent pénalisés par la situation en cours. Ils souhaitent que la situation soit rapidement apurée, que la gouvernance soit clairement établie, que les problèmes financiers qui se font également jour entre la fondation et l’association soient complètement réglés, en somme que les contentieux en cours soient tranchés.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie

Monsieur le sénateur, le ministre de l’intérieur et la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sont, tout comme vous, attentifs au bon fonctionnement de l’hôpital Foch et de la fondation. Nous comprenons aussi l’inquiétude des personnels.

C’est précisément pour ces raisons que l’IGAS et l’IGA ont mené une mission d’inspection conjointe. À son issue, un rapport a été remis aux deux ministres, en décembre 2013.

Ce rapport contient deux préconisations principales : la restitution par la fondation de sommes qui auraient dû revenir à l’association ; une refonte de la gouvernance, passant notamment par une réforme des statuts de la fondation.

Sur le premier point, l’administratrice provisoire de l’association l’a confirmé à plusieurs reprises, la dette a été en quasi-totalité remboursée.

Sur le second point, le Gouvernement a entrepris de faire adopter de nouveaux statuts par la fondation. L’objectif est de mettre fin aux dysfonctionnements et de clarifier les relations entre la fondation et l’association, chacune devant agir conformément à son objet, sans risque de confusion d’intérêts.

Ce travail est mené en lien avec le conseil d’administration de la fondation et son président. Le conseil d’administration de la fondation doit en effet approuver les nouveaux statuts, qu’il reviendra au ministre de l’intérieur de proposer au Premier ministre d’accepter, après avis du Conseil d’État.

Ce travail est long, il requiert de nombreux échanges, mais il est nécessaire. Dans leur fonction de tutelle des fondations reconnues d’utilité publique, les services du ministère de l’intérieur veillent attentivement à l’aboutissement de ce dossier, en lien avec ceux du ministère chargé de la santé et l’agence régionale de santé d’Île-de-France.

Je tiens à cet égard à souligner qu’il appartient désormais à la fondation de prendre rapidement position sur de nouveaux statuts qui tiennent pleinement compte des recommandations de la mission d’inspection et préviennent, pour l’avenir, toute confusion d’intérêts entre la fondation et l’association. Il s’agit d’une condition impérative pour que le modèle d’organisation actuel, comportant une fondation propriétaire et une association gestionnaire, puisse continuer d’être approuvé par l’autorité publique. À défaut, celle-ci prendra ses responsabilités, qui lui imposent de retenir une organisation à même d’assurer la pérennité de l’hôpital Foch, à laquelle le ministre de l’intérieur et la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sont, tout comme vous, monsieur le sénateur, très attachés.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Je vous remercie de cette réponse, madame la secrétaire d’État.

Je note que les difficultés financières sont quasiment réglées. Reste la question de la gouvernance. La position du Gouvernement est extrêmement claire et ferme. Il fallait la répéter en ces lieux pour qu’elle soit entendue par tous, et notamment par le personnel de l’hôpital.

Je comprends que la balle est désormais dans le camp de la fondation Foch, qui doit réagir rapidement et proposer de nouveaux statuts. Sans cela, en effet, le Gouvernement prendrait ses responsabilités.

Si je suis satisfait de cette réponse, je voulais néanmoins insister sur le fait que les agents sont depuis trop longtemps dans l’expectative ; ce dossier doit donc être réglé au plus vite.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Jacques Genest, auteur de la question n° 968, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Genest

Ma question porte sur le retard dans la signature des conventions tripartites liant les établissements publics d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ou EHPAD, les conseils généraux et l’État via les agences régionales de santé, les ARS.

Je rappelle qu’en vertu des dispositions prévues à l’article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles, ces trois parties signent une convention fixant des objectifs à chacun des signataires. Cette convention attribue également des moyens aux EHPAD.

Il revient aux départements de financer une partie de dépenses liées à la dépendance, soit 30 % des personnels aides-soignants et aides médico-psychologiques et 100 % des psychologues.

L’État, par le truchement des ARS, finance la partie « soins », soit 70 % des mêmes personnels aides-soignants et médico-psychologiques, 100 % du personnel infirmier, ainsi que la location du matériel médical.

Quant à l’EHPAD, il lui revient de pourvoir à la partie « hébergement-restauration ».

Dans le cadre de ces conventions, les établissements ont pour obligation de respecter un cahier des charges contenant des recommandations de bonnes pratiques, qui les invitent à s’engager dans une démarche qualité vis-à-vis des personnes âgées dépendantes.

J’ajoute que la médicalisation des EHPAD est subordonnée à la signature de ces conventions.

Or nous devons constater un retard dans la signature de ces conventions de un à trois ans environ. Cette situation est génératrice de grandes difficultés pour les établissements car, dans le même temps, les personnes prises en charge entrent plus tard dans les EHPAD, et donc avec un niveau de dépendance supérieur et des besoins de soins plus importants que ceux que l’on a connus lors de la signature des premières conventions tripartites.

De ce fait, les établissements connaissent des conditions d’accueil dégradées et n’ont guère d’autres choix qu’accepter le manque de personnel ou avoir recours à des postes non financés. Cette situation a pour conséquence de provoquer le déséquilibre de leurs comptes ou de les obliger à facturer les frais de dépendance et de soins aux résidents.

Je vous demande donc, madame la secrétaire d’État, quelles initiatives le Gouvernement compte prendre pour faire respecter les échéances tripartites, afin de permettre aux EHPAD de mener à bien leurs missions, sans dégradation des conditions d’accueil ni tarif prohibitif pour les résidents, et assurer ainsi la réelle prise en charge du cinquième risque.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie

Monsieur le sénateur, sur le territoire français, plus de 7 000 établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes accompagnent près de 600 000 personnes âgées.

Les ressources publiques consacrées à ce dispositif sont particulièrement significatives, car elles représentent environ 11, 5 milliards d’euros, dont 7, 5 milliards d’euros au titre des crédits d’assurance maladie.

La médicalisation des établissements, dont la vocation est d’accompagner l’élévation du niveau de dépendance et de besoins en soins des résidents, a permis de renforcer le taux d’encadrement, notamment en personnel soignant. Les 400 000 agents intervenant en EHPAD représentent un taux d’encadrement de 61 équivalents temps plein pour 100 places.

Ce processus de médicalisation, financé par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, se poursuit. C’est ainsi que 100 millions d’euros ont été budgétés en 2015 dans la loi de financement de la sécurité sociale. Nous avons pour objectif de voir ce processus achevé très rapidement

Les règles actuelles de tarification impliquent que le renfort de crédits sur la section « soins » soit impérativement accompagné de crédits sur la section « dépendance », financée par les conseils généraux, pour ce qui concerne le recrutement des aides-soignants, cas de figure le plus courant. Lorsque ce cofinancement ne peut être assuré, la convention tripartite ne peut en effet être renouvelée, bloquant ainsi le processus de médicalisation, alors qu’une partie des crédits est disponible.

Nous sommes conscients de ces difficultés et soucieux de soutenir l’accompagnement des personnes âgées en établissement. C’est pourquoi j’ai, en décembre dernier, lancé une concertation, sous la forme d’un groupe de travail, dit de « tarification des EHPAD », associant les autorités de tarification ainsi que les représentants des gestionnaires et des usagers.

La création de ce groupe de travail était prévue dans un rapport annexé au projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement, texte qui n’a pas encore été examiné par le Sénat. J’ai donc souhaité anticiper et installer cette instance de concertation sans attendre que la loi soit définitivement adoptée.

Ce groupe de travail a pour but de simplifier la gestion et de moderniser le pilotage des EHPAD. Un des axes de travail concerne la rénovation du processus de l’allocation de ressources, afin de donner plus de souplesse aux tarificateurs quant à la détermination de leurs ressources propres, et plus d’autonomie aux gestionnaires quant à leur utilisation.

Un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens pluri-établissements se substituera aux conventions tripartites, fondé sur des orientations stratégiques contractuelles et des indicateurs partagés. Ces dispositions sont en cours de discussion et les dispositions législatives nécessaires seront intégrées dans le projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement, que votre assemblée aura à examiner au mois de mars, monsieur le sénateur.

Ainsi, grâce à sa mise en place anticipée, le groupe de travail prévu dans le rapport annexé au projet de loi en cours de discussion nous permettra d’intégrer dans ce texte les modifications législatives qu’il aura préconisées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Genest

Créer un groupe de travail, c’est bien ; mais, en attendant, comment les EHPAD vont-ils assurer la qualité de l’hébergement et des soins ?

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d’État

Ses conclusions seront rendues en juin !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Genest

Le retard pris dans la signature des conventions n’est pas toujours dû à des problèmes de financement entre le conseil général et l’État ; il est même souvent causé par un manque de personnel au sein des ARS. À moins que, mais c’est une hypothèse bien triste, le retard pris dans la signature des nouvelles conventions ne fasse gagner un peu d’argent à l’État, la prise en charge au titre des anciennes conventions lui coûtant moins cher…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Cyril Pellevat, auteur de la question n° 958, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Cyril Pellevat

Madame la secrétaire d’État, sénateur de Haute-Savoie et frontalier, je souhaite évoquer les conséquences de l’affiliation obligatoire des travailleurs frontaliers à la couverture maladie universelle, la CMU.

Cette situation a été, une nouvelle fois, largement évoquée à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, et notamment de son article 65, lequel prévoit des sanctions à l’encontre des personnes qui ne seraient pas affiliées à un régime de sécurité sociale à compter du 1er janvier 2015.

Le département de Haute-Savoie compte 100 000 travailleurs qui, chaque jour, traversent la frontière pour travailler en Suisse. Avec les accords bilatéraux entre l’Union européenne et la Suisse, signés dans les années deux mille, les frontaliers français actifs en Suisse avaient trois options pour être assurés : l’affiliation au régime d’assurance maladie suisse, régi par la loi fédérale sur l’assurance maladie, dite « LAMal », pour un minimum de 300 francs suisses par mois ; l’affiliation volontaire à la sécurité sociale ; le recours aux assurances privées.

Le droit d’option entre une assurance privée française et le régime général de l’assurance maladie française avait été introduit en 2002 pour une durée de sept ans, et prorogé en 2006 pour une durée supplémentaire de six ans. En effet, l’affiliation à une assurance privée était plébiscitée par 90 % des travailleurs frontaliers ; elle correspondait à un besoin.

Cette possibilité d’affiliation en France auprès d’une assurance privée a pris fin le 1er juin 2014 par décret ministériel n° 2014-516. L’affiliation en France se fait désormais uniquement auprès de l’assurance maladie.

À partir du 1er juin 2014, les quelque 163 000 frontaliers vivant dans les six départements limitrophes de la Confédération helvétique et ayant opté pour l’assurance privée basculent dans le système de sécurité sociale français à la date d’échéance de leur contrat annuel. Une circulaire ministérielle du 23 mai 2014 précise les modalités d’intégration des frontaliers dans le régime général de sécurité sociale.

Une période transitoire permettra aux personnes ayant souscrit une assurance privée avant le 1er juin 2014 de rejoindre l’assurance maladie française au terme de l’échéance annuelle de leur contrat d’assurance privée, au plus tard le 31 mai 2015.

Cette situation soulève plusieurs interrogations quant à l’organisation des services des caisses primaires d’assurance maladie, au réseau territorial des médecins traitants ou encore à la situation des frontaliers au regard de la loi.

L’afflux de ces nouveaux inscrits sature les caisses primaires d’assurance maladie et mobilise un nombre substantiel d’agents, qui doivent faire face à un surcroît important de travail.

Une personne m’a récemment indiqué par courrier que le délai de carence annoncé par les collaborateurs de la sécurité sociale d’Annemasse était de quatre mois. Les nouveaux assurés doivent avancer tous leurs frais de santé. Les services de la caisse primaire d’assurance maladie sont déjà sous pression et débordés. Ils manquent d’informations pour répondre aux attentes des frontaliers.

Je voudrais donc savoir les mesures et les garanties que le Gouvernement envisage pour assurer l’inscription des demandeurs frontaliers dans les temps et la délivrance de leur carte Vitale dans des délais raisonnables. Un nouveau sursis à la date butoir du 31 mai serait le bienvenu.

Je souhaiterais également connaître les études d’impact ou les mesures pérennes que le Gouvernement prévoit pour assurer l’accès aux soins de ces nouveaux assurés auprès des médecins traitants français, qui sont déjà extrêmement saturés - du moins quand il en existe encore, et je pense ici à certaines zones qualifiées de « désert médical ». C’est vers eux que les publics concernés vont se tourner.

Le Gouvernement a été alerté dans un récent courrier par ma collègue Sophie Dion, députée de Haute-Savoie, sur la situation du bassin de Cluses, dont la densité médicale est faible, avec 59, 6 médecins pour 100 000 habitants, contre une moyenne nationale de 109.

La situation dans le pays de Gex n’est guère meilleure, avec un gynécologue pour 36 182 habitants, contre un pour 11 377 en moyenne nationale. Il en est de même pour les dermatologues, les cardiologues ou les pédiatres.

D’ailleurs, j’ai lu aujourd'hui dans la presse que le nombre de lits en pédiatrie baissait dans l’hôpital de Saint-Julien-en-Genevois.

Dans notre département, le temps d’accès à certains centres hospitaliers est plus élevé que la moyenne : plus de cinquante-cinq minutes pour une maternité de niveau II à Annecy ou Annemasse ; plus d’une heure et demie pour une maternité de niveau III à Chambéry.

Les témoignages de frontaliers sont édifiants. Au mois d’octobre dernier, lorsque mon épouse a appelé un gynécologue de la région, on l’a invitée à rappeler en décembre pour obtenir un rendez-vous en mars, soit six mois de délai pour un simple rendez-vous !

Même si le patient peut choisir un médecin traitant en Suisse sans être pénalisé dans le remboursement des soins, le professionnel de santé suisse devra obtenir un conventionnement spécifique avec la CPAM comprenant des engagements minimaux. Autant de démarches administratives qui peuvent être dissuasives !

Enfin, l’article 65 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 envisageait des sanctions pour les personnes qui ne seraient pas affiliées à un régime de sécurité sociale au 1er janvier 2015. Quels aménagements le Gouvernement compte-t-il adopter pour que ces pénalités ne touchent pas les travailleurs frontaliers, qui avaient jusqu’au 31 mai 2015 pour assurer cette affiliation ?

Je vous remercie de l’attention que vous porterez à la situation de travailleurs qui assurent des revenus à leur famille en traversant des frontières et qui contribuent à la richesse de nos départements, tout en étant soumis à des règles en matière de temps de travail et de congés payés n’ayant rien à voir avec celles qui prévalent en France.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie

Monsieur le sénateur, dans le cadre de l’accord sur la libre circulation des personnes, la Suisse a permis aux travailleurs frontaliers qui résident en France, en Allemagne, en Autriche ou en Italie d’être, par exception, exemptés de l’assurance maladie obligatoire en Suisse, la LAMal, et a ouvert un droit d’option entre la LAMal et la couverture maladie du pays de résidence.

La France a autorisé l’affiliation auprès d’une assurance privée en cas d’option pour une couverture maladie en France, pour une période limitée initialement à sept ans. Cette affiliation a été prorogée en 2006 jusqu’au 31 mai 2014.

À l’issue d’un long processus de concertation, le Gouvernement a organisé les conditions d’extinction de ce dispositif spécifique.

Deux décrets publiés le 23 mai 2014 et une circulaire détaillent les modalités de mise en œuvre et apportent toutes les garanties aux intéressés quant à la qualité de leur couverture sociale en tenant compte de la situation locale.

Sur le terrain, les services des organismes de sécurité sociale sont mobilisés pour informer et gérer l’intégration des travailleurs frontaliers : mise en ligne des formulaires et de la documentation, informations détaillées sur le site Ameli, numéro d’appel unique.

Pour que cette transition s’effectue dans de bonnes conditions, l’affiliation à l’assurance maladie française est progressive. Elle intervient à l’échéance annuelle du contrat d’assurance privée, entre le 1er juin 2014 et le 31 mai 2015, au plus tard.

De plus, le Gouvernement s’est montré très attentif à l’accès aux soins des frontaliers et des mesures d’assouplissement ont été prises.

Ainsi, le médecin traitant peut être choisi aussi bien en France qu’en Suisse. L’accès aux soins programmés hospitaliers ou coûteux en Suisse est facilité pour les frontaliers résidant dans des zones à faible densité médicale. Les soins lourds entamés en Suisse avant le 1er juin 2014 et les soins ambulatoires non urgents dispensés en Suisse peuvent être pris en charge sur la base des tarifs français.

Les soins effectués en marge du travail du frontalier le sont sur la base des tarifs suisses ou, à la demande des frontaliers, sur la base des tarifs français. Les frontaliers bénéficient aujourd’hui, comme tous les autres assurés, d’une durée de validité de la carte européenne d’assurance plus longue, de deux ans.

Enfin, monsieur le sénateur, vous faites référence à la disposition introduite par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 concernant les personnes refusant de s’affilier à la sécurité sociale. Il est important de rappeler que l’article concerné a pour objectif de renforcer les sanctions envers toute personne qui chercherait délibérément à se soustraire à ses obligations.

Ce ne sera donc pas le cas des travailleurs frontaliers suisses dès lors que, à l’issue de l’échéance annuelle de leur contrat et au plus tard avant le 31 mai 2015, ils auront procédé à leur affiliation auprès de l’assurance maladie. Il est recommandé aux intéressés de prendre attache auprès de la caisse primaire d’assurance maladie le plus en amont possible pour faciliter leur affiliation par la suite.

Debut de section - PermalienPhoto de Cyril Pellevat

Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, mais ces informations nous étaient connues.

Comme je le soulignais, les problèmes sont réels sur le terrain. Je pense notamment aux déserts médicaux constatés pour certaines professions. Dans les faits, on constate déjà que les hauts revenus quittent la France pour s’installer en Suisse et ainsi pouvoir exercer de nouveau leur droit d’option.

Je voudrais également évoquer la cotisation sur le revenu fiscal de référence. Des abattements ont été décidés, et je salue l’action du Gouvernement à cet égard. J’espère que le taux restera limité à 8 %.

Enfin, je signale que, côté suisse, nous sommes assurés pour les maladies professionnelles, ainsi que pour les accidents professionnels et non professionnels.

MM. Loïc Hervé et Michel Houel applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Yves Détraigne, auteur de la question n° 969, adressée à M. le ministre des finances et des comptes publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

L’État a récemment pris la décision de fermer la trésorerie de Mourmelon-le-Grand, dixième ville du département de la Marne.

Sur la forme, il n’y a pas eu, semble-t-il, de concertation préalable sur le terrain. En 2013, la question de la restructuration des services avait simplement été évoquée par le directeur régional des finances publiques. Différentes hypothèses de regroupement avaient été formulées, mais rien de plus. Il avait juste été indiqué que de nouveaux contacts seraient pris avec les élus concernés en cas de fermeture.

Au mois de décembre dernier, le maire de Mourmelon-le-Grand m’alertait sur la décision qui avait été prise de fermer la trésorerie au 1er janvier. Il m’informait des inquiétudes que cela soulevait quant à l’avenir du personnel, à l’aménagement de la trésorerie de Suippes, où les services devaient être transférés, au devenir des régies communales, nombreuses à Mourmelon-le-Grand, avec en plus les conséquences du récent redécoupage des cantons, ou encore aux risques de détérioration des services rendus.

Qu’en est-il aujourd’hui ? La fermeture partielle a été mise en œuvre. Toutefois, contrairement à ce qui avait été annoncé, il reste possible, semble-t-il, de déposer le produit des régies communales à la trésorerie de Mourmelon-le-Grand. C’est d’autant plus important pour la ville.

Cette fermeture partielle est donc, pour le moment, un moindre mal et les élus locaux demandent légitimement que l’on en reste à cette demi-mesure. Je partage leur position.

Je souhaite donc que le Gouvernement m’assure du maintien durable des services de la trésorerie de Mourmelon-le-Grand dans leur organisation actuelle.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget

Monsieur le sénateur, la fermeture de la trésorerie de Mourmelon-le-Grand est intervenue le 1er janvier de cette année, après une période de deux ans d’évaluation préalable et de concertation menée par le directeur régional des finances publiques.

Tout d’abord, l’organisation sur l’ensemble du territoire d’un service public efficace répondant aux besoins des usagers est un élément essentiel pour le Gouvernement. Cet objectif est au cœur des choix effectués sur chacun des territoires.

C’est dans ce cadre que la Direction générale des finances publiques, la DGFIP, peut être conduite à adapter son réseau, de manière pragmatique et concertée, y compris en ouvrant de nouveaux centres lorsque cela est justifié. Ces réorganisations sont, bien entendu, menées en étroite concertation avec les élus locaux et nationaux, qui sont systématiquement consultés.

En pratique, les discussions sont menées au plus près du terrain par le directeur départemental ou régional des finances publiques, en lien direct avec le préfet.

L’adaptation des réseaux déconcentrés du ministère des finances, que ce soit la DGFIP ou la Direction générale des douanes et droits indirects, est une nécessité pour répondre à l’évolution des missions, dans un contexte budgétaire très tendu.

J’en viens plus particulièrement à la trésorerie de Mourmelon-le-Grand. Comme je l’indiquais, le projet a été engagé par la direction régionale des finances publiques depuis plus de deux ans. Il a été discuté avec les chefs de service, les agents, les représentants du personnel, les élus locaux et la préfecture. Ce fut notamment le cas à l’occasion de la dernière réunion de concertation avec les élus locaux, qui est intervenue à Suippes le 28 novembre 2014. Elle faisait suite à de précédentes informations.

Je le rappelle, il s’agissait d’un très petit poste, composé de deux agents. La responsabilité en était d’ores et déjà assurée par le chef de poste de la trésorerie de Suippes, dont l’activité était résiduelle.

Il est donc cohérent que la Direction générale des finances publiques m’ait proposé de redéployer ses moyens dans ce territoire, tout en continuant à répondre aux attentes des usagers.

Les missions précédemment exercées par la trésorerie de Mourmelon-le-Grand sont désormais assurées par deux postes comptables, celui de Suippes et celui de Verzy.

Pour répondre à votre interrogation, le rattachement des communes est en conformité avec le schéma départemental de coopération intercommunale. C’est dans ce cadre que les budgets de deux communes ont été transférés à la trésorerie de Verzy ; les autres ont été rattachées au poste de Suippes. Et, pour maintenir la présence de l’administration auprès des publics les plus fragiles, des permanences bihebdomadaires seront mises en place en mairie de Mourmelon-le-Grand pour répondre aux demandes des usagers qui ne pourraient pas se déplacer jusqu’à Suippes ou Verzy.

Vous m’interrogez enfin sur les conditions d’accueil des personnels transférés à Suippes. Le phénomène que vous avez décrit est provisoire, en attendant la finalisation des aménagements immobiliers qui seront effectués.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse.

Je réaffirme la position des élus du secteur en faveur du maintien du service minimum. La commune de Mourmelon-le-Grand est au cœur d’un espace important - tout le monde connaît son camp militaire – et son activité dépasse largement ses limites territoriales pour concerner l’ensemble du pays. Les services de trésorerie ne doivent donc pas fermer.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, auteur de la question n° 950, adressée à Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

Ma question porte sur les conséquences du surcoût lié aux opérations de désamiantage dans le parc de logements HLM.

Depuis le 1er juillet 1997, la législation interdit toute construction de logement contenant de l’amiante, mais 80 % des permis de construire de logements sociaux ont été délivrés avant cette date.

Ainsi, 3, 1 millions de logements collectifs sont susceptibles de contenir des traces d’amiante, dans plus de 3 000 composants, comme les mastics pour les joints de fenêtre, les colles ou le ciment.

Les avancées législatives inscrites dans les codes de la santé et du travail permettent de protéger les habitants et les professionnels du bâtiment.

Cependant, en contrepartie, les organismes d’HLM doivent faire face à une forte hausse du prix des travaux de rénovation.

Selon le rapport d’information de la mission sénatoriale sur l’amiante de juillet 2014, l’Union sociale pour l’habitat évalue le surcoût à 2, 3 milliards d’euros hors taxe par an, pour la rénovation de logement. Cette somme représente l’équivalent de 120 000 constructions ou 400 000 rénovations.

La législation a été renforcée depuis 2001, notamment avec la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, ou loi ALUR. Le seuil d’exposition « passive » aux poussières d’amiante a été abaissé de vingt-cinq fibres par litre d’air à cinq et les règles d’information des habitants et des intervenants ont été élargies, avec, par exemple, la création du dossier technique « amiante » ou encore la notification de présence d’amiante au sein du logement en annexe du contrat de bail.

Par ailleurs, le décret du 4 mai 2012 relatif aux risques d’exposition à l’amiante a changé la méthode de mesure de l’empoussièrement : le seuil d’exposition « active » aux poussières d’amiante passera, le 1er juillet 2015, de cent fibres par litre d’air à dix fibres.

Lors du congrès des HLM de septembre dernier, Mme la ministre du logement a annoncé l’ouverture, via un prêt de la Caisse des dépôts et consignations, d’une enveloppe de 10 000 euros par logement au bénéfice de 40 000 logements par an. Comment le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre ces prêts ? Des critères d’éligibilité ou des conditions d’attribution seront-ils fixés pour les organismes d’HLM ?

Plus généralement, le Gouvernement envisage-t-il de créer une structure interministérielle pour harmoniser les actions de désamiantage des logements ? D’un territoire à un autre, en effet, les inspecteurs du travail font une interprétation variable des procédures administratives à suivre en matière d’amiante, ce qui aggrave encore les surcoûts de production supportés par les bailleurs sociaux.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget

Madame Estrosi Sassone, vous avez interrogé Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité sur le surcoût lié aux actions de désamiantage des logements sociaux ; retenue ce matin par la présentation du rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre, Mme Pinel m’a chargé de vous transmettre sa réponse.

La volonté du Gouvernement est d’engager la rénovation énergétique massive de notre parc de logements. Or ce projet ambitieux de réhabilitation de l’existant impose une prise en compte renforcée de l’amiante présente dans certains bâtiments, dont la libération et la manipulation doivent être entourées de précautions.

L’utilisation de l’amiante est interdite depuis 1997, mais, comme vous l’avez rappelé, madame la sénatrice, cette substance est encore présente dans de nombreux logements. Les surcoûts liés aux travaux de désamiantage dans les seuls logements sociaux sont estimés par l’Union sociale pour l’habitat, l’USH, à 2, 3 milliards d’euros. Le même problème se pose pour les logements privés et pour les bureaux, sans que les coûts réels aient encore pu être évalués.

Le Gouvernement a pris une série de mesures pour répondre à ces enjeux et soutenir les acteurs.

Ainsi, alors qu’aucun financement particulier ne permettait jusqu’à présent de prendre en charge les travaux liés spécifiquement à l’amiante, Mme la ministre du logement a annoncé en septembre dernier, lors du congrès de l’USH, la création d’un prêt dédié aux travaux de traitement de l’amiante. Cette mesure a été intégrée à la loi de finances pour 2015.

Ce nouveau prêt, consenti par la Caisse des dépôts et consignations, est très avantageux, puisqu’il est bonifié au même niveau que l’éco-prêt logement social : son taux est donc inférieur à celui du livret A. Une enveloppe totale de 1, 5 milliard d’euros est prévue et les prêts sont plafonnés à 10 000 euros par logement afin que 50 000 logements puissent en bénéficier chaque année.

Les prestations éligibles correspondent aux différentes étapes du désamiantage, depuis la phase de repérage des matériaux contenant de l’amiante avant travaux jusqu’à la phase de traitement et d’élimination des déchets. Sur ce point, la convention entre l’État et la Caisse des dépôts et consignations est en cours de finalisation.

Le Gouvernement veut également soutenir l’exploration de nouvelles méthodes d’extraction de l’amiante. C’est la raison pour laquelle il mobilise 20 millions d’euros du Fonds de compensation des risques de l’assurance de la construction à partir de cette année au service de la recherche et du développement en matière de détection et d’extraction robotisée de l’amiante.

Un plan a été défini sur trois ans et des actions opérationnelles seront menées dès cette année. Un programme de recherche et développement pour l’extraction de l’amiante dans le bâtiment a été confié à des organismes de recherche, dont le Centre scientifique et technique du bâtiment, le CSTB. Par ailleurs, un appel à manifestation d’intérêt sera bientôt lancé au sujet des différentes modalités d’extraction de l’amiante.

Il s’agit de développer des technologies fiables pour réduire les coûts.

Vous le voyez, les mesures prises par le Gouvernement sont immédiates et produiront des effets à court terme, mais nous devons nous doter d’un programme d’actions pérenne pour mener à bien la tâche que nous nous sommes fixée.

Ces travaux sont interministériels, comme vous avez eu raison de le souligner, madame la sénatrice. C’est pourquoi, en juillet dernier, une feuille de route interministérielle a été élaborée conjointement par le ministère du logement et les ministères du travail, de la santé et de l’écologie ; elle regroupe toutes les actions d’information, de formation, de recensement et d’animation interprofessionnelle que l’État aura à mettre en œuvre.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, des précisions que vous venez d’apporter.

J’espère que les fonds nécessaires, qui sont importants, seront bien mobilisés, car les bailleurs sociaux en ont véritablement besoin pour continuer à mener des opérations lourdes dans le domaine de la réhabilitation, qui est l’une de leurs priorités.

J’attire l’attention du Gouvernement sur les difficultés croissantes qui s’attacheront à la conduite d’opérations de réhabilitation en site occupé, compte tenu des contraintes qui doivent être respectées à l’égard des locataires. Imaginez la réaction des occupants quand ils voient arriver chez eux des personnes équipées comme des scaphandriers, et ce uniquement pour désamianter les mastics des joints de fenêtres, alors qu’eux-mêmes habitent parfois sur place depuis de très nombreuses années sans avoir jamais été protégés !

En vérité, il est important d’améliorer les procédures pour permettre aux bailleurs sociaux, qui font face à des difficultés grandissantes, de poursuivre leurs travaux de réhabilitation, y compris en site occupé, ce qui devient de plus en plus compliqué.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Dominique Gillot, auteur de la question n° 971, adressée à Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

Par courrier en date du 27 octobre dernier, le conseil général du Val-d’Oise a informé les associations à caractère social du département, dont Espérer 95, qu’il se désengageait du dispositif d’allocation de logement temporaire, ou ALT.

La décision du conseil général représente pour cette association, dont la convention de subvention date de plus de vingt ans, une perte de 122 428 euros de dotations, reportée du 1er janvier au 1er juillet de cette année à la suite de nombreuses interventions.

Alors que le conseil général a toujours entretenu des relations de confiance, efficaces et constructives, avec les partenaires associatifs du territoire, cette décision, d’une grande brutalité, prive les associations partenaires des financements nécessaires à la continuité de leur action.

L’article 68 de la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion précise les modalités de la prise en charge par les conseils généraux, en centres d’hébergement et de réinsertion sociale, des femmes avec enfants de moins de trois ans : si l’État, en application du code de l’action sociale et des familles, assume la charge des familles au titre de l’aide sociale, le département dispose, quant à lui, de compétences spécifiques de droit commun au titre de l’aide sociale à l’enfance, notamment à l’égard des femmes enceintes et des mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans qui ont besoin d’un soutien matériel et psychologique.

Les personnes prises en charge, notamment par l’association Espérer 95, ne sont pas placées en raison d’un défaut de logement, mais en considération d’une situation de danger éducatif qui nécessite un accompagnement.

La décision annoncée par le conseil général le 27 octobre dernier a été prise unilatéralement, sans aucune concertation et sans que la moindre solution transitoire soit proposée. Elle risque de jeter à la rue au moins soixante-douze adultes et soixante-huit enfants, pour ne parler que de ceux qui sont pris en charge par Espérer 95, et sans même évoquer le licenciement probable des salariés de l’association. Elle ajoute donc de la précarité à la précarité et, en bout de chaîne, du malheur au malheur ; elle condamne à l’exclusion.

La situation dans mon département n’est pas un cas isolé. Le secteur associatif partenaire de l’État relaie, en les localisant, les politiques publiques sociales que celui-ci met en œuvre. Si le contexte des finances publiques contraint implique un effort collectif partagé, celui-ci ne peut être reporté unilatéralement en bout de chaîne, sur le secteur associatif, surtout si cela conduit à la fin de la continuité des politiques publiques. En effet, nous mesurons d’autant mieux dans le contexte actuel que cette continuité est le fondement de notre République égalitaire et solidaire.

C’est l’image protectrice et impartiale de l’État qui est menacée. On peut toujours expliquer que ce sont les conseils généraux qui, dans certains départements, n’assument plus leur charge de droit commun au titre de l’aide sociale à l’enfance, il reste que cette politique ne trouve plus de concrétisation.

L’accueil temporaire a, comme son nom l’indique, une vocation temporaire : sa durée ne peut, en principe, excéder six mois. La collectivité est le partenaire des organismes d’accueil qui prennent en charge les plus démunis, les plus fragiles, ceux qui risquent de rester sur le bord du chemin. Il s’agit d’une action d’urgence, destinée à maintenir la dignité de personnes en grande précarité et à prévenir leur basculement dans l’exclusion.

Sans méconnaître la nécessité du redressement des comptes publics, je souhaite savoir quels garde-fous l’État compte instaurer face à ces situations de rupture qui, rendues encore plus nombreuses du fait du recul de certaines collectivités territoriales, risquent de conduire vers l’exclusion un grand nombre de nos concitoyens et, par suite, de les radicaliser dans leur sentiment que la République ne les reconnaît plus.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget

Madame Gillot, vous avez interrogé Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité sur la prise en charge des femmes avec enfants de moins de trois ans en situation de grande précarité. Mme Pinel souhaite vous assurer de son engagement personnel en faveur de l’hébergement et de l’accès au logement des personnes sans abri ou mal logées, quelle que soit leur situation, et de la grande importance que le Gouvernement accorde à cette politique.

La priorité donnée aux femmes avec enfants de moins de trois ans repose sur une articulation très claire des compétences de l’État et des conseils généraux : si l’État assume, au titre de l’aide sociale, la charge des familles sollicitant un accueil dans un centre d’hébergement et de réinsertion sociale, le département a, quant à lui, des compétences spécifiques de droit commun au titre de l’aide sociale à l’enfance, l’ASE.

Le service de l’ASE a pour mission d’apporter un soutien matériel, éducatif et psychologique aux mineurs, à leur famille, aux mineurs émancipés et aux majeurs âgés de moins de vingt et un ans confrontés à des difficultés sociales susceptibles de compromettre leur équilibre. Le département doit, en outre, disposer de structures d’accueil pour les femmes enceintes et les mères avec leurs enfants. Par ailleurs, l’ASE prend également en charge les femmes enceintes et les mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans qui ont besoin d’un soutien matériel et psychologique, notamment parce qu’elles sont sans domicile.

Depuis quelques mois, nous constatons un désengagement de certains conseils généraux dans la prise en charge de ce public vulnérable, justifié par des contraintes budgétaires. Dans le cadre du contrôle de légalité, le préfet du Val-d’Oise a formé devant le tribunal administratif un recours contre la décision du conseil général de ne pas appliquer la législation relative à l’hébergement des femmes enceintes et des mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans.

Par ailleurs, je tiens à l’affirmer, le dispositif d’aide au logement temporaire, dit « ALT1 », cofinancé à parité par l’État et les organismes de protection sociale - la Caisse nationale des allocations familiales - et dont l’objectif est de couvrir les frais engagés par les organismes qui mettent des logements à disposition des personnes privées de domicile stable, n’est aucunement remis en cause. La dépense à la charge de l’État, qui s’élève à 39, 2 millions d’euros en 2015, est maintenue tant au niveau national que dans le Val-d’Oise.

Ce dispositif doit cependant être distingué de l’allocation de logement temporaire, dispositif facultatif mis en œuvre par le conseil général du Val-d’Oise pour soutenir les associations et les centres communaux d’action sociale qui gèrent des structures accueillant des personnes démunies.

En ce qui concerne le choix du conseil général de mettre fin au versement de cette allocation, le Gouvernement regrette, comme vous, madame la sénatrice, l’absence de concertation en amont d’une décision lourde de conséquences pour les ménages en situation de grande précarité vivant dans le département.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

Monsieur le secrétaire d’État, votre réponse est tout à fait argumentée. C'est vrai, l’ALT est une politique facultative décidée par le conseil général. Mais le retrait de la subvention permettant d’alimenter l’ALT conduit, par un effet de domino, à empêcher l’association Espérer 95 de poursuivre l’accompagnement social qu’elle assume dans le cadre de l’hébergement d’urgence des femmes et des enfants tel que prévu par la loi.

Je sais que le préfet du Val d’Oise est extrêmement attentif au respect de la loi et à la mise en relation des partenaires qui doivent concourir à son application. Cependant, je continue d’alerter sur le problème qui est le nôtre aujourd’hui, notamment pour maintenir la cohésion sociale et donner l’assurance aux populations connaissant les plus grandes difficultés que la République se préoccupe d’elles. Souvent, cette charge revient à des associations qui, malheureusement, sont aujourd'hui privées de ressources.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Michel Houel, auteur de la question n° 963, adressée à Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Houel

La loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite « loi ALUR », prévoit des évolutions significatives dans différents domaines du logement mais aussi en ce qui concerne l’instruction du droit des sols.

Parmi les nombreuses mesures annoncées, l’État, pour des raisons budgétaires, a décidé de supprimer, à partir du 1er juillet 2015, l’appui aux communes de moins de 10 000 habitants actuellement assuré par les DDT, les directions départementales des territoires.

Ainsi, les communes vont devoir mettre en œuvre les moyens nécessaires pour parvenir, d’une manière ou d’une autre, à reprendre à leur compte cette mission : soit en instruisant elles-mêmes la demande, qui appelle une vraie compétence technique ; soit en déléguant cette compétence à une autre commune ou à un EPCI ; soit encore en la confiant à une agence départementale, sachant que l’instruction des autorisations d’urbanisme ne peut être réalisée par un bureau d’études.

Les petites communes ne disposent pas des moyens qui leur permettraient d’instruire elles-mêmes les demandes sur une matière très complexe. Bien souvent, seules les DDT – qui font très bien leur travail – sont à même de leur rendre ce service. Le risque est donc d’aboutir à la délivrance de permis tacites.

Cette évolution, qui marque le désengagement de l’État, engendre un transfert de charges financières non négligeable, qui vient s’ajouter à la baisse drastique des dotations aux collectivités locales et aux coûts supplémentaires engendrés par la mise en œuvre obligatoire des nouveaux rythmes scolaires. Les collectivités n’ont pas de « trésor caché » sur lequel on pourrait prélever sans dommage !

Si l’État, monsieur le secrétaire d'État, n’accepte pas de revenir sur une décision pénalisante pour les communes rurales, je ne vois qu’une solution : supprimer la gratuité du permis de construire et en fixer le prix à un certain pourcentage du coût de la construction.

La formule que je vous propose aujourd’hui permettrait d’assurer une véritable égalité entre les territoires et une transparence financière vis-à-vis des contribuables qui, de toute façon, auront à assumer ce transfert de charges.

Je saurais donc gré au Gouvernement de bien vouloir engager une réflexion sur cette proposition.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget

Monsieur le sénateur, vous interrogez Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité sur les évolutions apportées par la loi ALUR concernant l’instruction du droit des sols.

L’article 134 de cette loi prévoit que la mise à disposition des services de l’État pour l’instruction des actes d’urbanisme sera réservée, à compter du 1er juillet 2015, aux seules communes compétentes appartenant à des établissements publics de coopération intercommunale de moins de 10 000 habitants, ou, si l’EPCI est compétent en matière d’urbanisme, aux seuls EPCI de moins de 10 000 habitants, la capacité des intercommunalités à assumer ces missions s’étant significativement renforcée. Il n’est donc pas question d’abandonner les communes ou les EPCI dont la population se situe en dessous de ce seuil.

Je souhaite par ailleurs souligner qu’il ne s’agit pas, en réalité, de l’abandon d’une mission de la part de l’État, mais d’une réorientation de celle-ci vers un « nouveau conseil aux territoires » – le NCT – ciblé sur l’appui à l’émergence de projets, l’aide à la gestion de situations difficiles ou imprévues, le portage de politiques prioritaires de l’État qui doivent s’inscrire sur le territoire, ou encore le concours en termes d’organisation de la sécurité des ouvrages d’art.

La généralisation de l’intercommunalité comme la création du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, également effectives depuis le 1er janvier 2014, ont d’ailleurs facilité cette évolution.

Par ailleurs, il est important de rappeler que l’instruction des actes d’urbanisme est une compétence des collectivités territoriales. Si certains services de l’État étaient jusqu’à présent mis à disposition des collectivités pour les aider à instruire les actes, le maire, ou le représentant de l’intercommunalité, demeurait bien le signataire de l’acte.

Comme vous le rappelez, le code de l’urbanisme précise la liste des services habilités à instruire les actes d’urbanisme. Dans une instruction ministérielle du 3 septembre 2014 relative aux missions de la filière d’application du droit des sols dans les services de l’État et aux mesures d’accompagnement des collectivités locales, il est clairement précisé que, en l’état actuel des textes, une commune ne peut pas confier l’instruction des actes d’urbanisme à des prestataires privés.

La mutualisation de l’ingénierie au niveau intercommunal est la solution la plus adaptée pour répondre aux difficultés que vous signalez. C’est la solution préconisée dans l’instruction du 3 septembre 2014 précitée. En effet, la dissémination des moyens à l’échelle de chaque commune ne paraissait pas judicieuse.

Au-delà de l’aspect financier, la mutualisation permet d’assurer la prise en compte des préoccupations locales tout en capitalisant l’expérience et le savoir-faire avec un service d’instruction dédié au niveau intercommunal. Le maire reste par ailleurs signataire des actes.

Enfin, il n’est pas possible de faire payer les demandeurs des autorisations d’urbanisme, car cela dérogerait au principe – inscrit dans notre droit – suivant lequel l’instruction des autorisations d’urbanisme est considérée comme un service public administratif.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Houel

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de ces précisions. Il est évident que l’on ne peut s'engager aveuglément dans un tel bouleversement. Il reste que, pour l’avoir moi-même appliquée dans ma communauté de communes, je préconise la mutualisation. Il faudra bien que, in fine, quelqu’un supporte le coût de l’instruction du droit des sols…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 956, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Monsieur le secrétaire d'État, j’appelle une nouvelle fois l’attention du Gouvernement sur l’urgence qu’il y a à s’occuper des usurpations de plaques d’immatriculation, et particulièrement de ce que l’on appelle les « doublettes ».

En 2010, 5 079 usurpations de plaques étaient recensées. Ce chiffre a été multiplié par plus de trois en 2012, avec 17 479 délits !

Sur ces quelque 17 000 infractions, 11 060 demandes de réimmatriculation ont été effectuées par les automobilistes, alors que la procédure n’était alors pas vraiment connue. Celle-ci constitue la seule aide réelle pour les victimes qui ont réussi à prouver leur innocence, mais elle ne règle pas un phénomène que les sociétés d’assurance évaluent à 400 000 cas par an, monsieur le secrétaire d'État ! Les réimmatriculations à la suite d’une doublette reflètent l’ampleur croissante du phénomène qu’il nous faut constater.

J’en veux pour preuve la facilité déconcertante avec laquelle un magazine automobile a pu faire reproduire le numéro d’immatriculation des véhicules officiels du Président de la République ou de Bernard Cazeneuve par plusieurs revendeurs de plaques.

Plus grave, l’enquête sur les frères Kouachi a récemment révélé que les tueurs avaient utilisé une « doublette parfaite » du véhicule d’un habitant de Lyon.

Si, depuis ma dernière intervention sur ce sujet en mai 2013, une réflexion a été menée entre les directions ministérielles chargées de ce dossier, le Défenseur des droits et des associations de défense des conducteurs, les conclusions auxquelles sont parvenus ces travaux n’ont malheureusement pas été suivies d’effets et n’ont pas trouvé, en particulier, de traduction législative.

J’aimerais, monsieur le secrétaire d'État, connaître les chiffres officiels de ces infractions en 2013 et, si possible, en 2014. Leur croissance continue a conduit l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions, l’ANTAI, à recruter, il y a huit mois, quinze fonctionnaires à temps plein uniquement pour éviter l’envoi de PV injustifiés quand les « doublettes » se révèlent trop grossières.

Ce surcoût, que vous ne pouvez ignorer, monsieur le secrétaire d'État, ne peut continuer de croître sans que l’État agisse.

Comptez-vous combler le vide juridique actuel et suivre le Défenseur des droits quand il recommande de réglementer la profession de fabricant de plaques ?

Allez-vous sécuriser la fabrication des plaques en développant, par exemple, des techniques peu coûteuses comme l’intégration d’un numéro pour un contrôle optique ? Enfin, le ministère va-t-il se décider à encadrer la vente libre d’appareils que des particuliers peuvent trouver aussi facilement sur internet ?

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser Bernard Cazeneuve de son absence ; vous l’interrogez sur une question bien connue, sur laquelle je voudrais vous apporter les éléments de réponse qu’il m'a chargé de vous donner.

Tout d'abord, je souhaite rappeler le droit en vigueur.

Circuler ou mettre en circulation un véhicule muni d’une plaque avec un numéro d’immatriculation attribué à un autre véhicule dans des circonstances qui ont ou auraient pu entraîner des poursuites pénales contre un tiers est puni de sept ans de prison et de 30 000 euros d’amende.

S’ajoute à cela un retrait de six points sur le permis de conduire et, à titre de peine complémentaire, la possibilité de le suspendre ou de l’annuler pour une durée de trois ans maximum.

L’auteur des faits risque également la confiscation de son véhicule.

Ces dispositions s’appliquent aux « doublettes parfaites », qui consistent à usurper une plaque d’un véhicule en tous points identique, comme aux « doublettes imparfaites », pour lesquelles l’usurpation du numéro d’immatriculation porte sur un modèle de véhicule différent.

Les usurpations de numéros d’immatriculation de véhicules constituent un phénomène qui a fait l’objet de différentes mesures visant notamment à mieux accompagner les victimes dans leurs démarches.

L’ensemble de la procédure ainsi que les coordonnées des services devant être contactés par les victimes de « doublettes » sont présentés sur le site service public.fr.

Une aide à la rédaction du formulaire de contestation est par ailleurs disponible depuis plusieurs mois sur le site de l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions, et un dispositif de pré-plainte en ligne permet à présent de fournir de premiers éléments aux services de police ou aux unités de gendarmerie territorialement compétents.

Le contrôle des « doublettes imparfaites » réalisé par l’ANTAI depuis novembre 2013 est totalement automatisé et n’a pas nécessité le recrutement de nouveaux agents. Il a permis de diminuer fortement le nombre d’avis de contravention envoyés à des titulaires de certificat d’immatriculation n’ayant commis aucune infraction.

Par ailleurs, les directions générales de la police et de la gendarmerie ont transmis des directives à leurs services et unités afin que les plaintes liées aux « doublettes parfaites », non détectables par l’ANTAI, soient systématiquement enregistrées et renseignées au sein du fichier des véhicules et des objets signalés.

En 2013, 22 164 plaintes ont été déposées auprès des forces de l’ordre, et l’on a compté 17 840 réimmatriculations de véhicules.

Si l’on ne peut se satisfaire de ces chiffres, je note néanmoins qu’en 2014, sur les dix premiers mois de l’année, le nombre de faits signalés pour usurpation de numéro d’immatriculation connaît, après plusieurs années d’augmentation, un premier recul, de près de 10 %.

Mais l’ambition du Gouvernement ne s’arrête pas à cela. Ainsi, une sécurisation accrue pourrait passer par un contrôle des conditions de délivrance des plaques ou par l’apposition de marques sur les plaques ou les véhicules.

Les contraintes de l’ensemble des acteurs doivent toutefois être pleinement prises en compte, notamment en termes de coût et de charge administrative, d’autant que les solutions mises en œuvre à l’étranger, notamment le marquage des plaques par les services de l’État, ne peuvent pas nécessairement être transposées telles quelles en France dans la mesure où, dans leur majorité, les demandes d’immatriculation sont aujourd’hui traitées en dehors des préfectures.

Ces différentes pistes devront faire l’objet d’une concertation avec les professionnels du secteur.

Comme vous l’indiquiez lors d’une précédente question orale, l’une des motivations des auteurs de ces actes réside dans la volonté de se soustraire aux contrôles automatisés. Sur ce sujet particulier, si, depuis 2009, le contrôle par l’arrière du véhicule a permis d’étendre ce dispositif aux deux-roues motorisés, il a également pu constituer un frein à l’identification des auteurs de doublettes.

D’ores et déjà, dans le cadre de la modernisation du parc des radars, deux modèles de radar « double face » sont en cours d’expérimentation.

Installés dans une ou deux cabines, ces équipements détectent et photographient de face et de l’arrière les véhicules circulant au-dessus de la vitesse limite autorisée. Un premier modèle est testé depuis le 12 décembre dans le Rhône, sur la départementale 301. Trois autres appareils seront déployés au début de l’année 2015. En fournissant une photo du conducteur et des plaques montées sur le véhicule, cette technologie facilitera les investigations des forces de l’ordre et participera à la lutte contre les usurpations de numéro d’immatriculation, et plus particulièrement contre les « doublettes parfaites ».

Vous l’aurez compris, monsieur le président, les doublettes évoquées ici n’ont rien à voir avec la pétanque !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

M. le président. Cela ne m’avait pas échappé, monsieur le secrétaire d’État !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Monsieur le secrétaire d’État, votre réponse s’inscrit parfaitement dans le sens de ma question : il a donc bien fallu affecter un certain nombre de fonctionnaires - quinze ou trente-cinq, peu importe - au traitement de ces cas d’usurpation, qui ne cessent d’augmenter, puisque, alors qu’on en recensait 17 000 en 2012, nous en étions à plus de 22 000 en 2013 !

Je note que la réponse que vous m’avez lue n’évoque pas le contrôle de ces machines que l’on trouve désormais sur internet.

Surtout, vous avez affirmé d’emblée que la question était bien connue. Ce n’est d’ailleurs pas moi qui l’ai posée pour la première fois en 2013 ; c’est le Défenseur des droits qui a soulevé le problème. Nous sommes aujourd'hui en 2015, et rien n’a encore été fait, alors que le phénomène concerne non plus seulement ceux qui veulent échapper aux radars en utilisant de fausses plaques, mais aussi le grand banditisme et le terrorisme, comme nous en avons eu la preuve tout récemment.

Les frères Kouachi, qui ont d’ailleurs laissé leur carte d’identité dans le véhicule qu’ils ont utilisé, avaient autre chose en tête que la volonté d’échapper à une amende ! Le problème est donc très grave.

Des systèmes ont été mis en place par d’autres pays. Lorsque je m’interroge sur leur adoption par la France, on me rappelle à chaque fois les contraintes des différents acteurs. Toutefois, les règles de droit que vous avez citées, monsieur le secrétaire d’État, devraient déboucher sur un encadrement plus strict de la fabrication des plaques d’immatriculation.

Je l’ai dit, on peut se faire faire une plaque d’immatriculation sans aucune difficulté. Selon moi, il n’est pas normal que ceux qui sont théoriquement habilités à fabriquer des plaques d’immatriculation n’effectuent aucune vérification, ne réclamant ni permis de conduire ni carte d’immatriculation. Les dispositifs adoptés ailleurs et, en particulier, la mise en place d’une puce ou d’un système de lecture optique, pourraient permettre aux forces de l’ordre de repérer plus facilement les infractions, sans attendre qu’une amende soit envoyée au domicile d’une personne n’ayant jamais conduit dans le département dans lequel l’infraction a été commise.

Il faut donc faire de la prévention. Or, pour le moment, on se contente de constater, en essayant d’alléger un peu – heureusement ! – le sort des automobilistes dont la plaque d’immatriculation a été usurpée, en mettant à disposition sur internet un certain nombre d’informations. Ce que je réclame, comme d’autres, c’est que le Gouvernement prenne en charge en amont ces usurpations, et d’une façon plus efficace !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

Monsieur le président, je souhaite faire une mise au point concernant le scrutin n° 89 sur l’ensemble de la proposition de loi organique portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy : j’ai en effet été déclarée comme ayant voté pour, alors que je souhaitais m’abstenir, tandis que, à l’inverse, mon homonyme, M. Jacques Gillot, a été déclaré comme s’étant abstenu, alors qu’il souhaitait voter pour.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Acte est donné de cette mise au point, madame Gillot. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures cinq, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.