Intervention de Jacques Mézard

Réunion du 3 février 2015 à 14h30
Accords commerciaux entre l'union européenne le canada et les états-unis — Adoption d'une proposition de résolution européenne dans le texte de la commission

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

C’est ainsi que l’accord économique et commercial global entre l’Union européenne et le Canada a pu être conclu sans que nous en soyons informés, ni même consultés du reste, le Parlement national n’intervenant in fine que pour le ratifier.

Il faut dire que, aujourd'hui, de célèbres élus veulent supprimer nombre de parlementaires. Cela devient quasiment une manie ! §

Ne restent aux parlementaires nationaux, pour peser dans ces grands arrangements, que des résolutions. C’est donc une bonne chose qu’elles existent.

La proposition de résolution européenne que nous examinons aujourd'hui s’articule autour de deux axes : le premier concerne le recours aux procédures d’arbitrage dans le règlement des différends entre investisseurs et États, le second, la « publicisation » des négociations.

Nous le savons, surtout ceux qui, parmi nous, ont une formation juridique, ces tribunaux arbitraux sont couramment inclus dans les accords commerciaux internationaux. Ils le sont même parfois à la demande des institutions européennes. Ces systèmes d’arbitrage, qui se substituent aux tribunaux des États, présentent, nous le savons aussi, de nombreuses faiblesses : risques de conflits d’intérêts, partialité au profit des investisseurs et au détriment des États, opacité de la procédure.

Or le recours à l’arbitrage apparaît dans le CETA, tel qu’il a été finalisé à l’automne. Ses promoteurs nous assurent que des « garde-fous » – le mot convient ! – ont été introduits dans le texte final. Mais sont-ils suffisants, s’agissant des modalités de composition, de saisine, de décision et de contrôle du processus de coopération réglementaire ?

Le CETA, bien qu’il relève de négociations distinctes, apparaît largement comme une préfiguration du TTIP.

Lors des discussions du second accord, en 2014, un front franco-allemand semblait s’être constitué au sein de l’Union européenne contre l’arbitrage. Les Allemands gardent en effet en mémoire le contentieux qui les oppose à Vattenfall, notamment au sujet de l’arrêt de leur programme nucléaire. Nous avons cependant constaté une inflexion ces dernières semaines.

Le présent texte propose donc un encadrement strict du processus d’arbitrage, concernant notamment la transparence des débats – la « transparence », encore un mot très à la mode ! –, la publicité des actes, l’indépendance et l’impartialité des arbitres ou, à défaut, le recours à un mécanisme de règlement interétatique des conflits. Nous aurions également pu ajouter l’introduction d’un mécanisme d’appel ou la pénalisation des plaintes infondées, vu le coût de telles procédures.

Bien que la confidentialité des négociations soit la norme dans ce genre de tractations, le secret qui les entoure fait peser le soupçon d’un accord qui, se faisant loin des peuples, se nouerait contre eux. La proposition invitant le Gouvernement à permettre au Parlement d’avoir un accès aux documents de la négociation identique à celui du Parlement européen est donc tout à fait opportune.

La nouvelle Commission européenne a procédé à une timide ouverture en s’engageant à publier certains documents sur l’état d’avancement des négociations. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez vous-même réorganisé, ces derniers mois, le comité de suivi stratégique des sujets de politique commerciale, que vous avez réuni en fin d’année. Nous vous invitons à informer plus régulièrement nos assemblées – si elles existent encore à l’avenir !

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