Intervention de Jean-Patrick Courtois

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 4 février 2015 : 1ère réunion
Projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2014-1543 du 19 décembre 2014 portant diverses mesures relatives à la création de la métropole de lyon — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Jean-Patrick CourtoisJean-Patrick Courtois, rapporteur :

Créée le 1er janvier 2015, en application de l'article 72 de la Constitution, par la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (Maptam), la métropole de Lyon est une collectivité territoriale à statut particulier, issue de la fusion de la communauté urbaine de Lyon et du département du Rhône dans les limites du périmètre intercommunal. Elle exerce par conséquent sur son territoire les compétences du département et celles anciennement attribuées à la communauté urbaine. Ne demeurent ainsi sur l'aire métropolitaine que deux échelons de collectivités, la métropole et les communes ; le département du Rhône subsiste hors ce territoire.

Le législateur a élaboré pour cette nouvelle collectivité territoriale un statut spécifique, unique sur le territoire national. Il a également accordé au Gouvernement une habilitation législative pour adapter le droit en vigueur à cette création. Trois ordonnances ont été publiées sur ce fondement. Le projet de loi que nous sommes appelés à examiner ratifie celle du 19 décembre 2014 portant diverses mesures relatives à la création de la métropole. La deuxième, relative aux règles budgétaires et financières, a été envoyée à la commission des finances et est discutée en parallèle. La troisième, relative aux modalités d'élection des conseillers métropolitains, n'est pas encore inscrite à l'ordre du jour parlementaire.

La présente ordonnance comporte un ensemble de dispositions très diverses. Certaines sont de simples adaptations de l'organisation territoriale à la création de la métropole ; d'autres prévoient des dispositions dérogatoires au droit commun ; d'autres, enfin, de portée générale, assurent un fonctionnement harmonieux de la nouvelle collectivité.

L'article 1er dispose que l'évolution des limites d'une collectivité territoriale est sans incidence sur celles des circonscriptions administratives de l'État : il revient à celui-ci d'apprécier si une telle évolution s'accompagne ou non d'une modification des limites de ses circonscriptions administratives. En l'espèce, il a choisi de conserver ses circonscriptions dans leurs limites antérieures à la création de la métropole, en vertu de l'article 2, qui maintient l'unité du département du Rhône dans ses anciennes limites, en tant que circonscription déconcentrée des services de l'État.

D'autres articles organisent le partage des outils nécessaires à la métropole pour assumer les compétences exercées habituellement par un département : ainsi en est-il du financement du placement des mineurs étrangers isolés (article 7), de la politique de l'habitat (articles 14 et 15), ou encore de l'élaboration conjointe du plan départemental-métropolitain des espaces, sites et itinéraires relatifs aux sports de nature (article 16).

En matière de mutualisation de services ou de structures, le choix a été fait de maintenir un syndicat mixte unique de transports, le fameux SYTRAL N (articles 20 et 21). D'autres instances sont préservées à l'échelle de l'ancien département du Rhône avec une représentation de la métropole : citons l'association départementale d'information sur le logement (article 24), la commission de conciliation en matière d'élaboration de schémas de cohérence territoriale, de schémas de secteur, de plans locaux d'urbanisme et de cartes communales (article 29), la commission consultative d'accueil des gens du voyage du Rhône (article 26), le comité départemental des retraités et personnes âgées (article 33), ou encore le conseil de famille des pupilles de l'État du Rhône (article 34).

L'article 32 pose le principe d'une maison départementale des personnes handicapées (MDPH) commune à la métropole de Lyon et au département du Rhône. Afin de préserver l'autonomie et la confidentialité de l'attribution des prestations relevant de chaque collectivité, deux formations se réuniront en alternance : l'une consacrée à l'instruction des demandes du département, l'autre à celles de la métropole. Alors que de nombreux élus souhaitaient la création d'une MDPH propre à chaque collectivité, l'État a souhaité limiter la création de structures au profit d'une mutualisation des diverses commissions départementales existantes.

L'ordonnance prévoit en revanche des structures spécifiques à chaque collectivité pour des instances aux responsabilités d'inégale importance. L'article 38 fixe la création, à côté de l'actuel OPAC du Rhône rattaché au département, d'un nouvel office public de l'habitat (OPH) rattaché à la métropole. L'article 17 autorise l'adhésion d'un établissement public d'aménagement et de gestion de l'eau (EPAGE), constitué sous la forme d'un syndicat mixte ouvert, à un établissement public territorial de bassin (EPTB). Cette disposition mériterait d'être généralisée à l'ensemble des EPAGE.

Le champ de l'habilitation a été respecté. Si certaines dispositions n'entrent pas stricto sensu dans les limites fixées par le Parlement, une telle création justifie l'adoption de dispositions que le législateur ne pouvait prévoir lors du débat parlementaire, et qui transposent les principes généraux établis au fil des lois de décentralisation.

Tout en approuvant que l'État conserve, pour certains de ses services, le cadre de l'ancien département du Rhône, afin de ne pas multiplier des structures déconcentrées, je regrette que la création de la métropole n'ait pas été l'occasion d'adapter le ressort territorial à d'autres cartes administratives. Il en est ainsi de la carte judiciaire. Notre collègue Yves Détraigne, rapporteur pour avis de notre commission pour les crédits affectés à la justice judiciaire et à l'accès au droit, a examiné cette question lors d'un déplacement, le 18 novembre dernier, au tribunal de grande instance de Lyon. Il a estimé que plusieurs scénarios étaient possibles, dont celui d'« expérimenter à l'échelle du territoire du département du Rhône, le tribunal de première instance qui serait installé à Lyon, mais compterait un site détaché, celui de l'actuel TGI de Villefranche-sur-Saône », sous réserve de lui garantir une activité contentieuse suffisante. Une réflexion analogue semble nécessaire pour décider de l'évolution du ressort territorial des tribunaux de commerce de Lyon et de Villefranche-sur-Saône. Je regrette que le gouvernement privilégie le statu quo sur cette question.

Pour conclure, sous réserve de ces remarques et de trois amendements de précision, je vous invite à adopter le projet de loi de ratification.

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