Monsieur le président, mes chers collègues, à l’instar de nos collègues des groupes socialiste et CRC-SPG, la très grande majorité des membres du RDSE vous demande aujourd’hui, par cette proposition de loi, de prendre enfin vos responsabilités, madame la secrétaire d'État, en permettant aux conseils généraux de financer les prestations sociales dont ils ont la charge.
La réforme constitutionnelle de 2003, pilotée par Jean-Pierre Raffarin, devait parachever la décentralisation, dont, je le rappelle, la gauche a pris l’initiative en 1982.
Huit années plus tard, son application s’est en réalité traduite, dans les faits, par un recul historique des libertés locales, l’État ayant refusé de mettre en œuvre ses obligations, lesquelles sont pourtant inscrites dans la loi !
Certes, l’autonomie financière des collectivités territoriales est un principe constitutionnel, mais l’autonomie fiscale, qui est au cœur du principe même de libre administration, n’a jamais – hélas ! – été reconnue comme règle constitutionnelle.
La désastreuse suppression de la taxe professionnelle a achevé de mettre en pièces l’autonomie fiscale, déjà largement battue en brèche depuis 2002 par une succession de lois ôtant aux collectivités, en premier lieu aux départements, leurs outils d’intervention fiscale.
La contribution économique territoriale, qui nous avait été présentée comme un progrès pour nos libertés locales, a surtout contribué à complexifier la fiscalité locale et à réduire les ressources autonomes des départements. Leur pouvoir de modulation fiscale est ainsi passé de 36 % à 12 % !
Où est désormais l’autonomie ? Où sont les garanties financières que le Gouvernement nous promettait en cas de carence budgétaire ?
Madame la secrétaire d'État, qu’avez-vous à répondre aux affirmations de notre collègue député Gilles Carrez, qui a calculé que le coût de la suppression de la taxe professionnelle serait, en réalité, de 7 milliards d’euros en 2010, et non de 3, 9 milliards, comme l’annonçait le Gouvernement ? Comment l’État va-t-il financer ce surcoût sans l’imputer sur les collectivités ?
Cette régression est d’autant plus inacceptable que les départements sont soumis à un effet de ciseaux créé par des charges toujours plus lourdes et des ressources toujours plus rares.
Les transferts massifs de compétences et des personnels y afférents opérés depuis 2004 vers les départements n’ont jamais été accompagnés de la compensation intégrale et concomitante que la Constitution et la loi requièrent de l’État.
En 2010, vingt-sept départements sont au bord de la cessation de paiement ; l’an prochain, ils seront vraisemblablement quarante, peut-être cinquante, du seul fait de leur impossibilité de faire face à leurs charges.
Évidemment, le gel pour trois ans des dotations de l’État inscrit dans la loi de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 va encore assombrir les perspectives de l’ensemble des collectivités, aggraver la situation, en particulier pour celles d’entre elles qui ne bénéficieront pas du fonds national de garantie individuelle des ressources ou de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle.
Prenons l’exemple de la Seine-Saint-Denis, qui a été, en 2010, le premier département contraint de voter, en dépit de la loi, je le reconnais, un budget primitif déficitaire de 75 millions d’euros, soit le montant des compensations que l’État n’avait jamais versées !