Intervention de André Trillard

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 2 octobre 2012 : 1ère réunion
Convention du travail maritime de l'organisation internationale du travail — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de André TrillardAndré Trillard, rapporteur :

Monsieur le président, mes chers collègues, vous savez que l'Organisation internationale du travail (O.I.T.) a été fondée en 1919. Ses statuts ont été élaborés par la Commission de la législation internationale du travail, créée par la Conférence de la Paix, qui avait conclu le traité de Versailles mettant fin à la Première Guerre mondiale. La création de l'OIT découlait de l'idée que la paix durable et universelle à laquelle aspiraient les pays vainqueurs ne pouvait être assurée que par une meilleure justice sociale.

La France siégeait parmi les neuf pays composant la Commission ayant élaboré les statuts de l'OIT. Celle-ci est organisée de façon tripartite : ses organes exécutifs sont composés de représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs.

Le Bureau international du travail (B.I.T), secrétariat permanent de l'OIT, s'installa à Genève en 1920, et le Français Albert Thomas en fut le premier directeur général. L'OIT compte aujourd'hui 185 Etats membres et fait partie du système des Nations unies. L'ONU regroupe 193 membres, soit 8 de plus que l'OIT.

J'en viens maintenant à la convention qui nous est soumise aujourd'hui, adoptée à l'unanimité des membres de l'OIT en février 2006 à Genève.

Ce texte vise à substituer un texte unique et cohérent à 37 conventions adoptées de 1920 à 1996 et qui touchaient, à divers titres, au travail maritime.

Les deux premières conventions adoptées en 1920 portaient ainsi sur l'âge minimum requis pour embarquer et les indemnités de chômage en cas de naufrage.

La convention de 2006 a d'ores et déjà rempli les deux conditions préalables à son entrée en vigueur : sa ratification par 30 pays, représentant au moins 33 % du total de la jauge brute de la flotte marchande mondiale. Je précise qu'au 1er juillet 2012, la flotte marchande mondiale représentait près de 1 milliard de jauge brute, réparti en près de 48 000 navires de plus de 300 unités de jauge (chiffre minimum pour être considéré comme un navire de commerce).

Au sein de la flotte marchande mondiale, la Grèce arrive au 1er rang et la France au 25ème. Parmi les pays européens, la Grèce occupe également la 1ère place et la France la 8ème. Vous trouverez le détail de cette répartition dans mon rapport écrit.

S'agissant des personnels employés à bord des navires de commerce, auxquels s'applique le présent texte, ils sont estimés par l'OIT à 1,2 million. Les Français sont près de 14 000, répartis sur 299 navires.

La présente convention est particulièrement opportune, car le développement en volume de la flotte marchande internationale s'est accompagné d'une forte concurrence entre armateurs, qui a pesé sur les prix, et donc sur les conditions d'emploi des gens de mer. Le texte fixe des normes minimales en matière d'heures de travail et de repos, d'hébergement, de protection sanitaire, de soins médicaux et de sécurité sociale.

Il introduit la notion de « certification nationale », qui oblige chaque Etat l'ayant ratifié à ce que les navires battant son pavillon satisfassent aux critères de « travail décent » détaillés dans la convention, mais également que l'autorité de l'Etat du port puisse contrôler les navires. Par ailleurs, une procédure permet de recueillir les plaintes éventuelles, à bord comme à terre.

L'OIT a ainsi estimé que : « le système d'inspection et de certification du travail maritime est une grande avancée qui permet de faire face aux graves situations découlant de l'internationalisation des navires, et de l'incapacité de certains pays à veiller à ce que leurs navires répondent aux normes internationales de qualité. »

Une commission tripartite spéciale réunit des représentants des gouvernements des Etats ayant ratifié la convention et des représentants des armateurs et des gens de mer désignés par le conseil d'administration du B.I.T.. Mais cette instance peut également associer à ses délibérations, sans droit de vote, des représentants des gouvernements n'ayant pas ratifié la convention. Je précise qu'au 25 septembre 2012, 31 Etats, représentant 60 % de la jauge brute de la flotte marchande mondiale, ont ratifié la convention. Parmi les Etats ayant une flotte commerciale significative et qui ont ratifié, on relève la présence de Chypre, du Libéria, des Philippines, de la Pologne, de la Russie et de Singapour.

La possibilité pour les Etats n'ayant pas ratifié de participer aux discussions sur les normes applicables aux gens de mer témoigne d'un pragmatisme positif, puisqu'elle leur permet de connaître l'évolution des normes retenues par les Etats engagés par leur respect, et les implique de ce fait même. Il serait évidemment préférable, dans un monde idéal, que tous les Etats possédant une flotte marchande d'importance ratifient la présente convention, mais nous ne vivons pas dans un tel monde.

En conclusion, je vous suggère d'adopter le présent texte qui représente une réelle avancée pour les conditions de travail des gens de mer. Il convient donc que la France, par sa ratification, puisse participer aux travaux de la Commission tripartite chargée de suivre l'application concrète de ce texte.

Je vous propose également que son examen en séance publique se fasse en forme simplifiée.

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