Je vous remercie de votre invitation et du temps que vous consacrez au groupe EADS. J'en suis très honoré. EADS est un acteur industriel majeur en France et en Europe et, à ce titre, il me paraît important de vous présenter notre groupe aujourd'hui.
Avant toute chose, je souhaiterais dire mon respect et mon admiration pour les forces françaises, ce qu'elles font au Mali en ce moment même et surtout pour les soldats français qui sont tombés au combat. Permettez-moi de saluer la mémoire de mon camarade du deuxième Régiment étranger de parachutistes de la légion étrangère. J'ai sauté avec le 2ème REP à Calvi.
Je suis également d'accord avec ce que vous avez dit, avec peut être une légère réserve concernant le Premier ministre britannique, David Cameron. Je fais partie d'un groupe de conseillers autour du Premier ministre britannique, que je trouve à titre personnel beaucoup plus pro-européen qu'on ne le dit.
L'année dernière a été marquante pour EADS. La nouvelle gouvernance a été élaborée. Je ne parle pas de la succession des personnes qui s'est passée comme prévue, sans psychodrame, avec l'arrivée d'hommes issus de l'entreprise comme cela devrait toujours se passer.
S'agissant du projet de fusion avec BAE Systems, même s'il ne s'est finalement pas réalisé, je vous suis très reconnaissant du soutien que vous lui avez apporté. Vous êtes les seuls hommes politiques en Europe à avoir pris position publiquement en faveur de ce projet. Je vous en remercie.
Je souhaiterais maintenant vous présenter l'entreprise en soulignant trois caractéristiques clés. Premièrement, c'est une entreprise multinationale aux racines européennes, qui est une force dans les exportations de la France. Deuxièmement, c'est un maître d'oeuvre industriel qui, par ses grands programmes civils et militaires, entraîne le tissu industriel français. Troisièmement, c'est une entreprise duale capable de tirer parti de la « fertilisation croisée » des technologies et des activités civiles et militaires. Plus qu'aucune autre société, EADS est particulièrement concerné par l'Europe de la défense à laquelle votre commission consacre ses réflexions.
Les résultats de 2012 sont remarquables. Le chiffre d'affaires a augmenté de 10 % alors même que la croissance stagne et qu'il n'est pas certain qu'il y ait encore une reprise. EADS a été une des plus belles réussites industrielles en Europe dans la dernière décennie. La profitabilité de notre Groupe s'est améliorée, même si elle reste trop faible et insuffisante au regard de celle de nos concurrents américains. Nous devons encore améliorer notre résultat net afin de renforcer notre robustesse.
Grâce à sa croissance, EADS a été capable de créer de nombreux emplois dans les pays de sa base nationale. Cela est particulièrement vrai en France où EADS emploie aujourd'hui plus de cinquante-deux mille employés, ce qui représente 20 % de plus que lors de sa création en 2000.
Le projet de fusion entre EADS et BAE était une étape majeure dans notre stratégie, plus particulièrement pour nos activités de défense. Comme vous le savez, je me suis personnellement engagé dans ce projet. J'avais conscience, dès le départ, que nous prenions un risque important, mais que le jeu en valait la chandelle. C'était un moyen de réaliser en une seule fois le plan stratégique « Vision 2020 », lancé en 2008 par Louis Gallois afin d'équilibrer les activités d'Airbus et les autres activités et d'élargir notre empreinte géographique.
Mais les choses ne se sont pas déroulées comme nous l'espérions. L'opération aurait sans aucun doute renforcé EADS et à travers elle toute l'industrie aéronautique et la défense européennes. Quoi qu'il en soit, après quelques mois de négociations, il est apparu que les conditions requises n'étaient pas remplies et j'ai préféré, avec mon ami Ian King, président exécutif de BAE Systems, arrêter ce projet malgré son grand intérêt pour nos deux entreprises.
Le projet a échoué parce que l'environnement politique était trop complexe. Nous n'avons pas pu bénéficier d'une conjonction de paramètres qui aurait permis l'alignement de trois gouvernements européens. Sur les trois, l'un était opposé. Les deux autres ont été positifs, mais leur soutien n'a pas été suffisamment décisif pour infléchir la position du premier. Nous étions convaincus qu'à un moment où l'Europe est en difficulté, ce projet serait accueilli plus favorablement. Quoi qu'il en soit, cet événement est derrière nous.
L'échec du projet de fusion nous conduit à réexaminer la vision stratégique d'EADS et proposer de nouvelles directions ainsi qu'une nouvelle gouvernance pour y conduire. Ce réexamen progresse et devrait aboutir d'ici quelques mois. Les paramètres financiers sont déterminants : aucune entreprise ne peut avoir une stratégie de long terme soutenable sans faire de profits. C'est un prérequis pour être capable de faire de la recherche et du développement et renforcer notre compétitivité.
Sur la question de savoir si nous aurons une autre occasion, c'est difficile à dire. Un tel alignement de planètes ne se produit pas tous les jours. Néanmoins nous avons pu bénéficier d'éléments de gouvernance que nous avions élaborés pour ce projet de fusion. Daimler et Lagardère voulaient sortir depuis longtemps du capital d'EADS. Je rappellerai que leur soutien a été déterminant lors de la création d'EADS et que cette entreprise n'aurait pas existé aujourd'hui sans leur concours.
En décembre, nous sommes parvenus à un accord que nous n'aurions jamais estimé possible l'été dernier. En ce sens, au moins, le projet de fusion BAE System/EADS a porté des fruits. L'accord multilatéral signé entre les gouvernements français, allemand et espagnol ainsi que Lagardère et Daimler marque le coup d'envoi d'une nouvelle gouvernance et d'une nouvelle structure actionnariale pour l'entreprise, une sorte de « reset » qui est sans aucun doute le changement le plus important depuis la création de l'entreprise il y a douze ans.
Bien que le gouvernement allemand achète 12 % d'EADS, l'influence des gouvernements sur la gouvernance de l'entreprise sera moindre qu'avant. Le pacte d'actionnaires actuel sera dissous et l'entreprise disposera d'un conseil d'administration normal. Cette amélioration nous permet de clarifier les droits des Etats et nos obligations.
EADS va devenir une entreprise « normale ». Les membres du conseil d'administration seront proposés par le comité des nominations, formé au sein du conseil lui-même. Ce comité des nominations garantira que chaque personne nommée est celle qui correspond le mieux au profil du poste. Aucun actionnaire ne pourra nommer un membre du conseil d'administration directement ou indirectement. Au lieu d'avoir un pacte d'actionnaires compliqué, notre nouvelle structure de gouvernance rendra l'intervention des trois gouvernements similaire à celle qu'ils auraient avec une action de contrôle, une golden share par exemple, pour prévenir toute opération de prise de contrôle hostile.
Les intérêts légitimes de sécurité des gouvernements seront sauvegardés à travers des accords particuliers de sécurité et des mécanismes prévenant les OPA hostiles. C'est une amélioration, puisque de telles transformations clarifient les droits des Etats et les obligations d'EADS, plus particulièrement en matière de défense, sans placer en conflit d'intérêt les actionnaires et les parties prenantes (stakeholders).
Le mois dernier, j'ai proposé aux autorités françaises que le Général Bernard Thorette, Anne Lauvergeon et Jean-Claude Trichet soient nommés au conseil d'administration de la filiale qui détiendra les actifs de sécurité français. Je suis convaincu que ces nominations sont les bienvenues. Sur le long terme je ne vois pas la nécessité pour la France de rester actionnaire. S'il s'agit de préserver ses intérêts stratégiques, elle peut y parvenir d'une autre manière.
Le changement de gouvernance va nous permettre aussi d'accéder plus facilement à certains marchés. Aux Etats-Unis en particulier, nous étions jusqu'ici suspectés d'être une société sous contrôle étatique. Les réactions ont donc été positives à l'annonce de la nouvelle gouvernance.
C'est un changement pour notre société qui doit modifier sa gouvernance afin de devenir plus forte, plus rapide dans ses décisions tout en restant un leader toujours plus compétitif sur des marchés aéronautique et de défense. L'accord sera soumis à l'assemblée générale extraordinaire des actionnaires le 27 mars.
Pour ce qui est de la stratégie, soyons lucides : les dépenses de défense vont au mieux ralentir en France, en Europe et même aux Etats-Unis dans les prochaines années. On pourrait être surpris par une telle tendance quand on sait que d'autres pays, en dehors de l'OTAN, augmentent de façon considérable leurs dépenses, en créant de nouvelles menaces et que des moyens militaires nous serons de plus en plus nécessaires à des fins de stabilisation, comme le montre le Mali.
Personne ne peut échapper à la nécessité de s'adapter. Cela soulève la question de savoir si nous ne devrions pas nous concentrer dans le long terme sur nos activités commerciales et en particulier les avions et les hélicoptères.
Les exportations en matière de défense peuvent aider, c'est certain ; mais aucune industrie de défense ne peut prospérer à l'export si elle ne s'appuie pas sur une solide base domestique. C'est le coeur du problème : si nous voulons garder des capacités industrielles clefs en Europe, nous n'éviterons pas une restructuration des industries de défense. C'est ce à quoi nous devons nous préparer et c'est la raison pour laquelle nous entrons dès maintenant dans ce que j'ai appelé « EADS 2.0 ».
Je voudrais remercier les gouvernements français, allemand et espagnols pour avoir eu la volonté et la sagesse de trouver un accord sur la gouvernance qui donne un nouveau départ et apporte à EADS les outils pour être plus fort et plus compétitif dans le futur.
Pour ce qui est de la relation entre la France et EADS, je voudrais préciser le lien futur entre l'Etat français et l'entreprise. Je voudrais souligner combien notre partenariat est crucial l'un pour l'autre : la France est un pays clé pour les activités de défense d'EADS et EADS est un des acteurs essentiels pour la défense de la France. En effet, EADS contribue à la force de dissuasion nucléaire française, puisqu'elle fournit notamment les missiles M51 et ASMPA développés, produits et soutenus respectivement par ASTRIUM et MBDA.
Nous sommes fiers de livrer le premier A400M avant le Bourget à l'armée de l'air française avec un premier contrat de soutien qui vient d'être signé il y a à peine quelques jours. Nous avons proposé l'Airbus A330-200 MRTT pour le ravitaillement en vol à l'armée de l'air française. Nous avons également commencé les livraisons d'hélicoptères NH-90 à la fois à la marine et à l'armée de terre. Depuis trois ans, nous sommes le premier fournisseur industriel du ministère de la défense français, ce que M. Laurent Collet-Billon a confirmé à l'occasion de sa conférence de presse mercredi dernier, lorsqu'il a présenté les résultats de la DGA.
Les opérations au Mali démontrent l'importance de nos systèmes d'armes pour conduire les missions d'aujourd'hui. Les hélicoptères Tigre font la preuve de leur efficacité, comme ils l'ont déjà fait en Libye et en Afghanistan. Les drones Harfang et les satellites d'observation de la terre, tels qu'Hélios 2 B et Pléiades sont également des capacités critiques dans l'opération Serval au Mali.
Les leçons apprises en opérations extérieures renforcent notre détermination à livrer l'A400M avant l'été. La production est en plein essor. Je tiens à remercier la DGA pour son soutien et son leadership vis-à-vis des autres Etats tout au long de ce programme et de sa renégociation. Notre volonté de rester un partenaire du ministère français de la défense est égale dans le domaine des drones afin d'éviter des lacunes capacitaires et des dépendances pour des capacités aussi critiques.
La croissance des activités d'EADS en France a été spectaculaire, grâce à un dialogue constructif entre tous les acteurs de l'industrie aéronautique et de l'espace et, en particulier, l'Etat. Grâce à une politique industrielle de long terme, l'industrie aéronautique et spatiale française est compétitive sur le marché mondial. Elle le restera tant que ce modèle sera préservé.
Une remarque de principe : une industrie ne peut réussir qu'avec une véritable politique industrielle ambitieuse. C'est le rôle de l'Etat. Le succès de notre industrie en France est le résultat d'un partenariat piloté par des institutions publiques telles que la DGA, DGAC ou le CNES qui ont su mettre en place des programmes de long terme, couvrant toutes les étapes de la R&D, depuis la R&T jusqu'aux avances remboursables. Une telle dynamique profite grandement de forums publics privés tels que CORAC dans le domaine de l'aéronautique civile. A tel point que, et c'est une bonne nouvelle, des forums similaires vont être mis en place pour les priorités de demain que sont la Sécurité et l'Espace.
Je voudrais insister sur l'importance stratégique d'avoir à la fois des activités de défense et des activités civiles, ce qui nous permet de tirer le maximum de synergies de notre politique d'investissement en R&T.
La défense a besoin des systèmes les plus en pointe et de technologies qui n'existent pas encore. C'est pour cela que la recherche en matière de défense progresse par ruptures technologiques. Ce sont ces ruptures qui bénéficient ensuite aux activités civiles à moyen et long terme à travers des retombées issues de ces recherches.
C'est pourquoi il est essentiel que le prochain Livre Blanc préserve cette approche et, quelles que soient les décisions budgétaires, sanctuarise à tout prix le budget de la Recherche amont, aussi bien militaire que civile. A travers ces études, la DGA a réussi à construire une base industrielle compétitive et technologiquement avancée. C'est du reste exactement ce que font nos concurrents. Les mesures adoptées devront cibler les technologies clefs pour l'avenir : ces choix n'auront pas simplement d'impact sur la défense mais aussi sur notre compétitivité face aux Etats-Unis et aux grands émergents. Notre projet avec BAE Systems s'inscrivait dans cette perspective industrielle de long terme face à une concurrence bientôt mondiale.
Le deuxième enseignement que je retiendrai est que l'industrie aéronautique ne peut être pas viable sans une approche duale.
La politique industrielle doit porter sur un périmètre industriel et technologique adéquat. Notre industrie est, par nature, duale. On ne peut pas considérer les enjeux de défense, d'un côté, et ceux des activités commerciales, de l'autre. Il y a une fertilisation croisée entre les activités civiles et militaires pour les lanceurs, les satellites, les hélicoptères... Ici aussi une approche globale est nécessaire afin de préserver une base industrielle dans la durée en France.
Prenons en compte un exemple critique : les lanceurs spatiaux et les missiles balistiques. Le développement complet d'Ariane 5ME et les études sur la nouvelle génération de lanceurs Ariane 6 sont absolument indispensables afin de préserver les compétences en matière de missiles balistiques.
Cela n'est pourtant pas suffisant pour préserver les compétences des bureaux d'études des Mureaux et de nos sous-traitants et la capacité à contribuer à la dissuasion nucléaire. Le programme M51 doit pouvoir être poursuivi dans ses versions ultérieures comme prévu dans la programmation, sauf à devoir faire face à des conséquences majeures en matière d'ingénierie pour ASTRIUM et, plus particulièrement, pour son bureau d'études des Mureaux.
Il est également important de garder à l'esprit qu'il n'y a pas de politique industrielle viable si les demandes en matière civile et militaire ne sont pas coordonnées. C'est de cette façon que la compétitivité peut être renforcée dans le long terme et que les politiques peuvent produire ce que l'on appelle « the best value for money ».
En troisième lieu, je souhaiterais vous parler des exportations. Une de nos principales priorités est de développer notre capacité d'exportation en dehors de nos marchés nationaux. Nous bénéficions d'un fort soutien des pouvoirs publics en ce domaine. Les exportations sont cruciales pour préserver la base industrielle de défense européenne, tout particulièrement dans le contexte actuel de réduction des budgets de défense et de compétition mondiale accrue. Mais comme toujours, les exportations reposent sur la maîtrise des marchés nationaux, ce en quoi la France joue un rôle de leader. J'espère que les résultats du Livre blanc prendront cet aspect des choses en considération.
Je tiens à rappeler qu'EADS s'appuie sur ses partenaires industriels pour être et rester compétitif. Notre groupe sous traite plus de 70 % de son chiffre d'affaires à des milliers d'entreprises françaises, essentiellement des PME-PMI. C'est pour cela que nous avons besoin de réseaux industriels innovants et résilients et c'est la raison pour laquelle Marwan Lahoud a récemment signé le pacte PME avec le ministère de la défense française. Nous avons besoin de partenaires industriels forts, à la fois petits et grands, pour livrer les meilleurs produits aux forces armées françaises et gagner ensemble des contrats à l'export.
Dans le domaine des hélicoptères, Eurocopter s'attaque à l'ensemble des marchés civils et militaires. Nous avons remporté des succès importants avec l'EC-725 Cougar, le NH-90 et le Tigre. Notre préoccupation principale concerne la commande de trente-quatre NH-90 TTH qui doit encore être confirmée par la France. L'export et la coopération sont ici encore, des éléments clés du succès, au même titre que les synergies entre le civil et le militaire, surtout quand Eurocopter doit renouveler son offre de produits.
Accroître notre capacité d'accéder au marché américain sera déterminant pour les années à venir. Ce marché restera le premier marché au monde pour l'aéronautique, l'espace et la défense encore pendant des décennies. EADS a fait des efforts importants pour pénétrer ce marché américain des équipements de défense, et d'aéronautique civile. Le projet de fusionner avec BAE Systems était tout en fait en ligne avec cet objectif, notamment de faire d'EADS un acteur américain sur le marché américain.
Enfin, concernant les enjeux européens, j'ai compris que vous attendiez de moi que je vous donne des avis sur la façon dont on pouvait s'y prendre pour avoir une meilleure coopération en matière de grands programmes d'armement. La période de réductions budgétaires dans laquelle les Etats européens inscrivent leurs politiques appelle un premier commentaire de ma part. C'est le bon moment pour établir des coopérations. Il s'agit de faire « plus », et non pas de faire « moins ». Le second est que le meilleur multilatéral, c'est le bilatéral ou, tout du moins, la coopération entre un nombre limité de partenaires. Les différentes revues internes consacrées à l'A400M ont montré que le manque de coopération structurée et des justes retours ingérables ont généré des problèmes en nombre. Je dois vous dire que je ne détiens pas la formule magique pour réussir une coopération. Néanmoins, EADS a accumulé suffisamment d'expériences, dans ce domaine, qui n'ont pas toutes été des succès, je dois l'admettre. J'en retire quelques enseignements :
Premièrement : pas de juste retour, ni de duplications. Seulement la sélection des meilleurs fournisseurs.
Deuxièmement, les Etats qui s'engagent dans une coopération doivent accepter d'emblée et une fois pour toutes qu'ils créent ainsi des dépendances mutuelles.
Troisièmement, il devrait y avoir un seul maître d'oeuvre industriel, clairement identifié.
Quatrièmement, il doit y avoir, en face de ce maître d'oeuvre un expert étatique fort. Les industriels ne peuvent être efficaces sur un programme en coopération s'ils doivent faire face à plusieurs clients non coordonnés. L'OCCAR est un progrès dans cette direction, mais c'est largement insuffisant. En outre cet opérateur étatique doit inclure l'industrie dès le début du programme. C'est absolument indispensable pour avoir une évaluation réaliste de ce qu'il est possible de faire et à quel coût, à travers un dialogue compétitif. J'en prendrai pour exemple le programme METEOR réalisé par MBDA : le gouvernement britannique a été chef de file du programme pendant que MBDA en était le chef de file industriel.
Les défis face à nous sont importants. Mais nous pouvons les relever dans l'esprit qui a présidé à la signature du Traité de l'Elysée entre la France et l'Allemagne. Depuis cinquante ans, de multiples programmes en coopération ont été réalisés avec succès. Ils ont d'ailleurs favorisé la création d'EADS.
Pour préserver notre industrie, je voudrais encore insister sur deux conditions :
- consolider nos capacités industrielles au niveau européen : ce qui a été réussi avec Airbus et MBDA doit s'appliquer à l'ensemble de l'industrie de défense.
- maintenir des financements publics de R&D à un niveau suffisant pour garder notre avance technologique.
Ces deux conditions sont nécessaires pour préserver les compétences de notre industrie en restant à la pointe de l'innovation et pour nous permettre d'être compétitifs sur les marchés internationaux.
C'est l'enjeu majeur pour l'industrie de défense en France et en Europe, en particulier dans le cadre du Livre Blanc et de la future loi de programmation militaire. Je sais, Monsieur le président et Messieurs les sénateurs, pouvoir compter sur vous.