Intervention de Son Exc. M. Tomasz Orlowski

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 30 janvier 2013 : 1ère réunion
Europe de la défense — Audition de se. M. Tomasz Orlowski ambassadeur de la république de pologne

Son Exc. M. Tomasz Orlowski, ambassadeur de la République de Pologne :

En réponse à M. René Beaumont, concernant la modernisation de l'armée polonaise, je voudrais indiquer, qu'à nos yeux, la question cruciale porte sur les transferts de technologies et la « polonisation » de la production. Je voudrais également confirmer que les offres des industriels français, à l'image d'Eurocopter, sont étudiées avec beaucoup d'attention en Pologne. En revanche, compte tenu du fait que nous n'avons pas besoin de couvrir des distances aussi éloignées que celles existant entre la métropole et les DOM/COM pour la France, nous ne prévoyons pas pour l'instant d'acquérir des avions A400M, et nous avons plutôt recours à des avions de transport de type CASA qui sont aussi une capacité européenne. En revanche, nous étudions notre participation à la flotte européenne en matière de ravitaillement en vol.

Je partage votre avis sur le Mali, M. Jacques Berthou, et il me semble important de penser dès à présent à une solution politique et à notre politique d'aide au développement. Notre ministre des affaires étrangères déléguée pour le développement et la coopération, Mme Katarzyna Pelczynska-Nalecz, a fait la semaine dernière un déplacement en Afrique - le continent qui constitue la priorité de la politique polonaise d'aide au développement et où nous sommes déjà très présents.

Concernant une force d'intervention commune européenne, nous y sommes favorables. Pourtant, comme l'a déclaré M. Tomasz Siemoniak, notre ministre de la Défense, « L'armée européenne n'est pas un uniforme unique, mais des projets communs dans le cadre de la défense aérienne, l'imagerie satellitaire et le ravitaillement en vol. Ce qui veut dire plus d'Europe forte au sein d'une OTAN forte ». Pourquoi ne pas commencer par utiliser l'Eurocorps en tant que force d'intervention européenne, afin de la rendre plus opérationnelle ?

En réponse à M. André Vallini, je dirai que l'expérience montre que ce sont essentiellement les « grands » pays qui démontrent une réelle volonté d'agir sur le plan militaire. En matière militaire, et de capacités, la taille joue souvent un rôle déterminant. Ainsi, les pays baltes ont renoncé à se doter d'une force aérienne, et ce sont les alliés de l'OTAN qui assurent la « police du ciel » dans les pays Baltes. Cela n'empêche pas ces pays de développer une expertise spécifique dans certains domaines, à l'image de la cyberdéfense pour l'Estonie.

Enfin, pour répondre à M. Pierre Bernard-Reymond, la Pologne a besoin d'une relation apaisée et un partenariat avec la Russie. A la différence de la plupart de ses voisins, le gouvernement de M. Donald Tusk, soutenu par la coalition centre-droit formée par la plateforme civique (PO) et le parti paysan (PSL), a remporté les dernières élections et a été reconduit, ce qui constitue une exception en Europe. Ceci est un gage de la stabilité politique. Comme le montrent les sondages d'opinions, le sentiment pro-européen reste largement majoritaire en Pologne. L'ancrage européen de la Pologne n'est pas remis en cause par les différentes forces politiques. Il est par ailleurs source de la fierté : nous avons réussi, aussi bien la transformation systémique que la résistance à la crise. La croissance économique favorise la stabilité non seulement politique, mais aussi celle de l'esprit, dont même la terrible catastrophe de Smolensk n'a pas provoqué l'ébranlement.

Enfin, s'agissant du Royaume-Uni, la Pologne est favorable à son maintien au sein de l'Union européenne, au-delà de nos liens historiques, pour au moins trois raisons :

- tout d'abord, nous apprécions l'orientation et la dimension « plus libérale » que le Royaume-Uni apporte à l'Europe, notamment par rapport au couple franco-allemand ;

- ensuite, nous sommes, comme les Britanniques, très attachés au lien transatlantique et à la relation avec les Etats-Unis, que nous avons besoin de garder dans notre intérêt ;

- enfin, nous pensons que sans le Royaume-Uni, il ne peut pas y avoir d'Europe de la défense.

Si nous souhaitons que le Royaume-Uni reste au sein de l'Union européenne, pour autant nous refusons toute idée d'une « Europe à la carte ».

Et, on peut observer que, malgré certaines tentatives, il n'existe pas un groupe de pays dont le Royaume-Uni serait le chef de file.

Pour reprendre la formule du ministre polonais des affaires étrangères, la Pologne veut une « Europe puissance », une « union toujours plus étroite entre les peuples ».

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