Le budget d'Ariane 6 s'établit à environ 3 milliards d'euros pour le développement du lanceur, à quoi s'ajoutent 750 millions pour le segment du sol ; l'objectif est que la France en finance 50%, l'Allemagne 25%, l'Italie 15% et la Suisse et la Belgique, 5% chacun. Ariane 5 fut un programme guidé par la technologie. Son développement a coûté près de 10 milliards d'euros et la part de la France s'élève à 55%.
La Chine a déjà des lanceurs compétitifs, mais la réglementation ITAR interdit qu'ils lancent des satellites comprenant de la technologie américaine. Cette réglementation a été adoptée dans les années 90 à la suite de doutes très documentés sur les transferts de technologie réalisés par les Chinois et ce sont ces règles qui empêchent aujourd'hui la Chine d'être présente sur le marché commercial. Les Chinois, cependant, vendent des satellites aux pays émergents, dans une économie de troc : ils échangent des satellites contre du gaz au Venezuela, du pétrole au Nigéria ou du lithium en Bolivie. Mais les satellites chinois n'ont qu'une durée de vie de 3 à 4 ans, contre 15 à 18 ans pour les satellites occidentaux, ce qui rétablit notre compétitivité.
Le modèle de SpaceX diffère ce celui d'Ariane sur trois critères au moins : il est beaucoup plus simple, conçu pour des lancements à bas prix - l'ensemble de lancement tient sur un terrain de football, alors que celui d'Ariane 5, qui n'a pas été conçu au départ avec cette notion d'économie, constitue une petite ville ; ensuite, l'organisation de la production est verticalisée et rationnalisée : tout tient, quasiment, dans un bâtiment, avec un étage pour les moteurs et le lanceur, un autre pour le bureau d'études, un troisième pour le service commercial - cette concentration a fait l'objet de commentaires tout à fait élogieux dans la presse ; enfin, SpaceX s'appuie sur les budgets publics américains : celui de la Nasa, 17 milliards de dollars, celui de l'US Air Force, 18 milliards et celui qui est à discrétion du Président américain, pratiquement autant, soit un total de près de 50 milliards, à comparer aux 4 milliards d'euros de l'Agence spatiale européenne, auxquels s'ajoutent 1 à 2 milliards pour les programmes militaires européens. En d'autres termes, Ariane doit recourir au marché pour atteindre un prix compétitif ; ce sont les commandes commerciales qui font vivre le lanceur européen et c'est ce modèle d'une souveraineté fondée sur le marché commercial, qui est aujourd'hui remis en cause. Avec Ariane 6, l'objectif annuel est de quatre lancements institutionnels et de dix lancements commerciaux.