Intervention de Laurent Béteille

Réunion du 29 mars 2006 à 15h00
Droit de préemption et protection des locataires en cas de vente d'un immeuble — Adoption d'une proposition de loi en deuxième lecture

Photo de Laurent BéteilleLaurent Béteille, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui, en deuxième lecture, la proposition de loi de Mme Aurillac relative au droit de préemption et à la protection des locataires en cas de vente d'un immeuble, telle qu'elle a été adoptée par l'Assemblée nationale, en deuxième lecture, le 15 décembre dernier.

Au cours de la navette, le texte de la présente proposition de loi a été enrichi et consolidé tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, avec un même objectif : protéger les occupants les plus fragiles tout en évitant d'accroître la pénurie de logements actuellement proposés à la location, et avec une même règle : limiter ce texte à la seule vente à la découpe et ne pas rompre l'équilibre difficilement atteint par les lois du 23 décembre 1986 et du 6 juillet 1989 qui assurent une stabilité et une sécurité juridiques dans les droits et les obligations respectifs des locataires et des bailleurs.

Sur les cinq articles que comprenait ce texte à l'issue de son adoption par le Sénat, trois seulement restent encore en discussion.

Les principales modifications adoptées par le Sénat le 13 octobre 2005, pour l'essentiel à l'initiative de la commission des lois, ont été maintenues.

Il en est ainsi de la création d'un dispositif de préemption autonomisé au profit du locataire d'un logement inclus dans la vente en bloc d'un immeuble à usage d'habitation ou à usage mixte, sauf dans le cas où l'acquéreur de l'immeuble prend l'engagement de proroger les baux à usage d'habitation en cours pour une durée de six ans à compter de la délivrance de l'immeuble.

Ce droit de préemption a en outre été étendu au cas où l'immeuble est détenu par une société civile immobilière.

Nous avons également prévu la communication préalable, à peine de nullité de la vente, des résultats d'un diagnostic technique établi par un contrôleur technique ou un architecte, de même que la communication préalable au maire de la commune du prix et des conditions de la vente de l'immeuble, dans sa totalité et en une seule fois, cette communication ne faisant pas double emploi avec la déclaration d'intention d'aliéner en vue de l'exercice éventuel du droit de préemption urbain.

La possibilité pour la commune d'utiliser le droit de préemption urbain afin d'assurer le maintien dans les lieux des locataires doit faire l'objet d'une confirmation expresse, grâce à l'adoption d'un amendement de Dominique Braye.

La commune et le département ont la faculté de réduire le taux de la taxe additionnelle aux droits d'enregistrement ou à la taxe de publicité foncière lorsque, dans le cadre d'une vente à la découpe, l'acquéreur d'un logement occupé s'engage à le maintenir en location pendant au moins six ans.

Mme la ministre a évoqué la modification de la majorité d'opposition à l'extension par décret d'un accord collectif intervenu au sein de la commission nationale de concertation, qui permettra d'étendre par décret les dispositions de l'accord du 16 mars 2005, fortement protectrices des locataires, dont on pouvait regretter qu'elles ne soient pas déjà appliquées depuis longtemps.

Il est de plus prévu la nullité du congé pour vente intervenu en méconnaissance des dispositions d'un accord collectif rendu obligatoire par décret, ainsi que la nullité de plein droit du congé pour vente délivré en violation de l'engagement de prorogation des contrats de bail en cours souscrit lors de la vente en bloc.

En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a apporté deux modifications principales.

La première concerne le droit de préemption nouvellement créé au profit du locataire au stade de la vente de l'immeuble en bloc.

Lors de la première lecture au Sénat, la commission avait souhaité porter le seuil à plus de dix logements. Tout seuil est arbitraire, mais celui-ci nous paraissait plus cohérent avec les autres dispositions législatives et conventionnelles actuelles, tout en permettant d'exclure de facto la quasi-totalité des bailleurs personnes physiques du dispositif ; le Sénat nous avait suivis sur ce point.

L'objet de ce texte est de s'opposer à la pratique de certains bailleurs institutionnels qui ont créé un véritable désordre dans le marché de l'immobilier, notamment dans les grandes villes ; il n'est pas de porter atteinte au droit de propriété des bailleurs personnes physiques, dont l'utilité est grande dans l'offre de logements de location. Il faut donc éviter de décourager ce type d'investisseurs.

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