Monsieur le président, cette intervention vaudra aussi défense de l’amendement n° 59.
Par cet amendement, nous demandons, purement et simplement, la suppression de cet article nouveau voté par l’Assemblée nationale. Nous demandons également la suppression de l’article suivant pour des raisons identiques.
En effet, l’article 2 bis A ouvre la possibilité aux régions de racheter certaines petites lignes d’intérêt purement local afin de ne pas les laisser se détériorer.
Si nous ne contestons pas les intentions mentionnées par les auteurs de cet article, qui évoquent quasiment des situations d’exception, nous restons dubitatifs sur son orientation au regard de l’acte III de la décentralisation et du renforcement du rôle des régions au détriment de l’État. Ces articles permettront ainsi aux régions de racheter certaines lignes ou d’en créer d’autres.
Tout d’abord, nous nous interrogeons : comment le pourront-elles ? Et avec quels moyens, alors même que les dotations dont elles bénéficient ne font que baisser ?
Plus fondamentalement, nous estimons que, avec ces articles, nous mettons le doigt dans un mécanisme funeste, ouvrant la possibilité d’une régionalisation de la gestion des infrastructures déjà prévue dans les esquisses d’un acte III de la décentralisation. Certes, l’on nous dit aujourd’hui que le réseau ferré national n’est absolument pas concerné par ces dispositions, mais, ce que vous ne dites pas, c’est que le périmètre de ce réseau peut bien évidemment évoluer : ce qui est national aujourd’hui peut devenir régional demain.
Nous trouvons donc ces articles extrêmement dangereux dans leur esprit, puisqu’ils tendent à reconnaître, sans aucun encadrement spécifique, une compétence pleine et entière aux régions pour devenir gestionnaires d’infrastructure, en lieu et place du gestionnaire national créé par la présente loi, à savoir SNCF Réseau.
Nous estimons, par conséquent, que ces articles, loin de permettre le retour de l’État stratège, ouvrent la voie à une régionalisation permettant une application inégalitaire du droit à la mobilité sur le territoire.
De plus, au regard des objectifs de rentabilité assignés à SNCF Réseau, il est bien clair qu’il sera fort opportun pour elle, d’un point de vue comptable, de se séparer d’une partie du réseau dans les régions.
Pour toutes ces raisons, et sans mettre en cause les motivations certainement légitimes des auteurs – députés, mais aussi sénateurs – de ces articles, nous souhaitons que le message de ce projet de loi ne soit pas brouillé par des informations contradictoires.
Ce projet de loi doit permettre le retour de l’État stratège et la réunification de la famille ferroviaire pour la rendre plus forte, et non pas conduire à l’atomisation du réseau et à la multiplication des gestionnaires d’infrastructure. C’est pourquoi nous proposons la suppression de ces articles.