Intervention de Frédéric Cuvillier

Réunion du 10 juillet 2014 à 14h00
Réforme ferroviaire — Article 2 bis

Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État :

… puisqu’il est obnubilé par ce modèle unique qu’est l’ouverture à la concurrence. Vous en avez même oublié, monsieur le sénateur, le cœur de ce projet de loi : mettre en place un groupe ferroviaire unifié, efficace, avec un cadre social harmonisé, afin de répondre aux missions de service public en satisfaisant l’attente des usagers.

Or les usagers n’attendent pas nécessairement ce que vous essayez, comme vous dites, d’anticiper. En fait, vous n’anticipez rien, vous baissez pavillon ! Les usagers attendent de la sécurité, de la qualité, du confort, de la régularité. Telle est la réalité.

L’état dans lequel nous avons trouvé le réseau ferroviaire nous a conduits à concentrer nos efforts sur l’essentiel. Le fret ferroviaire, vous l’avez bradé, en anticipant une ouverture à la concurrence. Nous souhaitons, pour notre part – c’est notre méthode –, renforcer l’opérateur public, en ayant des règles claires et stables, qui soient les mêmes pour les uns et les autres.

Aucune malédiction ne s’est abattue sur le service public : les règles que vous proposez, plus lourdes, lui seraient défavorables et lui feraient perdre en compétitivité, laissant la place aux acteurs privés, qui bénéficieraient de la loi du marché et entraîneraient l’effondrement de l’opérateur historique.

Vous dites, monsieur Nègre, que vous anticipez, mais, au contraire, je vous le redis, vous battez pavillon.

Cela fait plus de deux ans que nous nous battons – là où vous, vous ne vous étiez pas battus ! – auprès de la Commission européenne pour faire triompher la singularité de la France, et nous avons d’ailleurs été rejoints par d’autres partenaires. La Commission européenne reconnaît aujourd'hui que son calendrier était trop restreint, trop étriqué. Il n’est pas souhaitable d’imposer au transport ferroviaire des dates qui ne sont pas tenables, sauf à vouloir désorganiser l’ensemble du réseau européen. Il convient de fixer un calendrier qui ne soit pas figé, avec des étapes.

Contrairement à vous, qui souhaitez anticiper, comme d’autres d’ailleurs, moi, je veux solidifier le dispositif. La date doit être différée – elle doit être précisée à une échéance lointaine –, parce que l’opérateur public n’est pas aujourd'hui en mesure d’affronter une mise en concurrence, qui ne serait pas équilibrée. Voilà la réalité.

Monsieur Nègre, vous allez me rétorquer que vous n’étiez pas élu et que vous n’êtes pas redevable des actions de vos prédécesseurs ou de vos amis. Toutefois, vous avez pu voir que l’ouverture mal préparée du fret ferroviaire a conduit l’opérateur historique non pas au gain, mais à l’effondrement.

Vous auriez pu penser – c’est d’ailleurs ce qui avait été prédit ! – que l’ouverture à d’autres acteurs du fret ferroviaire aurait permis de dynamiser le réseau. On a même entendu des déclarations à ce sujet, des statistiques ont été annoncées dans le cadre du Grenelle de l’environnement. Pourtant, aucun chiffre n’a été tenu.

Le fait d’ouvrir le fret à d’autres opérateurs n’a pas eu pour effet, tant s’en faut – c’est même l’inverse ! –, d’augmenter la part modale du fret ferroviaire. Au contraire, cela a déstabilisé l’opérateur historique, Fret SNCF. Nous pouvons donc voir aujourd'hui combien le manque de préparation et d’anticipation de règles solides a conduit à fragiliser le réseau, ce qui est dommageable quand il s’agit d’un opérateur appartenant au patrimoine ferroviaire commun.

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