Intervention de Laurent Béteille

Réunion du 29 mars 2006 à 21h30
Droit de préemption et protection des locataires en cas de vente d'un immeuble — Article 1er, amendement 16

Photo de Laurent BéteilleLaurent Béteille, rapporteur :

J'ai déjà fait part des raisons qui ont conduit la commission à émettre un avis défavorable sur l'amendement n° 16.

L'amendement n° 34 tend à porter de six à douze ans la durée de prolongation des baux en cours. Il est clair que cette durée est extrêmement longue et risque d'avoir un effet contraire à celui qui est recherché : plus aucun acquéreur ne prendra l'engagement de maintenir le locataire pour une telle durée ; quelles que soient les incitations fiscales proposées, il préférera délivrer un congé. L'avis de la commission est donc défavorable.

La commission est également défavorable aux amendements nos 35 et 36, qui sont des amendements de repli par rapport au précédent.

L'amendement n° 33 tend à substituer à l'obligation de proroger les contrats en cours l'obligation de maintenir le local sous statut locatif. C'est exactement l'inverse de ce que nous avions approuvé ici même en première lecture. Nous avions en effet considéré qu'il était utile de permettre au locataire de se maintenir dans le local et non de donner au local un statut qui non seulement n'apporterait rien à personne, mais risquerait de poser un problème lorsque le locataire part volontairement à quelques mois ou à moins de deux ans de l'expiration du bail. À ce moment-là, le propriétaire qui serait tenu de maintenir l'immeuble sous statut locatif pourrait faire le choix de ne pas relouer son immeuble et d'attendre la fin de l'expiration de ce délai. Nous avons donc émis un avis défavorable.

Monsieur Cléach, la commission souhaite le retrait de l'amendement n° 9, qui tend à limiter la prorogation des contrats en cours aux seuls contrats de bail à usage d'habitation. Cette disposition nous paraît en effet inutile puisque la loi de 1975, dans laquelle s'insère le nouveau droit de préemption, a depuis longtemps été interprétée par les juridictions comme s'appliquant aux seules personnes physiques et non aux personnes morales.

En outre, cet amendement exclut implicitement du dispositif les logements placés sous d'autres régimes, par exemple ceux qui sont régis par la loi de 1948 ou les meublés, ce que nous ne souhaitons pas.

La commission est, en revanche, monsieur Cléach, favorable à votre amendement n° 11, qui prévoit que la période de prorogation de six ans des contrats de bail à usage d'habitation en cours démarre à la date de la signature de l'acte authentique de vente et non à celle de la délivrance de l'immeuble.

La détermination de la date de délivrance d'un immeuble est relativement bien cernée, nous semble-t-il, puisqu'il s'agit soit de la remise des clés, soit de la remise des titres. Toutefois, la prise en compte de la signature de l'acte authentique peut apparaître encore moins sujette à contentieux.

La commission est défavorable aux amendements nos 26 et 27, qui tendent, l'un à substituer à la notion de « vente en sa totalité et en une seule fois » d'un immeuble celle d'« opération conduisant à un changement de propriétaire », l'autre à préciser la notion d'« opération » conduisant à un changement de propriétaire de l'immeuble.

Nous avons quelque difficulté à suivre Mme Borvo Cohen-Seat sur ce sujet dans la mesure où, de toute façon, les différentes opérations en cause conduisent à une vente. Par conséquent, mieux vaut conserver le terme juridique précis et adéquat.

La commission est également défavorable à l'amendement n° 28, qui a en fait pour objet de prévoir que le prix de vente proposé à chacun des locataires pour son lot est égal au prix au mètre carré habitable de l'immeuble vendu en bloc.

Je comprends bien la logique de cet amendement. Il n'en demeure pas moins que, à suivre ses auteurs, un appartement en mauvais état, mal exposé, mal agencé et peu confortable, sur cour au rez-de-chaussée, devrait être vendu sur la même base qu'un appartement en bon état, bien exposé, bien agencé et situé en étage élevé. Or cela nous paraît totalement inapplicable.

La commission demande le retrait de l'amendement n° 10, qui tend à prévoir, dans un souci d'économie bien sympathique, que le projet de règlement de copropriété ainsi que les résultats du diagnostic technique seront mis à disposition des locataires et non communiqués par lettre recommandée avec accusé de réception.

La commission comprend naturellement cette préoccupation, mais craint qu'une telle disposition ne soit moins protectrice que celle qui figure dans le texte actuel.

De même, la commission demande le retrait de l'amendement n° 30, qui tend à préciser que le diagnostic prévu par le nouvel article 10-1 de la loi du 31 décembre 1975 est établi conformément aux stipulations de l'accord collectif du 9 juin 1998, rendu obligatoire par le décret du 19 juillet 1999.

Il ne nous semble pas qu'il puisse y avoir de confusion avec le diagnostic technique prévu par l'ordonnance du 8 juin 2005. En outre, la commission regretterait que l'on renvoie, dans un texte législatif, à une norme de rang inférieur. Au surplus, et c'est sans doute l'argument majeur, cet amendement fait disparaître une garantie importante, à savoir le fait que le diagnostic doit être effectué par un contrôleur technique ou un architecte impartial par nature, ce qui, je pense, rassurera M. Madec !

L'amendement n° 12 tend à prévoir que l'architecte ou le contrôleur technique chargé d'établir le diagnostic technique de l'immeuble vendu en bloc ne doit avoir aucun lien de nature à porter atteinte à son impartialité ou à son indépendance avec les locataires concernés. Il faut effectivement assurer l'impartialité complète du diagnostic, tant à l'égard du propriétaire ou de son mandataire, que des locataires. Ce souci d'équilibre ne peut qu'être approuvé.

Toutefois, je demande à M. Cléach de bien vouloir rectifier son amendement, afin de remplacer les mots « de l'immeuble, son mandataire, ni un des locataires concernés » par les mots « de l'immeuble, son mandataire ou l'un des locataires concernés ». Moyennant cette rectification, la commission est favorable à cet amendement.

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