Intervention de Olivier Roussat

Commission des affaires économiques — Réunion du 28 mai 2014 : 1ère réunion
Audition de Mm. Olivier Roussat président-directeur général et didier casas secrétaire général de bouygues telecom

Olivier Roussat, président-directeur général de Bouygues Telecom :

Le secteur des télécoms ne va pas bien, et même, reconnaissons-le, il va mal. Aujourd'hui même, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) a publié son observatoire 2013 de l'investissement et de l'emploi selon lequel 4 000 emplois directs ont été perdus entre 2012 et 2013. Le revenu moyen des opérateurs a diminué en 2013 d'environ 7 %, du fait notamment de la baisse des tarifs des services mobiles (-27 % en 2013, après une première baisse de 11 % en 2012). Tout cela alors que l'usage continue de se développer fortement, ce qui suppose de lourds investissements. Or, pour investir, il faut des revenus.

Entre 2010 et 2013, le chiffre d'affaire des opérateurs a baissé de 5 milliards d'euros, passant de 43 à 38 milliards. L'EBITDA (qui correspond grossièrement au solde entre le chiffre d'affaires et les dépenses de fonctionnement est passé de 15 à 12 milliards entre 2010 et 2013. Cela fait donc trois milliards de valeur en moins donc, au passage, une perte d'un milliard d'impôt sur les sociétés (IS) pour l'État. Dans des industries très capitalistiques comme les télécom, la capacité d'investissement est le nerf de la guerre. Un niveau d'investissement insuffisant, c'est la condamnation à être moins performant à moyen terme. C'est pourquoi les données actuelles sont inquiétantes.

Pour ce qui concerne Bouygues Telecom, aujourd'hui, nos résultats nous placent au quatrième rang. Nous sommes confrontés à un problème de taille critique. Pour faire face à nos coûts fixes, c'est-à-dire à l'extension du réseau, il nous faut plus de clients, d'où notre offre de rachat de SFR, qui a échoué. Les résultats en matière de 4G n'ont pas été à la hauteur de nos espérances, l'un de nos concurrents ayant décidé en décembre dernier de galvauder la 4G en proposant un abonnement à 20 euros. Au premier trimestre, Bouygues Telecom a ainsi connu une perte opérationnelle de 19 millions d'euros : l'entreprise doit donc se réformer pour changer de modèle, car il n'est pas possible de vivre durablement avec des résultats négatifs. Nous sommes en pleine réflexion pour continuer à exister dans ce marché à quatre opérateurs. Nous avons décidé d'économiser 300 millions supplémentaires par an, après avoir réduit nos coûts de fonctionnement de 600 millions en deux ans. Notre objectif est d'économiser un milliard par an d'ici trois ans : c'est énorme, pour un chiffre d'affaires de 4 milliards. En outre, nous ne bénéficions pas de l'itinérance, ce qui nous oblige à maintenir l'investissement pour développer notre réseau. Dans ces conditions, nous devons réduire de façon drastique nos dépenses. Nous l'avons dit lors de notre comité central d'entreprise (CCE) il y a quinze jours. Un comité exceptionnel se réunira le 11 juin : nous annoncerons des réductions d'emplois, condition pour continuer à vivre dans un monde à quatre opérateurs.

La presse a fait état de discussions avec Orange. Tout ce que je peux vous dire, c'est que, pour l'instant, elles sont très préliminaires. Nous ne voulons dépendre de personne pour restaurer notre rentabilité et pouvoir réaliser les investissements dont nous avons besoin.

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