Je vais vous répondre avec un peu d'ironie : les pouvoirs publics estimaient indispensable d'avoir quatre opérateurs fin 2011 et aujourd'hui il n'en faudrait plus que trois ? Quel est le sens de tout cela ? Si le but était de transférer l'argent d'un opérateur à un autre, c'est réussi, la fortune du patron de Free, Xavier Niel, est faite. Mais où est la logique ? Favoriser l'émulation entre les opérateurs, et donc l'investissement ? Sans doute pas puisque l'un des opérateurs bénéficie de conditions d'installation biaisées.
L'autorité de régulation procède à des mesures pour vérifier que les opérateurs atteignent bien un certain niveau de couverture, mais cette méthode de mesure ne tient pas compte d'un point essentiel : l'essentiel des communications des clients de Free passe en réalité sur le réseau d'Orange. Ce qui est vérifié par l'Arcep, c'est la couverture théorique par le réseau de Free, mais pas la couverture effective. Quelle est la différence ? Tout simplement le nombre d'antennes dont vous avez besoin pour couvrir effectivement et éponger tout votre trafic quand vous n'avez pas le filet de sécurité d'Orange. Je vous donne un exemple : Free ne disposait que de 1 200 sites lorsque l'Arcep a estimé qu'il couvrait bien 27 % de la population. Deux ans auparavant, l'Arcep avait refusé de considérer que Bouygues Telecom atteignait 20 % de la population couverte alors que nous disposions de 2 000 sites ! On nous dit qu'avec 5 000 sites, Free couvrira 75 % de la population en janvier prochain. Mais là encore, c'est purement théorique. Les quatre opérateurs disposant des mêmes gammes de fréquence, des mêmes équipementiers, des mêmes méthodes et les conditions d'exploitation étant identiques, la couverture effective de 75 % de la population, c'est 7 à 8000 sites. Évidemment pour cela, il faut accepter d'investir.
Quand le nombre de communications augmente sur un relais de Free, réduisant par la même la qualité, l'itinérance prend le relais. Tel n'est pas le cas pour nous, qui devons augmenter le nombre de pylônes pour maintenir la qualité de notre réseau. Ces différences de traitement ne sont pas prises en compte par l'Arcep. C'est bien dommage car cette concurrence faussée implique, vous le voyez bien, des destructions d'emplois et d'investissements alors que ce marché n'est pas soumis à la concurrence internationale, que ses emplois ne sont pas délocalisables et qu'un tiers des investissements réalisés se traduit par des créations directes d'emplois.
Le régulateur doit normalement s'assurer des conditions de la compétition en France. Or l'Arcep n'a rien fait depuis l'avis de l'Autorité de concurrence en mars 2013. Est-ce normal ? Nous verrons bien ce qu'en dira le Conseil d'État.