Il y a tout juste un an, le Parlement a définitivement adopté le projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.
L'article 26 de la loi prévoit la mise en place, au 1er janvier 2015, d'une nouvelle collectivité territoriale - la métropole de Lyon - résultant de la fusion de la communauté urbaine de Lyon et de la portion du département du Rhône comprise sur son périmètre. La commission des finances s'était intéressée à la création de cette nouvelle collectivité territoriale, notamment lors de l'examen du rapport pour avis de notre collègue Jean Germain.
Cette nouvelle collectivité territoriale n'est ni un département, ni un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), mais une collectivité sui generis. Ce statut particulier emporte naturellement de nombreuses conséquences et nécessite d'ajuster les dispositions législatives existantes en matière de fiscalité locale, de concours financiers de l'État, de fonds de péréquation ou de règles budgétaires et comptables.
En raison du caractère technique de ces dispositions, le Gouvernement avait souhaité légiférer par ordonnance sur ces différentes questions.
L'habilitation ouvrait notamment la possibilité de « préciser et compléter » les règles budgétaires, financières, fiscales, comptables et relatives aux concours financiers de l'État applicables à la métropole de Lyon et à ses communes membres. En matière fiscale, elle autorisait en particulier la répartition du produit de certaines impositions départementales, le partage des compensations d'exonérations de fiscalité locale, ainsi que des compensations de la réforme de la taxe professionnelle. En matière de concours financiers, elle permettait notamment de définir les modalités de partage de la dotation de compensation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) entre la métropole de Lyon et le département du Rhône et les modalités de calcul du potentiel fiscal et financier de la métropole de Lyon.
L'ordonnance du 6 novembre 2014, qui vous a été distribuée, a été prise sur le fondement de cette habilitation et le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui vise à ratifier cette ordonnance.
Le seul dépôt du projet de loi de ratification, dans le délai prescrit par l'habilitation, permet d'éviter la caducité de l'ordonnance. Sa ratification, en revanche, a pour effet de la transformer rétroactivement en texte de valeur législative. Aux termes de l'arrêt du Conseil d'État du 8 décembre 2000, l'« ordonnance acquiert valeur législative à compter de sa signature ».
J'en viens aux dispositions de cette ordonnance.
En matière de fiscalité, la principale difficulté posée par la création de la métropole de Lyon réside dans le fait qu'elle n'est ni un EPCI, ni un département. Dès lors, les dispositions qui s'appliquent aux métropoles et aux départements ne lui sont pas applicables par défaut.
Les articles 1er à 22 visent donc à adapter le droit existant en matière de fiscalité locale à ce statut particulier. Sont ainsi concernées : les règles de liaison des taux ; les commissions départementales des impôts et des valeurs locatives ; la perception de diverses taxes locales, dès lors que des mesures de coordination étaient nécessaires ; la répartition des produits perçus en compensation de différents transferts de compétences, des allocations compensatrices d'exonérations d'impositions directes locales et des compensations de la réforme de la taxe professionnelle. Ce partage s'est fait en fonction des bases fiscales ou selon une clé de répartition définie par la commission locale chargée de l'évaluation des charges et des ressources qui, comme vous l'imaginez, a beaucoup travaillé sur le sujet.
Au total, la métropole de Lyon percevra entre 70 % et 80 % environ des principales ressources fiscales de l'ancien département du Rhône et un peu moins de 60 % des compensations de la réforme de la taxe professionnelle.
Relevons que l'article 7 prévoit une période transitoire pour la perception de la part départementale de la taxe d'aménagement par la métropole de Lyon : pour les exercices 2015 et 2016, ce produit continuera à être perçu par le département du Rhône mais sera pris en compte dans le calcul de la dotation de compensation métropolitaine. Ceci s'explique par des difficultés informatiques.
Soulignons par ailleurs que les dispositions de l'article 9, qui étendait à la métropole de Lyon les dispositions applicables aux EPCI à fiscalité propre en matière de taxe de séjour, ont déjà été pratiquement entièrement réécrites par la loi de finances pour 2015.
J'en viens aux dispositions relatives aux concours financiers.
La métropole de Lyon est éligible à l'ensemble des concours financiers et dispositifs de péréquation dont bénéficient les départements et les communautés urbaines. Par exemple, dès 2015, la métropole de Lyon perçoit les versements au titre du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) dans les conditions de droit commun.
Toutefois, il n'est pas toujours possible de calculer le montant de chaque dotation que la métropole de Lyon pourrait désormais percevoir. Il est alors nécessaire de définir une répartition pérenne de la dotation jusqu'alors perçue par le seul département du Rhône.
Cette répartition a été prévue, dans certain cas, par la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, dite loi MATPAM : ainsi, la DGF du département du Rhône est répartie entre les deux collectivités territoriales en fonction de leur population respective. Dans d'autres cas, la clé de répartition est fixée par l'ordonnance : c'est le cas en particulier de la dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC), répartie proportionnellement à la surface respective des collèges sur chaque territoire.
La loi MAPTAM a en outre prévu que les transferts de compétences entre le département du Rhône et la métropole de Lyon étaient compensés grâce à une dotation de compensation métropolitaine.
Pour calculer cette dotation de compensation métropolitaine, l'ensemble des recettes réelles de fonctionnement perçues en 2013 par le département du Rhône ont été réparties, par construction, entre la métropole de Lyon et le département du Rhône. Certains concours ne pouvant être territorialisés a priori, l'ordonnance a prévu des critères de répartition de ces recettes pour le calcul de la dotation de compensation métropolitaine.
En application de ces critères, la commission locale chargée de l'évaluation des ressources et des charges, créée par la loi MAPTAM, a déterminé précisément les clés de répartition.
La dotation de compensation métropolitaine permet, à l'issue de ce travail de répartition, d'égaliser les taux d'épargne du département du Rhône et de la métropole de Lyon après transferts de compétences. En application de ces dispositions, la métropole de Lyon verse une dotation de compensation métropolitaine annuelle de 75 millions d'euros au département du Rhône.
Enfin, dans certains cas, la métropole de Lyon ne peut être éligible à un concours dans les conditions de droit commun dès sa création, dans la mesure où il est versé en fonction de critères non disponibles, notamment parce qu'ils ne peuvent pas être territorialisés. C'est le cas par exemple des concours versés par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) ou du fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI).
L'ordonnance prévoit donc un régime transitoire, de deux ans maximum, pendant lequel le département du Rhône, dans ses limites territoriales antérieures à la création de la métropole de Lyon, continue de percevoir les concours de la CNSA et du FMDI. Ces concours sont ensuite répartis entre les deux collectivités territoriales selon des critères fixés par l'ordonnance.
Un mot sur la péréquation. Si la métropole de Lyon est éligible à l'ensemble des mécanismes de péréquation départementaux, il n'en est pas moins nécessaire de préciser les modalités de calcul du potentiel financier de ces deux nouvelles collectivités territoriales, et notamment d'isoler les ressources départementales de la métropole de Lyon de ses ressources intercommunales, ainsi que de prendre en compte la dotation de compensation métropolitaine.
Je tiens à souligner que la création de la métropole de Lyon, soit un département particulièrement urbain, et d'un département du Rhône rural et privé de son territoire métropolitain, pourrait, si un tel schéma venait à se généraliser, avoir des effets considérables sur les mécanismes de péréquation départementaux. Il serait alors de plus en plus difficile de comparer entre eux des départements devenus très hétérogènes et une remise à plat de la péréquation au niveau départemental devrait alors sans doute être envisagée.
Telles sont les observations qu'appelle ce projet de loi, que je vous propose tel que modifié par un amendement rédactionnel et de précision.