La dette de la branche AT-MP s'est en effet creusée progressivement depuis quelques années, principalement en raison de l'augmentation régulière des transferts mis à sa charge.
Il s'agit tout d'abord de transferts à la branche maladie destinés à compenser la sous-déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles, sur la base des travaux de la commission présidée par M. Diricq. Il s'agit aussi de transferts aux fonds relatifs à l'amiante, le fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata) et le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), qui ont eux aussi régulièrement augmenté au cours du temps. D'autres transferts techniques, moins importants, ont également participé au déséquilibre de la branche.
S'agissant des prestations, l'augmentation est constante mais ne pose pas de difficultés particulières du point de vue des équilibres financiers. Il existe cependant un sujet relatif aux contentieux, non que ceux-ci ne soient pas financés par la branche mais ils ne le sont que l'année d'après. Dans une situation de stabilité du risque contentieux, le financement est à peu près équilibré. Mais ce risque, lié à la contestation de l'imputation d'un sinistre sur le compte d'un employeur, a augmenté de manière rapide, les sommes provisionnées se révélant inférieures à la réalité des dépenses. Ceci participe aussi au déséquilibre financier.
On arrive aujourd'hui à une dette qui approche les 2 milliards d'euros. Le PLFSS prévoit en 2013 un excédent de 300 millions d'euros l'an prochain, en raison notamment d'une augmentation du taux des cotisations de l'ordre de 0,05 point et d'une diminution de 200 millions d'euros de la dotation au Fiva dont le fonds de roulement atteint un niveau très élevé. Par construction, cette opération ne pourra se répéter.
Quelle sera, dans les années à venir, l'évolution des transferts techniques qui constituent un des éléments essentiels du déséquilibre financier de la branche ?
Le Fcaata doit connaître une baisse programmée des dépenses puisqu'on observe une diminution des nouvelles attributions d'allocations. On dénombre en effet chaque année, pour des raisons démographiques, moins de prises en charge au titre du Fcaata que l'année précédente. Fort heureusement, l'exposition à l'amiante est désormais réduite et les personnes que l'on indemnise aujourd'hui sont celles qui se trouvaient en situation de risque il y a quelques années. On enregistre donc plus de sorties que d'entrées dans le dispositif, la file active passant de 30 000 à 26 000 personnes environ. On peut donc prévoir, toutes choses égales par ailleurs du point de vue de la législation, une évolution à la baisse de ce transfert important.
Pour ce qui est du Fiva, on n'envisage pas à ma connaissance de baisse des indemnisations ces prochaines années - sous réserve des données fournies par le fonds.
S'agissant du transfert à la branche maladie, un nouveau rapport sera produit l'année prochaine par la commission Diricq, mais la situation n'a certainement pas connu d'évolution majeure. La sous-déclaration concerne beaucoup de cancers pris en charge au titre des affections de longue durée (ALD) alors qu'ils pourraient être classés en maladies professionnelles. Il peut aussi y avoir d'autres formes de sous-déclarations qui relèvent soit de la fraude, soit de l'abus. C'est pourquoi nous disposons d'un programme de lutte contre la fraude et l'abus - absence de déclaration d'accident du travail ou incitation au retour trop précoce à l'emploi afin de diminuer la charge des indemnités journalières.
Il existe donc de nombreuses inconnues sur l'évolution des charges de transferts. Nous ne pouvons notamment pas anticiper le montant du transfert à la branche maladie qui sera retenu à partir de la prochaine étude de la commission Diricq.
La branche AT-MP dégagera un excédent pour 2013 et la dette devrait commencer à baisser. A partir de 2014, la dotation au Fiva devra cependant être réactualisée et majorée. Il faudra trouver une compensation... A partir de 2015, la situation sera telle que je viens de la décrire. Nous n'avons donc pas de certitudes à deux ou trois ans.
Je précise que lorsqu'on parle d'une augmentation du taux net de cotisation de 0,05 point, il s'agit d'un taux moyen. Le calcul de la cotisation, assez complexe, fait appel à la fois à la sinistralité des entreprises et à la mutualisation des risques entre celles-ci. La question restant à trancher est de savoir si cette augmentation de 0,05 point pèsera principalement sur le taux brut, lié à la sinistralité des entreprises, ou si elle sera mutualisée. Cet arbitrage technique fait l'objet de discussion avec les partenaires sociaux.
En cas d'augmentation du taux brut, la fédération la plus concernée par la sinistralité est celle du bâtiment ; faire principalement porter cette augmentation sur le taux brut entraînerait une charge importante pour l'économie générale du secteur. La mutualisation est plus favorable au bâtiment mais reporte une partie de l'augmentation sur des secteurs à très faible sinistralité. Un équilibre doit être trouvé entre les entreprises. Cette question devrait être rapidement arbitrée puisque la tarification devra être présentée aux partenaires sociaux lors de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles de novembre.