Intervention de Dominique Gillot

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 13 novembre 2014 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2015 — Mission « recherche et enseignement supérieur » - examen du rapport spécial

Photo de Dominique GillotDominique Gillot, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication :

J'interviens à présent comme rapporteur pour avis de la recherche, après avoir été rapporteur pour avis de l'enseignement supérieur sur lequel je garde un oeil attentif. Comme vous, je salue les efforts de la Nation en faveur de l'enseignement supérieur et la recherche qui sont une priorité du Gouvernement. J'ai noté votre inquiétude sur la création des 1 000 emplois. Les évaluations montrent qu'il y a une petite dérive, mais elle ne concerne pas la totalité de ces postes. Sur les postes créés, un tiers est absorbé pour le rééquilibrage budgétaire des établissements en difficulté ou qui le jugent nécessaire, un tiers pour les fonctions académiques et un tiers pour le renforcement des fonctions supports, ce qui est bien utile et rejoint votre souhait d'un meilleur management des établissements. Les présidents d'université appartiennent à une génération qui comprend bien l'importance de leur mission de management et de gestion et prennent en charge les formations nécessaires pour structurer l'administration. C'est aussi l'objet des COMUE dont vous avez craint qu'elles augmentent les coûts. Pour participer régulièrement au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), je constate que la majeure partie des projets de regroupement qui sont présentés s'appuie sur une démarche de projet, de partage des compétences et de mutualisation des moyens au service de la stratégie des établissements, de la stratégie territoriale et de la réussite des étudiants. Il est bon de laisser le temps à ces regroupements de se mettre à l'oeuvre et de faire la preuve de leur efficacité. Mais cela me semble bien parti.

Il y a aussi un effort qui est fait pour clarifier les critères de présence, de performance, de réussite et d'insertion professionnelle des jeunes diplômés. Cette culture n'est pas toujours partagée, mais elle est en train de se développer. La nécessaire diversification des ressources est aussi dans les esprits avec les difficultés que cela représente. Aujourd'hui les établissements se rendent compte qu'ils ont les capacités internes, en contractualisant les missions de formation continue ou en offrant des services extérieurs à partir des compétences de l'université. Cependant, je formule un bémol. Il y a effectivement une nécessité urgente de revoir les procédures d'attribution des allocations. Philippe Adnot et moi-même avions produit un rapport en avril 2013, au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication et de la commission des finances, intitulé « Financement des universités : l'équité au service de la réussite de tous », qui reste d'actualité. Malheureusement, les résistances culturelles et financières sont toujours fortes. Le ministère aura du mal à imposer une mesure qui n'est pas encore acceptée par l'ensemble des bénéficiaires.

Concernant la recherche, la principale information que nous devons retirer de l'exposé très précis de Michel Berson est l'attention permanente portée à l'emploi scientifique. J'ai noté la reconduction des crédits CIFRE et la prise en compte du principal risque existant qui est le désintérêt des entreprises pour la recherche collaborative. L'Agence nationale de la recherche (ANR) est véritablement engagée pour exercer une force d'impulsion plus importante pour organiser des projets partenariaux entre l'université, les organismes et les entreprises. Ces trois vecteurs de créativité sont nécessaires à la recherche en tant qu'investissement d'avenir. La dépense privée en recherche et développement est encore trop faible au regard des standards de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Les appels à projet de l'ANR ne sont pas la première source de contrats à durée déterminée (CDD) contrairement à une idée reçue. Il est injuste de l'accuser de générer de la précarité. Les organismes eux-mêmes recourent de manière inconsidérée à des CDD pour éviter de pérenniser des emplois. Pour accompagner le nouveau PCRD « Horizon 2020 », l'ANR s'apprête à mettre en oeuvre des crédits d'incitation à la création d'équipes pluridisciplinaires à même de participer avec succès aux appels à projets, ce qui concrétise la stratégie du Gouvernement afin d'accroître la participation française aux appels à projets de niveau européen. Car si les appels à projets individuels marchent bien, ce n'est pas le cas des appels à projets en équipe. Les équipes pluridisciplinaires ne se constituent pas suffisamment. Pourtant, quand elles se constituent, elles réussissent.

Quant à l'emploi scientifique, le soutien aux jeunes docteurs est multiforme. La solution ne réside pas uniquement dans l'emploi public scientifique. Il est nécessaire que les jeunes chercheurs puissent irriguer l'ensemble de la société, l'entreprise, la recherche et développement, les fonctions publiques. Il y a là encore des résistances à vaincre.

Je relève des difficultés de lecture des moyens consentis au partage de la culture scientifique, technique et industrielle (CSTI). En application de l'article 15 de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche, la CSTI fait partie de la stratégie nationale de recherche et doit être prise en compte dans sa mise en oeuvre. Toutefois, cela ne se lit pas dans les documents budgétaires. La création d'un service spécifique au ministère et la gestation du Conseil national de culture scientifique, technique et industrielle va permettre de finaliser l'évolution de la gouvernance nationale de ce secteur essentiel à la recherche dans la construction de la connaissance et son partage. Je sollicite la vigilance de la commission des finances sur l'affectation tangible des moyens consacrés à la CSTI, et notamment à la conservation des collections scientifiques qui peuvent disparaître d'un moment à l'autre.

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