Intervention de Luciano Vandelli

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 27 novembre 2014 : 3ème réunion
Nouvelle organisation territoriale de la république — Auditions sous forme de table ronde d'universitaires spécialisés dans l'approche comparative des organisations territoriales au sein de l'union européenne

Luciano Vandelli, professeur de droit public à l'Université de Bologne :

Votre invitation m'honore et est l'occasion de réfléchir aux évolutions de votre système territorial. Si les exigences de modernisation et de clarification des compétences, de rationalisation, de simplification et de transparence nous sont communes, partout en Europe, nous y apportons néanmoins des réponses assez différenciées. Je partage toutefois l'idée avancée par le professeur Auby que les spécificités nationales sont moindres qu'autrefois, ce qui nous amène à mettre en cause des éléments très enracinés dans notre tradition commune.

Alors qu'a toujours prévalu, historiquement, un principe d'uniformité dans l'organisation du système territorial, on en vient à différencier les territoires métropolitains et les autres. Dans le même temps, la gouvernance de chaque métropole est modulée, chacune étant dotée de moyens spécifiques. En France, c'est le législateur qui s'en charge, tandis qu'en Italie, chaque territoire est appelé à écrire son propre statut. La loi votée cette année crée des villes métropolitaines, collectivités qui, pour les villes les plus importantes, vont se substituer aux provinces, à compter du 1er janvier 2015. Dans l'intervalle, chaque ville est appelée à définir son propre statut, sa gouvernance, les relations des communes et associations de communes avec la métropole.

S'agissant de la répartition des compétences, j'observe qu'en Italie, à la différence de la France, la clause de compétence générale n'a pas été mise en cause : c'est plutôt la contrainte financière qui amène les collectivités à réduire le champ de leur intervention.

En Espagne, en Allemagne et en Italie, les régions sont dotées d'un pouvoir législatif. En Italie, la réforme constitutionnelle, approuvée en première lecture au Sénat, prévoit de réduire ce pouvoir législatif, pour renforcer, en corollaire, la participation des régions à l'établissement des règles nationales, via un Sénat des représentations territoriales. Quant aux provinces, leurs compétences administratives, en vertu d'une récente réforme, s'amenuisent, pour être transférées aux villes métropolitaines, qui se renforcent. En l'absence de métropole, ces compétences vont, pour une part, aux régions, pour une autre part aux communes et associations de communes. J'ajoute que la métropole est appelée à jouer un rôle important dans l'élaboration et l'approbation d'un plan stratégique de développement économique du territoire.

Pour simplifier ce que vous appelez le mille-feuille - qu'en bon Bolognais je qualifierai plutôt de lasagnes -, nous n'avons pas supprimé les provinces, ce qui aurait supposé une réforme constitutionnelle. La loi relative aux métropoles, cependant, a prévu que celles-ci, de même que la ville métropolitaine, seront gouvernées par les maires et conseillers communaux. Il faut savoir que chez nous, en l'absence de cumul des mandats, chaque niveau de collectivité avait sa classe politique. Il n'y en aura désormais plus qu'une seule, prémices d'une simplification des compétences : les mêmes personnes auront à se prononcer sur la proximité et sur ce qui relève d'un territoire plus vaste.

Géographiquement parlant, nos régions sont de petite taille. Surtout, les plus petites sont aussi celles qui ont une langue différente et bénéficient parfois d'une protection internationale, comme le Val d'Aoste ou le Haut-Adige. Pour les autres, cependant, des fusions sont envisagées. Mais c'est avant tout sur les provinces que le débat est le plus vif. Alors qu'elles étaient 70 à l'époque de l'unité nationale, elles sont aujourd'hui 110, certaines de très petite taille. Simplifier appelle aussi, à mon sens, une réforme de l'administration de l'État, afin de faire des préfectures des bureaux généraux de la représentation de l'État, absorbant toutes les administrations périphériques.

Pour les communes, l'Italie n'a pas, comme la France, suivi la voie des fusions qu'ont empruntée l'Angleterre, l'Allemagne, la Belgique ou les pays du nord. En dépit d'incitations financières à la fusion, nous comptons toujours 8 100 communes. Depuis deux ans pourtant, la tendance semble s'inverser. Ainsi, dans la province de Bologne, six communes viennent de fusionner pour n'en former qu'une seule, de 30 000 habitants. Les avantages en sont multiples, tant pour le respect du pacte de stabilité que par le poids que peuvent prendre les subventions économiques.

Les associations intercommunales, enfin, au nombre de quelque 400, regroupent un peu plus de 2 000 petites communes, et la loi récente se donne pour objectif de parvenir à couvrir l'ensemble du territoire.

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