Intervention de Hervé Le Bras

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 27 novembre 2014 : 3ème réunion
Nouvelle organisation territoriale de la république — Auditions sous forme de table ronde d'universitaires spécialisés dans l'approche comparative des organisations territoriales au sein de l'union européenne

Hervé Le Bras, directeur d'étude à l'École des hautes études en sciences sociales, chercheur émérite à l'Institut national de la statistique et des études démographiques :

Je suis honoré de votre invitation, qui me fait partie à cette docte assemblée de juristes. Il est vrai que si ma spécialité me range plutôt du côté des sciences sociales et de l'Histoire, je n'en ai pas moins eu, au cours de ma carrière, l'occasion de me familiariser avec les questions qui nous occupent ici, pour avoir animé un groupe de prospective de la Datar dont j'ai présidé, in fine, le conseil scientifique.

Ce qui m'a frappé, lorsque le projet de nouvelle carte territoriale, fusionnant des régions, a été annoncé, c'est le défaut d'objectifs assignés à cette réforme. Certes, trois arguments étaient mis en avant dans la lettre du Président de la République - donner à nos régions une taille européenne, assurer leur dynamisme économique, réaliser des économies de fonctionnement. Mais ils se laissent aisément démonter. La taille critique ? Mais celle des Länders allemands est très variable, et leur coefficient de Gini, qui mesure la dispersion de la population, est double de celui des nouvelles régions françaises, dessinées comme sous l'influence de notre vieux tropisme, l'illusion de l'égalité. Le dynamisme économique ? Mais il n'y a aucune corrélation entre la taille des Länders allemands et leur PIB par tête. Même chose pour la croissance de leur PIB au cours des dix dernières années. Quant à la question des économies d'échelle, je souscris pleinement à ce qu'a dit Robert Hertzog. Il faut y regarder de près. Une étude de l'Institut Esprit public sur une éventuelle fusion entre Haute et Basse-Normandie fait apparaître que l'on y perdrait de l'argent les sept premières années, pour n'en gagner un peu - 5% - qu'à partir de la huitième.

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