L'année 2014 sera marquée par un plan de 4 milliards d'euros d'économies supplémentaires. Le projet de loi de finances rectificative en porte une partie, avec l'annulation de 1,6 milliard d'euros de crédits sur le budget de l'État. Concernant la sécurité sociale, deux mesures d'économie figurent dans le projet de financement rectificative : la diminution de 800 millions d'euros de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) et la non revalorisation des prestations d'assurance vieillesse, pour un montant de près de 300 millions d'euros. Je rappelle que la réforme des retraites débattue en 2013 avait reporté l'indexation des pensions de retraite du 1er avril au 1er octobre 2014. Elle est ici repoussée au 1er octobre 2015 - étant entendu que seules sont touchées les retraités dont le montant total de pensions est supérieur à 1 200 euros. Le reste des mesures d'économie ne nécessite pas de traduction législative : il s'agit du report de dépenses d'investissement d'avenir, de moindres dépenses de l'Unédic et du fond d'action sociale de la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF), le tout pour un total de 1,3 milliard d'euros.
Venons-en maintenant à un « coup de projecteur » sur l'ONDAM : la sous-exécution, à hauteur de 1,4 milliard d'euros, constatée en 2013, sera pleinement intégrée à l'ONDAM 2014. Un rebasage de 800 millions d'euros est prévu par le projet de loi de financement rectificative, sachant que 600 millions d'euros avaient d'ores et déjà été pris en compte par la loi de financement initiale. Le dernier avis du Comité d'alerte sur le respect de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie conforte ce choix.
Qu'en est-il des soldes prévisionnels pour 2014 ? Celui du régime de base se dégrade de 200 millions d'euros par rapport aux prévisions, et celui du Fond de solidarité vieillesse (FSV) de 100 millions d'euros. Ce dérapage, en dépit des économies dont je viens de donner le détail, s'explique par une révision à la baisse de 1,7 milliard d'euros des prévisions de recettes pour 2014. Ceci n'est pas imputable aux cotisations, dont les recettes augmenteraient de 400 millions d'euros, ainsi qu'il apparaît dans le dernier rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, mais à de moindres recettes de CSG, pour 400 millions d'euros et à d'autres impôts et taxes affectés, pour 1,7 milliard d'euros, en raison, principalement, d'un moindre rendement des revenus de placement.
Au total, malgré un léger dérapage en 2014, le déficit de la sécurité sociale se réduit : il s'élèverait à 13,6 milliards d'euros contre 16,2 milliards d'euros en 2013. Les efforts entrepris portent leurs fruits, et l'on est désormais loin du déficit historique de 30 milliards d'euros en 2010.
J'en viens aux mesures qui prendront effet en 2015, en commençant par celles du Pacte de solidarité. Les cotisations des salariés du secteur privé, tout d'abord, seront réduites de 3 points au niveau du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC), avec une dégressivité jusqu'à 1,3 SMIC. Au niveau du SMIC, le salarié paiera 520 euros de charges sociales en moins par an. La mesure bénéficiera à 5,2 millions de salariés. Le coût pour les organismes de sécurité sociale sera de 2 milliards d'euros en 2015.
Pour les fonctionnaires, le dispositif est légèrement différent : la réduction est plus faible au niveau du SMIC (2 points) mais elle s'appliquera de façon dégressive jusqu'à 1,5 SMIC. Au niveau du SMIC, un fonctionnaire paiera donc 330 euros de moins par an et 51 euros pour une rémunération équivalant à 1,5 SMIC. La mesure bénéficiera à 2,2 millions de fonctionnaires, dont l'ensemble des fonctionnaires de catégorie C, 70 % des fonctionnaires de catégorie B et 20 % des fonctionnaires de catégorie A, en début de carrière. Le coût pour l'État sera de 450 millions d'euros en 2015.
J'en arrive aux diminutions de charges des entreprises prévues par le Pacte de responsabilité. Il s'agit, tout d'abord, de la baisse de 1,8 point des cotisations patronales d'allocations familiales, jusqu'à 1,6 SMIC, soit le même champ que la réduction générale de cotisations de sécurité sociale dite « Fillon ». Cette baisse est uniforme et non dégressive. Le taux de cotisation passera ainsi de 5,25 % à 3,45 %. 1,5 million d'employeurs en bénéficieront, pour environ 10 millions de salariés. Le coût de la mesure est estimé à 3 milliards d'euros en 2015.
Vient ensuite la mesure dite « zéro cotisations unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) », annoncée par le président de la République en janvier, et confirmée par le Premier ministre en avril dernier. Dans le système dit « Fillon », les réductions au niveau du SMIC, qui portent sur les cotisations d'assurance vieillesse, maladie et d'allocations familiales, représentant 28,25 % de l'ensemble, sont différentes selon la taille de l'entreprise : ces 28,25 points de cotisation sont exonérés à hauteur de 28,1 % jusqu'à vingt salariés et de 26 % au-delà. La réforme proposée, outre qu'elle étend le champ d'application à d'autres cotisations et contributions recouvrées par les URSSAF - étant entendu que sont exclues d'autres prélèvements recouvrés par les URSSAF comme le versement transport et les cotisations d'assurance chômage, qui font l'objet d'une gestion paritaire - prévoit une exonération totale sur le groupe de cotisations retenu, ce qui représente 27,95 points pour les entreprises de moins de vingt salariés et 28,35 points pour les entreprises de plus de vingt salariés. Si l'on y ajoute la baisse de 1,8 point des cotisations famille, l'exonération de cotisations atteint 29,1 points pour les entreprises de vingt salariés et moins, et 30,15 points pour les entreprises de plus de vingt salariés.
Autrement dit, sur un salaire au niveau du SMIC, une entreprise de moins de vingt salariés, en 2014, dans le système Fillon, était exonérée de 28,1 points, sur un total de cotisations représentant 41,98 % du salaire brut, soit un reste à payer de 13,88 %. En 2015, sur un taux de cotisation qui ne sera plus qu'à 40,18 % du salaire brut, du fait de l'exonération de 1,8 point de cotisation d'allocations familiales, elle sera exonérée de 27,95 points : le reste à payer n'est plus que de 12,23 % - 1,65 point de moins - soit 286 euros par an. Le même raisonnement s'applique pour les entreprises de plus de vingt salariés : le reste à payer est ramené de 18,61 % à 14,46 % - 4,15 points de différence - soit 720 euros sur l'année.
Ce nouveau mécanisme annule l'effet de seuil des exonérations « Fillon », qui défavorisaient les entreprises de plus de vingt salariés et simplifie le système, en exonérant totalement un groupe de cotisations pour l'emploi d'un salarié payé au SMIC. Le coût de la mesure est estimé à 1,4 milliard d'euros. Si l'on y ajoute les 3 milliards d'euros des cotisations d'allocations familiales, cela représente un total de 4,4 milliards d'euros.
Une mesure équivalente est prévue pour les travailleurs indépendants. Il s'agit de la baisse des cotisations d'allocations familiales de 3,1 points jusqu'à 3 SMIC, à quoi s'ajoute une dégressivité jusqu'à 3,8 SMIC, pour un coût estimé à 1 milliard d'euros. La mesure bénéficiera à 82 % des travailleurs indépendants et à 95 % des non-salariés agricoles.
Le pacte prévoit, enfin, une diminution de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S) - en vue de sa disparition à l'horizon 2017 - pour un coût avoisinant 6 milliards d'euros, dont 1 milliard d'euros en 2015. Avec un abattement d'assiette de 3,25 millions d'euros, seules les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à ce montant seront, de facto, imposables, quand le seuil d'entrée dans l'imposition est aujourd'hui fixé à 760 000 euros. La mesure entraînera la diminution de 67 % du nombre d'entreprises redevables, essentiellement des petites et moyennes entreprises (PME).
Pour récapituler, l'ensemble des mesures d'allègement de charges sur les entreprises et les ménages représenteront 8,9 milliards d'euros en 2015, 9,2 milliards d'euros en 2016 et un peu plus de 9,5 milliards d'euros en 2017. Étant entendu que ce collectif ne prend en compte que les mesures relatives à 2015 et que le Pacte de responsabilité prévoit de nouvelles exonérations de charges en 2016, ainsi que la poursuite de l'extinction de la C3S.