Dans le projet annuel de performances (PAP), les missions de la gendarmerie sont présentées à travers cinq actions :
- l'action n° 1 « Ordre et sécurité publics », qui correspond aux activités de la gendarmerie départementale et de la gendarmerie mobile et regroupe 39% des crédits ;
- l'action n° 2 « sécurité routière », soit 9,5% des crédits ;
- l'action n° 3 « missions de police judiciaire et concours à la justice », 22% des crédits ;
- l'action « commandement, ressources humaines et logistique », qui correspond aux activités de soutien et représente 27% des crédits ;
- et l'action « exercice des missions militaires », qui renvoie aux opérations extérieures et aux opérations militaires sur le territoire national et à laquelle sont consacrés 2% des crédits.
Si l'on regarde les statistiques d'activité de la gendarmerie pour 2013, on constate que cette répartition des moyens budgétaires est globalement cohérente avec le temps que celle-ci consacre à ses différentes missions : 40% du temps est consacré à la défense civile, 28% aux missions judiciaires, 24% aux activités de soutien et 4% aux missions militaires.
En ce qui concerne l'ordre public et la sécurité, le contexte est celui d'une délinquance qui progresse sur l'ensemble du territoire et du développement de diverses formes de criminalités : criminalité organisée, criminalité itinérante, réseaux transnationaux émanant d'Europe de l'Est, cybercriminalité...
Du fait de la contrainte budgétaire, cette situation appelle une évolution du dispositif territorial, fondé sur quelque 3 000 brigades, ainsi que la mise en place d'une nouvelle proximité.
L'évolution du dispositif territorial implique de poursuivre les redéploiements entre zones de police et zones de gendarmerie, afin de garantir la continuité et donc l'efficacité de l'action des forces de l'ordre. Ainsi, la compétence de la police nationale a vocation à s'étendre à des communes relevant actuellement de la gendarmerie et situées dans la continuité de grandes plaques urbaines ou enclavées en zone de police. A l'inverse, la gendarmerie nationale a vocation à reprendre les petites circonscriptions de sécurité publique isolées, pouvant difficilement être renforcées par d'autres unités de la police nationale. En 2013, un mouvement de redéploiements portant sur plus d'une vingtaine de communes a eu lieu. D'autres pourraient intervenir en 2015. Il est à noter que la gendarmerie souhaiterait prendre en charge l'ensemble des villes de moins de 20 000 habitants, mais ce point n'est pas encore arbitré.
L'évolution du dispositif territorial pourrait signifier ponctuellement un regroupement accru des moyens et donc la fermeture de très petites brigades, dont l'effectif est trop réduit pour conduire une action efficace. De telles décisions doivent faire l'objet d'une concertation approfondie, en particulier avec les élus locaux.
Parallèlement, la gendarmerie mobile et même les réservistes sont envoyés en renfort dans les territoires qui en ont le plus besoin.
Ces recompositions s'accompagnent d'une volonté de rénovation du lien de proximité, qui s'appuie notamment sur l'usage du numérique. Le directeur général de la gendarmerie nationale, le général Denis Favier, nous a fait part de son projet d'équiper chaque gendarme d'une tablette lui permettant d'être connecté en permanence, y compris hors de son véhicule, au réseau de la gendarmerie, et donc plus mobile et réactif. Mais la proximité numérique, ce sont aussi des mesures tendant à impliquer les citoyens, par exemple en mettant à leur disposition des applications sur Smartphones leur permettant d'envoyer des alertes, à l'image de l'application « stopcambriolages ».
Pour vos rapporteurs, ces initiatives sont incontestablement des avancées, et ils s'en félicitent. Néanmoins, il importe également de renouer et renforcer les contacts sur le terrain, avec la population, mais aussi avec les différents acteurs des territoires qui sont en demande de proximité (les maires, les travailleurs sociaux...).
L'accent mis sur la proximité a sans aucun doute contribué aux bons résultats obtenus en 2014 dans l'application du plan national de lutte contre les cambriolages. Rappelons que le ministre de l'intérieur avait lancé ce plan en septembre 2013, après le constat d'une forte augmentation du nombre des cambriolages commis. L'action multiforme mise en oeuvre par la gendarmerie dans ce cadre (groupes d'enquête de lutte anti-cambriolages et brigades d'observation et de surveillance (BOS) au niveau local, présence dissuasive sur le terrain, surveillance des flux sur les axes de circulation, systèmes d'alertes, travail au sein de l'Office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI), conjointement avec la police, sur le démantèlement de gros réseaux...) lui a permis d'inverser la tendance en 2014, avec une baisse de plus de 8% du nombre de cambriolages sur les six premiers mois de l'année.
En ce qui concerne les autres missions de la gendarmerie, celles en rapport avec l'activité pénale sont très prenantes, du fait de l'importance de la délinquance. La gendarmerie souhaite un allégement des tâches et des formalités dans ses relations avec la justice, marquées par la lourdeur des procédures. La multiplication des directives pénales, en ce qui concerne notamment la garde à vue, mais aussi des normes européennes, complique son travail. Enfin, la gestion des scellés revêt un caractère particulièrement fastidieux. A cet égard, il serait intéressant que les marchandises sous scellés, en particulier les véhicules, puissent davantage être mises à la disposition de la gendarmerie qui manque cruellement de moyens. En ce qui concerne les transfèrements, un accord a finalement été trouvé et ils devraient entièrement revenir à l'administration pénitentiaire à l'horizon 2019.
Concernant la sécurité routière, la gendarmerie poursuit l'objectif de ramener le nombre de tués sur les routes à moins de 2 000 par an. La lutte contre l'insécurité routière incombe à la fois aux brigades et à des unités spécialisées, les escadrons départementaux de sécurité routière, et ce sur près de 85% du réseau routier français.
Enfin, s'agissant des missions militaires, je rappelle que début septembre, 172 gendarmes étaient engagés dans 16 opérations extérieures (OPEX), sous commandement international, européen ou national, le plus gros effectif (62 gendarmes) étant déployé en République centrafricaine. Pour 2014, les dépenses prévisibles pour les OPEX sont de l'ordre de 12,5 millions d'euros, pour une dotation de 15 millions d'euros, dotation qui est reconduite à l'identique pour 2015.
Outre la poursuite de son action dans les domaines précédemment évoqués, la gendarmerie entend renforcer son action en matière de lutte contre la cybercriminalité. A ce titre, elle anime, avec la police nationale, l'office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication (OCLCTIC), qui intervient contre les fraudes aux moyens de paiement, les escroqueries sur Internet, mais aussi les piratages informatiques et les atteintes aux systèmes d'information gouvernementaux et gère une plateforme d'harmonisation des signalements. La gendarmerie intervient également via le Service technique de recherche judiciaire et de documentation (STRJD) et l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN), qui disposent tous deux d'une division d'une vingtaine de gendarmes consacrée à la lutte contre la cybercriminalité. Enfin, il existe tout un réseau d'enquêteurs (260) et de correspondants (1 000) NTEC, répartis sur l'ensemble du territoire, au plus près des unités.
Un mot avant de conclure, puisque l'actualité nous y invite, sur le survol des centrales par les drones. Comme vous le savez, la gendarmerie est responsable de la protection des centrales nucléaires contre les intrusions via les pelotons spécialisés de protection de la gendarmerie, les PSPG. Ces unités, rassemblant en tout 882 gendarmes, sont affectées à la protection de 20 sites nucléaires civils, soit 40 à 50 hommes par site, les frais liés à cette mission de protection étant pris en charge par EDF dans le cadre d'une convention. Ces survols appellent une réponse à la fois sur un plan matériel (comment les neutraliser alors qu'il n'est pas possible, pour des raisons de sécurité de l'environnement, de tirer sur les drones ?) et sur un plan juridique (comment incriminer le survol des centrales par les drones, qui ne sont pas des aéronefs ?). Il s'agit là d'un sujet de première importance, sur lequel les autorités travaillent avec la discrétion qui s'impose. Pour conclure, je vous propose de donner un avis favorable à l'adoption du budget de la gendarmerie pour 2015 qui, même s'il reste contraint, prend en compte ses besoins.