Intervention de Louis Nègre

Commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire — Réunion du 3 décembre 2014 : 1ère réunion
Rapport public thématique relatif à la grande vitesse ferroviaire — Audition de Mm. François-Roger Cazala arnold migus paul-henri ravier et andré le mer conseillers maîtres à la cour des comptes

Photo de Louis NègreLouis Nègre :

Je félicite en premier lieu la Cour des comptes pour ces travaux, qui nous manqueraient si nous n'en bénéficiions pas ! Ce rapport est stimulant et également le bienvenu. Celui de 2012, rédigé à la demande du Sénat, nous a beaucoup aidés pour faire prendre conscience du problème aux autorités de ce pays.

Les Suisses, en 2005, avaient déjà attiré notre attention sur ce point, mais votre rapport a permis de compléter cette analyse et de conclure que l'État ne gère pas bien notre pays dans ce domaine.

Vous demandez aux politiques d'être plus réalistes : vous avez cent fois raison ! Si notre pays, depuis quelques décennies, l'avait été davantage, on n'aurait pas aujourd'hui 2 000 milliards d'euros de dettes, et nous nous porterions mieux, jusque dans le domaine ferroviaire !

Vous avez également raison lorsque vous affirmez que la grande vitesse ne constitue pas une panacée, même si elle représente un important succès technologique, que nous n'avons d'ailleurs que très modérément exporté.

Si la première de vos recommandations ne nous pose pas problème, ce n'est pas le cas de la deuxième, sur laquelle je reviendrai plus tard...

Nous partageons la troisième recommandation, qui prône la transparence et l'accès aux données, en l'absence de concurrent pour l'opérateur historique.

Nous sommes également d'accord avec la contre-expertise que préconise la quatrième recommandation, ainsi qu'avec la cinquième recommandation, relative aux études préliminaires qui permettent de connaître les éléments sur lesquels le politique va fonder ses décisions.

Quant à la sixième recommandation, elle consiste à veiller au règlement par l'AFITF de ses engagements financiers vis-à-vis de RFF, qui représentent plus de 770 millions d'euros d'arriérés. Encore faudrait-il que l'État, qui alimente l'AFITF, puisse lui donner les moyens de mener sa politique !

Une remarque concernant la septième recommandation : celle-ci conseille de concentrer les moyens financiers sur l'entretien du réseau : cela ne suffit pas ! Notre réseau a non seulement besoin d'être entretenu, mais également modernisé. Or, l'entretien et la modernisation constituent deux actions bien distinctes. Il existe encore des postes d'aiguillage complètement obsolètes !

Enfin, nous sommes d'accord avec la huitième recommandation, qui suggère d'adopter une règle d'or empêchant chacun de dépenser plus d'argent que ce dont il dispose.

Je reviens un instant sur la deuxième recommandation, qui présente une difficulté. Vous êtes ici devant la commission de l'aménagement du territoire. Or, vous estimez que les 283 gares intermédiaires existantes sont excessives. Sans doute, mais il s'agit d'une discussion de fond... À quoi le TGV sert-il ? Il sert à gagner du temps, mais ne sert-il pas également à aménager le territoire ?

Je ne sais si tous nos collègues sont au courant que l'État finance le système ferroviaire français à hauteur de 5 milliards d'euros - dont 3,3 milliards d'euros pour les régimes spéciaux de retraite. Or, la part des collectivités territoriales s'élève quant à elle à 6 milliards d'euros ! Il est utile de le répéter dans la maison des collectivités territoriales ! Et rappelle que la dette dépasse plus de 40 milliards d'euros...

On constate en second lieu une baisse importante et continue des dotations de l'État à RFF, ce qui peut expliquer certaines choses. En dix ans, les dotations sont passées de 2,8 milliards d'euros à 1,9 milliard d'euros. La France est parmi les pays européens ayant le plus faible taux de subventionnement du gestionnaire d'infrastructures. Il s'élève à 32 %, contre 90 % en Suède, 61 % au Royaume-Uni, et 50 % en Allemagne !

Or, les habitants des zones les moins urbanisées, qui représentent les trois quarts de la population française, constituent seulement 25 % des utilisateurs de TGV. Il y a donc, de fait, deux catégories de citoyens.

Lors de l'audition précédente, Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy, commissaire générale à l'égalité du territoire, a confirmé la dégradation des services publics dans les territoires ruraux, en particulier dans le domaine des transports. Comment améliorer la cohérence de ceux-ci, et redonner espoir à ces territoires, si vous estimez qu'il existe déjà trop d'arrêts TGV ?

Votre rapport est bâti sur une série d'évaluations qui vous conduisent à un certain nombre de conclusions. Le taux de la valeur actualisée nette a été modifié par une instruction du 16 juin 2014. Par ailleurs, il existe une opposition entre la simple évaluation socio-économique et l'analyse multicritère. Que pouvez-vous nous en dire ?

La Cour des comptes critique l'AFITF de manière récurrente. Cette position est compréhensible à l'égard des règles d'orthodoxie budgétaire, mais si ces crédits n'étaient pas sanctuarisés, la situation serait pire encore ! Pouvez-vous le reconnaître et porter un jugement plus pondéré dans ce domaine ?

Enfin, vous soulignez le manque de stratégie de l'État. C'est bien le reproche que l'on peut adresser au système ferroviaire. J'espère que la nouvelle loi - que je n'ai personnellement pas votée - permettra d'améliorer les choses dans ce domaine !

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