Nous avons beau être habitués, ici ou ailleurs, à l'intensité des débats sur l'agriculture, le manichéisme d'Alain Houpert me surprend. Le budget de l'agriculture - enseignement, quelques mesures sociales, filières, offices... - pèse peu. Pour avoir été en responsabilité sur ces questions, je sais qu'il est compliqué de maintenir des crédits dans une situation nationale et européenne telle que la nôtre. Le Gouvernement s'est efforcé de sauver l'essentiel : la PAC. Car la question est bien de savoir si elle existera encore après 2020. Il s'est battu avec opiniâtreté, et la part de la France en est sortie grandie. Les agriculteurs le savent. Cela me fait sourire : à chaque réforme de la PAC, les agriculteurs se battent pour sauvegarder la PAC d'avant, celle-là même qu'ils avaient combattue lors de sa mise en place. Je me souviens de leurs actions contre les quotas laitiers, en 1982 - jeune parlementaire, j'avais été confronté à une tentative de pendaison ; les mêmes les ont défendus ensuite...
Les gouvernements, de droite comme de gauche, se sont battus pour que la France reste le premier bénéficiaire de la PAC. Je regrette les distorsions entre les terres les plus et les moins productives. Là où le rendement est de 110 quintaux à l'hectare, les droits à paiement unique (DPU) sont de 352 euros par hectare, tandis qu'ils sont de 180 euros là où le rendement est de 55 quintaux à l'hectare... Ils ne profitent pas toujours à ceux qui en ont le plus besoin.
Reste le problème éthique et économique de l'article 47. Il faut préserver les contrats vendanges. Je ne parle pas des grands crus. La viticulture de qualité a encore besoin de vendanges manuelles et non mécaniques. Aujourd'hui, les viticulteurs peuvent faire appel par Pôle Emploi à des chômeurs qui gagnent en moyenne 220 euros sur trois semaines. Demain, ils devront mécaniser les récoltes ou ne recourir qu'à une main d'oeuvre étrangère, qui remonte du Languedoc à la Bourgogne en passant par les côtes du Rhône, avant d'aller peut-être en Champagne.
L'argument selon lequel le monde viticole a le CICE et ne peut avoir le beurre et l'argent du beurre ne tient pas : les exonérations profitent aux vendangeurs, pas aux employeurs. Plus à gauche que jamais, je défendrai les salariés. La situation est différente pour les forestiers, dont l'activité n'est pas soumise à la même saisonnalité. Je me souviens de la loi Evin, présentée comme une loi de santé publique : vingt-cinq ans après, on lit encore au Clos Vougeot : « toujours en vin, jamais Evin ». Évitons une perte de substance pour la mutualité sociale agricole (MSA) comme pour les territoires. Les acteurs de la vigne aux Hospices de Beaune m'ont demandé d'être vigilant : je le serai.