Certes, mais ils épargnent aussi près de 14 % de leur revenu, ce qui est considérable. C'est le résultat du traumatisme causé par l'éclatement de la bulle et la crise des subprimes. Il nous incombe de restaurer la confiance et de redonner du sens à la finance, car sans elle, il n'y a pas de croissance. Le PEA est un bon instrument et je suis satisfait que les pouvoirs publics l'aient maintenu, aient augmenté son plafond, et l'aient complété par le PEA-PME. Espérons simplement que les Français n'entreront pas sur le marché des actions lorsque les cours seront au plus haut.
EMIR est une réforme majeure. On a laissé se développer dans les années 2000 des instruments nouveaux - dérivés sur actions, sur taux... - à l'abri de toute régulation, sur les marchés over the counter (OTC). Or seules 15 % ou 20 % des opérations ont une finalité de couverture des risques. Le volume total a atteint 60 trillions de dollars au moment de la crise ! L'un des axes majeurs de notre action sera de soumettre progressivement cette masse à une régulation. Je n'ai pas de réponse définitive à votre question, mais je ne suis pas très optimiste : les référentiels centraux que nous avons agréés sont presque tous américains, ce qui est dommage. Des chambres de compensation existent en Europe, et développeront leur activité en compensant une partie de cette masse de dérivés, mais les Américains ont une longueur d'avance et fixent les règles les premiers. C'est l'un des terrains ouverts à Euronext, dont la faiblesse est toutefois de n'avoir plus de chambre de compensation propre. Dans ce jeu compliqué, il y a du business à faire, mais il n'est pas évident que ce soient des Français qui s'emparent de cette activité. Nous participons à des collèges de régulateurs qui examinent la façon dont LCH et Deutsche Börse vont se lancer dans ces métiers. C'est une gigantesque partie stratégique, dont je ne connais pas l'issue.
Il y a indéniablement un écart entre les grands groupes d'origine française et le territoire français. La logique des premiers consiste à se mondialiser, de sorte qu'ils peuvent bien se porter tandis que notre économie stagne. Efforçons-nous de ne pas donner l'image de nationalistes étroits : nous devons avant tout être compétitifs. La détermination de la politique économique n'est pas de ma compétence, ni la façon dont on présente ces choix aux milieux d'affaires et à l'opinion publique. Mais tout est question de dosage, car nos groupes font des acquisitions à l'extérieur ; il est normal que des groupes étrangers en fassent chez nous. Je suis plus inquiet de la tendance à déplacer les centres de décisions hors de France. Mais les facteurs à l'oeuvre ne sont pas strictement financiers, je l'ai dit.