Intervention de Jean-Louis Carrère

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 9 avril 2014 : 1ère réunion
Création d'un espace aérien commun entre l'union européenne et ses etats membres et la république de moldavie — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Jean-Louis CarrèreJean-Louis Carrère, président :

en remplacement de Mme Josette Durrieu, rapporteure. - Mes chers collègues, nous examinons ce matin le projet de loi n° 167 (2013-2014) autorisant la ratification de l'accord sur la création d'un espace aérien commun entre l'Union européenne et ses Etats membres et la République de Moldavie.

Malheureusement, notre collègue rapporteure, Mme Josette Durrieu, a été impérativement retenue par la session de l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe à Strasbourg. Elle m'a donc communiqué son intervention que je m'apprête à vous lire, et renvoie à son rapport très détaillé.

Ancienne république de l'Union soviétique, indépendante depuis 1991, elle a subi un affrontement violent en 1992 qui s'est soldé par la proclamation de la sécession de la Transnistrie, partie est du territoire la plus riche. La Moldavie a initié un renouvellement profond de ses institutions. Depuis lors, ce petit pays a entrepris de nouer de solides relations politiques, économiques, commerciales, culturelles et sociales avec l'Union. Cependant la Moldavie n'a pas su s'engager dans la procédure d'intégration à l'Union européenne, alors qu'elle était partie intégrante des pays de la région est des Balkans qui l'ont rejointe.

Cette démarche a conduit, dès 1994, à la signature d'un accord de partenariat et de coopération. Et c'est très récemment qu'un accord d'association a été paraphé, lors du sommet de Vilnius, en 2013.

Une autre illustration de ce rapprochement avec l'Union européenne concerne plus particulièrement notre sujet. Il s'agit de la mise en oeuvre de la politique européenne de voisinage, en matière aérienne. En effet, la Moldavie constitue l'un des seize partenaires de cette politique aux côtés notamment de la Géorgie, de l'Ukraine, de la Jordanie, du Liban, ou du Maroc.

Mise en place en 2004, elle vise à encourager des relations plus étroites avec les pays limitrophes de l'Union européenne. Elle s'est traduit notamment par la création « d'espaces aériens communs » afin de favoriser les échanges avec les pays dits de voisinage.

C'est ainsi qu'ont déjà été conclus des accords de transport aérien avec les pays des Balkans occidentaux, l'Islande et la Norvège, en 2006, avec le Maroc la même année puis avec la Géorgie et la Jordanie en 2010.

Quant au présent accord, soumis à votre examen, il illustre la mise en oeuvre de la politique de coopération avec la Moldavie dans les domaines de la sécurité, de la sûreté et de la gestion du trafic aérien.

Négocié par la Commission européenne, cet accord, qui comporte 29 articles et 4 annexes, a été conjointement signé par l'Union et chacun des Etats membres, le 26 juin 2012.

Les bénéfices de la mise en oeuvre d'un tel accord pour la France sont triples.

1 - Tout d'abord, alors que 16 Etats sont actuellement liés à la Moldavie par des traités aériens bilatéraux, cet accord constitue pour la France un premier lien en ce domaine, en l'absence d'une convention bilatérale franco-moldave.

Se substituant à l'ensemble de ces traités, l'accord va donc permettre la mise en place d'un cadre juridique unique pour l'exploitation des services aériens entre la Moldavie d'une part, et les membres l'Union européenne dont la France, d'autre part.

2 - Autre avantage, le marché aérien sera progressivement ouvert aux entreprises de transport. Cette ouverture tend à offrir le droit aux compagnies aériennes européennes et moldaves de desservir l'intégralité des routes, entre tout aéroport situé dans l'Union européenne et toute destination en Moldavie.

En outre, la suppression de toutes les limitations antérieurement appliquées à ces services vise à permettre à ces transporteurs de fixer librement les fréquences, les capacités et les tarifs de leurs services en fonction des opportunités du marché.

En ce qui concerne les impacts économiques de cette ouverture, ils sont peut-être plus incertains.

La Commission européenne évalue à 15 %, la croissance annuelle du transport aérien entre l'Union européenne et la Moldavie. Elle estime à 17 millions d'euros les gains économiques potentiels pour ce pays.

Toutefois, il convient probablement de nuancer ces estimations, compte tenu de la taille modeste du marché. On ne dénombre que deux compagnies aériennes desservant le territoire européen et que six entreprises de transport aérien européennes desservant la Moldavie.

Selon Eurostat, le trafic des passagers avec l'Union européenne représente seulement 465 000 passagers en 2010. Pour la France, les services directs avec la Moldavie concernent environ 8 000 passagers par an.

Ainsi, l'ouverture de ce marché ne pourra se traduire par une augmentation significative que si l'offre vers la Moldavie s'améliore et si un intérêt économique conduit les transporteurs à ouvrir de nouvelles dessertes dans le cadre de ce marché.

3 - L'enjeu de cet accord se situe au-delà des aspects économiques. Il réside, avant tout, dans la volonté politique ancienne de rapprochement de la Moldavie avec l'Union européenne. Cette priorité est affirmée depuis 2009 par les Moldaves. Mais c'est aussi une démarche qui revêt un intérêt politique et stratégique.

Cette démarche conduit à l'harmonisation des normes moldaves sur les règles européennes. J'insiste sur ce point essentiel. En effet, cette mise en conformité législative conditionne, l'ouverture du marché aérien. Elle permet ainsi la mise en place d'un cadre concurrentiel équitable.

Ensuite et principalement, cette harmonisation des règles tend à renforcer la sécurité des transports aériens avec ce pays. Je rappelle que les normes européennes figurent parmi les règles mondiales les plus contraignantes, en termes de mise en oeuvre des précautions et des contrôles.

À titre d'illustration, la Moldavie devra retirer de son registre des immatriculations des aéronefs l'intégralité des appareils qui ne sont pas certifiés par l'Agence européenne de sécurité aérienne.

Elle bénéficiera dans cette mission de l'appui de programmes européens. Cette reprise de l'acquis communautaire en matière aérienne fera, par ailleurs, l'objet d'évaluations par la Commission européenne.

À l'issue de cet examen, les compagnies aériennes bénéficieront alors de droits commerciaux additionnels sur des points intermédiaires dans les pays de la politique européenne de voisinage, ceux de l'Espace aérien commun européen et de la Suisse.

Pour l'ensemble de ces raisons, et en insistant particulièrement sur le renforcement de la sécurisation des opérations de transport aérien, je vous propose d'adopter le projet de loi visant à le ratifier, et de prévoir son examen en séance publique en forme simplifiée, le 15 avril à 14 heures 30.

À l'issue de la présentation du rapporteur, la commission a adopté le rapport ainsi que le projet de loi précité.

Elle a proposé que ce texte fasse l'objet d'une procédure d'examen simplifié en séance publique, en application des dispositions de l'article 47 decies du règlement du Sénat.

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