Intervention de Gilles Leborgne

Commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire — Réunion du 14 janvier 2015 : 1ère réunion
Effets des motorisations diesel sur la santé et l'environnement — Table ronde

Gilles Leborgne, directeur de la recherche et du développement du groupe PSA Peugeot Citroën :

Vaste question, surtout si on doit la traiter en quelques minutes !

En tant que constructeurs automobiles, nous ne sommes pas qualifiés pour parler des effets des polluants sur la santé. Toutefois, nous pouvons faire le point sur les progrès que nous avons déjà réalisés, et sur ceux qui restent à accomplir pour limiter les émissions polluantes, notamment les particules fines.

PSA, de ce point de vue souhaite se positionner comme un acteur du dialogue concernant les enjeux de santé publique et l'environnement. Je désirerais vous soumettre quelques idées simples...

Tout d'abord, comme chacun ici, PSA est un pourfendeur des particules fines. C'est PSA qui a inventé le filtre à particules et nous combattons ces dernières depuis les années 1990. Nous avons développé le filtre à particules à partir de l'an 2000, plus de dix ans avant la réglementation Euro 5. PSA est le premier constructeur à en avoir équipé ses modèles en série, dès 2007.

PSA rejoint l'avis de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) au sujet des particules. Je cite un rapport de l'ADEME de novembre 2012 : « Les filtres fermés sont généralisés sur les véhicules neufs depuis janvier 2011. Ils permettent d'éliminer au moins 95 % en masse, et 99,7 % en nombre, des particules de plus de 23 nanomètres (...) ce qui les ramène à un niveau équivalent à celui des moteurs à essence ».

C'est un point extrêmement important. Pour l'illustrer, j'ai amené deux échantillons, que je vais faire circuler dans la salle. Le premier est un filtre blanc, en cordiérite, destiné aux moteurs à essence. À l'examen en pleine lumière, si on oriente convenablement les canaux, on se rend compte qu'il laisse passer les gaz qui sortent du moteur à essence, qui sont traités par les dispositifs catalytiques.

Un filtre à particules diesel est facile à reconnaître. Il est noir. Il s'agit d'un carbure de silicium qui doit résister à de très hautes températures. Je vous mets au défi de voir la lumière à travers : il est en effet opaque. Le mécanisme du filtre à particules de base est un dispositif de filtrage mécanique : les particules qui y entrent sont arrêtées ; au bout de 100 à 300 kilomètres, la température du moteur augmente, provoquant la combustion du carbone piégé à l'intérieur du filtre, qui se transforme en eau et en gaz carbonique. C'est exactement le même procédé que celui du four à pyrolyse.

Je précise que le filtre à particules est efficace à froid, à chaud, et dans toutes les conditions d'utilisation ! Il est en outre transparent pour l'utilisateur.

Ces filtres à particules, grâce au travail de précurseur de PSA, sont obligatoires depuis janvier 2011, dans le cadre de la norme Euro 5. PSA en aura bientôt équipé dix millions de véhicules.

Tout comme vous, nous nous battons pour réduire les émissions de particules des véhicules diesel ; le filtre à particules constitue la réponse à ce problème.

Par ailleurs, nous sommes soumis, depuis septembre 2014, à une nouvelle norme, appelée Euro 6. Les exigences de dépollution de celle-ci sont similaires pour les moteurs diesel ou essence. C'est ce que l'on nomme le « fuel neutral », pour employer un terme anglo-saxon. C'est là un point fondamental : grâce aux réglementations européennes, qui sont parmi les plus sévères au monde, le diesel a atteint, à l'homologation, des niveaux d'émissions équivalents aux normes des véhicules à essence.

Cette homogénéisation, qui ne dépendra pas du carburant, va s'accélérer encore avec les futures réglementations, qui apparaîtront en septembre 2017. Les deux versions seront alors non seulement équivalentes, mais on mesurera aussi les « real drive emissions » dans les conditions réelles d'utilisation.

Aujourd'hui, intenter un procès au diesel n'a pas de sens ! Pour répondre à la norme Euro 6, nous disposons d'un produit appelé « Blue HDI », qui réduit les NOx. Nos véhicules recrachent l'urée embarquée à leur bord ; elle se transforme en ammoniaque, permettant ainsi de réduire les NOx. Cette technologie, qu'on est en train d'étendre à l'ensemble de nos diesel, va permettre de réduire les émissions de NOx jusqu'à 90 %.

La généralisation du filtre à particules a permis de traiter les particules émises par les véhicules diesel - je vous renvoie à ce sujet au rapport de l'ADEME. L'introduction de la technologie « Blue HDI », dont tous nos moteurs diesel sont maintenant équipés, permet de traiter jusqu'à 90 % des NOx.

Tout ce que l'on vient de dire précédemment sur le constat des émissions concerne le parc ancien, aucun véhicule antérieur à 2011 n'étant équipé de filtres à particules. À titre d'exemple, en 2012, 8 % du parc diesel était responsable de 23 % des émissions de particules.

Le président de PSA, Carlos Tavares, lors d'une audition devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, a réclamé une commission d'experts indépendants qui vienne, dans nos laboratoires, vérifier la conformité de notre production. Il existe des organismes pour cela, mais nous ne sommes pas entendus ! On pourrait de la sorte mesurer tout ce que nous venons d'avancer. Nous réitérons donc cette suggestion.

Sans vouloir polémiquer, chacun sait que les émissions de particules liées aux transports sont largement minoritaires et sont plutôt produites par les autres industries, les cheminées, métros, RER... On a déjà évoqué les frottements que provoque le freinage par exemple. Je souhaite que vous ayez d'autres tables rondes à ce sujet.

En matière de gaz à effet de serre, secteur où l'Europe est bien plus en avance que n'importe quel autre pays, notre flotte doit en moyenne atteindre un objectif de 95 grammes de CO2 par kilomètre d'ici 2020. Or, le moteur diesel consomme 25 % de carburant en moins et émet 25 % de CO2 en moins qu'un moteur à essence.

À ce sujet, contrairement à ce qui a été dit, PSA produit davantage de moteurs à essence dans le monde que de moteurs diesel. Nous ne sommes donc pas « accrochés » au moteur diesel ! Nous développons également d'autres produits, que je n'ai pas le temps de présenter.

Inciter les consommateurs à se détourner du diesel moderne reviendrait donc à se priver d'une technologie déterminante pour l'amélioration de la qualité de l'air et pour la réduction du CO2 !

Quant à la notion de véhicule propre, il est important que le débat actuel se déroule sur la base de données factuelles, et non autour d'une spécificité française. PSA ou Renault constituent des groupes internationaux. Les technologies que nous développons doivent pouvoir être utilisées ailleurs.

C'est pourquoi la définition du véhicule propre qui figure dans le projet de loi nous convient. Le véhicule propre est « technological neutral », et n'impose ni technique, ni carburant, mais des résultats. Cela nous convient parfaitement, car privilégier une technologie plutôt qu'une autre, alors que celles-ci évoluent très rapidement, est extrêmement dangereux.

Enfin, il est paradoxal qu'au moment où le diesel est le plus propre, il soit à ce point attaqué dans notre pays, alors que c'est un point fort français ! Pour preuve, d'autres pays lui trouvent certaines vertus. La semaine dernière, un article de l'AFP indiquait que les États-Unis sont séduits par le diesel. Nous le savons, car nous entretenons des relations avec General Motors. Au Japon, Mazda, constructeur de premier plan, développe aussi des moteurs diesel. Nos partenaires chinois, avec qui nous avons des relations fortes, nous demandent d'étudier l'introduction du diesel en Chine. Je ne reviens pas sur l'augmentation du nombre de véhicules diesel en Allemagne, ni sur sa quasi-stabilité au Royaume-Uni...

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