Merci de nous avoir conviés à nous exprimer sur ce sujet très important.
La question qui se pose, après la série d'interventions que nous venons d'entendre, est bien celle des nouveaux diesel. Je ne suis malheureusement pas qualifié pour vous dire s'ils sont mieux que les anciens.
Je constate que le diesel, en général, est un produit qui a eu des effets très négatifs. C'est pourquoi France Nature Environnement, avec d'autres associations, avait lancé la campagne intitulée : « Le diesel tue », en 2013. Celle-ci faisait suite aux positions de l'OMS, qui avait déclaré les produits issus de la combustion du diesel comme cancérogènes certain.
C'est un élément essentiel. Aujourd'hui, je ne peux m'en tenir qu'au discours des constructeurs. Or, l'histoire montre que les constructeurs ont à plusieurs reprises affirmé des choses qui ne se sont pas révélées exactes ! Il faut donc avoir un peu de recul avant de pouvoir dire que le futur moteur diesel sera plus propre que le précédent !
La population française est très sensible à la qualité de l'air et à ses effets sur la santé. Aujourd'hui, l'OMS estime que la pollution de l'air entraîne 42 000 décès prématurés par an, du fait de la mauvaise qualité de l'air. On évalue par ailleurs à 30 milliards d'euros le supplément de dépenses dans le domaine de la santé.
C'est donc un sujet majeur. Une étude récente de l'Institut de veille sanitaire (InVS) a démontré son impact sanitaire à court terme. Même à des niveaux d'exposition relativement faibles, il existe un accroissement du risque de la mortalité immédiate.
Cela étant, les normes définies aujourd'hui par l'Union européenne offrent de réels avantages, puisqu'elles réduisent la production de polluants ; toutefois, l'accroissement de la circulation routière compense en grande partie ces réductions. Cet avantage disparaît donc du fait du volume.
La France se singularise sur la scène internationale. Nous possédons le parc le plus « diésélisé » du monde. Cela est dû aux décisions prises après le premier choc pétrolier. On a pris à l'époque la décision de développer des véhicules utilitaires légers et des véhicules légers en général roulant au diesel, mais les véhicules diesel coûtant plus cher, il fallait, pour obtenir des débouchés, abaisser le prix du carburant. C'est pour cette raison que l'État a décidé d'appliquer une taxe réduite, avantage fiscal qui aurait dû disparaître progressivement, au fur à mesure que l'on arrivait à maîtriser le système. Cette décision n'a jamais été prise, alors qu'il était logique de la prendre, d'autant que la qualité de combustion du diesel a été mise en cause un peu partout, notamment dans les pays qui comptent de grands constructeurs automobiles comme les États-Unis, le Japon ou l'Allemagne.
L'exemple du Japon est assez emblématique. Au début des années 1990, le Gouvernement découvre que les véhicules roulant au diesel émettent des particules fines au dioxyde d'azote, à l'origine de maladies respiratoires. Commence alors une politique antipollution qui se traduit par une taxe spécifique sur le diesel. C'est l'amorce d'une taxation d'un produit dangereux pour la santé.
Après son élection, le nouveau maire de Tokyo é décide de lancer une campagne intitulée : « Dites non au diesel ». Les résultats sont remarquables. La concentration de particules fines a diminué de 55 % entre 2001 et 2011. Cela a inspiré d'autres villes, comme Berlin, ou Londres.
En France, il a fallu attendre l'abandon de la bien mal nommée « écotaxe » pour que soit envisagée une augmentation de la taxe sur le diesel, écornant ainsi un avantage fiscal de plus de trente ans.
Le second fait qui semble indiquer que la France serait enfin mûre pour ce changement de cap est la décision de la mairie de Paris de voir disparaître rapidement la circulation des véhicules roulant au diesel dans la capitale.
Je ne parle pas du nouveau diesel : je dresse le constat de ce qui existe aujourd'hui...
France Nature Environnement estime que le modèle de mobilité fondé sur l'automobile confrontée à ses impacts environnementaux, sociaux, sanitaires et économiques est à réinventer. Il faut pouvoir se déplacer moins, mieux et autrement. Cela implique de réorganiser la ville en la rendant plus compacte pour limiter l'étalement urbain, et de développer les services en ligne, dont le télétravail.
France Nature Environnement considère que la première démarche à accomplir est de développer l'écomobilité, c'est-à-dire la capacité à se déplacer en employant les modes de transport les moins émetteurs de gaz à effet de serre et les moins polluants, l'écoconduite et l'éco-entretien.
Comme le Réseau Action Climat-France, France Nature Environnement préconise de faire évoluer la fiscalité des transports et des mobilités vers une fiscalité environnementale, avec une triple vocation, celle de réduire les émissions de GES et de tous les polluants, de compenser le coût des impacts de ces émissions, et d'inciter à des changements de comportement pour aller dans le sens d'une meilleure sobriété énergétique. On pourra ainsi accélérer la sortie du diesel sans mesure coercitive lourde.
Enfin, il faut également agir sur la logistique urbaine, encore peu connue il y a peu. Celle-ci émerge comme une composante essentielle au bon fonctionnement des villes. France Nature Environnement a créé, en partenariat avec l'ADEME, un groupe de travail portant sur le thème de la logistique urbaine, dont les recommandations ont été présentées dans un guide paru en septembre 2010. France Nature Environnement se félicite que, depuis cette date, des expériences se soient développées sur cette base dans de nombreuses communes, avec, pour certaines, l'objectif de sortir le diesel de la ville en recourant à des carburants alternatifs, comme l'électricité ou le gaz naturel, et à des modes de livraison doux. Cela signifie que l'écomobilité exige une réflexion sur le véhicule du futur et sa motorisation.
Quant au véhicule électrique, France Nature Environnement estime que ce n'est pas un véhicule « propre », mais celui-ci présente cependant des avantages et il faut l'utiliser dans le cadre du développement de la mobilité durable.
D'autres carburants peuvent être envisagés, comme l'hydrogène. Je pense que l'on pourra y recourir dans les décennies à venir. Il existe toutefois un carburant utilisé par nombre de pays voisins, qui le développent actuellement, mais que la France ignore : il s'agit du gaz naturel. En effet, celui-ci jouit d'un certain nombre de qualités, qui sont essentielles pour la santé humaine et pour la lutte contre le réchauffement climatique.
Il ne génère quasiment aucune émission de particules fines. Sa combustion est propre naturellement. Il n'a pas besoin de filtre, raison de l'accroissement du prix du véhicule. Il est à l'origine de très peu d'émissions d'oxyde d'azote et surtout pas de dioxyde d'azote, produit le plus dangereux pour la santé humaine. Ses émissions de CO2 sont réduites. Les véhicules utilisant ce carburant roulent moins vite.
Enfin, le gaz naturel n'est pas seulement fossile : il peut être produit de façon renouvelable par méthanisation des déchets. La perspective de voir se développer une production renouvelable significative sans avoir recours à des cultures dédiées peut faire de ce carburant un carburant quasiment neutre vis-à-vis de l'effet de serre.
France Nature Environnement estime que le gaz naturel pour véhicule devrait pouvoir jouer un rôle majeur dans le cadre de la transition énergétique, et demande que la filière du gaz naturel soit réactivée en France, et que l'État prenne toutes les dispositions pour que les infrastructures de distribution de ce carburant alternatif, prévues pour 2010 dans le protocole signé le 4 juillet 2005 par le ministre, les présidents-directeurs généraux d'EDF, Carrefour, Total, PSA Peugeot Citroën, Renault et Renault Trucks, soient mises en oeuvre. En effet, ce protocole n'a jamais été appliqué !