Intervention de Hervé Poher

Réunion du 10 février 2015 à 21h30
Transition énergétique — Article 1er

Photo de Hervé PoherHervé Poher :

On ne peut pas reprocher à quelqu’un de vouloir devenir vertueux, surtout quand il n’a plus le choix... Gaz à effet de serre, changement climatique, coût de l’énergie et ses conséquences sur les populations les plus démunies, chamboulement environnemental, impact indéniable sur la santé humaine de certains produits, process et développement industriels, sans parler de la mauvaise conscience que nous avons tous de jouer aux apprentis sorciers avec notre monde : tout cela nous incite, nous conduit, nous oblige à imaginer et à construire l’avenir autrement.

L’article 1er du projet de loi relatif à la transition énergétique vise simplement à afficher une volonté et à affirmer une prise de conscience.

Oui, il affiche une volonté ! Or, en français, quand on veut afficher une volonté, on utilise des verbes comme maîtriser, garantir, diversifier, procéder, assurer, développer, renforcer, parvenir... J’arrête là l’énumération, et je vous renvoie au texte.

Oui, il affirme aussi une prise de conscience ! Nous sommes conscients que nous sommes devenus des « consommateurs fous », d’innovation, de technologie. C’est un concept de société, c’est une nouvelle façon de vivre, certains parlent même d’un nouvel art de vivre – encore faudrait-il définir le mot « art »… Bref, dans notre société, on ne peut pas faire autrement que de consommer et d’être « branché », au sens littéral et physique du terme.

Oui, notre nouveau fonctionnement sociétal nous conduit à être énergivores, outrageusement énergivores ! Certains diront que ce n’est pas un défaut, que cela fait « tourner la machine ». Certes, mais quand on a conscience que la machine nous fait cadeau d’effets secondaires peu désirables et potentiellement dangereux, on est en devoir d’inventer un autre type de machine.

Nous sommes à une période de l’évolution humaine où il nous faut abandonner une partie du modèle qui a prévalu durant les deux siècles précédents pour inventer une partie du modèle du siècle futur, sachant que nous devrons être plus conscients, plus raisonnables, plus vertueux.

Vouloir être vertueux, c’est une qualité pour un être humain. Pourquoi pas pour une nation, pour un État ou pour un gouvernement ?

Bien sûr, dans cet article, il aurait été plus commode de faire figurer des objectifs sans chiffres et sans dates, en d’autres termes faire un listing de bonnes intentions. Mais nous savons tous à quoi peuvent servir les bonnes intentions… Voilà pourquoi il faut de temps en temps avoir le courage de dire, d’afficher, d’assumer et ne pas avoir honte d’être ambitieux. On ne peut pas reprocher à quelqu’un d’être ambitieux, surtout quand il n’a plus le choix.

Sans les chiffres, sans les objectifs, sans les repères, il est difficile d’expliquer, de mobiliser, d’avancer... Il est compliqué d’expliquer l’urgence de la situation. Comment dire aux gens que la banquise fond, que le climat change, que nous avons perdu 99, 9 % de la biodiversité depuis l’apparition de la vie sur Terre. Nos ressources s’épuisent et l’énergie pourrait devenir un produit de luxe. Si nous présentions les choses ainsi à nos concitoyens, ils nous répondraient : soit, mais qu’attendez-vous pour agir, vous, les élus ?

Difficile de mobiliser sans des dates butoirs, car les gens, les décideurs, les collectivités, tous vous répondront : on a le temps, on verra cela plus tard, on a d’autres chats à fouetter, et de toute façon on n’a plus d’argent. Ces arguments, nous, élus, les avons utilisés maintes et maintes fois, quelles que soient nos responsabilités.

Il est difficile d’avancer sans des objectifs, sans des chiffres, sans un tableau de bord... Or nous savons tous qu’il est très difficile d’élaborer un tableau de bord dans le cadre des politiques publiques, et ce pour diverses raisons, quelquefois peu avouables…

Alors, oui, il faut expliquer mobiliser et avancer ! Oui, il faut diminuer de 30 % la consommation d’énergie fossile pour 2030 ! Ça va être dur, mais c’est faisable ! Oui, il ne sera pas évident de passer à 32 % d’énergies renouvelables en 2030, mais c’est réalisable !

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