Intervention de Élisabeth Lamure

Réunion du 10 février 2015 à 21h30
Transition énergétique — Article 1er

Photo de Élisabeth LamureÉlisabeth Lamure :

Pour donner l’illusion qu’une nouvelle politique publique énergétique est en marche, le Gouvernement nous a gratifiés de deux dispositions au caractère purement incantatoire. La première porte sur le plafonnement du parc nucléaire à son niveau actuel, soit 63, 2 gigawatts, ramené avec prudence par notre rapporteur à 64, 8 gigawatts. La seconde, surtout, fixe l’objectif de réduction de la part du nucléaire dans le bouquet énergétique à 50 % en 2025. Là encore, notre rapporteur a cherché à moduler cet objectif avec tact. Néanmoins, je m’interroge sur la volonté gouvernementale de faire cohabiter, sur un même pied d’égalité, l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre et celui de réduction de la part du nucléaire dans notre mix énergétique.

Nous le savons tous, et le Gouvernement ne l’ignore pas, le nucléaire est le principal atout dont nous disposons pour lutter contre ces émissions. En effet, si la France n’émet que 5, 6 tonnes de CO2 par habitant contre 9, 1 tonnes pour l’Allemagne, c’est justement grâce au nucléaire.

En ce qui concerne la compétitivité et le pouvoir d’achat de nos concitoyens, là encore, c’est le nucléaire qui nous permet de fournir une électricité à 15 centimes d’euros le kilowattheure contre 20 centimes pour la moyenne européenne ou 30 centimes pour l’Allemagne. Et combien coûte le combustible nucléaire que nous importons et qui permet de produire 77 % de notre électricité ? Entre 500 millions et 1 milliard d’euros ! Avec cette somme, nous produisons le tiers de nos besoins énergétiques finaux.

Par comparaison, les importations de produits pétroliers ont coûté 52 milliards d’euros, les importations de gaz, 14, 2 milliards d’euros et les importations de charbon, 1, 9 milliard d’euros. Vous trouverez ces chiffres dans le rapport Panorama énergies-climat 2014, disponible sur le site du ministère de l’écologie, du développement durable et de l'énergie.

Ainsi, le nucléaire est un atout incontournable pour notre souveraineté, notre compétitivité et la préservation de notre environnement. Pour ces raisons, cette volonté de réduire le nucléaire à 50 % en 2025 est une tromperie.

Vous ne pourrez pas fermer vingt de nos cinquante-huit réacteurs en dix ans. Vous éprouvez déjà les plus grandes difficultés à supprimer la centrale de Fessenheim, de telle sorte que plus personne ne peut vous croire. D’ailleurs, c’est en cinq ans que vous envisagez de fermer les réacteurs, puisque votre étude d’impact précise que ces fermetures interviendront entre 2020 et 2025.

En admettant que vous fermiez vingt réacteurs, au mépris des bassins industriels, je poserai la même question que mon collègue Bruno Retailleau : par quoi les remplacerez-vous ? Où trouverez-vous les térawattheures manquants ? Pas dans l’hydroélectrique en tout cas : le potentiel français y est désormais très faible.

Dans la biomasse ? Oui, dans une certaine mesure, mais ne faites pas croire que cette source de production électrique peut être indéfiniment développée : ce n’est pas le cas, notamment à cause de rejets de polluants atmosphériques.

Dans le photovoltaïque et l’éolien offshore peut-être ? Pourquoi pas, mais à très long terme ! Au reste, songez au coût de ces sources de production électrique…

Dans l’éolien terrestre alors ? C’est sans doute la seule solution qui ne soit pas infinitésimale à l’heure actuelle. Mais combien d’espaces, combien de terres faudra-t-il mobiliser ?

Dans ces conditions, il est clair que votre objectif de réduction est une tromperie. Pour ma part, je refuse d’en être complice !

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