Permettez-moi tout d'abord de revenir sur la question de la fiscalité environnementale. Les services de la Commission européenne publient annuellement un rapport sur les prélèvements obligatoires intitulé Tendances fiscales. Celui d'il y a deux ans comportait un chapitre introductif sur la fiscalité environnementale, qui faisait apparaître combien elle reste faible en France. Au point que lors du semestre européen, qui est l'occasion de faire des recommandations aux États membres, la Commission demandait à la France de s'améliorer en ce domaine. Preuve qu'il nous reste du pain sur la planche.
En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés acquitté par les grandes entreprises multinationales, Olivier Sivieude a largement répondu. Dans une enquête que nous avons menée auprès de 500 directeurs fiscaux d'entreprise, nous leur demandions quel était leur taux effectif d'imposition : il est de 20 % en moyenne, chiffre plus élevé que celui qui a été ici cité.
Voilà trois ans que la Commission européenne s'est engagée dans le calcul du VAT gap. C'est le début d'une expérience intéressante. La semaine dernière, une réunion a eu lieu entre les experts des États membres, ceux de la Commission et le consultant chargé des évaluations, sur la méthode. Il est vrai qu'elle est mécanique, et ne donne pas d'explication sur les causes, qui tiennent cumulativement à la fraude, à une mauvaise application des règles, à l'évitement, aux faillites ou à l'insolvabilité. Il serait bon que les États membres se penchent sur ces chiffres pour trouver les moyens de distinguer.
S'agissant des fraudes à la TVA et aux certificats carbone, on sait, ainsi que l'a rappelé Olivier Sivieude, que c'est la législation européenne qui les a permises. Dès lors qu'une transaction n'est pas taxée à son point de départ, ce qui est le cas de la TVA intracommunautaire, on peut faire du « carrousel ». La solution est théoriquement simple : supprimer l'exonération des livraisons intracommunautaires. Mais les points de vue sur la question divergent de façon assez virulente. Les entreprises, qui étaient autrefois favorables à l'idée, le sont moins, car ce serait renoncer à l'avantage financier qu'il y a pour elles à ne pas payer de TVA au moment de la facturation.
Quant au CIR, je souhaite indiquer que le cabinet de conseil Taj, pour lequel je travaille, a recruté des ingénieurs afin de sécuriser les demandes de CIR des entreprises, qui n'entendent pas s'engager en prenant le risque d'une remise en cause en cas de contrôle. Nous avons en quelque sorte, essayé de trouver le moyen de labelliser les « distributeurs de CIR », si je puis m'exprimer ainsi, à travers une pratique correspondant aux normes et avec toute la transparence nécessaire.
La présidente m'a interrogé sur le projet ACCIS. Je suis convaincu que passer par une assiette commune consolidée assortie d'un système de répartition plutôt que par les prix de transfert, source de détournements possibles, est la meilleure solution pour tout le monde. Cette proposition, adoptée en 2011 par la Commission européenne, n'a jamais pu accéder à l'échelon du débat politique. La faute en est à la présidence tournante du Conseil européen, mais il appartient aussi au commissaire en charge de la fiscalité de travailler à convaincre. Les travaux de la Cour des comptes ainsi que le livre vert sur la convergence France-Allemagne voient dans la convergence de la fiscalité des sociétés un préalable à l'ACCIS. On n'avancera pas si la France et l'Allemagne ne poussent pas conjointement en ce sens. Si elles s'y déterminent, d'autres États membres auront tôt fait de les rejoindre. L'Espagne et l'Italie ont toujours été demandeurs. L'Autriche, le Benelux suivront aussi.