Intervention de Christian Walter

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 14 mai 2014 à 10h10
Stabilité financière : a-t-on progressé depuis 2008 — Audition conjointe de Mm. Jean Beunardeau directeur général de hsbc france et directeur de la banque de financement d'investissement et de marchés en france didier duval responsable de la sécurité financière et de la prévention de la fraude au sein de la direction de la conformité du groupe crédit agricole laurent le mouel responsable des affaires réglementaires et prudentielles au sein de la direction des risques du groupe crédit agricole gérard rameix président de l'autorité des marchés financiers et christian walter professeur d'économie au collège d'études mondiales de la fondation de la maison des sciences de l'homme titulaire de la chaire éthique et finances

Christian Walter, professeur d'économie au Collège d'études mondiales :

Je rejoins ce qu'a dit Gérard Rameix à propos du trading haute fréquence. Il me paraît très important de bien voir que ce qui fonde le trading haute fréquence est une compréhension continuiste des risques financiers. Plus on continuise cette perception des risques, plus on légitime le trading haute fréquence. On est au coeur du débat leibnizien, au sens où il existe pratiquement là deux courants de pensée : si on est leibnizien, on considère le trading haute fréquence comme légitime parce qu'il est continu ; si on ne l'est pas, on le considère comme dangereux.

L'enjeu est donc bien dans la régulation et dans la manière dont les cadres conceptuels des directives se représentent l'incertitude économique et financière : est-elle « continuisable » ou non ? Il y aura deux manières d'agir concrètement, selon que l'on a ou non telle ou telle conviction.

À Columbia, à Cambridge, à la LSE, cette idée commence progressivement à faire son chemin. On voit apparaître une alternative forte, au sens français du terme, entre continuisation ou discontinuisation. Les techniques, les instruments, les calculs, les mesures, et les réglementations font référence à l'une ou l'autre des écoles de pensée en s'appuyant dessus. Si l'on décide par exemple d'affecter un poids de risques au calcul de rémunération de bonus, avec une mesure continue du risque, le bonus sera élevé ; avec une approche discontinue, il sera bien plus faible.

Il en va de même pour ce qui est de la question de la réglementation et du shadow banking : si on régule le système à partir d'une vision continuiste de l'économie, donc fausse, peut-être crée-t-on des arbitrages réglementaires sur une partie non réglementée.

J'ai dit que la technique n'est pas neutre du point de vue de ce qu'elle conditionne ; nous ne sommes pas dans un monde positiviste. Je pense qu'il est aujourd'hui important de faire passer dans les calculs, les instruments, et les réglementations une compréhension discontinue des variations économiques et financières.

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