Intervention de Gérard Longuet

Réunion du 12 février 2015 à 9h30
Transition énergétique — Article 3

Photo de Gérard LonguetGérard Longuet :

Après l’intervention de Jean-Pierre Leleux, je suis rassuré. Il aurait en effet été inacceptable de voir disparaître nos façades historiques, car elles ne sont pas toutes protégées.

L’histoire de France, aussi bien à Paris qu’en province, se lit sur nos façades. Imaginons un instant qu’il soit possible de procéder à une isolation extérieure des immeubles haussmanniens, cela aboutirait à nier l’identité de notre capitale. Comme l’a très justement indiqué Jean-Pierre Leleux, les détails doivent être protégés. Une façade de la révolution industrielle n’est pas une façade de la Restauration, qui elle-même n’est pas une façade de l’Ancien Régime. Il faut conserver cette diversité.

Les terroirs s’expriment également sur les façades. Les pierres ne sont pas les mêmes selon l’origine des carrières. Ceux qui investissent encore un peu d’argent, d’une façon totalement irrationnelle d’ailleurs, par sympathie, par intérêt ou par affection pour le patrimoine de leur pays, font appel aux ressources locales pour respecter la couleur des enduits et les matériaux utilisés à l’origine. En s’attachant à la tradition, ils évitent la banalisation et les innovations architecturales déconcertantes, lesquelles, avec le temps, deviennent parfois des manifestations de créativité, mais elles ne sont le plus souvent, d’abord et avant tout, que des incongruités.

Nos façades ont déjà connu des tragédies. L’impôt sur les portes et fenêtres au XIXe siècle a entraîné le massacre de nombreux bâtiments de la Renaissance, par exemple. La diminution du nombre de fenêtres, outils de mesure de richesse et du pouvoir d’achat de l’occupant, a rendu les logements obscurs.

Les pans de bois, la brique, le mariage de la brique et de la pierre, le chaînage, l’organisation des façades : tout cela doit être préservé, car cela constitue notre patrimoine. Quant aux constructions postérieures à 1948, il arrivera bien un moment où il faudra aussi les préserver. Si cette date paraissait récente au siècle dernier, elle deviendra bientôt une date historique – malheureusement, nous vieillissons tous…

Mes chers collègues, ne cédons pas à la facilité en instaurant l’obligation d’effectuer des travaux de rénovation dès lors que la consommation par mètre carré dépasse les 330 kilowattheures par an. La réduction de la consommation énergétique est un beau combat, mais il ne doit pas être mené au prix de travaux prohibitifs, au risque de décourager l’accès au logement, ou de solutions techniques médiocres, au risque de dégrader notre patrimoine. Dans les deux cas, nous ferions une mauvaise affaire. Les déperditions de chaleur sont certes regrettables, mais elles sont peut-être plus acceptables que la dégradation durable des façades de notre pays.

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