Intervention de Évelyne Didier

Réunion du 16 février 2015 à 21h30
Transition énergétique — Article 19 quinquies

Photo de Évelyne DidierÉvelyne Didier :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à l’occasion de l’examen du titre IV par la commission du développement durable, j’ai déposé un amendement afin d’inscrire dans le projet de loi que « l’enfouissement et le dépôt de déchets sur les terres agricoles sont interdits ». Cet amendement a été accepté par notre rapporteur et voté par notre commission. C’est une bonne chose, à plusieurs égards.

Comme vous le savez, les déchets, dits « inertes », de construction et de démolition représentent aujourd'hui plusieurs millions de tonnes dans notre pays. Or, en l’absence de contrôles précis lors de l’enfouissement, le risque de pollution est réel. Il est d’autant plus dommageable en cas d’activités agricoles ultérieures sur les terres ainsi remblayées.

Ces déchets « inertes » peuvent concentrer et diffuser des polluants, notamment sous l’effet des ruissellements d’eau, avec la présence de divers hydrocarbures, métaux lourds et autres produits.

En l’état actuel du droit, rien n’interdit de telles pratiques pour remblayer les terres.

Ainsi, l’article L. 541-30-1 du code de l’environnement dispose que « l’exploitation d’une installation de stockage de déchets inertes est soumise à autorisation administrative délivrée dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État ». Cependant, cet article prévoit plusieurs exceptions : il ne s’applique pas, premièrement, « aux installations de stockage de déchets inertes relevant déjà d’un régime d’autorisation d’exploitation », deuxièmement, « aux installations où les déchets inertes sont entreposés pour une durée inférieure à trois ans afin de permettre leur préparation à un transport en vue d’une valorisation dans un endroit différent, ou entreposés pour une durée inférieure à un an avant leur transport sur un lieu de stockage définitif » et, troisièmement, « à l’utilisation de déchets inertes pour la réalisation de travaux d’aménagement, de réhabilitation ou à des fins de construction ».

En complétant l’article 19 quinquies, nous avons souhaité protéger particulièrement les terres agricoles.

Mes chers collègues, permettez-moi de citer ici le secrétaire général adjoint et président de la commission foncière de la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles du département de la Seine-et-Marne, la FDSEA 77 – on se souvient que, dans ce département, des agriculteurs ont dû engager des procédures pour faire analyser leurs terres –, après que les membres des commissions foncières de la chambre d’agriculture et de la FDSEA 77, réunies conjointement, eurent constaté que « les remblais de déchets inertes posent question du fait des difficultés à pouvoir contrôler la nature des dépôts », la chambre d’agriculture s’opposant à la réalisation d’exhaussement sur des espaces agricoles productifs, « sauf exception dûment justifiée pour des besoins d’exploitation » : « L’histoire nous rappelle chaque jour que certaines terres sont aujourd’hui polluées par des personnages peu scrupuleux. Le cahier des charges doit être conséquent et irréprochable ».

Ces propos ne sont pas de moi, mais du président de la FDSEA 77 !

En outre, notre proposition s’inscrit pleinement non seulement dans les objectifs du titre IV, mais également dans ceux de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, à travers l’agro-écologie.

On ne peut pas à la fois dire qu’il faut diminuer, voire supprimer l’enfouissement des déchets et permettre l’enfouissement de ces déchets sur des terres agricoles.

On ne peut pas affirmer que les déchets et les matières doivent être valorisés et, dans le même temps, laisser les entreprises utiliser les terres agricoles pour se débarrasser de leurs déchets sans les valoriser.

On ne peut pas déclarer qu’il faut protéger la terre agricole et l’utiliser comme dépotoir, en prenant le risque d’une possible pollution des terres et des nappes phréatiques, puisqu’il n’y a aucun contrôle.

On ne peut pas à la fois demander aux communes de ne pas utiliser la terre agricole pour construire des lotissements et permettre qu’elles l’utilisent pour en faire des décharges.

Arrêtons de nous contredire et essayons d’être cohérents. Il y va de notre crédibilité !

Mes chers collègues, telles sont les raisons pour lesquelles j’ai déposé cet amendement au moment de l’élaboration du texte de la commission. Il ne s’agit en rien d’une mesure anti-agriculture. Au contraire !

Cela dit, je souscris aux amendements présentés par notre rapporteur.

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