Monsieur le sénateur François Bonhomme, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de M. le ministre de l’intérieur.
Les aéronefs qui circulent sans personne à bord, couramment dénommés « drones », terme qui néanmoins n’apparaît pas dans la réglementation en vigueur, comme vous l’avez indiqué, sont régis par deux arrêtés du 11 avril 2012, ainsi que par certaines dispositions du code des transports et du code de l’aviation civile.
Les deux arrêtés du 11 avril 2012 ont pour objet principal de préserver la sécurité des personnes et des biens survolés, des aéronefs et des autres usagers de l’air. Ils ne traitent pas directement des questions de protection de la vie privée qui restent régies par les dispositions générales applicables dans ce domaine, notamment l’article 9 du code civil et l’article 226-1 du code pénal.
S’agissant plus particulièrement des drones de loisirs, l’accès à l’espace aérien est libre en dessous de 150 mètres par dérogation aux règles de l’air habituelles, étant précisé, en l’espèce, que seuls les vols en vue sont autorisés pour ces aéromodèles de moins de vingt-cinq kilogrammes.
Toutefois, cet accès à l’espace aérien en dessous de 150 mètres doit se faire en dehors, tout d’abord, des agglomérations et des rassemblements de personnes ou d’animaux, ensuite, des zones proches des aérodromes et, enfin, des espaces aériens spécifiquement réglementés qui figurent sur les cartes aéronautiques.
Concernant les utilisations professionnelles, le survol des agglomérations ou des rassemblements de personnes par ces drones n’est possible que dans le cadre d’une autorisation préfectorale délivrée après avis du service de la Défense et de la Direction régionale de l’aviation civile.
En outre, dès lors qu’un drone est équipé d’un appareil photo, d’une caméra mobile, d’un capteur sonore ou encore d’un dispositif de géolocalisation, il peut potentiellement porter atteinte à la vie privée. Si la prise de vue aérienne est réglementée par l’article D. 133-10 du code de l’aviation civile, il n’en demeure pas moins que la captation et l’enregistrement d’images relatives aux personnes relèvent également de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
La multiplication potentielle de ces engins soulève en effet des enjeux importants pour les libertés individuelles et le respect de la vie privée. Les travaux menés durant l’année 2014 ont permis, en collaboration avec des constructeurs de drones de loisirs, la Fédération française d’aéromodélisme, la FFAM, la Fédération professionnelle du drone civil, la FPDC, et la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, la réalisation d’une notice d’information relative à l’usage de loisir des aéromodèles.
Cette notice a fait l’objet d’une large diffusion auprès des acteurs associatifs et professionnels du domaine du drone. Ce travail collaboratif sera suivi de travaux sur une obligation réglementaire de fourniture de cette notice lors de la vente d’un drone.
Eu égard à l’ensemble de ces aspects, la CNIL a engagé des travaux sur le sujet. Elle souhaite réfléchir à un cadre de régulation adapté permettant d’accompagner l’innovation et le développement de nouveaux usages, tout en fixant les limites à ne pas franchir en termes de surveillance.
Par ailleurs, à la suite de nombreux survols illicites de zones dites « sensibles », que vous avez soulignés dans votre question, le Premier ministre a initié un travail interministériel sur la protection contre les actes de malveillance commis au moyen de drones.
Le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, le SGDSN, a été chargé de coordonner les travaux et la réflexion menés dans ce cadre, qui s’inscrivent dans trois directions : d’abord, l’évaluation des risques et des menaces, ensuite, la réponse capacitaire à apporter, enfin, le champ juridique.
De plus, l’article 2 de la proposition de loi relative au renforcement de la protection des installations civiles abritant des matières nucléaires, adoptée par l’Assemblée nationale, en première lecture, le 5 février 2015, prévoit que, avant le 30 septembre 2015, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport évaluant les risques et menaces que constituent les survols illégaux par des aéronefs télépilotés. Ce rapport présentera également les solutions techniques et capacitaires envisageables afin d’améliorer la détection et la neutralisation de ces appareils, ainsi que les adaptations juridiques nécessaires afin de réprimer de telles infractions.
Le Gouvernement entend soutenir les évolutions législatives et réglementaires qui se révéleraient nécessaires et proportionnées afin de concilier le développement de ce secteur avec les impératifs, notamment de protection de la vie privée et de respect de l’ordre public.