La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
La parole est à M. Richard Yung, auteur de la question n° 977, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question porte sur le délicat sujet de l’indemnisation du chômage des personnels recrutés localement par les administrations françaises à l’étranger.
Ce sujet est d’autant plus délicat que ces personnes, dont le nombre est estimé à 4 700 ou 4 800, jouent un rôle central dans le fonctionnement des postes diplomatiques et consulaires, des instituts culturels et des établissements scolaires français à l’étranger.
À leur retour en France, ces agents de droit local se voient refuser le bénéfice d’une allocation d’assurance chômage, qu’il s’agisse de l’allocation temporaire d’attente ou de l’allocation d’aide au retour à l’emploi.
Cette situation a été jugée légale par le juge administratif, lequel a considéré que ces agents n’ont droit à une allocation que s’ils ont été détachés à l’étranger ou expatriés.
Le Défenseur des droits, lui, a pris une position différente dans une décision de février 2013, en considérant que ces personnes « subissent une différence de traitement qui n’apparaît pas justifiée ». Partant, il a recommandé au Gouvernement de leur permettre de « bénéficier d’une protection sociale comparable à celle octroyée aux agents non titulaires de droit public ou aux salariés du secteur privé ».
Pour le moment, aucune suite n’a été donnée à cette recommandation, qui va dans le même sens qu’un télégramme diplomatique en date du 9 septembre 2009, selon lequel l’ouverture des droits à l’assurance chômage « s’applique [...] aux [agents de droit local] qui décideraient de venir résider en France dans les douze mois qui suivent la fin de leur contrat ».
Le 21 août dernier, dans sa réponse à ma collègue Claudine Lepage, le ministre des affaires étrangères disait souhaiter « se conformer aux recommandations du Défenseur des droits » et « faire évoluer le dispositif d’indemnisation chômage ». À cette fin, il annonçait vouloir convoquer « une nouvelle réunion interministérielle sur ce sujet ».
Monsieur le secrétaire d’État, je souhaiterais donc savoir si cette concertation interministérielle a eu lieu. Je vous serais également reconnaissant de bien vouloir m’indiquer comment le Gouvernement entend clarifier la situation de ces recrutés locaux.
Monsieur Yung, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international, qui m’a demandé de vous répondre.
Comme vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur, l’État emploie de nombreux agents à l’étranger.
Certains d’entre eux sont recrutés dans les conditions du droit local, contrairement aux agents publics expatriés ou détachés. Vous avez rappelé, monsieur le sénateur, leur contribution essentielle au bon fonctionnement de nos services publics.
Vous m’interrogez à propos de la situation particulière des anciens agents de droit local employés par les services de l’État à l’étranger au regard de l’assurance chômage, lorsqu’ils rentrent en France dans les douze mois après la fin de leur contrat.
Je rappelle d’abord que, lorsque ces personnes continuent de résider à l’étranger à la fin de leur contrat, elles relèvent du dispositif d’indemnisation chômage du pays dans lequel elles ont été recrutées.
Le ministère des affaires étrangères et du développement international attache une très grande importance à ce que les mesures nécessaires soient prises localement pour que les services employeurs s’acquittent des contributions indispensables. Nous veillons à ce que les droits de ces agents soient garantis dans leur pays de résidence.
Lorsque ces agents décident de rentrer en France, leur situation est plus complexe, il est vrai. Les textes en vigueur ne permettent pas aux agents qui ont travaillé pour la France à l’étranger d’avoir accès aux prestations de l’assurance chômage française, telles que l’allocation temporaire d’attente, l’ATA, et l’allocation d’aide au retour à l’emploi, l’ARE, lors de leur réinstallation dans notre pays.
En effet, le droit à ces prestations n’est ouvert qu’aux agents qui ont été détachés ou expatriés. Or tel n’est pas le cas aujourd’hui des agents sous contrat de droit local.
Le juge administratif l’a confirmé de manière très claire en 2014, comme vous l’avez indiqué.
Vous avez aussi rappelé, monsieur le sénateur, que l’application de cette règle avait conduit à certaines situations peu équitables, comme l’a relevé le Défenseur des droits en février dernier dans un document que vous avez également cité.
Le ministère des affaires étrangères et du développement international souhaite que des mesures de soutien et d’accompagnement vers le retour à l’emploi adaptées à la situation de ces agents soient prises.
Les services de ce ministère, comme ceux du ministère de la fonction publique, travaillent actuellement pour trouver la solution technique permettant de parvenir, dans les meilleurs délais, à ce résultat souhaité par tous.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État : elle montre que le Gouvernement est à la recherche d’une solution.
Certains de ces recrutés locaux se trouvent en effet dans des situations difficiles une fois de retour en France.
Je comprends qu’il soit nécessaire de discuter au niveau interministériel. Je ne sais si les discussions interministérielles ont déjà eu lieu, ou si elles sont programmées. C’est en tout cas par ces dernières qu’une solution pourra être trouvée.
On pourrait sans doute imaginer un dispositif d’indemnisation dans le cadre d’une auto-assurance ou d’une convention de gestion.
On pourrait aussi autoriser les agents de droit local à adhérer à titre individuel au régime français d’assurance chômage, ce qui engagerait moins le Gouvernement.
Quoi qu’il en soit, nous sommes impatients de connaître les résultats de ces délibérations.
La parole est à M. Christian Cambon, auteur de la question n° 985, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.
Monsieur le secrétaire d’État, depuis de nombreux mois déjà, les membres de Daesh sèment la terreur, notamment en Irak et en Syrie.
La France a beaucoup œuvré pour la protection des communautés chrétiennes, qui étaient et sont toujours persécutées dans cette région. Les événements qui ont eu lieu voilà quarante-huit heures le démontrent amplement.
Aujourd’hui, je souhaiterais attirer votre attention sur une communauté bien moins connue, qui n’est ni chrétienne ni musulmane, mais qui subit de plein fouet l’extrême barbarie des djihadistes de Daesh. Lors de leur offensive menée dans le nord-ouest de l’Irak le 3 août 2014, les combattants de Daesh se sont attaqués aux Yézidis, massacrant les hommes, capturant les femmes et les enfants.
En ce moment même, plus de 5 000 femmes et enfants yézidis sont aux mains des djihadistes en tant qu’esclaves, vendus sur des marchés aux terroristes. Ces femmes sont victimes de viols, de travail forcé, de mariages forcés et de conversions aux rites musulmans contre leur gré. Hélas, certaines ne voient pas d’autres solutions que de mettre fin à leurs jours. Cent cinquante femmes, y compris des femmes enceintes, ont d’ores et déjà été exécutées parce qu’elles avaient refusé de se marier à des combattants du groupe terroriste.
Les récits des rescapées sont effroyables. De surcroît, beaucoup de ces malheureuses sont mineures. Les combattants de Daesh utilisent le viol comme une arme lors d’attaques qui constituent des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.
Les Nations unies ont encore rappelé récemment que l’État islamique, ou plutôt Daesh, se sert des enfants yézidis, y compris d’enfants handicapés, pour en faire des combattants et des kamikazes. Ces enfants sont transformés en véritables boucliers humains pour protéger les installations des bombardements, mais ils subissent aussi des sévices sexuels et d’autres tortures.
La stratégie d’endiguement de la coalition internationale a entraîné un retranchement des forces de Daesh auprès des populations locales, qui sont de plus en plus susceptibles d’être utilisées en tant que bouclier humain.
On le sait, plus de 500 000 yézidis et membres d’autres minorités religieuses ont fui face aux attaques menées par Daesh dans le nord de l’Irak depuis le mois de juin, la plupart se réfugiant dans la région autonome du Kurdistan irakien, avec une problématique humanitaire à la clef. La situation s’aggrave, l’hiver n’arrange pas les choses et la libération de Mossoul ne semble pas encore à l’ordre du jour afin de permettre à ces réfugiés de rentrer chez eux.
Dans l’ère de l’ultra-communication, un événement qui fait la une de l’actualité un jour tombe aux oubliettes le lendemain. Pourtant, les souffrances perdurent et le problème n’a toujours pas de solution. Avant-hier encore, vingt et un chrétiens coptes ont été assassinés dans des conditions effroyables par les soldats de Daesh. Les minorités religieuses sont, une nouvelle fois, les premières victimes de l’extrémisme islamiste.
Monsieur le secrétaire d’État, un bilan de ces atrocités est-il en cours, afin de permettre aux pays occidentaux de poursuivre le cas échéant devant la Cour pénale internationale les auteurs de ces crimes de guerre et crimes comme l’humanité ? La France est-elle prête à s’associer à une démarche commune pour déposer une plainte à La Haye du fait des crimes contre les minorités religieuses commis par Daesh ? Certes, Daesh n’est pas un État, mais se revendique comme tel et doit donc assumer les conséquences de ses actions. Il est temps de combattre l’État islamique, non seulement avec les armes, mais aussi avec nos idées et nos valeurs.
Enfin, pourriez-vous nous dresser le bilan des actions humanitaires mises en place par la France ou l’Europe pour venir en aide à ces populations démunies, qu’il s’agisse de l’aide aux réfugiés ou de ce que l’on peut faire pour sauver ces populations, singulièrement ces femmes et ces enfants, de ce sort absolument dramatique ?
Monsieur Cambon, vous avez rappelé avec force l’horreur de l’actualité et les persécutions de nombreuses populations, parmi lesquelles les chrétiens d’Orient, victimes d’actes de persécution, de violence et de meurtres que la France condamne avec la plus grande fermeté, et contre lesquels elle agit.
Vous l’avez aussi rappelé, la France est aux avant-postes de la mobilisation internationale en Irak. Le ministre des affaires étrangères, M. Fabius, est allé à Erbil dès le 10 août dernier pour superviser les premières livraisons d’aide humanitaire. Le Président de la République s’est également rendu le 12 septembre 2014 à Bagdad et à Erbil.
La situation dramatique de la population irakienne, notamment de ses minorités, parmi lesquelles les Yézidis, est au cœur de nos préoccupations. Ces minorités sont parmi les premières cibles des terroristes de Daesh.
Cette barbarie ne fait que renforcer notre détermination à lutter contre Daesh sur tous les fronts : en cassant son expansion territoriale, grâce à l’action militaire de la coalition ; en luttant contre les réseaux de financement et les filières de combattants étrangers ; en apportant une aide aux populations civiles – la France a pour cela débloqué en 2014 une aide humanitaire d’urgence de plus de 5 millions d’euros, et incite ses partenaires à aller dans le même sens – ; en soutenant aussi une solution politique en Irak et en Syrie ; en favorisant enfin l’accueil des réfugiés irakiens qui le demandent – à l’heure actuelle, près de 1 000 personnes ont été accueillies sur le territoire français.
Notre position constante est que seule une solution politique permettra de lutter contre la menace terroriste de Daesh et de restaurer durablement un État de droit.
En ce qui concerne votre question sur la possibilité de lancer une procédure à l’encontre de Daesh pour crime contre l’humanité, une session spéciale du Conseil des droits de l’homme des Nations unies a permis de mobiliser la communauté internationale face aux crimes commis en Irak, constitutifs de crimes contre l’humanité.
Sur l’initiative de la France et de l’Irak, une résolution a établi une mission chargée d’enquêter sur ces crimes. Elle rendra son rapport en mars. C’est un premier pas très important pour établir les faits et collecter les preuves, dans un souci de justice.
Il appartient bien sûr, en premier lieu, aux autorités irakiennes de juger les auteurs des crimes commis sur leur territoire. Il est essentiel pour cela que l’Irak puisse mettre en place un système judiciaire équitable et indépendant.
La saisine de la Cour pénale internationale, quant à elle, reste difficile puisque l’Irak n’a pas ratifié le statut de Rome.
Mais les États parties à la Cour pénale internationale pourraient connaître, le cas échéant, des crimes commis par leurs propres ressortissants.
Vous l’aurez compris, monsieur le sénateur, notre mobilisation est totale et notre engagement constant. La France est attachée à la lutte contre l’impunité. Tous les auteurs de violations constitutives de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité doivent être poursuivis et condamnés.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de l’extrême précision de votre réponse, qui vous a permis de rappeler les différentes initiatives qui ont été prises, sur le plan tant national qu’international. Celle du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, en particulier, me semble très importante.
Peut-être y a-t-il un déficit d’action au niveau de l’Europe ? Il pourrait être rappelé, lors des réunions des ministres des affaires étrangères, que l’Europe a une vocation tout à fait particulière à se mobiliser.
En tout cas, je vous remercie d’avoir rappelé ces initiatives, car il ne faudrait pas que la multiplication des horreurs commises dans cette région fasse oublier le drame que vivent actuellement les populations.
La parole est à M. Jacques Legendre, auteur de la question n° 988, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la SNCF a-t-elle entrepris de faire disparaître la liaison Intercités entre Paris et l’agglomération cambrésienne ? Cette agglomération, qui compte 70 000 habitants, et son arrondissement, qui en regroupe 150 000, situés à moyenne distance de Paris, ont évidemment besoin d’une desserte ferroviaire.
Depuis des années, nous luttons pour le maintien de cette desserte. Nous avons eu une liaison TGV ; elle a été supprimée par la SNCF au motif que le nombre de voyageurs était insuffisant. Il nous reste une liaison Intercités par jour. Or, nous constatons que la SNCF a entrepris d’en changer le cadencement. Elle a par exemple décidé de faire partir l’unique train quotidien à cinq heures quarante du matin, ce qui ne provoque pas l’enthousiasme des voyageurs.
Et voilà maintenant que ces voyageurs, déjà victimes d’un horaire peu pratique, constatent qu’ils ne sont pas sûrs que leur train arrivera à l’heure ni même qu’il entrera en gare de Paris. Comment expliquer que, le 22 décembre, le train parti à cinq heures quarante ait été arrêté trente kilomètres plus loin, à Saint-Quentin, parce que, a-t-on dit aux voyageurs, la locomotive ne pouvait aller plus avant dans la mesure où des révisions devaient être effectuées ? Les voyageurs ont dû attendre une heure avant qu’un autre train ne puisse les emporter.
Presque tous les jours – la semaine dernière encore –, des incidents de cette nature allongent, parfois d’une heure ou d’une heure et demie, à l’aller comme au retour, ce trajet qui ne devrait pas durer plus de deux heures. Monsieur le secrétaire d'État, comment ne pas comprendre que j’en sois réduit à dénoncer ici l’attitude méprisante de la SNCF à l’égard des usagers de cette ligne ?
Nous sommes attachés à la SNCF. Nous pensons qu’elle est un service public, qu’elle est utile et même nécessaire, qu’elle contribue à l’égalité des territoires. Cependant, en l’espèce, nous ne voyons pas qu’elle respecte encore ce principe de l’égalité des territoires. Monsieur le secrétaire d'État, quelles mesures allez-vous prendre pour que la SNCF respecte ce qui est sa vocation première et se souvienne que les voyageurs sont sans doute ses clients, mais d'abord ses financeurs ?
Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur la situation de la liaison ferroviaire Cambrai-Paris. L’État, autorité organisatrice des trains d’équilibre du territoire, ou TET, depuis 2011, est particulièrement attentif à la qualité du service proposé aux usagers sur ces lignes indispensables aux dessertes de moyenne et longue distances.
Les horaires mis en œuvre le 14 décembre dernier ont été étudiés par SNCF Mobilités et SNCF Réseau pendant plus de deux ans en lien avec les acteurs concernés, notamment les régions Picardie et Nord-Pas-de-Calais, autorités organisatrices des transports express régionaux, ou TER, afin de répondre aux besoins exprimés et d’assurer une meilleure robustesse des circulations, en particulier à l’approche de Paris, dans un contexte de saturation du réseau.
Comme vous le relevez, les horaires des trains du matin depuis Cambrai à destination de Paris ont été modifiés. Vous noterez cependant que l’offre Intercités permet aux voyageurs d’arriver à Paris avant huit heures avec un train direct, ou avant neuf heures avec une correspondance, le temps de parcours étant similaire. Ces modifications ont été relayées auprès des usagers plusieurs semaines avant leur application, afin d’anticiper les changements d’habitude qu’elles allaient entraîner.
La mise en œuvre des nouveaux horaires a par ailleurs fait l’objet d’une attention particulière de la part de la SNCF, qui a procédé à un pointage des anomalies rencontrées au cours des premiers jours afin d’y apporter des solutions. Les incidents que vous relatez témoignent effectivement des difficultés rencontrées par la SNCF pour assurer son service avec la qualité demandée par l’État en tant qu’autorité organisatrice. Sachez que la convention entre l’État et la SNCF concernant les trains Intercités intègre déjà un mécanisme d’incitation à la qualité, qui méritera d’être affiné et complété à l’occasion de l’élaboration d’une nouvelle convention, afin d’être au plus proche du ressenti des usagers du quotidien.
En préalable, j’ai souhaité confier à une commission, composée de parlementaires, d’élus régionaux et d’experts, et présidée par le député Philippe Duron, une mission d’analyse et de propositions visant à clarifier l’avenir des TET. En effet, l’articulation des TET avec les TER et les TGV, et plus largement au sein d’une offre de mobilité de plus en plus large, mérite une réflexion approfondie. Ces travaux font l’objet d’une concertation elle aussi approfondie, et la commission présentera ses conclusions aux commissions compétentes du Parlement d’ici à juin 2015, en préalable aux décisions que prendra le Gouvernement en vue d’élaborer une nouvelle convention entre l’État et la SNCF, pour une entrée en vigueur à partir de 2016.
Monsieur le secrétaire d'État, votre réponse est très administrative. Je ne peux pas vous en vouloir : la SNCF vous a fourni quelques éléments de réponse. J’espère que la commission Duron aboutira enfin à des conclusions raisonnables.
J’ai cité quelques exemples ; j’aurais pu en ajouter d’autres. Est-il normal que le train ne parte pas le 25 décembre au soir, parce que, au dernier moment, sans explication, un membre du personnel s’est absenté ? Comme par hasard, cela s’est produit plusieurs années de suite… Ce n’est pas acceptable, vous en conviendrez. Il y a un problème de qualité. Non, monsieur le secrétaire d'État, contrairement à ce que vous ont dit les services de la SNCF, cette ville moyenne qu’est Cambrai ne bénéficie pas d’une desserte de qualité.
Il y a également des problèmes de fond. Nous ne voudrions pas que la SNCF décourage les voyageurs en changeant les horaires, en rendant la liaison infernale, puis explique que, faute de voyageurs, elle doit supprimer la liaison. Nous ne voulons pas aller à Paris en autocar, monsieur le secrétaire d'État ; or, j’ai parfois l’impression que c’est le destin vers lequel on voudrait nous pousser.
Nous serons très attentifs aux travaux de la commission Duron. Nous espérons que les manquements graves à la qualité du réseau que nous constatons presque tous les jours vont cesser. À défaut, monsieur le secrétaire d'État, je serai obligé de vous demander d’en discuter à nouveau avec moi dans cet hémicycle.
La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 972, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ma question vise à formuler les mêmes doléances, mais au sujet de la ligne Paris-Rouen-Le Havre, une ligne historique faisant elle aussi partie du réseau des trains Intercités, également appelés trains d’équilibre du territoire, ou TET.
À l’heure actuelle, il faut deux heures seize pour relier Le Havre à Paris, alors qu’une heure suffit pour aller de Lille à Paris. De nombreuses publicités promettent même un trajet Paris-Bordeaux en deux heures en 2017… Depuis de nombreuses années, les avaries et les retards sont récurrents, à tel point que des associations et des collectifs se sont constitués pour alerter la SNCF et les pouvoirs publics sur la dégradation régulière de la ligne. Les incertitudes quant au départ des trains, à la vétusté des rames et aux arrêts en plein trajet sont le quotidien des usagers.
En effet, depuis quarante ans, aucun investissement majeur n’a été effectué pour garantir un service de qualité sur cette ligne. Dans son rapport public annuel 2015, la Cour des comptes a justement souligné la qualité de service médiocre, liée principalement à l’ancienneté du matériel roulant sur les lignes Intercités ; j’en suis le témoin régulier sur la ligne Paris-Le Havre. La convention triennale signée en 2010 avait pourtant fait naître beaucoup d’espoirs. Des travaux ont été effectués en urgence sur certains matériels roulants, mais il ne s’agissait que de répondre à des situations d’extrême urgence. D’après ce que je sais, la ligne Paris-Le Havre n’a pas été concernée. Son parc demeure hétéroclite et ancien, avec un âge moyen de plus de trente-cinq ans.
Dans le même temps, le territoire normand évolue, d’un point de vue tant politique qu’économique. La réorganisation des régions va faire de la Normandie la sixième région de France. Ce sera une région ouverte à la fois sur la mer et sur le Grand Paris, et une porte d’entrée et de sortie pour de nombreux échanges commerciaux maritimes grâce à ses deux ports, Le Havre et Rouen. Des infrastructures de transport de qualité, notamment dans le domaine ferroviaire, sont essentielles pour le développement de cet axe à fort potentiel d’expansion. Le projet de ligne nouvelle Paris-Normandie, ou LNPN, est au cœur du sujet. Acté par Réseau ferré de France, ou RFF, en 2012, cette ligne nouvelle doit voir le jour. Elle est nécessaire à l’expansion économique normande.
Comme l’a reconnu Guillaume Pépy, la SNCF a une dette envers la Normandie. Je partage son point de vue. Aussi souhaiterais-je, monsieur le secrétaire d'État, connaître vos intentions et vos engagements pour que la ligne Paris-Rouen-Le Havre retrouve une qualité décente, propre à satisfaire les usagers-clients, dont beaucoup sont des abonnés quotidiens. La nouvelle commission « Avenir des trains d’équilibre du territoire » doit rendre ses conclusions à la mi-2015. En quoi la Normandie sera-t-elle affectée ? Les usagers peuvent-ils espérer un engagement ferme de votre part pour une amélioration du matériel roulant et une vraie fiabilité de la liaison ferroviaire ?
Enfin, après les péripéties de l’écotaxe et de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, je suis naturellement poussée à vous poser la question de l’avenir de la LNPN. Pouvez-vous me confirmer qu’elle fera partie des chantiers prioritaires pour lesquels l’Agence fera « un effort particulier », selon l’expression qu’elle emploie dans son communiqué du 16 décembre dernier ? Pourrais-je un jour emprunter cette ligne et relier ainsi Le Havre à Paris en une heure quarante, comme promis ?
Madame la sénatrice, vous m’interrogez sur les lignes ferroviaires qui desservent la Normandie. Il est vrai que, dans l’attente des nouvelles infrastructures prévues, que vous avez mentionnées, les conditions de circulation sur le réseau sont particulièrement contraintes, notamment à cause de l’existence d’un goulet d’étranglement entre Poissy et Vernouillet, qui concentre l’ensemble des circulations entre la Haute-Normandie, la Basse-Normandie et la gare Saint-Lazare.
L’État, autorité organisatrice depuis 2011 des trains d’équilibre du territoire, dont font partie les liaisons Paris-Caen-Cherbourg et Paris-Rouen-Le Havre, est particulièrement attentif à la qualité de service proposée aux usagers. C’est pourquoi la SNCF a mis en place un plan d’action « lignes sensibles », qui a permis une amélioration progressive des résultats de ponctualité sur ces axes au cours des trois dernières années.
Toutefois, ces résultats ne sont pas encore satisfaisants, et une conjonction de facteurs perturbant l’exploitation – travaux et difficultés de maintenance du matériel roulant, notamment – a effectivement conduit à constater une dégradation nette depuis le mois de septembre 2014. L’État, en tant qu’autorité organisatrice des TET, a donc demandé à la SNCF de mettre en œuvre dès la fin 2014 un ensemble d’actions à court et moyen terme pour améliorer dans la durée la qualité de service de ces circulations.
S’agissant de la ligne nouvelle Paris-Normandie, je tiens à rappeler les conclusions de la commission « Mobilité 21 ». Dans son rapport, remis le 27 juin 2013, la commission reconnaissait la saturation de l’axe existant et son besoin d’amélioration en termes de capacité et de régularité. À cet effet, elle a classé le projet de ligne nouvelle dans les opérations à réaliser en première priorité.
Mon prédécesseur a donc relancé la gouvernance du projet, en nommant à la tête du comité de pilotage le préfet Philizot, délégué interministériel au développement de la vallée de la Seine, et a demandé à RFF de lancer la première phase d’études préalables à l’enquête d’utilité publique, afin que soit choisie en 2016 une zone de passage préférentielle sur trois sections considérées aujourd’hui comme prioritaires : Paris-Mantes, Rouen-Yvetot et Mantes-Évreux.
RFF a constitué une équipe dédiée à ce projet et a lancé les premiers appels d’offres afin de s’inscrire dans ce calendrier. Un dispositif de gouvernance a été mis en place afin de permettre au plus grand nombre de s’exprimer. La Commission nationale du débat public et le comité de pilotage du projet ont tous deux validé le dispositif de concertation prévu dans le cadre du projet de ligne nouvelle Paris-Normandie.
Ce dispositif permettra d’associer largement les collectivités locales aux différentes étapes du processus, via des instances qui seront saisies des dessertes envisagées ainsi que des différents fuseaux étudiés. Il garantira également l’information et l’expression du grand public, en particulier grâce à un site internet dédié et à l’organisation de réunions publiques.
Monsieur le secrétaire d’État, vous constatez comme moi la dégradation permanente du trafic sur les lignes desservant la Normandie, en particulier sur la ligne Paris-Le Havre. Cette semaine encore, trois trains ont été supprimés sur cette ligne, ce qui ne fait qu’accroître l’exaspération des usagers, auxquels il faut adresser un signal fort. Des améliorations avaient été promises pour le 15 décembre : même si un projet est en cours de réalisation, on n’en perçoit pas encore les effets tangibles. Or nous sentons que le mécontentement de l’ensemble des territoires normands grandit.
En ce qui concerne la ligne nouvelle, nous en suivons les travaux avec intérêt. Nous espérons qu’ils ne prendront pas de retard et se dérouleront selon le calendrier prévu. Surtout, nous souhaitons que cette ligne permette d’irriguer l’ensemble des axes de circulation de la région normande et aille jusqu’au Havre, qui est le port de Paris, afin d’améliorer sensiblement la desserte du fret, essentielle pour ce port.
La parole est à M. Simon Sutour, auteur de la question n° 973, adressée à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur la problématique des ruisseaux couverts à laquelle sont confrontées, en ce qui concerne le département du Gard, quatre communes clairement identifiées – Bessèges, Molières-sur-Cèze, Gagnières et Robiac-Rochessadoule –, ainsi qu’une dizaine d’autres vraisemblablement.
Pour répondre aux nécessités de l’exploitation industrielle de charbon au début du XIXe siècle, les compagnies minières ont été amenées à construire de longs tunnels recouvrant les ruisseaux afin de pouvoir remblayer les fonds de vallées encaissées, tout en laissant s’écouler normalement l’eau : c’est ce que l’on nomme « les ruisseaux couverts ».
Les plateformes ainsi créées ont permis d’accueillir non seulement les carreaux de mine et toutes les infrastructures liées à l’activité minière, mais aussi, dans un territoire jusque-là rural, des villages et villes bâtis en quelques décennies, avec leurs « corons », que l’on appelle dans les Cévennes « cités » ou « casernes », leurs écoles, leurs salles des fêtes, leurs églises et même leurs routes qui sont, pour certaines, devenues départementales.
Certains tunnels, véritables œuvres d’art, présentent d’impressionnantes proportions de dix mètres sur douze et ont été parfaitement dimensionnés selon l’importance du débit des ruisseaux, volumineux et puissant au moment des épisodes que l’on n’appelait pas encore « cévenols » et qui jouissent maintenant d’une notoriété nationale.
Alors que ces ouvrages étaient très surveillés lorsque les mines étaient en activité, le transfert de propriété par des cessions foncières de l’État en direction des communes ou de particuliers, à partir de la fin des années soixante, a conduit à un arrêt de l’entretien de ceux-ci, les actes notariés ne mentionnant aucune préconisation particulière. Ces « cessions » à titre gratuit, ou pour des sommes dérisoires, de terrains ou de bâtiments étaient-elles bien intentionnées de la part de Charbonnages de France ? Je m’interroge – et je fais même plus que m’interroger. Les communes et les particuliers en acceptaient-ils, de fait, l’entretien ?
Au regard du droit français, un propriétaire est responsable du sous-sol au droit des limites de son terrain. Des personnes publiques ou privées sont donc responsables d’une portion de tunnel recouvrant un ruisseau. Or, pour la plupart, elles ne le savent pas ! De ce fait, ces tunnels ont sombré peu à peu dans l’oubli, jusqu’au 10 novembre 2012, date de l’effondrement de la clef de voûte de l’un des tunnels sur le Rieusset, créant un cône de quarante mètres de diamètre en plein cœur du bourg de Robiac-Rochessadoule.
Aujourd’hui, l’urgence est avérée : une étude portant sur 500 mètres de tunnel passant dans cette commune conclut à la très grave altération de la structure et à la nécessité d’engager rapidement des travaux. Cette situation est connue des services de l’État qui redoutent de graves accidents dans de nombreuses communes, notamment avec la multiplication des épisodes pluvieux intenses.
Or, face à cette situation, des moyens financiers substantiels sont nécessaires pour recenser, pour sécuriser et pour réparer l’ensemble de ces tunnels. Les particuliers concernés et les collectivités n’ont bien évidemment pas les moyens financiers d’y faire face ; ils n’ont d’ailleurs même pas les moyens de financer des études préalables.
Alors même que les galeries, par exemple, sont considérées comme des éléments indispensables à l’exploitation du charbon et, de ce fait, continuent à bénéficier d’une attention particulière de la part de l’État, les ruisseaux couverts sont considérés comme des éléments périphériques à l’exploitation minière. Pourtant, sans ces ruisseaux, l’exploitation aurait été impossible compte tenu de la topographie. Ces ruisseaux ne bénéficient donc d’aucune attention particulière de la part de l’État.
C’est pourquoi il serait souhaitable – j’ajoute même : nécessaire et indispensable – que l’État assume cet héritage et puisse intervenir massivement pour venir en aide aux particuliers et aux collectivités concernés.
Monsieur le sénateur, Mme la ministre de l’écologie attache une grande importance à la mise en œuvre d’une politique de prévention des risques adaptée aux enjeux et tenant compte des spécificités des territoires. La gestion des risques miniers après la fin de l’exploitation en fait partie.
Je rappelle que la responsabilité première est portée par l’exploitant et que la loi ne confie à l’État certaines des responsabilités des exploitants miniers qu’en cas de défaillance ou de disparition de ceux-ci. Comme vous l’indiquez dans votre question, les installations communément appelées « ruisseaux couverts » sont généralement des ouvrages réalisés par d’anciens exploitants miniers, sur des terrains dont ils étaient propriétaires, par exemple pour en optimiser la surface.
Ces ouvrages n’étaient pas directement liés à l’activité d’extraction minière, même s’ils ont pu la faciliter. Lorsque les exploitants ont mis fin à leurs activités minières, ils ont suivi une procédure d’arrêt des travaux prévue par la réglementation en vigueur, à laquelle ces ouvrages de génie civil n’étaient pas soumis. Par la suite, les exploitants ont cédé les terrains dont ils étaient propriétaires. Les droits et responsabilités afférents, notamment d’entretien, ont ainsi été transférés aux acquéreurs. En effet, ces ouvrages n’entrent pas dans le cadre des dispositions législatives spécifiques qui confient à l’État la responsabilité d’assurer la sécurité minière pour les anciens exploitants miniers disparus.
Néanmoins, conscient des difficultés auxquelles font face les propriétaires actuels, l’État intervient, au cas par cas, pour apporter son appui aux communes et particuliers concernés.
Ainsi, les services du ministère de l’écologie ont notamment été amenés à faire intervenir les opérateurs techniques du ministère, en particulier Géoderis, un organisme d’expertise regroupant l’Institut national de l’environnement industriel et des risques, l’INERIS, et le Bureau des recherches géologiques et minières, le BRGM, pour expertiser les éventuels risques présentés par les ruisseaux couverts.
Pour appuyer les communes concernées, l’État a en outre cofinancé une mission de recherche, réalisée en 2014 par l’École des mines d’Alès, visant à inventorier et à hiérarchiser les actions à mener pour sécuriser ces ouvrages dans la région Languedoc-Roussillon.
Les agences de l’eau sont également susceptibles d’accompagner, par l’octroi de subventions, les collectivités dans des programmes de réhabilitation, voire de « reconstruction », de cours d’eau artificialisés par une ancienne activité industrielle.
Dès à présent, les collectivités locales et les particuliers peuvent donc être aidés par ces différents dispositifs dans la gestion du risque lié à ces anciens ouvrages.
Monsieur le secrétaire d’État, en posant cette question, j’ai souhaité prendre date. En effet, votre réponse témoigne de l’absence de prise de conscience de la gravité de la situation par les services de l’État, ce que je regrette.
Ces ouvrages d’art ne sont plus entretenus et les catastrophes ont commencé, avec l’effondrement de Robiac-Rochessadoule en 2012, mais d’autres vont suivre, qui seront peut-être encore plus dramatiques ! Au moins, le problème aura été soulevé au sein de cet hémicycle.
Chacun doit assumer ses responsabilités. Les communes concernées sont très pauvres. Les populations qui habitent au-dessus de ces ruisseaux couverts en ignorent l’existence : le plus souvent, ce sont des retraités des mines qui n’ont évidemment pas les moyens d’engager les travaux nécessaires. Seule la puissance publique peut réaliser le travail d’analyse du risque et coordonner les solutions, en liaison avec les collectivités locales, les communes, mais surtout le département et la région.
Il faut que l’État passe la surmultipliée sur ce dossier et ne s’endorme pas sur ma question. En effet, d’ici à quelques mois, nous pourrions être amenés à nous souvenir que la question avait été posée sans qu’aucune réponse soit apportée.
La parole est à M. François Bonhomme, auteur de la question n° 981, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question porte sur l’usage des drones et leur encadrement.
Le récent survol de centrales nucléaires, et même du palais de l’Élysée, par des drones non identifiés pose la question de l’utilisation de ces engins volants pilotés à distance dont l’application, d’abord militaire, est à présent largement répandue dans le civil et le secteur des loisirs. Cette année encore, les drones de loisirs ont « fait un tabac » à l’occasion des fêtes de fin d’année, et des modèles de plus en plus sophistiqués sont proposés.
Notre pays a joué un rôle précurseur en matière de législation dans ce secteur, puisque l’usage des drones dans la sphère civile est réglementé par deux arrêtés ministériels du 11 avril 2012. Le premier concerne la conception des drones, les conditions de leur emploi et les capacités requises des personnes qui les utilisent. Le second précise les conditions d’utilisation de l’espace aérien par les drones. Il s’agit là de textes techniques.
Par ailleurs, la collecte de données par voie aérienne, réservée jusqu’ici au monde professionnel, est régie par le code de l’aviation civile qui prévoit que des autorisations peuvent être accordées. Ces données étant numériques, leur utilisation et leur conservation sont régies par la loi « informatique et libertés ».
Enfin, une réglementation particulière s’applique au survol des centrales nucléaires, mais aussi à celui des zones urbaines : c’est à la fois le survol de zones interdites qui est sanctionné, mais aussi l’utilisation non autorisée des fréquences de communication. Le code des transports prévoit des sanctions en cas d’infraction, comme a pu le constater le lycéen dont le drone avait survolé la place Stanislas à Nancy.
La France va prochainement aller plus loin et toiletter la réglementation de 2012. De nouveaux arrêtés doivent reconnaître la possibilité de prises de vues de toute nature en aéromodélisme, dès lors que celle-ci est accessoire au vol et que les vues réalisées ne sont pas exploitées à titre commercial. Autrement dit, l’utilisation de drones de loisirs qui n’était jusqu’alors que tolérée sera reconnue de jure, car la réglementation actuelle n’évoque pas l’usage récréatif de drones. Ces textes s’inscrivent cependant dans un cadre assez strict qui autorise le pilotage de drones pour un usage non professionnel, à la condition que ces aéronefs sans pilote restent dans le champ de vision de celui-ci et ne dépassent pas une altitude de 150 mètres.
Il n’en demeure pas moins que plusieurs problèmes se posent : d’abord, celui de la méconnaissance de la réglementation par les utilisateurs de drones de loisirs ; ensuite, celui des moyens mis à disposition de la gendarmerie des transports aériens pour faire respecter la réglementation et identifier les auteurs d’infractions.
Enfin, comme on commence à le voir aux États-Unis, de vives controverses apparaissent sur la question de la protection de la vie privée. La loi de 1978 protège clairement la vie privée, mais dès lors que la collecte de données est aérienne, il semble bien difficile de tracer une limite claire entre ce qui peut être licitement vu et entendu, ou non, et ce qui fait partie de la vie privée d’un point de vue aérien. Cette question est suffisamment aiguë pour que la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, ait décidé de s’en saisir.
C’est pourquoi je vous demande, madame la secrétaire d’État, comment le Gouvernement entend concilier les nouveaux usages induits par ces innovations robotiques et la nécessité d’un cadre juridique clair, rassurant et protecteur.
Monsieur le sénateur François Bonhomme, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de M. le ministre de l’intérieur.
Les aéronefs qui circulent sans personne à bord, couramment dénommés « drones », terme qui néanmoins n’apparaît pas dans la réglementation en vigueur, comme vous l’avez indiqué, sont régis par deux arrêtés du 11 avril 2012, ainsi que par certaines dispositions du code des transports et du code de l’aviation civile.
Les deux arrêtés du 11 avril 2012 ont pour objet principal de préserver la sécurité des personnes et des biens survolés, des aéronefs et des autres usagers de l’air. Ils ne traitent pas directement des questions de protection de la vie privée qui restent régies par les dispositions générales applicables dans ce domaine, notamment l’article 9 du code civil et l’article 226-1 du code pénal.
S’agissant plus particulièrement des drones de loisirs, l’accès à l’espace aérien est libre en dessous de 150 mètres par dérogation aux règles de l’air habituelles, étant précisé, en l’espèce, que seuls les vols en vue sont autorisés pour ces aéromodèles de moins de vingt-cinq kilogrammes.
Toutefois, cet accès à l’espace aérien en dessous de 150 mètres doit se faire en dehors, tout d’abord, des agglomérations et des rassemblements de personnes ou d’animaux, ensuite, des zones proches des aérodromes et, enfin, des espaces aériens spécifiquement réglementés qui figurent sur les cartes aéronautiques.
Concernant les utilisations professionnelles, le survol des agglomérations ou des rassemblements de personnes par ces drones n’est possible que dans le cadre d’une autorisation préfectorale délivrée après avis du service de la Défense et de la Direction régionale de l’aviation civile.
En outre, dès lors qu’un drone est équipé d’un appareil photo, d’une caméra mobile, d’un capteur sonore ou encore d’un dispositif de géolocalisation, il peut potentiellement porter atteinte à la vie privée. Si la prise de vue aérienne est réglementée par l’article D. 133-10 du code de l’aviation civile, il n’en demeure pas moins que la captation et l’enregistrement d’images relatives aux personnes relèvent également de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
La multiplication potentielle de ces engins soulève en effet des enjeux importants pour les libertés individuelles et le respect de la vie privée. Les travaux menés durant l’année 2014 ont permis, en collaboration avec des constructeurs de drones de loisirs, la Fédération française d’aéromodélisme, la FFAM, la Fédération professionnelle du drone civil, la FPDC, et la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, la réalisation d’une notice d’information relative à l’usage de loisir des aéromodèles.
Cette notice a fait l’objet d’une large diffusion auprès des acteurs associatifs et professionnels du domaine du drone. Ce travail collaboratif sera suivi de travaux sur une obligation réglementaire de fourniture de cette notice lors de la vente d’un drone.
Eu égard à l’ensemble de ces aspects, la CNIL a engagé des travaux sur le sujet. Elle souhaite réfléchir à un cadre de régulation adapté permettant d’accompagner l’innovation et le développement de nouveaux usages, tout en fixant les limites à ne pas franchir en termes de surveillance.
Par ailleurs, à la suite de nombreux survols illicites de zones dites « sensibles », que vous avez soulignés dans votre question, le Premier ministre a initié un travail interministériel sur la protection contre les actes de malveillance commis au moyen de drones.
Le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, le SGDSN, a été chargé de coordonner les travaux et la réflexion menés dans ce cadre, qui s’inscrivent dans trois directions : d’abord, l’évaluation des risques et des menaces, ensuite, la réponse capacitaire à apporter, enfin, le champ juridique.
De plus, l’article 2 de la proposition de loi relative au renforcement de la protection des installations civiles abritant des matières nucléaires, adoptée par l’Assemblée nationale, en première lecture, le 5 février 2015, prévoit que, avant le 30 septembre 2015, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport évaluant les risques et menaces que constituent les survols illégaux par des aéronefs télépilotés. Ce rapport présentera également les solutions techniques et capacitaires envisageables afin d’améliorer la détection et la neutralisation de ces appareils, ainsi que les adaptations juridiques nécessaires afin de réprimer de telles infractions.
Le Gouvernement entend soutenir les évolutions législatives et réglementaires qui se révéleraient nécessaires et proportionnées afin de concilier le développement de ce secteur avec les impératifs, notamment de protection de la vie privée et de respect de l’ordre public.
Madame la secrétaire d'État, j’ai pris bonne note de vos réponses concernant la protection de la vie privée.
Un autre volet de ma question portait sur une crainte suscitée par l’une des déclarations de Mme Royal. Interrogée à la suite du survol de centrales nucléaires à quatorze reprises en quatre mois par des drones non identifiés, elle semblait considérer que ces survols ne faisaient pas courir de risques.
Je retiens que le Gouvernement se préoccupe de protéger la vie privée et qu’une réflexion est actuellement menée pour apporter une réponse adéquate à cette demande.
La parole est à Mme Anne Emery-Dumas, auteur de la question n° 976, adressée à Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.
Madame la secrétaire d’État, lors du lancement par le Gouvernement du programme expérimental pour la revitalisation des centres-bourgs, nous avions été heureux de constater enfin la prise en compte des espaces ruraux. Cette idée de dynamisation de nos campagnes s’inscrivait complètement dans la démarche des « nouvelles ruralités » que portent depuis plusieurs années une quarantaine de présidents de conseil général.
Ainsi, trois communes de la Nièvre – La Charité-sur-Loire, Decize et Luzy – ont monté leur dossier et répondu à l’appel à manifestation d’intérêt lancé par le ministère de l’égalité des territoires et de la ruralité.
Au niveau départemental, Mme la préfète de la Nièvre avait placé la commune de Luzy en première position sur les trois projets présentés et M. le préfet de région l’avait classée en deuxième position à l’échelon régional.
Au final, c’est avec surprise et étonnement que nous avons appris qu’aucune des communes de la Nièvre n’avait été retenue dans la liste des villes sélectionnées, alors que Luzy était en position plus que favorable dans cette liste !
Cette situation nous est apparue comme un revirement incompréhensible au regard des modifications apportées dans le règlement et dans le choix des communes cibles de l’appel à manifestation d’intérêt. Nous ne la comprenons pas au regard des efforts fournis par notre département de la Nièvre auprès de communes et des intercommunalités pour promouvoir les territoires et la revitalisation des centres-bourgs. Nous ne la comprenons pas eu égard à la qualité de la candidature de Luzy dont les élus œuvrent chaque jour à la redynamisation de leur territoire tout en combattant le sentiment de relégation des populations.
Cette situation m’amène aujourd’hui à vous demander, madame la secrétaire d'État, des explications sur les conditions de mise à l’écart du département de la Nièvre de ce programme. Je vous rappelle que votre collègue Mme Sylvia Pinel, qui avait assisté aux états généraux des nouvelles ruralités, à Nevers, avait pris l’engagement de porter une vigilance particulière sur l’avenir des petites villes, des petites communes et de certains centres-bourgs qui sont essentiels à l’attractivité du monde rural.
Or, aujourd’hui, malgré la déception suscitée par cette annonce négative, nous continuons d’avancer. Le conseil général de la Nièvre, qui poursuit le développement de sa politique en faveur des territoires, souhaite que le dossier de la ville de Luzy puisse être réexaminé. Il forme le vœu qu’en toutes hypothèses – peut-être à l’occasion des assises de la ruralité – puissent être envisagées d’autres formes de soutien aux projets de dynamisation des territoires les plus ruraux.
Je vous remercie, madame le secrétaire d’État, de bien vouloir nous dire ce qui est prévu dans ce cadre.
Madame la sénatrice, vous attirez l’attention de Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité sur l’appel à manifestation d’intérêt pour soutenir la revitalisation des centres-bourgs de nos territoires. Vous l’interrogez particulièrement sur le dossier déposé par la ville de Luzy. Retenue par de fortes contraintes d’agenda, elle m’a chargée de vous transmettre sa réponse.
Le Gouvernement est convaincu de la nécessité de mettre en œuvre une politique d’aménagement équilibré du territoire. La pérennisation de centres-bourgs animés en est une condition sine qua non, car ils sont des lieux de cohésion sociale et des pôles indispensables à la vie quotidienne et à l’attractivité des territoires ruraux et périurbains.
Comme vous l’avez souligné, un certain nombre d’entre eux sont aujourd’hui en proie à de grandes difficultés soit parce qu’ils perdent de la population, soit parce qu’ils en gagnent sans parvenir à répondre aux enjeux de leur dynamisme démographique.
C’est la raison pour laquelle nous avons lancé un programme expérimental en juin dernier : 300 centres-bourgs pré-identifiés par les préfets et les services déconcentrés de l’État ont été invités à soumettre un dossier de candidature.
Luzy faisait partie des centres-bourgs pré-identifiés, mais, comme vous l’avez constaté et en dépit des enjeux réels de revitalisation que vous soulignez, cette ville n’a pu être retenue dans la liste des cinquante-quatre centres-bourgs qui ont été annoncés en novembre dernier.
L’enveloppe dédiée à ce programme ne permettait en effet pas de retenir tous les territoires. La sélection, fondée sur des analyses objectives des administrations centrales et déconcentrées de l’État, s’est donc faite en fonction de l’importance des difficultés constatées, mais aussi de la maturité du projet.
Toutefois, compte tenu de l’engouement généré pour ce programme et consciente qu’il s’agit bien là d’un enjeu réel sur lequel l’État doit se mobiliser aux côtés des collectivités, ma collègue Sylvia Pinel a annoncé sa volonté de fonder une politique plus ambitieuse en matière de revitalisation des centres-bourgs.
Dans l’intervalle et pour accompagner les projets non retenus, elle a demandé aux préfets de porter à ces derniers une attention particulière. Les dossiers non retenus, comme celui de Luzy, de La Charité-sur-Loire ou encore de Decize, vont ainsi pouvoir bénéficier d’un appui des services de l’État en région et dans le département pour retravailler les points perfectibles des dossiers et conforter les points forts.
Par ailleurs, le préfet étudiera les possibilités de les faire bénéficier de moyens mobilisables au titre des politiques de droit commun, notamment avec la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, qui a été augmentée de 200 millions d’euros en 2015, et à travers le nouveau volet territorial des contrats de plan État-région que nous avons lancé.
Une animation nationale, pilotée par le Commissariat général à l’égalité des territoires et l’Agence nationale de l’habitat, l’ANAH, sera organisée avec les lauréats. Elle sera ouverte à la participation des non-lauréats afin de capitaliser sur les expériences et d’en tirer des enseignements importants pour l’extension de cette démarche.
Enfin, je vous informe que les communes de Luzy, de La Charité-sur-Loire et de Decize figurent toutes parmi les 6 000 communes rurales concernées par l’ouverture du prêt à taux zéro pour l’achat de logements anciens à rénover depuis le 1er janvier 2015. Il s’agit d’un outil efficace pour favoriser la revitalisation des centres-bourgs ainsi que l’accession à la propriété, qui est par ailleurs l’une des clés de la relance de la construction dans laquelle le Gouvernement s’investit fortement.
Je remercie Mme la secrétaire d’État chargée de la politique de la ville de m’avoir transmis la réponse de Mme la ministre de la ruralité, réponse qui ne me satisfait pas complètement.
Je regrette que le soin de financer les aménagements de ce type ait été transféré à la DETR. J’avais compris que l’augmentation de la DETR, dont allait bénéficier notamment le département de la Nièvre au titre de la péréquation avec les départements les plus pauvres, pourrait servir les projets de l’ensemble des communes. J’espère que nous ne serons pas pénalisés par l’absence de nos villes sur la liste retenue au titre de l’appel à projets.
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, auteur de la question n° 978, transmise à Mme la garde des sceaux.
Monsieur le président, par cette question, je voulais attirer l’attention de M. le Premier ministre sur l’arrêt rendu par le Conseil d’État, le 12 décembre 2014, qui a rejeté le recours de l’association « Juristes pour l’enfance » et validé la circulaire dite « Taubira » du 25 janvier 2013 visant à faciliter la délivrance de certificats de nationalité pour les enfants nés à l’étranger de gestation pour autrui, GPA.
Par cet arrêt, le Conseil d’État valide de facto les conséquences d’une pratique interdite en France. Alors que le rapporteur public a rappelé à l’audience le contexte d’une interdiction très claire de la GPA, qualifiant le commerce de la GPA de « sordide et cauchemardesque », le Conseil d’État a considéré, s’appuyant sur l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 26 juin 2014, que la France ne peut plus priver un enfant de sa nationalité française, sous peine de porter une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée.
Or, selon le 1° de l’article 21-12 du code civil, la nationalité est acquise pour les enfants nés de GPA à l’étranger de manière automatique, au bout de cinq ans de résidence sur le territoire français.
Par conséquent, il n’y a pas de nécessité – ni pratique ni juridique – à créer des règles en ce domaine. Il est en revanche porté une grave atteinte à l’intérêt supérieur de l’enfant, qui devrait pourtant guider l’ensemble des réflexions et décisions.
Enfin, une convention de GPA ne peut pas être distinguée de ses effets, puisque la naissance de l’enfant constitue l’objet même et exclusif de cette convention.
En validant ses effets, c’est la convention de la GPA en elle-même que l’on valide. L’interdiction française de recourir à cette pratique ne devient alors qu’une pure pétition de principe, alors que cette interdiction est sanctionnée d’une peine d’un an d’emprisonnement et d’une amende de 15 000 euros, selon l’article 227-12 du code pénal.
Je rappelle que le Premier ministre s’est élevé publiquement, à plusieurs reprises, contre la pratique de la GPA. Dans ses propos recueillis par le journal La Croix du 2 octobre 2014, il indique que « la GPA est une pratique intolérable de commercialisation des êtres humains et de marchandisation du corps des femmes ».
Ma question est simple et mérite une réponse claire : le Premier ministre entend-il intervenir concrètement – et comment – contre cette pratique ?
Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme la garde des sceaux.
Vous interrogez le Gouvernement sur la manière dont il entend intervenir pour lutter contre la gestation pour autrui. Vous estimez, en particulier, que la décision du Conseil d’État du 12 décembre 2014, aux termes de laquelle cette haute juridiction a validé la circulaire du 25 janvier 2013 visant à permettre la délivrance de certificats de nationalité française pour les enfants nés de gestation pour autrui à l’étranger, revient finalement à valider la GPA elle-même puisqu’on en reconnaîtrait ainsi ses effets en France.
On ne doit pas se méprendre sur la portée de la décision du Conseil d’État : cette décision ne porte pas atteinte au principe de prohibition de la gestation pour autrui en France qui, je le rappelle, est affirmé à l’article 16-7 du code civil.
Le Conseil d’État, en rejetant le recours formé contre la circulaire du 25 janvier 2013, confirme uniquement la possibilité de délivrer un certificat attestant de leur nationalité française aux enfants concernés, nés à l’étranger d’un Français et qui disposent d’un acte d’état civil étranger « probant » justifiant d’un lien de filiation avec ce parent français.
Or, contrairement à ce que vous indiquez, madame le sénateur, l’article 21-12 du code civil ne permet pas d’admettre de manière automatique l’acquisition de la nationalité française pour les enfants nés à l’étranger de GPA, en raison de leur recueil par un Français depuis au moins cinq ans.
La décision du Conseil d’État témoigne de la recherche d’un juste équilibre entre le principe d’ordre public de prohibition de la gestation pour autrui, qui demeure et auquel le gouvernement français est très attaché, et la nécessaire protection qu’il convient de garantir à l’enfant au nom de son intérêt supérieur, au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la convention de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l’enfant, et de son droit à mener une vie familiale normale, au sens de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Elle confirme tout simplement, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, aux termes de ses arrêts du 26 juin 2014 ayant condamné la France, la nécessité impérieuse de distinguer le sort des enfants de celui de leurs parents ayant eu recours à un contrat illicite et de leur garantir ainsi, sur le territoire national, le droit au respect de leur identité, dont la nationalité française constitue un aspect essentiel.
J’ajoute que la décision du Conseil d’État ne remet nullement en cause la politique pénale que le Gouvernement entend faire respecter contre toutes les atteintes à l’ordre public. En particulier, la garde des sceaux veille à ce que l’action publique soit particulièrement diligente s’agissant de la lutte contre toute forme de trafic d’enfants s’apparentant à l’exploitation d’autrui et de la poursuite des intermédiaires proposant des activités interdites en France.
Pour ma part, je pense que le Conseil d’État, en validant la circulaire Taubira, a consacré une nouvelle avancée de la GPA en France. Les droits des femmes et des enfants s’en trouvent plus que jamais menacés.
Je le redis, les enfants nés par GPA à l’étranger n’avaient pas besoin de cette circulaire pour avoir une nationalité : nés à l’étranger, ils ont la nationalité de leur pays d’origine. De plus, en vertu à l’article 21-12 du code civil, ils peuvent acquérir la nationalité française au bout de cinq ans de résidence sur le territoire français.
La position du Gouvernement n’est pas claire.
Vous avez évoqué, madame la secrétaire d’État, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ainsi que les arrêts du 26 juin 2014 de la Cour européenne des droits de l’homme, dont le Gouvernement n’a pas fait appel. Or tous les spécialistes s’accordent à dire que cette décision de ne pas faire appel desdits arrêts était motivée par la volonté de permettre la validation de la circulaire Taubira. La Cour européenne des droits de l’homme, en effet, est clairement sortie de son champ de compétence en se prononçant sur des affaires de GPA, alors même que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qu’elle est chargée de faire respecter, ne comporte aucun engagement des États en la matière. Il fallait donc faire appel de ces arrêts !
Là, réside toute l’ambiguïté du Gouvernement sur ce dossier.
Je déplore que, lentement mais sûrement, grâce à la tactique des « petits pas », la GPA s’installe en France. La circulaire Taubira n’a été prise que pour réaliser une avancée vers sa légalisation !
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, auteur de la question n° 964, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l'économie, de l’industrie et du numérique, chargée du numérique.
Alors que le Gouvernement encourage l’utilisation du numérique pour faciliter les démarches des citoyens auprès de l’administration, avec la mise en place d’outils dématérialisés pour le paiement des impôts ou le dépôt de pré-plainte, certaines communes n’ont plus de connexion internet depuis le 1er janvier 2015. Un comble à l’ère du « tout-numérique » !
La commune du Mas, village de 170 habitants situé à 77 kilomètres au nord de Nice, se trouve précisément dans cette situation. Faute de couverture 3G, le maire nourrit des craintes quant au bon fonctionnement de la mairie et à la continuité du service public.
La raison évoquée de ce retrait par l’opérateur est le manque de rentabilité. Cela laisse supposer qu’aucun autre prestataire ne prendra le relai. La seule solution proposée est l’installation d’un « kit satellitaire », avec un abonnement bien trop onéreux pour une si petite commune et un débit bien plus lent pour la navigation.
Il ne s’agit malheureusement pas d’un cas unique, puisque dix-huit autres communes des Alpes-Maritimes sont actuellement dans la même situation.
L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, a mis en demeure deux opérateurs téléphoniques qui avaient deux à trois ans de retard sur leur taux de couverture attendu. Une enquête administrative a également été ouverte sur une « zone blanche » de montagne, censée disposer de réseau, comme l’a expliqué l’ancien président de l’ARCEP lors d’une audition à l’Assemblée nationale le 18 juin 2014.
À l’heure de l’« ultraconnectivité », à l’heure où les campagnes de publicité des opérateurs vantent les mérites du très haut débit, les communes sont loin d’être toutes égales face au numérique.
Dans les Alpes-Maritimes, l’uniformisation des connexions a été fixée à l’horizon 2020. Le conseil général s’est engagé à financer les opérations grâce à un schéma directeur départemental d’aménagement numérique, ou SDDAN, mais les opérateurs doivent néanmoins jouer leur rôle, conformément aux accords, et proposer des offres aux habitants.
Comment le Gouvernement compte-t-il encourager les opérateurs à s’implanter dans ces zones où la collectivité aura installé son propre réseau, et à y rester ?
Va-t-il renforcer les moyens de l’ARCEP pour sanctionner les opérateurs qui se retirent d’une zone géographique, alors que des communes y sont recensées et doivent bénéficier d’une connexion digne de notre temps ?
Madame la sénatrice, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Mme Axelle Lemaire.
Avec le plan France Très Haut Débit, nous avons souhaité engager le plus rapidement possible le chantier structurant pour nos infrastructures numériques de demain. Mais il nous faut aussi répondre aux besoins du moment, veiller à étendre l’accès aux réseaux existants et en assurer la fiabilité.
S’agissant des réseaux mobiles, des travaux sont en cours pour définir un nouveau programme de couverture, avec trois objectifs.
Premièrement, il convient d’achever les précédents programmes de couverture des zones blanches et, au-delà de ces programmes, de couvrir les 170 communes identifiées comme ne disposant d’aucune couverture mobile. Aucune commune n’est concernée dans le département des Alpes-Maritimes : l’ensemble des seize communes recensées au titre du programme « zones blanches » sont couvertes, quinze par les trois opérateurs et la seizième, pour le moment, par un seul opérateur.
Deuxièmement, il s’agit de pallier un manque évident des programmes précédents, lesquels ne permettaient pas d’assurer la couverture de l’ensemble de la population des communes puisqu’ils ne visaient que les centres-bourgs. Il faut en effet pouvoir répondre aux besoins des communes les plus mal couvertes, comme certaines communes des Alpes-Maritimes que vous avez évoquées.
Troisièmement, au-delà du service téléphonique de base, il faut s’assurer que les territoires ruraux disposent de l’accès à l’internet mobile en 3G.
Un programme de couverture en 3G de 3 900 communes par l’ensemble des opérateurs devait être achevé à la fin de 2013. Il ne l’a pas été et l’ARCEP a ouvert, à ce titre, une enquête administrative en mai dernier. Le Gouvernement travaillera, avec le régulateur, pour que l’objectif de ce programme soit atteint, ce qui permettra aussi de limiter les zones grises de la 3G.
Le programme que le Gouvernement entend proposer à brève échéance permettra de répondre aux difficultés que vous décrivez. Il pourra nécessiter d’étendre par la loi les obligations existantes des opérateurs mobiles.
Dans le cas d’une commune telle que celle du Mas, la réponse doit venir autant de la couverture fixe que de la couverture mobile. L’un des objectifs du plan France Très Haut Débit est d’apporter l’accès à internet dans les communes qui n’en bénéficient pas aujourd’hui ou qui n’ont qu’un accès très dégradé.
La situation de la commune du Mas est en outre assez particulière : il apparaît que les habitants de la commune sont placés derrière un équipement du réseau de cuivre d’Orange, un multiplexeur, empêchant les signaux DSL émis depuis la commune voisine de Saint-Auban de passer. Historiquement, cet équipement était nécessaire afin d’assurer le raccordement téléphonique de la commune. De ce fait, aucun logement du Mas n’est aujourd’hui éligible à l’ADSL.
Orange a engagé depuis plusieurs années un plan de neutralisation de ces multiplexeurs, consistant à procéder à des opérations de réaménagement de réseau exactement semblables à la montée en débit sur cuivre. Dans cette hypothèse, les logements du Mas pourraient théoriquement être éligibles au haut débit de qualité pour 93 % d’entre eux et au très haut débit pour 56 %.
Néanmoins, la commune du Mas ne fait pas partie du plan de neutralisation des multiplexeurs GMUX d’Orange. La réponse viendra donc du projet porté par le département dans le cadre du plan France Très Haut Débit. Ce projet prévoit la couverture en fibre optique de l’ensemble du département, y compris de la commune du Mas, selon un calendrier dont il a la maîtrise.
Dans ce cadre, le Gouvernement ne peut que vous encourager, madame la sénatrice, à solliciter les services du conseil général des Alpes-Maritimes, mais il reste bien entendu, de même que la mission France Très Haut Débit, à votre disposition.
Je vous remercie de ces réponses, madame la secrétaire d’État.
Bien évidemment, le conseil général des Alpes-Maritimes s’est saisi de ce projet de réduction de la fracture numérique, en se fixant pour objectif très ambitieux l’uniformisation des connexions à l’horizon 2020.
Cependant, ce schéma a un coût, qui, selon l’estimation du conseil général, est de 140 millions à 180 millions d’euros.
Je souhaite donc que l’État accompagne le conseil général des Alpes-Maritimes. Celui-ci financera une partie de l’équipement nécessaire pour couvrir les communes non encore couvertes par le très haut débit, mais il est impératif que l’État soit présent financièrement à ses côtés. D’autres sources de financement seront également bienvenues. Nous avons ainsi sollicité l’aide de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et de l’Union européenne.
La parole est à M. Henri de Raincourt, auteur de la question n° 992, adressée à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
J’ai pu constater que l’attention du ministre de l’agriculture avait déjà été appelée par différents collègues sur l’incompréhension que suscite chez certains non-salariés agricoles le décret n°2014-494, portant application de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.
En effet, si ce décret prévoit fort opportunément l’attribution de points gratuits de retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux, il n’en reste pas moins que les critères qu’il exige – à savoir, pour les retraités d’avant 1997, justifier de 32, 5 années de carrière comme non-salarié agricole et, pour ceux qui sont à la retraite depuis 1997, justifier de 17, 5 années de carrière comme non-salarié agricole – sont de nature à exclure près de 80 000 conjoints et aides familiaux d’anciens exploitants agricoles.
Pour ces personnes, ce dispositif d’application paraît d’autant plus injuste que la loi prévoyait 557 000 bénéficiaires pour une enveloppe de 160 millions d’euros, mais que, dans les faits, on en compte 477 000, pour un coût de 133 millions d’euros. Le Gouvernement a expliqué que ce « décalage» résultait d’une application réduite du dispositif et qu’il fallait ne pas négliger la question des droits de réversion.
À ce sujet, j’ai étudié les arguments du ministre de l’agriculture. Sa réponse, d’ordre comptable, n’est pas, hélas ! de nature à satisfaire les principaux intéressés, raison pour laquelle ceux-ci n’ont de cesse de nous solliciter. On peut les comprendre quand sait ce qu’est aujourd'hui le niveau des retraites agricoles !
Pour dissiper définitivement le soupçon du caractère discrétionnaire de cette mesure, je souhaiterais connaître la raison qui justifie une telle exclusion d’une partie des conjoints et aides familiaux d’anciens exploitants agricoles et je voudrais savoir si le Gouvernement envisage d’autres dispositions, plus souples, pour répondre à leur situation.
Je vous prie tout d’abord, monsieur le sénateur, de bien vouloir excuser l’absence de M. Stéphane Le Foll.
Je rappelle qu’un plan ambitieux de revalorisation des retraites agricoles a été mis en œuvre dans le cadre de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.
Cette réforme, conformément aux engagements pris par le Président de la République, est la plus ambitieuse en termes de revalorisation des petites retraites agricoles depuis la loi Peiro de 1998.
L’une des mesures mises en œuvre permet d’attribuer aux aides familiaux et aux conjoints d’exploitants – des femmes dans leur très grande majorité – des points gratuits de retraite complémentaire obligatoire au titre des années antérieures à l’obligation d’affiliation au régime.
Par souci de cohérence, les conditions d’accès au bénéfice de la mesure sont identiques à celles qui sont mises en œuvre depuis 2002 pour l’attribution de points gratuits aux chefs d’exploitation.
Ainsi, les personnes dont la retraite a pris effet avant 1997 doivent justifier d’une durée minimale d’assurance en tant que non-salarié agricole au moins égale à 32, 5 années. Celles dont la retraite a pris effet à compter du 1er janvier 1997 doivent justifier d’une durée minimale d’assurance en tant que non-salarié agricole égale à 17, 5 années ainsi que d’une retraite à taux plein dans le régime des non-salariés agricoles.
Ces conditions d’accès à la mesure ont été présentées en toute transparence avant le débat parlementaire. En effet, c’est au mois d’août 2013, au cours d’une réunion présidée conjointement par Mme Marisol Touraine et M. Stéphane Le Foll et rassemblant l’ensemble des organisations professionnelles agricoles ainsi que les associations représentatives de retraités, qu’ont été exposées à la profession les conditions d’octroi des points gratuits de retraite complémentaire obligatoire, notamment celles qui sont relatives aux durées d’assurance nécessaires pour bénéficier de la mesure. Ces conditions ont d’ailleurs fait partie de l’étude d’impact du projet de loi.
Les décrets publiés au mois de mai 2014 sont conformes aux annonces et aux engagements pris et n’ont procédé à aucune restriction du champ d’application de cette mesure.
Le bilan provisoire qui a été réalisé au mois de juin 2014 ne prenait pas en compte les bénéficiaires des droits à réversion, ceux-ci n’ayant été versés, avec effet rétroactif, qu’à la fin de l’année 2014. De plus, en 2014, la mesure n’aura été appliquée que sur onze mois, ce qui minore son impact financier.
Enfin, il faut souligner que l’estimation des 557 000 bénéficiaires potentiels de la mesure correspondait à une simulation effectuée sur des effectifs de 2011. Or les effectifs de retraités subissent une érosion démographique naturelle, qui permet aussi d’expliquer le différentiel entre les effectifs estimés et les effectifs recensés.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. J’avoue que je n’attendais pas d’éléments franchement nouveaux sur ce sujet.
Je reconnais évidemment le côté positif de la mesure qui concerne les conjoints – qui sont bien souvent les épouses, comme vous l’avez rappelé – et les aides familiaux. Néanmoins, je souhaite que vous rappeliez au ministre de l’agriculture que, même si des efforts ont été accomplis, ce que nous reconnaissons, le niveau des retraites de ces personnes est véritablement une misère. Tout ce que la société pourra faire pour elles ne sera donc que justice.
La parole est à M. Claude Dilain, auteur de la question n° 983, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.
Madame la secrétaire d'État, au mois de novembre 2014, selon un sondage, 67 % des Français considéraient que l’État ne s’impliquait pas assez pour faire reculer les discriminations envers les personnes handicapées et 71 % reprochaient la même chose aux entreprises. Pourtant, plusieurs textes ont fait avancer la cause des personnes handicapées.
Ainsi, l’ordonnance du 26 septembre 2014 relative à la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d’habitation et de la voirie pour les personnes handicapées a permis de redéfinir les modalités de la mise en œuvre du volet « accessibilité » de la loi de 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Je me plais à souligner au passage votre implication dans le suivi de ce texte, madame la secrétaire d'État.
L’ordonnance prévoit notamment de faire reconnaître la spécificité des chiens-guides d’aveugles et d’assistance, c’est-à-dire d’y sensibiliser les magasins, notamment les magasins d’alimentation, et les vigiles assurant la surveillance de ces établissements. Or nous continuons à recevoir de nombreuses plaintes concernant l’accès aux magasins ; il nous faudra donc être très vigilants sur l’application effective de cette mesure.
Je veux également souligner les difficultés que rencontrent de nombreux élèves pour être accueillis avec leur chien d’assistance dans les écoles, malgré les dispositions de la loi de 2005. Je suis persuadé, madame la secrétaire d'État, que vous aurez l’occasion d’évoquer ce problème avec Mme la ministre de l’éducation nationale.
Si l’accueil, l’aménagement et la sécurité des établissements scolaires soulèvent nécessairement des questions complexes, il n’en reste pas moins que les élèves bénéficiant de l’aide d’un chien d’assistance doivent pouvoir accéder de façon autonome à leurs établissements.
L’ordonnance que j’ai évoquée ne fait pas mention de ce cas précis. C’est pourquoi, madame la secrétaire d'État, je souhaiterais obtenir des précisions pour tous ces élèves qui veulent accéder à l’école et pour leurs parents.
Monsieur le sénateur, je vous remercie de cette question qui porte sur un sujet essentiel : l’inclusion accompagnée à l’école des enfants en situation de handicap, en particulier les jeunes malvoyants qui ont besoin d’un chien-guide d’aveugle.
À l’heure actuelle, la loi prévoit que les chiens-guides d’aveugles ou d’assistance sont admis dans les locaux scolaires, dès lors que trois conditions sont réunies : premièrement, l’élève doit être titulaire d’une carte d’invalidité ou de priorité ; deuxièmement, l’animal doit être inscrit dans le plan de compensation du handicap établi par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées et considéré par cette dernière comme devant être présent durant les temps de scolarisation ; troisièmement, pour être réputé chien-guide d’aveugles ou d’assistance, l’animal doit nécessairement avoir été formé dans un centre agréé. J’insiste sur ce dernier point, car c’est l’un des sujets sur lesquels nous avons récemment travaillé pour permettre la reconnaissance de ces chiens.
Plus largement, monsieur le sénateur, vous avez raison d’inscrire votre propos dans le contexte plus global de l’accessibilité de la ville et des transports aux personnes aveugles ou atteintes de déficience visuelle accompagnées d’un chien-guide ou d’assistance. Celle-ci est inscrite dans la loi depuis 1987 et a connu plusieurs améliorations. Néanmoins, dans certains secteurs, elle demeure imparfaitement assurée. Ainsi, certains conducteurs de taxi continueraient de se montrer réticents à la présence des chiens-guides d’aveugles ou d’assistance dans leur voiture.
Pour ce qui est des établissements de santé, on comprend bien que, dans les services où des soins sont pratiqués, l’accès soit interdit aux chiens pour des raisons d’asepsie. En revanche, dans les services où les raisons d’hygiène ne peuvent être invoquées, notamment dans les salles d’attente des cabinets médicaux, il faut que ces chiens puissent être admis.
La publication toute récente du guide de l’accueil des personnes en situation de handicap dans les services publics a justement pour objet de faire reconnaître tous ces droits.
C’est également à cette fin que, dans le cadre de la publication de l’ordonnance du 26 septembre 2014, nous avons rendu obligatoire l’acquisition de connaissances en matière d’accueil des personnes handicapées lors de la formation des personnels amenés à être en contact avec les usagers et les clients des lieux recevant du public.
Enfin, c’est l’ensemble de nos concitoyens que nous entendons mobiliser grâce à la grande campagne nationale relative à l’accessibilité universelle qui sera lancée au cours de l’année 2015 dans les médias nationaux.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse et, surtout, de votre engagement dans ce dossier extrêmement important. Si les textes ont évolué dans le bon sens, l’application ne suit pas toujours, ou pas toujours suffisamment vite. J’espère que les mesures que vous avez prises dans ce domaine, notamment le guide et la campagne de communication, nous permettront de ne plus avoir à vous interroger à ce sujet.
La parole est à M. Claude Dilain, en remplacement de M. Michel Boutant, auteur de la question n° 991, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de bien vouloir excuser mon collègue Michel Boutant, qui a malheureusement été empêché de poser lui-même sa question.
Michel Boutant souhaitait attirer l’attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur le problème que rencontrent les professionnels affiliés au régime social des indépendants – RSI – du fait du décalage existant entre le moment où ils perçoivent leur revenu et celui où ils doivent acquitter leurs cotisations. En raison de ce décalage, il existe un régime d’acomptes provisionnels et de régularisations qui rend leurs cotisations difficilement compréhensibles.
Le revenu des artisans, en particulier, est soumis à une variabilité importante, de telle sorte que la trésorerie de certains travailleurs indépendants peut s’en trouver malmenée.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a prévu de rapprocher la date de régularisation des cotisations de l’année au titre de laquelle ces cotisations sont dues, c'est-à-dire de faire en sorte que la régularisation intervenant lors de l’année n concerne l’année n-1, au lieu de l’année n-2, comme c’est le cas actuellement. De même, la régularisation concernant les deux derniers mois de l’année pourra également être anticipée dès le printemps.
Toutefois, il n’est pas certain que ces avancées puissent apporter une solution complète en cas de fortes variations des revenus, encore moins dans les situations de cessation d’activité.
La pratique de l’autoliquidation, quant à elle, ne fait pas l’unanimité. En particulier, les artisans s’inquiètent des frais que pourrait entraîner la nécessité de faire appel aux services d’un expert-comptable. Par ailleurs, le RSI et l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, craignent une baisse du rendement du recouvrement et soulignent la difficulté d’effectuer des contrôles.
Une solution intéressante a été mise en avant par MM. Jean-Noël Cardoux et Jean-Pierre Godefroy dans leur rapport d’information sur le RSI, déposé le 11 juin 2014. Il s’agirait de recourir aux dispositions dérogatoires de l’article L. 131-6-2 du code de la sécurité sociale, qui permettent de calculer le montant des cotisations provisionnelles sur la base du revenu estimé de l’année en cours.
La pratique du provisionnement des cotisations, qui permettrait de lisser les variations de revenus, offrirait peut-être également une solution intéressante.
Michel Boutant souhaite donc savoir ce qu’entend proposer le Gouvernement, dans le cadre des travaux législatifs à venir, pour réaliser une avancée à cet égard ?
Ayant été moi-même médecin libéral pendant plusieurs dizaines d’années, je peux témoigner qu’il s’agit là d’un problème très sérieux pour les professionnels affiliés au RSI.
Monsieur le sénateur, le Gouvernement est particulièrement attentif à la mise en œuvre de mesures de simplification en faveur du régime social des indépendants. Par ailleurs, il est pleinement conscient des difficultés spécifiques que peuvent rencontrer certains travailleurs indépendants du fait des variations de leurs revenus dans le temps.
C’est pourquoi la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a généralisé le dispositif de régularisation anticipée, qui permet d’ajuster les cotisations provisionnelles appelées pour l’année en cours et de régulariser les cotisations de l’année précédente dès que le revenu est déclaré, sans attendre l’automne.
Cela permet aux cotisants de payer leurs cotisations provisionnelles sur le revenu de l’année n-1 au lieu de l’année n-2, donc sur une base plus proche de la réalité des revenus des entrepreneurs. Ainsi, ils peuvent ajuster plus tôt à la baisse leurs appels de cotisations si leurs revenus sont en baisse, tout comme cela leur évite de devoir verser des sommes trop importantes lors de la régularisation en cas de hausse de leurs revenus.
La régularisation anticipée permet aux entrepreneurs qui ont versé trop de cotisations provisionnelles de bénéficier au plus tôt d’un remboursement et à ceux qui doivent effectuer des versements complémentaires d’étaler ces paiements sur un plus grand nombre de mois.
Ajuster les cotisations au plus près de la réalité des revenus des entrepreneurs, limiter l’ampleur des régularisations, tels sont les objectifs de ce dispositif qui a fait ses preuves et se généralise en 2015. Les travailleurs indépendants pourront mesurer dès cette année les avantages de ce dispositif.
Michel Boutant propose d’aller plus loin aujourd’hui en généralisant, d’une part, le recours au dispositif permettant aux travailleurs indépendants d’opter pour le calcul de leurs cotisations provisionnelles sur la base du revenu estimé de l’année considérée et, d’autre part, la pratique du provisionnement des cotisations afin de lisser les variations de revenus.
Ce dernier aspect relève non pas de la responsabilité des organismes de sécurité sociale, mais bien de celle des entrepreneurs. Contraindre ces derniers à un provisionnement systématique, notamment en début d’activité, pourrait freiner leur développement. Il revient aux entrepreneurs d’apprécier la façon dont ils doivent anticiper le paiement des sommes dues lors de la régularisation dans les phases de croissance de leurs revenus.
Quant au calcul des cotisations provisionnelles sur la base du revenu estimé, il doit rester un dispositif facultatif, permettant aux travailleurs indépendants, par son caractère optionnel, d’adapter l’assiette de leurs cotisations provisionnelles en temps réel lorsque les aléas économiques l’exigent.
En effet, il convient de ne pas créer de complexité inutile pour les travailleurs indépendants dont les revenus sont plus stables ou qui ne sauraient pas procéder à une telle estimation.
Il est donc important de conserver cette possibilité – il faut aussi la faire connaître – pour les entrepreneurs pour lesquels elle est adaptée. Nous ferons ensuite le bilan des apports de la régularisation anticipée pour l’ensemble des entrepreneurs une fois que cette pratique aura été généralisée.
En résumé, le Gouvernement considère qu’il faut conserver une certaine souplesse afin que les entrepreneurs puissent choisir entre différentes possibilités.
Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État, que je transmettrai à M. Boutant.
Je sais, pour l’avoir pratiqué, que le régime en cause est extrêmement compliqué. Plus on le simplifiera, mieux cela vaudra !
La parole est à M. Roland Courteau, auteur de la question n° 1016, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Madame la secrétaire d’État, l’annonce de la dotation académique en effectifs avait suscité beaucoup d’espoir chez les parents d’élèves, les enseignants et les élus du département de l’Aude.
La dotation ministérielle pour l’académie de Montpellier est passée de 132 nouveaux postes pour 2014 à 214 postes pour la rentrée 2015. C’est là un signe fort de la volonté du Gouvernement de faire de l’enseignement la grande priorité de la Nation. J’en félicite le Gouvernement.
Dès lors, nous étions persuadés, dans l’Aude, que la dotation accordée par le rectorat à ce département correspondrait à ses besoins et à ses attentes, contrairement à ce qui s’était passé pour la dotation de 2014. Nous pensions que nous allions enfin bénéficier en 2015 d’une meilleure prise en compte de la ruralité.
À cet égard, je rappelle que 54 % de nos écoles comptent moins de quatre classes et que la majorité d’entre elles se situent en zones de revitalisation rurale. Or ces écoles consomment, fort logiquement, plus de postes.
Contrairement à ce que j’entends dire, la moyenne des effectifs par classe dans le département est loin d’être faible. Pourtant, ce département ne s’est vu doter que de 5, 5 postes seulement sur les 214 accordés à l’académie. Pis, selon les informations qui m’ont été communiquées, sur ces 5, 5 postes, il n’en restera aucun pour accueillir les élèves supplémentaires, car trois postes ont été gagés en 2014 : l’un concernera le dispositif « Plus de maîtres que de classes » et 1, 5 poste sera consacré à des mesures spéciales. Il n’y aura donc pas de poste en plus pour accueillir les élèves supplémentaires à la rentrée 2015. Dès lors, il faudra fermer des classes ou des écoles ici pour en ouvrir là où le besoin se fera impérieux.
De plus, les classes en ville verront leurs effectifs atteindre vingt-huit ou trente élèves, sans espoir d’ouverture, tandis que les élèves de moins de trois ans ne seront pas accueillis dans des classes leur étant dédiées.
J’avoue ne pas comprendre que la situation particulière du département de l’Aude n’interpelle pas le rectorat. Les classes chargées en milieu rural existent, tout comme en milieu urbain, mais il faut distinguer les situations rurales des situations urbaines. N’existe-t-il donc pas d’autre possibilité, pour accueillir des élèves supplémentaires, que de fermer ici pour ouvrir là ?
Je souhaite vivement que la dotation en postes d’enseignants du département de l’Aude pour 2015 soit réexaminée et que la spécificité de ce département soit mieux prise en compte.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Mme la ministre de l'éducation, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Cela étant, votre question concerne un département que je connais bien.
Sourires.
Je le rappelle, le Président de la République a fait de la jeunesse la priorité de son quinquennat. C’est pourquoi il s’est engagé à créer 60 000 nouveaux moyens d’enseignement d’ici à 2017. Ces créations se poursuivent aujourd'hui et un peu plus de 5 000 nouveaux postes sont prévus pour la rentrée de 2015.
La répartition de ces emplois entre les académies répond au critère objectif de l’évolution démographique, mais elle prend également en compte la difficulté sociale et scolaire, et ce dans un souci de justice vers lequel tend toute notre action, souci que vous partagez avec le Gouvernement, monsieur le sénateur.
La ventilation par départements est ensuite effectuée par les rectorats. Elle est fonction de l’évolution des effectifs des élèves, mais aussi des priorités éducatives de notre ministère, que sont notamment la mise en œuvre de la nouvelle carte de l’éducation prioritaire et du dispositif « Plus de maîtres que de classes », le renforcement de la scolarisation des enfants de moins de trois ans et l’amélioration du soutien aux enfants ayant des besoins éducatifs particuliers.
Ces priorités, vous le savez, monsieur le sénateur, traduisent l’ambition du Gouvernement de restaurer l’égalité des chances entre tous les élèves.
D’après les dernières prévisions, les effectifs dans le département de l’Aude devraient augmenter de 59 élèves pour le premier degré à la rentrée de 2015. Trois postes ont donc été spécifiquement accordés pour accompagner cette évolution, ce qui correspond à un poste pour vingt élèves, ce qui est normal. Ainsi les moyens alloués à l’Aude permettront-ils d’améliorer le ratio professeur/élèves, lequel continuera, monsieur le sénateur, à se situer au-dessus de la moyenne académique. Dans l’Aude, il y a effectivement plus de professeurs par rapport au nombre d’élèves que dans les autres départements de l’académie de Montpellier.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, le ministère de l’éducation nationale continue à se mobiliser pour assurer une juste répartition des moyens éducatifs afin que se poursuive efficacement la refondation de l’école de la République. Des postes supplémentaires sont bien prévus pour les nouveaux élèves qui seront inscrits à la rentrée 2015.
Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État, mais je vous rappelle que les trois postes que vous venez d’évoquer ne seront pas des postes devant les élèves.
J’avais déjà indiqué, lors d’une précédente intervention, que nous n’éviterions pas la fermeture d’un certain nombre de classes. Nous nous verrons donc contraints de demander un rendez-vous à Mme la ministre de l’éducation nationale afin d’évoquer avec elle la spécificité du département de l’Aude.
La parole est à Mme Aline Archimbaud, auteur de la question n° 974, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Madame la secrétaire d’État, vous le savez, des enseignants et des parents d’élèves se mobilisent depuis maintenant plusieurs mois partout en France face à la sortie de leur collège du dispositif d’éducation prioritaire. C’est le cas notamment en Seine-Saint-Denis, où cinq collèges sont concernés, à Aulnay-sous-Bois, à Montreuil, à Neuilly-sur-Marne, à Romainville, ainsi que dans d’autres territoires, dans l’Oise par exemple. Nul ne peut pourtant nier les difficultés socio-économiques que connaissent les habitants de ces zones.
La fin du classement d’un collège en zone d’éducation prioritaire – ZEP – fait planer une menace sur ses projets pédagogiques, souvent innovants, dans lesquels il a pu investir grâce à l’aide que l’État apporte aux plus fragiles. Les projets des établissements de ces zones ont permis de favoriser la mixité sociale, de réduire l’évitement social qui caractérisait ces collèges discriminés, et donc de lutter contre les inégalités en matière de réussite scolaire.
En Seine-Saint-Denis, treize collèges rejoindront l’éducation prioritaire. C’est une bonne chose. Pour autant, l’aide qui leur est justement accordée au regard de la situation sociale des bassins de vie, souvent sinistrés, dans lesquels ils s’inscrivent ne saurait leur être octroyée aux dépens de collèges qui en ont autant besoin et qu’on a néanmoins sortis de ces réseaux d’éducation prioritaire.
Si les enseignants et les parents d’élèves déplorent le manque de concertation et de discussion sur la nouvelle carte de l’éducation prioritaire, ils s’interrogent également sur les indicateurs sociaux ayant été retenus comme critères d’entrée et de sortie du dispositif d’éducation prioritaire, lesquels sont jugés opaques et imparfaits.
Le Gouvernement peut-il garantir la transparence des critères retenus pour redéfinir la carte de l’éducation prioritaire, ainsi que l’exactitude des données qui ont permis de sélectionner les collèges sortis du dispositif ?
Par ailleurs, quelle garantie de moyens peut à présent être donnée aux collèges et aux écoles primaires anciennement classés en ZEP afin qu’ils persévèrent dans leur lutte contre l’échec scolaire et qu’il soit ainsi démontré que l’égalité des élèves sur tous les territoires reste au cœur de la mission de l’éducation nationale ?
Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme Najat Vallaud-Belkacem.
Comme vous l’avez dit très justement, la difficulté scolaire est aujourd’hui concentrée dans certaines écoles et dans certains établissements, où les élèves sont malheureusement le plus souvent issus de familles défavorisées. C’est pourquoi il était impératif d’engager un plan sans précédent pour refonder l’éducation prioritaire.
La réforme de l’éducation prioritaire sera déployée, à compter de la rentrée 2015, sur 1 089 réseaux, dont 350 regrouperont les situations les plus difficiles.
Afin d’élaborer la nouvelle carte de l’éducation prioritaire, dont les contours n’avaient pas été revus depuis 2006, un indice social innovant a été défini, en toute indépendance, par la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance du ministère afin de prendre davantage en compte les critères sociaux, notamment la situation des familles. Il est calculé sur la base de quatre indicateurs dont on sait qu’ils ont un effet direct sur la réussite des élèves : le taux de professions et catégories socioprofessionnelles défavorisées ; le taux de boursiers ; le taux d’élèves résidant en zone urbaine sensible ; le taux d’élèves en retard à l’entrée en sixième.
Pour être efficace, l’éducation prioritaire doit concerner les réseaux de collèges et d’écoles qui concentrent le plus de difficultés, le plus de population scolaire en situation de grande fragilité.
L’éducation prioritaire a donc vocation non pas à englober tous les collèges et toutes les écoles accueillant des élèves issus de familles défavorisées, mais à concentrer les efforts sur les établissements comptant le plus d’élèves en situation de grande difficulté économique et sociale.
La réponse aux besoins légitimes de tous les autres établissements se trouve dans le nouveau système de répartition des moyens d’enseignement : l’allocation progressive des moyens.
Ce nouveau système mettra fin aux effets de seuil et aux ruptures de charges brutales entre les établissements qui relèvent de l’éducation prioritaire et ceux qui n’en relèvent pas, l’objectif étant d’accompagner les établissements à la hauteur de leurs besoins, même lorsque ces derniers ne se situent pas en zone d’éducation prioritaire.
La réponse aux besoins des écoles et des établissements se fera ainsi à un double niveau, grâce, d’une part, à la carte des réseaux relevant de l’éducation prioritaire et, d’autre part, à la répartition des moyens d’enseignement dans le cadre des travaux sur la carte scolaire qui sont actuellement en cours.
Vous le voyez, madame la sénatrice, notre ambition est de permettre une juste répartition des moyens, à la hauteur des besoins spécifiques de chaque établissement. Il y va de la réussite de tous les élèves, quelle que soit leur origine sociale.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de votre réponse et des précisions que vous m’avez apportées.
Je rappelle que de nombreux collectifs de parents d’élèves et d’enseignants travaillent sur ces questions et qu’ils se sont engagés lorsque leurs établissements faisaient partie d’un réseau d’éducation prioritaire. Il faudrait, me semble-t-il, avoir avec eux une concertation suivie, régulière, dans un cadre approprié, car, loin de se contenter de protester contre ce qui ne va pas, ils font aussi des propositions pour mieux assurer la réussite scolaire. Actuellement, le cadre de cette concertation régulière fait défaut et il y a là une source d’amélioration possible.
Par ailleurs, vous avez évoqué un système d’allocation progressive des moyens destinés à tous les établissements. Nous verrons comment elle sera définie dans le détail. Il reste que, pour éviter la constitution de ghettos, il faut absolument investir non seulement dans les établissements des territoires frappés par la crise sociale, mais aussi dans ceux des territoires qui, pour être sans doute moins défavorisés, n’en comptent pas moins de nombreuses familles en situation difficile.
L’investissement dans l’école est à l’image de l’investissement dans la recherche : ce que l’on croit économiser maintenant, on le paie beaucoup plus cher vingt ans plus tard.
La parole est à M. Jacques Bigot, auteur de la question n° 980, adressée à M. le ministre des finances et des comptes publics.
En 2004, l’État a fait l’acquisition de 2 000 mètres carrés sur deux niveaux dans des bâtiments construits dans le centre-ville d’Illkirch-Graffenstaden, ville de 27 000 habitants, dont je suis encore le maire, quatrième ville du département et troisième ville de la communauté urbaine devenue aujourd’hui Strasbourg Eurométropole.
Dans ce bâtiment, ont été installés sur deux étages, d’une part, le centre des impôts, d’autre part, le centre de formation.
À la fin de 2014, la direction régionale des finances publiques du département du Bas-Rhin m’annonce qu’une nouvelle orientation est prise : elle abandonne le site et envisage de louer des bureaux dans un quartier de Strasbourg, plus précisément dans une zone d’activités située à quatre kilomètres du centre de la ville.
Cela me conduit à poser deux questions : une en tant que maire et une autre en tant que parlementaire.
Si je me crois fondé à poser ici, dans cet hémicycle, une question en tant que maire, c’est que la lettre que j’ai adressée en cette qualité le 14 avril dernier à M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics, n’a pas été honorée d’une réponse ; je profite donc de ce que je siège au Sénat depuis le 1er octobre pour m’adresser au Gouvernement.
Pourquoi ce mépris à l’égard des usagers qui étaient jusque-là accueillis au centre de la ville où se trouvent non seulement la mairie, bien sûr, mais aussi la caisse primaire d’assurance maladie, le tribunal d’instance, des services de proximité du conseil général, ainsi que deux équipements culturels majeurs qui servent bien au-delà de notre seule commune ? C’est un centre-ville qui sera desservi à partir d’avril 2016 par le tramway.
En termes d’organisation des services publics, à mon avis, ce choix n’est pas exemplaire !
À cette question s’ajoute celle du sénateur sur la logique budgétaire et la dépense publique, monsieur le secrétaire d’État.
Contrairement à ce que l’on peut vous raconter, ces locaux ne seront pas facilement cessibles. Il s’agit de 2 000 mètres carrés conçus spécialement sur deux niveaux, accessibles par une seule entrée. Aucune société suffisamment importante pour occuper 2 000 mètres carrés de bureaux ne voudra s’installer à cet endroit. Les entreprises recherchent de préférence les zones d’activités ou encore le pôle d’innovation implanté sur ma commune.
L’administration des finances va donc payer un loyer pour des bureaux qu’elle compte occuper à partir de la fin de cette année ou du début de l’année prochaine, et France Domaine aura « sur les bras » un bien qui ne sera pas facile à vendre !
J’ose espérer, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, que ce n’est pas une façon très artificielle de vous proposer d’inscrire au compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État » une recette que vous n’aurez pas en 2016, ni même avant longtemps.
Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur le déplacement du centre des finances publiques d’Illkirch-Graffenstaden vers la commune de Strasbourg et sur ses multiples conséquences.
Tout d’abord, je veux vous indiquer que le maintien sur l’ensemble du territoire d’un service public efficace, répondant aux besoins des usagers, est bien un objectif majeur de l’action du Gouvernement, au cœur des choix qui sont faits sur chacun des territoires.
Il a été rendu compte au maire, donc à vous-même, par des courriers de mes services datés du 18 décembre 2013 et du 25 février 2014, ainsi qu’à l’occasion d’échanges multiples avec le cabinet de Michel Sapin, de la décision de déplacer le centre des finances publiques d’Illkirch-Graffenstaden pour répondre simultanément à une préoccupation de sécurité des agents et du public, mais aussi – et je réponds là au sénateur – en raison d’une situation immobilière sans rapport avec les besoins du service.
Le choix d’installer nos services dans un immeuble situé sur la commune de Strasbourg, et dont la surface et la configuration répondent parfaitement aux nécessités de service, s’inscrit pleinement dans le cadre de la stratégie immobilière de l’État visant à optimiser son parc immobilier.
Toutefois, vous le savez, cette décision a été accélérée par deux incidents importants survenus en 2013, qui ont révélé des dysfonctionnements graves dans le système de chauffage de l’immeuble. Fort heureusement, ils n’ont pas eu de conséquences humaines, mais ils ont justifié qu’une procédure judiciaire soit engagée afin de déterminer les responsabilités du maître d’ouvrage, du constructeur, de l’association syndicale des copropriétaires et de son représentant.
Vous vous inquiétez également du devenir de l’immeuble. Au passage, je vous rappelle que la direction régionale des finances publiques continue d’en assurer l’entretien. En tout cas, je ne peux pas vous laisser dire qu’il est invendable : le dynamisme du centre-ville d’Illkirch-Graffenstaden, les différentes évolutions des dessertes de transports en commun et la configuration des locaux, exclusivement composés d’espaces de bureaux banalisés, à l’exception de la zone réservée à l’accueil, constituent autant d’atouts pour les acheteurs potentiels.
C’est en lien avec les services de France Domaine, et nullement avec l’idée inscrire une hypothétique recette dans un compte – vous le savez, l’État possède et gère d’innombrables immeubles dans ce pays –, que cette décision a été retenue. Je suis prêt à proposer que les services de France Domaine s’associent à vous, le cas échéant, pour réaliser une vente qui corresponde aussi bien aux besoins de la commune qu’aux impératifs des équilibres financiers de l’État.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de la réponse que vous m’avez apportée, qui est la réponse de votre administration. Permettez-moi de vous indiquer que, parfois, écouter les élus, et pas seulement les services, peut se révéler utile. Je crois que le maire d’une commune qui a été, de surcroît, président de la communauté urbaine, connaît la situation de l’immobilier de bureaux sur son territoire, les besoins, les demandes, les attentes…
L’administration locale m’a elle-même indiqué que les travaux nécessaires pour porter remède aux dysfonctionnements dont vous avez fait état n’étaient pas d’un coût démesuré et qu’ils auraient permis de maintenir dans ces locaux les deux services publics qui y étaient abrités.
Je vous donne donc rendez-vous, monsieur le secrétaire d'État. Je vous poserai à nouveau une question orale lorsque je constaterai que ce bâtiment n’est pas occupé, qu’il est abandonné sans solution, alors que l’État paie un loyer ailleurs. Nous pourrons alors vérifier si j’ai tort ou raison. J’espère que, d’ici là, votre administration n’essaiera pas de vous convaincre qu’elle a toujours raison !
La parole est à M. Didier Marie, auteur de la question n° 979, adressée à M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.
Ma question porte sur les conséquences de la stratégie économique du groupe UPM-Kymmene, multinationale spécialisée dans la fabrication de papiers journaux et magazines, et plus particulièrement, sur son choix d’arrêter la machine numéro 3 de l’usine Chapelle Darblay de Grand-Couronne, en Seine-Maritime. Cette question concerne plus largement l’avenir de la filière bois et papier, qui connaît à l’heure actuelle une situation difficile.
Le 13 novembre 2014, le groupe UPM-Kymmene a annoncé un vaste plan de réduction de ses capacités de production en Europe. Au total, 552 emplois sont menacés en Finlande, au Royaume-Uni et en France. À Grand-Couronne, dans un département déjà fortement touché par la crise, ce sont 196 postes qui sont concernés, ce qui suscite la colère des ouvriers de Chapelle Darblay : ceux-ci manifestent en ce moment même dans le centre de Rouen. Il n’est pas inutile de préciser que cette usine se trouve juste à côté du site Petroplus qui a fermé il y a peu de temps.
Les salariés de ce site en ont fait une usine extrêmement compétitive et dont la grande qualité est reconnue. Il serait totalement incompréhensible à leurs yeux que cette machine performante ne trouve pas un autre usage. Le mode de fonctionnement de cette entreprise épouse les problématiques du développement durable, le choix étant d’acheminer les balles de papier à recycler de l’Île-de-France vers Grand-Couronne sur des barges descendant la Seine et de livrer les bobines de papier à destination des imprimeurs parisiens par la même voie.
Un plan de sauvegarde de l’emploi est lancé et s’achemine inexorablement vers la suppression des 196 postes. Les syndicats demandent sa suspension et du temps pour qu’une solution alternative à l’arrêt de la machine puisse être proposée. Ils y travaillent, soutenus notamment par la région, qui s’est engagée à financer les études nécessaires.
Je souhaiterais, monsieur le secrétaire d’État, connaître la position du Gouvernement sur la situation de cette usine et avoir des précisions sur les démarches entreprises par les services de l’État pour poursuivre une activité et sauver l’essentiel des emplois.
Cette situation particulière soulève aussi la question de l’avenir de toute la filière papetière. L’INSEE évalue à 136 000 personnes le nombre de travailleurs de tous statuts qui œuvrent dans le secteur papier graphique, papier d’emballage, d’hygiène, et à 26 milliards d’euros le chiffre d’affaires réalisé par l’ensemble des branches liées aux activités papier, carton et imprimerie.
Cette filière représente en Haute-Normandie près de 10 000 emplois.
Cette industrie est aujourd’hui fragilisée, notamment par la généralisation des usages numériques, la dématérialisation des supports et les chargements d’habitudes de lecture. Notre collègue député Serge Bardy a d’ailleurs réalisé un très intéressant rapport sur le sujet et a présenté 34 propositions. J’ai moi-même sollicité le Gouvernement pour que soit organisée une table ronde réunissant l’ensemble des parties prenantes de cette filière et les partenaires sociaux.
Il nous paraît urgent qu’il soit donné suite à la proposition de désigner un chargé de mission national pour animer la réflexion et impliquer l’ensemble des parties.
Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d’État, nous informer des dispositions susceptibles d’être prises rapidement pour accompagner les mutations de cette filière et préserver les emplois qui y sont liés ?
Monsieur le sénateur, je vous remercie d’excuser l’absence du ministre de l’économie, retenu en cet instant à l’Assemblée nationale, qui m’a chargé de vous transmettre sa réponse.
Comme vous le savez, le développement des supports de communication numériques touche de plein fouet l’industrie papetière, qui voit son chiffre d’affaires stagner ou baisser, selon les supports : la baisse est de 17 % sur les quatre dernières années pour ce qui est du papier.
Après plusieurs restructurations et cessions au cours des dernières années, le groupe finlandais UPM, quant à lui, ne dispose plus que de deux unités en France.
C’est dans ce contexte que la machine 3 de la papeterie Chapelle Darblay, spécialisée dans le papier journal à partir de fibres recyclées, va être arrêtée. En effet, le groupe UPM a décidé d’arrêter, au début de 2015, quatre de ses dix-huit machines à papier européennes : une chez Chapelle Darblay, mais aussi deux en Finlande et une au Royaume-Uni. Cela correspond à une réduction de capacité de production de 805 000 tonnes, dont 130 000 tonnes à Grand-Couronne. Cette décision est motivée par la baisse structurelle de la demande de papier journal et une surcapacité en Europe, où les capacités sont estimées à 43 millions de tonnes pour des débouchés, exportations comprises, de 36 millions de tonnes.
Il restera à Grand-Couronne la machine 6, qui peut produire jusqu’à 250 000 tonnes et pour laquelle le groupe a prévu un nouvel investissement de 3 millions à 5 millions d’euros, afin de la rendre compétitive. Les procédures engagées en Angleterre et en Finlande pour l’arrêt des trois autres machines concernées par le plan sont d’ores et déjà terminées.
En France, l’arrêt de cette machine mobilise les acteurs publics. De très nombreux contacts ont eu lieu entre la préfecture, les représentants du personnel, les élus et la direction du site afin d’analyser les conséquences de l’arrêt de la machine 3, pour le site même de Grand-Couronne et pour l’ensemble de la filière et ses salariés. Il importe en effet d’étudier conjointement des solutions industrielles alternatives pour conserver l’activité sur le site.
Celles-ci pourraient comporter la reconversion du site vers d’autres sortes d’activités papetières, comme cela a, par exemple, été réalisé avec succès pour la papeterie de Strasbourg du même groupe, réorientée vers la production de pâte désencrée.
Ces réflexions se poursuivent et de nouveaux rendez-vous auront lieu. J’espère que nous saurons trouver, en liaison avec tous les acteurs intéressés, la meilleure solution pour préserver à la fois la compétitivité de la filière et l’emploi des salariés touchés dans leur vie quotidienne. En tout cas, monsieur le sénateur, le Gouvernement et l’ensemble des services du ministère de l’économie, de l’industrie et du numérique sont à votre disposition pour continuer d’œuvrer dans ce but.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, que je trouve rassurante. Il est certain que les services de l’État s’occupent activement de ce problème ; le préfet de région, en particulier, a reçu à de nombreuses reprises les salariés et les élus. Il n’en faut pas moins rester vigilant, notamment dans trois directions.
D’abord, si aucune autre solution n’est envisageable à court terme, le plan de sauvegarde de l’emploi devra être mis en œuvre dans les meilleures conditions pour les salariés.
Ensuite, nous devons collectivement exercer sur le groupe UPM-Kymmene une pression suffisante en faveur de la reprise de la machine, notamment dans la perspective d’une production alternative telle que celle dont vous avez parlé. On évoque aussi la possibilité de produire des sacs en papier, ce qui serait conforme aux orientations définies dans le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte.
Enfin, il convient d’accompagner la réflexion des salariés et des pouvoirs publics pour assurer la pérennité de l’ensemble de la filière, au niveau local comme dans le reste du pays.
La parole est à M. Jacques Genest, auteur de la question n° 986, adressée à M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.
Ma question porte sur la situation préoccupante du secteur du bâtiment et des travaux publics et sur ses répercussions directes en matière d’emploi.
J’avais déjà interpellé le Gouvernement à ce sujet lors de la séance de questions d’actualité du jeudi 27 novembre dernier, mais Mme Delga, secrétaire d'État chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire, avait alors répondu à côté, en centrant son propos sur la crise du logement. J’espère donc, monsieur le secrétaire d’État, obtenir enfin une réponse ce matin.
En 2014, le nombre de mises en chantier de logements neufs a régressé de 10 % par rapport à 2013, pour s’établir à 297 000, ce qui est historiquement très bas. C’est dire si notre pays tourne le dos à l’objectif, affiché par le candidat François Hollande, de 500 000 nouveaux logements par an !
La conjoncture ne peut, à elle seule, expliquer cette situation. À la vérité, toujours plus de règles d’urbanisme et de normes en tout genre viennent rigidifier la législation en matière de construction ; le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, que nous examinons en ce moment, en offre de nouveaux et déplorables exemples. Il faudrait faire exactement le contraire ! Le Gouvernement serait-il insensible aux appels des chômeurs de ce secteur ?
Que dire aussi de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, véritable usine à gaz qui a fait chuter la confiance des investisseurs ? Jusqu’au sein du Gouvernement, elle ne trouve plus guère de défenseurs ! En vérité, il ne se passe pas un jour sans qu’un maire m’alerte sur un permis refusé ou sur un certificat d’urbanisme négatif.
Monsieur le secrétaire d’État, il faut absolument réduire les contraintes en assouplissant les règles d’urbanisme et en allégeant les obligations en matière de construction.
Aujourd’hui, les maires doivent faire face à l’incompréhension de leurs concitoyens, qui voient de plus en plus de terrains classés inconstructibles. Ce phénomène contribue aussi à tirer vers le haut le prix du mètre carré de terrain à bâtir : songez qu’il a augmenté de 8, 8 % au cours de la seule année 2013 !
Par ailleurs, les collectivités territoriales assurant environ 70 % de l’activité des entreprises de travaux publics, la baisse des dotations que l’État leur alloue aggrave les difficultés de ce secteur.
Les conséquences de cette situation, en particulier la baisse de 12 % du nombre d’emplois dans le bâtiment et les travaux publics, sont d’autant plus préoccupantes que ce secteur joue un rôle moteur pour l’économie de notre pays. Quant aux perspectives pour 2015, les professionnels s’accordent à considérer qu’elles sont tout aussi sombres : le secteur détruira cette année quelque 30 000 emplois, soit autant que l’année dernière.
D’où, monsieur le secrétaire d’État, la question simple que je pose une nouvelle fois : quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre d’urgence pour relancer l’activité et l’emploi dans la construction ?
Monsieur Genest, vous attirez l’attention du Gouvernement sur la crise du secteur du bâtiment. Nous sommes naturellement préoccupés par la situation de la construction, qui est l’un des pivots de la reprise de l’économie et de la création d’emplois.
Il faut se souvenir que, en réalité, la baisse de la construction a débuté en 2009 ; les chiffres de l’an dernier, que vous avez mentionnés, ne sont pas si éloignés de ceux de cette année-là.
Par ailleurs, les chiffres actuels doivent être analysés à la lumière de la nouvelle orientation que le Gouvernement a donnée à la politique du logement. Il s’agit, en particulier, d’opérer un rééquilibrage entre les territoires pour offrir des logements plus abordables aux endroits où les besoins sont les plus pressants. Ainsi, dans les zones tendues, la construction est plus importante aujourd’hui qu’entre 2007 et 2012.
Monsieur le sénateur, je vous assure que le Gouvernement ne minimise pas les difficultés rencontrées par le secteur, qui rejaillissent sur l’emploi, mais aussi sur les prix du marché. C’est si vrai qu’il a lancé un ambitieux plan de relance fondé sur cinq priorités.
Premièrement, nous favorisons l’accession à la propriété grâce au renforcement du prêt à taux zéro et à son ouverture à l’achat de logements anciens dans 6 000 communes rurales.
Monsieur le sénateur, les effets de transfert résultant de ces mesures sont loin d’être négligeables. De fait, l’insuffisante circulation dans le circuit d’occupation des locataires et des propriétaires est l’une des difficultés que nous signalent l’ensemble des gestionnaires du secteur ; il faut donc améliorer cette circulation, et nous nous y employons.
Deuxièmement, en ce qui concerne les normes, dont vous avez parlé, nous avons lancé un grand chantier de simplification des règles de construction et d’urbanisme pour abaisser les coûts, développer l’innovation et accélérer les projets. Trente-sept des soixante-dix mesures annoncées par le Premier ministre et la ministre du logement dans ce domaine sont d’ores et déjà opérationnelles.
Troisièmement, nous poursuivons le soutien de l’État à la construction de logements, y compris de logements sociaux et très sociaux. Nous avons également créé une nouvelle offre de logements intermédiaires en zone tendue et, pour la renforcer, nous faisons bénéficier ces logements d’un taux de TVA de 10 %.
Quatrièmement, nous avons intensifié la mobilisation du foncier public, dont chacun sait qu’elle est une condition de l’accélération de la construction de logements neufs.
Cinquièmement, nous soutenons la rénovation des logements, un secteur créateur d’emplois, via le crédit d’impôt pour la transition énergétique, la simplification de l’éco-prêt à taux zéro et le programme « Habiter Mieux » de l’Agence nationale de l’habitat, qui financera 45 000 projets en 2015.
Pour que ces mesures portent leurs fruits, il faut, il est vrai, encore un peu de temps ; mais le dernier trimestre de l’année dernière a vu se manifester des signes encourageants, dont la presse s’est fait l’écho ces deniers temps.
Il faut également mener un travail de pédagogie et de diffusion de l’information. C’est pourquoi Sylvia Pinel a entrepris un « tour de France de la construction », destiné à faire connaître l’ensemble des nouvelles mesures, notamment aux acteurs de la construction.
Les élus locaux doivent aussi prendre leurs responsabilités. Nous y veillerons particulièrement, au besoin en renforçant les sanctions contre les communes qui ne respectent pas leurs obligations de construction de logements sociaux au titre de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
À en juger par votre réponse, monsieur le secrétaire d’État, et par celle que Mme Delga m’avait apportée, le Gouvernement n’a plus les pieds sur terre ! En tout cas, c’est ce que je suis conduit à penser.
Voyez les ruraux : ils ne peuvent plus construire et se sentent ignorés, ce qui est encore pire qu’être méprisés ; ce sentiment, qui s’exprime à chaque élection, on le perçoit tous les jours dans le monde rural. Monsieur le secrétaire d’État, pour conjurer la menace, qui est grande, il faut donner de la liberté à la ruralité !
La parole est à M. Alain Bertrand, auteur de la question n° 967, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique.
Je dois dire, monsieur le secrétaire d’État, que M. Genest a raison : les ruraux et les hyper-ruraux se sentent incompris et abandonnés, ce qui se manifeste par des votes extrémistes dans nos territoires.
Ma question porte sur la téléphonie mobile, la téléphonie fixe et internet.
En 2013, le prédécesseur de Mme Lemaire a conclu un accord avec Orange pour mettre en œuvre l’article L. 35-1 du code des postes et des communications électroniques, aux termes duquel « le service universel des communications électroniques fournit à tous un raccordement à un réseau fixe ouvert au public et un service téléphonique de qualité à un prix abordable ». Or force est de constater que, aujourd’hui, ce principe n’est pas appliqué dans la ruralité et l’hyper-ruralité.
Les parlementaires interviennent régulièrement sur le sujet, et on leur répond tout aussi régulièrement, mais il ne se passe grand-chose sur le terrain. Pour vous persuader de la nécessité d’agir, monsieur le secrétaire d’État, j’évoquerai certains faits récents.
Le 1er août 2014, les habitants du village du Pompidou, en Lozère, ont protesté contre une panne générale qui durait depuis quinze jours : le réseau n’était plus alimenté, internet ne fonctionnait plus, les portables pas davantage et le téléphone seulement par intermittence. Monsieur le secrétaire d’État, je vois que vous avez un téléphone portable : imaginez-vous sans réseau pendant quinze jours, avec un téléphone fixe et une ligne internet qui ne fonctionnent pas !
À la même époque, à Cassagnas, commune estimable, le téléphone est resté coupé pendant trois semaines, alors que le portable ne passe pas !
Le 20 octobre dernier, à Hures-la-Parade, les habitants ont demandé que les services de l’opérateur se mobilisent pour prendre en compte les demandes des zones rurales, parce que rien ne passe dans le village.
Au même moment, les gérants d’une entreprise de Saint-Germain-de-Calberte sont restés un mois sans téléphone après un orage, sans parler d’internet qui ne fonctionne pas. Comment ne pas comprendre leur exaspération ?
Monsieur le secrétaire d’État, que compte faire le Gouvernement ? De fait, ce problème n’est pas seulement celui de l’opérateur privé ; Orange essaie d’apporter des solutions, mais a besoin d’être soutenue par l’État.
La République repose sur le principe d’égalité : elle ne connaît ni sous-territoires ni sous-citoyens ! La TVA sur le café et le Ricard au comptoir du bistrot est la même en Lozère que partout ailleurs
Sourires.
Monsieur le secrétaire d’État, vous qui êtes un homme de finances, vous pourrez peut-être m’expliquer comment l’État entend soutenir l’opérateur pour offrir à nos concitoyens les véritables solutions qui leur sont dues, au nom de l’égalité, de l’équité et des autres valeurs républicaines, auxquelles je vous sais attaché.
Monsieur Bertrand, je vous remercie de votre question et je vous prie de bien vouloir excuser l’absence d’Axelle Lemaire, qui m’a chargé de vous transmettre sa réponse.
Avec le plan « France Très Haut Débit », nous avons souhaité engager le plus rapidement possible le chantier structurant de la mise en place des infrastructures numériques de demain. Toutefois, il nous faut aussi répondre aux besoins immédiats en veillant à étendre l’accès au réseau existant et à en assurer la fiabilité.
Monsieur le sénateur, je vous répondrai d’abord au sujet de la qualité de service du réseau téléphonique. Les coupures que vous avez signalées ne sont pas acceptables. Orange, en tant que prestataire du service universel, doit respecter un cahier des charges comportant des exigences précises en matière de qualité du service fixe, s’agissant notamment du temps de réparation d’une défaillance téléphonique.
Devant cette dégradation de la qualité de service, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, chargée de contrôler le respect des engagements de qualité de service, a fait usage de ses pouvoirs en ouvrant, le 27 mai 2014, deux enquêtes administratives. Après que le résultat en a été rendu public, le 28 novembre dernier, l’opérateur Orange s’est engagé à respecter un plan d’amélioration de la qualité des services offerts sur ses réseaux fixes.
Ce plan prévoit notamment l’obligation pour Orange d’accorder des moyens supplémentaires à ses unités d’intervention. Il prévoit par ailleurs qu’Orange devra anticiper les dégradations futures de la qualité de service. Enfin, il dispose que l’opérateur s'engage à renforcer l’information des collectivités territoriales et à intensifier la collaboration avec celles-ci sur les détections et le traitement des dysfonctionnements, particulièrement en cas de crise. Nos équipes ont particulièrement insisté auprès d’Orange sur ce dernier point.
Ce plan doit désormais être en œuvre. Mme Lemaire s'engage à y être particulièrement attentive, s’agissant d’un service essentiel pour tous nos concitoyens, comme vous l'avez dit.
En cas de manquement, l’ARCEP, pourra mettre Orange en demeure de se conformer à ses obligations de service universel et, éventuellement, prononcer des sanctions pécuniaires à son encontre.
S’agissant des réseaux mobiles, comme je l’ai indiqué, des travaux sont en cours pour définir un nouveau programme de couverture, avec trois objectifs.
Premièrement, il s'agit d’achever les précédents programmes « zones blanches » et, au-delà de ces programmes, de couvrir les 170 communes identifiées comme ne disposant d’aucune couverture mobile ; pour le département de la Lozère, une commune est concernée au titre du programme « zones blanches » – soixante-neuf sur soixante-dix ayant déjà été couvertes –, ainsi qu’une commune supplémentaire, qui aurait été identifiée lors du comité interministériel à l’aménagement du territoire de 2010.
Deuxièmement, il s'agit de répondre à une lacune évidente des programmes précédents, qui ne visaient que les centres-bourgs.
M. Alain Bertrand acquiesce.
Troisièmement, il faut s’assurer que les territoires ruraux disposent de l’accès à l’internet mobile en 3G.
Le programme que Mme Lemaire entend proposer à brève échéance permettra de répondre aux difficultés que vous décrivez. Par ailleurs, il pourra nécessiter d’étendre par la loi les obligations existantes des opérateurs mobiles.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse, mais je crains qu’il ne subsiste une incompréhension entre le Gouvernement et les gens qui, comme moi, défendent la ruralité et l’hyper ruralité.
Pourtant, Manuel Valls a annoncé des mesures ; il a fait des efforts, de même que Mme Sylvia Pinel et d’autres membres du Gouvernement. Toutefois, quand on nous dit qu’il y a une seule commune de Lozère où la connexion internet mobile ne fonctionne pas, je réponds que, en réalité, c’est dans la moitié des communes que ça ne passe pas !
Or, quand la téléphonie mobile ou internet ne passe pas, les conséquences peuvent être dramatiques : si un bûcheron se coupe une jambe, les secours ne peuvent pas être prévenus, et le bûcheron risque de mourir ou de rester gravement handicapé. Mais cela veut dire aussi, pour l’infirmière, pour l’artisan, pour le commerçant ou pour l’entreprise, des surcoûts, des retards sur les chantiers, des clients perdus, du manque à gagner, et donc moins d’emplois !
On ne prend pas la mesure de la gravité de la situation. Monsieur Eckert, vous qui êtes proche de M. Macron, de M. Valls et de M. Hollande – cela m’arrive aussi, d'ailleurs
Sourires.
Répondre à la demande des citoyens concernés est une absolue nécessité, car il n’y a pas de sous-citoyens ni de sous-territoires !
Je vous remercie de votre bonne volonté, mais, encore une fois, tâchez d’appuyer cette démarche ! Nous faisons partie intégrante de la France, de la République, et nous avons des droits. Faites-les respecter ! Pour le reste, je ne pense pas que des incantations auprès de l’opérateur soient suffisantes. Je crois plutôt que le partenariat entre l’État et l’opérateur doit être complètement repensé.
La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 989, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
Monsieur le secrétaire d'État, j’appelle ce matin l’attention du Gouvernement sur la diminution substantielle du budget de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris pour 2015. Cette baisse va affaiblir la capacité opérationnelle de la brigade et elle fera peser des risques sur la population de la future métropole.
En effet, lors de la présentation du budget pour 2015 à la préfecture de police de Paris, il a été annoncé aux élus du département de Paris et de la petite couronne que cinq des grandes échelles nécessaires aux interventions dans les immeubles de grande hauteur seraient supprimées, ainsi que deux engins-pompes.
Par ailleurs, la création du centre opérationnel de backup, qui nous avait été présentée comme une nécessité, a été reportée.
Si ces choix sont définitifs, comment la sécurité des futurs immeubles de grande hauteur et entrepôts pourra-t-elle être assurée, particulièrement dans la petite couronne ? En effet, des constructions sont prévues tout autour des futures stations du métro du Grand Paris.
Enfin, monsieur le secrétaire d'État, je souhaiterais que vous m'informiez sur l'organisation de la sécurité des prochaines plateformes logistiques dont l'implantation est prévue dans mon département, le Val-de-Marne.
Madame la sénatrice, je vous remercie de bien vouloir excuser l’absence de M. le ministre de l'intérieur, qui m'a chargé de vous transmettre sa réponse.
Unité fortement sollicitée, remplissant ses missions en tout temps sans discontinuité ni rupture, sur un secteur à risque et en pleine évolution, la brigade des sapeurs-pompiers de Paris, la BSPP, s’adapte en permanence à son environnement, de manière à assurer son service à la satisfaction de tous.
Ces dernières années, elle a bénéficié de deux plans de modernisation qui lui ont permis de renforcer sa réponse dans des domaines aussi essentiels que le traitement de l’alerte et de la gestion de crise, avec un nouveau centre opérationnel mis en place fin 2011, ainsi que dans la prévention des risques nucléaire, radiologique, biologique et chimique.
L’évolution du budget de la BSPP doit s’apprécier sur une longue période. Son budget de fonctionnement a augmenté de 39 % entre 2001 et 2015. Dans le contexte budgétaire contraint qui est le nôtre aujourd’hui, ce budget connaîtra une baisse de 1, 2 % en 2015 – au niveau du budget primitif.
Pour tenir compte de cette évolution sans affecter la capacité opérationnelle de la BSPP à remplir ses missions – y compris dans le Val-de-Marne –, une démarche a été conduite, fondée sur les statistiques d’engagement des engins spécialisés et les possibilités de mutualisation capacitaire avec les services départementaux d'incendie et de secours – SDIS – de la Grande Couronne. Si cinq échelles sur cinquante ont été supprimées, cette mesure s’est faite sans altérer la réactivité et l’efficacité de la réponse aux risques spécifiques, y compris pour la défense des immeubles de grande hauteur.
En ce qui concerne le centre de traitement de l’alerte de substitution – dit backup –, sa livraison était prévue fin 2017. La programmation des travaux d’infrastructures de la préfecture de police conduit à reporter sa livraison à 2018, sous réserve des financements nécessaires. Toutefois, l’actuel centre opérationnel de la BSPP abritant le CTA – centre de traitement de l’alerte – livré en 2011 est moderne, protégé et hors zone d’inondation. En 2015, ce centre sera renforcé par la création d’une plateforme de réception des appels mutualisée avec les services de police, ce qui améliorera la réponse d’urgence sur la plaque parisienne. Néanmoins, au titre de la résilience des services d’urgence de la plaque parisienne, un CTA backup demeure pertinent.
Les différents contributeurs au budget de la BSPP ont pleinement conscience de la qualité du service rendu et des efforts de rationalisation déjà consentis depuis plusieurs années. Le modèle d’organisation et de fonctionnement de la BSPP a prouvé son efficacité lors des récents événements dramatiques qui ont frappé la capitale ou lors de la crise du virus Ebola.
Pour anticiper l’évolution des risques dans une agglomération parisienne en transformation perpétuelle, et pour tenir compte de la contrainte budgétaire, la BSPP a lancé une réflexion sur le nouveau modèle capacitaire à moyen terme. Ce modèle sera présenté en juin 2015, à l’occasion de la prochaine commission consultative de gestion de la brigade, la CCGB. Il intégrera la problématique des entrepôts de grand volume des plateformes logistiques, notamment par l’acquisition d’une capacité dite de « grande puissance », destinée au traitement des « grands feux ».
En fonction du modèle proposé, le Gouvernement et les collectivités locales contributrices veilleront à ce que la capacité opérationnelle de la BSPP ne soit pas réduite et feront en sorte de lui garantir une visibilité financière suffisante à moyen terme au travers d’une programmation ou d’une convention pluriannuelle engageant l’ensemble des contributeurs.
Monsieur le secrétaire d'État, les départements de la Petite Couronne – dont je me fais ici le porte-voix – et les élus de Paris joignent leurs compliments à ceux que vous avez adressés à la BSPP.
Il y a eu effectivement deux plans de modernisation. Quand vous évoquez un budget en augmentation de plus de 30 %, il convient de rappeler que c'est sur quatorze ans ! Il faut également rappeler que ces plans concernaient essentiellement le personnel, car les effectifs de la BSPP s'avéraient insuffisants pour intervenir. Le turnover était important, de nombreux pompiers venant se former à Paris avant de repartir en province. Compte tenu des conditions dans lesquelles les pompiers étaient accueillis, un important effort a été nécessaire.
Je relève une certaine ambiguïté dans vos propos : vous me dites que le budget de 2015 tient compte des statistiques passées. Or ces dernières ne sauraient enregistrer les effets de l’évolution actuelle de la métropole et de la région parisienne – évolution voulue et soutenue par le Gouvernement. Mais le ministre de l'intérieur nous annonce par votre bouche que l’on pourrait éventuellement, en juin 2015, adapter ce plan pour tenir compte des nouveaux besoins. Il y a donc de la place pour un espoir…
À propos de la suppression des cinq échelles, vous invoquez une possible mutualisation des capacités opérationnelles avec les SDIS de la Grande Couronne. Cela ne me rassure pas tout à fait, car je vois mal une grande échelle relevant du SDIS de Seine-et-Marne arriver à temps sur les lieux d’un sinistre dans le Val-de-Marne ! Compte tenu des conditions de circulation généralement observées à la frontière de ces deux départements et, d’une manière générale, dans toute la région parisienne, le bâtiment en feu aura le temps de brûler complètement avant que les pompiers de Seine-et-Marne aient pu déployer leur échelle !
En tout cas, je veux espérer que l’analyse qui sera présentée au mois de juin tiendra compte non pas du passé, mais de l’avenir et des projets.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à midi, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Hervé Marseille.