Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme la garde des sceaux.
Vous interrogez le Gouvernement sur la manière dont il entend intervenir pour lutter contre la gestation pour autrui. Vous estimez, en particulier, que la décision du Conseil d’État du 12 décembre 2014, aux termes de laquelle cette haute juridiction a validé la circulaire du 25 janvier 2013 visant à permettre la délivrance de certificats de nationalité française pour les enfants nés de gestation pour autrui à l’étranger, revient finalement à valider la GPA elle-même puisqu’on en reconnaîtrait ainsi ses effets en France.
On ne doit pas se méprendre sur la portée de la décision du Conseil d’État : cette décision ne porte pas atteinte au principe de prohibition de la gestation pour autrui en France qui, je le rappelle, est affirmé à l’article 16-7 du code civil.
Le Conseil d’État, en rejetant le recours formé contre la circulaire du 25 janvier 2013, confirme uniquement la possibilité de délivrer un certificat attestant de leur nationalité française aux enfants concernés, nés à l’étranger d’un Français et qui disposent d’un acte d’état civil étranger « probant » justifiant d’un lien de filiation avec ce parent français.
Or, contrairement à ce que vous indiquez, madame le sénateur, l’article 21-12 du code civil ne permet pas d’admettre de manière automatique l’acquisition de la nationalité française pour les enfants nés à l’étranger de GPA, en raison de leur recueil par un Français depuis au moins cinq ans.
La décision du Conseil d’État témoigne de la recherche d’un juste équilibre entre le principe d’ordre public de prohibition de la gestation pour autrui, qui demeure et auquel le gouvernement français est très attaché, et la nécessaire protection qu’il convient de garantir à l’enfant au nom de son intérêt supérieur, au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la convention de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l’enfant, et de son droit à mener une vie familiale normale, au sens de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Elle confirme tout simplement, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, aux termes de ses arrêts du 26 juin 2014 ayant condamné la France, la nécessité impérieuse de distinguer le sort des enfants de celui de leurs parents ayant eu recours à un contrat illicite et de leur garantir ainsi, sur le territoire national, le droit au respect de leur identité, dont la nationalité française constitue un aspect essentiel.
J’ajoute que la décision du Conseil d’État ne remet nullement en cause la politique pénale que le Gouvernement entend faire respecter contre toutes les atteintes à l’ordre public. En particulier, la garde des sceaux veille à ce que l’action publique soit particulièrement diligente s’agissant de la lutte contre toute forme de trafic d’enfants s’apparentant à l’exploitation d’autrui et de la poursuite des intermédiaires proposant des activités interdites en France.