Intervention de Ségolène Royal

Réunion du 17 février 2015 à 14h30
Transition énergétique — Article 28

Ségolène Royal, ministre :

Elle avait même été annoncée et signée par trois ministres, comme l’a rappelé le rapport Battistel. C’est en remettant en cause ces signatures ministérielles et en recherchant une idée neuve que nous avons pensé à la création de sociétés d’économie mixte, qui permettent justement de maintenir le contrôle public sur les concessions hydrauliques.

Il est important de le rappeler, nous avons en France deux régimes juridiques. La concession est le régime de la plus grande partie du parc hydroélectrique français. Cela signifie que l’État a la propriété des ouvrages construits par le concessionnaire, les contrats de concession permettant un encadrement strict de toutes les actions des exploitants. C’est ce régime que je vous propose d’adopter, et non pas l’autre régime français, à savoir le système d’autorisation, où l’encadrement réglementaire se fait au titre de la police de l’eau. Il s’agit là d’une privatisation des ouvrages, et les contrôles de l’État sont limités.

Aujourd'hui, les contrats de concession, qui avaient été attribués pour une durée de soixante-quinze ans, arrivent à échéance. À ce jour, quatorze sont déjà échus et trois autres arrivent à échéance en 2014 et 2015. Ces dix-sept concessions représentent trente-six ouvrages, pour une puissance installée de 2 800 mégawatts répartis dans dix vallées. Il est donc important de prendre une décision dans le cadre du renouvellement de ces différentes concessions.

J’ajoute que le choix du régime de la concession n’a pas été fait partout en Europe. D’autres pays, comme l’Allemagne, la Suède ou la Finlande, ont fait le choix de la privatisation de l’énergie des cours d’eau. Dans ces pays, les barrages sont la propriété des électriciens. Par conséquent, nul besoin d’une ouverture à la concurrence, puisque ces ouvrages sont déjà privatisés.

La France ne fait pas ce choix, au contraire ! Je réaffirme ici notre attachement au maintien du régime de la concession, qui constitue un outil efficace pour que les barrages restent un patrimoine national. L’État doit en effet conserver des marges de manœuvre importantes pour concilier les usages de l’eau et percevoir à la source les bénéfices économiques de l’hydroélectricité. Je pense également aux collectivités territoriales qui rentreront au capital des sociétés d’économie mixte.

Vous l’avez dit, monsieur Chiron, les collectivités locales ne peuvent pas, aujourd'hui, entrer au capital d’une société produisant de l’hydroélectricité. Une telle possibilité est donc nouvelle. La structure des sociétés d’économie mixte prévoit une entrée au capital d’un pôle de partenaires publics, constitué de l’État, des collectivités concernées qui le souhaitent et des investisseurs publics de la Caisse des dépôts et consignations. À l’heure où je vous parle, l’Agence des participations de l’État et la Caisse des dépôts et consignations se sont déclarées intéressées par une entrée au capital de ces sociétés d’avenir. En effet, il s’agit de bons placements ! Je suis convaincue que les collectivités territoriales prendront des participations, dans la mesure où elles bénéficieront d’un retour sur investissement grâce aux redevances qui seront versées.

Que les choses soient bien claires : la participation des partenaires publics sera au minimum de 34 %. Je déposerai d’ailleurs un amendement prévoyant que cette participation s’échelonne de 34 % à 66 %. Il convient d’ajouter à cela le fait que l’opérateur privé peut être, comme c’est le cas aujourd'hui, EDF ou GDF-Suez pour la totalité. Ainsi, avec des opérateurs énergéticiens que nous connaissons bien, 66 % du capital de ces sociétés peut être possédé par des partenaires publics. Par conséquent, je ne peux pas laisser dire qu’il y a une privatisation de l’hydroélectricité. Au demeurant, grâce à l’amendement que je défendrai tout à l’heure, vous devriez être totalement rassurés sur ce point. Je précise que le dispositif des sociétés d’économie mixte hydroélectriques renforcera le contrôle public sur l’exploitation des concessions, en instaurant la présence au capital d’un pôle public.

Il convient de conditionner la prolongation des concessions aux investissements, pour que l’hydroélectricité, la houille blanche, comme l’on disait autrefois, reste ce pôle d’excellence majeur auquel la France est très attachée et qui constitue aujourd'hui le pilier de la transition énergétique et des énergies renouvelables françaises.

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