Originellement, la société d’économie mixte était détenue en majorité par le secteur public et de façon minoritaire par le secteur privé. Aujourd’hui, il est prévu que la part publique puisse diminuer jusqu’à 34 % et l’investissement privé s’élever à 66 %. D’aucuns parlent d’une minorité de blocage, mais en quoi une société d’économie mixte avec 66 % de parts privées serait-elle représentative de la maîtrise publique ? Cet argument n’est pas du tout convaincant.
Un groupe privé ne prendra pas le contrôle de 66 % du capital sans des objectifs financiers. Il est évident que tous ceux qui investiront dans le cadre d’une concession hydraulique viseront un retour sur investissement. Il suffit d’observer comment s’opère la financiarisation de l’économie ! Si un fonds de pension prend 66 % du capital d’un groupe de centrales hydrauliques, regroupant plusieurs barrages sur des secteurs complets, il est évident que son but sera la recherche du profit maximum.
On nous répondra que la SEM se verra imposer des contraintes, comme la gestion des usages de l’eau, en lien avec les collectivités territoriales et tous les usagers de l’eau. On nous opposera que les profits ne seront pas extraordinaires et que les collectivités auront tout loisir de devenir des actionnaires beaucoup plus importants, pour laisser encore moins de marges de manœuvre au privé. Mais encore faudrait-il qu’elles le puissent ! Étant donné l’état des finances locales, nous pouvons en douter.
Le rapport Battistel l’a très pertinemment souligné : la seule garantie apportée aux collectivités est le cahier des charges des concessions, que Mme la ministre a évoqué il y a quelques instants. Or, comme le montre l’analyse des conséquences de la mise en concurrence, le cahier des charges des concessions ne permettra de mieux encadrer l’action du concessionnaire sur les cours d’eau qu’à court terme. Comment prévoir les besoins des usagers pour les quarante prochaines années ?
Enfin, la réduction du portefeuille hydraulique d’EDF provoquera mécaniquement une hausse des prix.
En résumé, cette nouvelle mise en concurrence des concessions conduit à perdre l’avantage compétitif dont dispose la France grâce à l’électricité hydraulique. J’ajoute que, sauf erreur de notre part, aucune clause de destination n’est prévue. Ainsi, si un concessionnaire veut signer un contrat à long terme avec un industriel étranger, on ne pourra pas l’en empêcher.
Mes chers collègues, pour l’ensemble de ces raisons, nous vous invitons à supprimer cet article.