Je voudrais tout d'abord aborder la situation financière de l'Unédic, qui dépend pour l'essentiel du contexte macro-économique français. Conséquence de la conjoncture dégradée depuis 2009, le chômage a augmenté. Or, l'assurance chômage jouant un rôle d'amortisseur économique et social, il est logique que son déficit augmente en période de faible croissance. La situation financière de l'Unédic s'explique davantage par des raisons conjoncturelles que structurelles. Aujourd'hui, le déficit annuel est d'environ 4 milliards d'euros. La dette avoisine 26 milliards d'euros, soit neuf mois de recettes. Son coût est de 300 millions d'euros, soit 1 % de nos recettes. Le consensus des économistes a légèrement revu à la hausse les perspectives de croissance en France pour 2015, de 0,8 à 0,9 %, ce qui demeurera insuffisant pour faire reculer le chômage, mais aura des conséquences positives sur notre situation financière.
Cette situation est-elle tenable ? Tout d'abord, je rappellerai que la nouvelle convention d'assurance chômage permettra une économie d'environ 800 millions d'euros en année pleine, et qu'elle sera renégociée dès le premier semestre 2016, afin de s'ajuster aux évolutions macro-économiques. Ensuite, notre stratégie financière nous permet de verser les allocations dans les délais, grâce à des maturités d'emprunt diversifiées et à la garantie explicite de l'Etat votée chaque année en loi de finances. Lors de notre première émission obligataire cette année, nous tablions sur un objectif de 2 milliards d'euros, mais nous avons finalement levé 3 milliards à un taux d'intérêt de 0,62 % à dix ans, soit seulement 9 points de base au-dessus du niveau auquel emprunte l'Etat. C'est dire à quel point les conditions de financement sont actuellement très favorables. Enfin, comme vous le savez, l'article 29 de la loi du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 oblige l'Unédic à transmettre chaque année au Parlement et au Gouvernement, au plus tard le 30 juin, ses perspectives financières triennales, en précisant notamment les effets de la composante conjoncturelle de l'évolution de l'emploi salarié et du chômage sur l'équilibre financier du régime d'assurance chômage. Les choix des partenaires sociaux lors de la renégociation de la convention d'assurance chômage découleront des conclusions de ce rapport. Ceux-ci disposent donc des moyens juridiques de corriger le déséquilibre financier de l'assurance chômage, qui s'explique selon moi essentiellement par des raisons conjoncturelles.
J'en viens maintenant à la présentation des nouvelles règles d'assurance chômage. L'un des objectifs des signataires de la convention était d'inciter au retour à l'emploi, tout en conservant les fondamentaux de l'assurance chômage, comme la proportionnalité de l'allocation par rapport au salaire (une journée travaillée ouvre droit à une journée d'indemnisation, dès lors que la personne a travaillé quatre mois), ou encore la durée du versement de cette allocation (deux ans, voire trois ans pour les personnes âgées de plus de 50 ans). Deux mécanismes ont été mis en place pour encourager la reprise d'activité et protéger dans la durée les demandeurs d'emploi qui alternent des périodes de travail et de chômage. D'une part, la création de droits rechargeables permettra, sans exception, d'ouvrir de nouveaux droits à l'assurance chômage pour tout demandeur d'emploi en cours d'indemnisation qui retrouve un emploi, même de courte durée. D'autre part, le cumul entre allocation chômage et salaire est désormais possible quel que soit le nombre d'heures de travail dans le mois, afin de rendre systématiquement plus intéressant financièrement le cumul plutôt que le simple bénéfice de l'allocation.
Parmi les grandes mesures d'économies figurent notamment l'allongement du différé d'indemnisation en cas d'indemnité de rupture supérieure au minimum légal (par exemple dans le cas des ruptures conventionnelles), afin de limiter les effets d'une entente entre salarié et employeur au détriment de l'assurance chômage, la révision des seuils pour l'allocation (qui ne peut être inférieure à 57 % du salaire de référence, contre 57,4 % auparavant, pour les salaires dépassant 1,5 Smic), la prise en compte du décalage de l'âge de départ en retraite, ou encore la modification des règles spécifiques aux intermittents du spectacle.
Je voudrais par ailleurs souligner que l'Unédic a travaillé en parfaite intelligence avec Pôle emploi. Alors que certains craignaient cet été un dysfonctionnement informatique majeur chez l'opérateur public, les allocations chômage ont été versées en temps et en heure, grâce à l'engagement de la direction et du personnel.
Si l'accord entre partenaires sociaux, à l'origine de la nouvelle convention d'assurance chômage, a été conclu en mars 2014, la réflexion a été lancée dès le début 2013. Elle fait aujourd'hui l'objet d'un suivi régulier par le bureau de l'Unédic, pour détecter notamment les problèmes liés aux droits rechargeables. Les média ont relayé de nombreux cas dans lesquels les bénéficiaires étaient indemnisés sur la base de leur ancienne allocation. Parmi le million de bénéficiaires, 30 000 cas ont été identifiés, ce qui ne remet pas en cause à nos yeux le bienfondé de cette mesure. Les partenaires sociaux se réuniront cependant début mars pour trouver un remède à cette situation.
Je voudrais enfin conclure sur l'articulation entre les règles de l'assurance chômage et le fonctionnement du marché du travail. Si la flexibilité du marché du travail français est globalement comparable à celle des autres pays européens, et notamment à l'Allemagne, notre pays se singularise sur deux points. D'une part, la proportion de contrats de travail à durée limitée, voire à très courte durée, y est plus forte qu'ailleurs. D'autre part, la probabilité pour une personne de passer d'un emploi précaire vers un emploi permanent a diminué. Les perspectives de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en matière d'emploi pour 2014 ont montré que 15 % seulement des salariés français en emplois temporaires accèdent à un emploi permanent sur une période de trois ans, ce qui place notre pays dans une situation atypique sur la scène internationale. L'assurance chômage est le miroir de cette situation. Je rappelle à cet égard que la moitié des allocataires actuellement indemnisés par l'Unédic sont des personnes qui ont terminé leur contrat à durée déterminée ou leur mission d'intérim, les personnes licenciées pour motif économique ne représentant que 10 % de nos allocataires. En outre, la moitié des allocataires travaillent chaque mois, ce qui montre à quel point les notions de demandeurs d'emploi et de travailleurs se chevauchent. La France se distingue également par une hausse du chômage de longue durée. En 2014, on comptait 800 000 personnes éloignées de l'emploi depuis plus de deux ans, contre 500 000 en 2011. La nouvelle convention vise à inciter la reprise d'emploi, par des règles simples, qui ne laissent aucun doute sur l'intérêt financier à sortir du chômage.