Intervention de Jean-Pierre Bosino

Réunion du 19 février 2015 à 15h00
Transition énergétique — Article 60

Photo de Jean-Pierre BosinoJean-Pierre Bosino :

Les ménages les plus pauvres sont les grands oubliés de ce projet de loi.

Lorsque nous avions demandé la remise d’un rapport sur le financement du Fonds de solidarité pour le logement, le FSL, il nous avait été répondu qu’une telle disposition n’avait pas sa place dans ce projet de loi. Nous pensons, au contraire, que la question de la vulnérabilité énergétique a toute sa place dans le présent débat.

Les chiffres sont connus : selon l’INSEE, un foyer sur sept consacre plus de 10 % de ses ressources aux dépenses de chauffage et d’électricité. Au cours des dix ans qui ont suivi l’ouverture à la concurrence des activités des entreprises EDF et GDF, le prix de l’électricité a augmenté de 22 % et celui du gaz de 66 %.

Les ménages les plus pauvres consacrent plus de 15 %, voire, selon la Fondation Abbé Pierre, jusqu’à 25 % de leurs revenus aux dépenses d’énergie, alors que les tarifs sociaux continuent de ne profiter qu’à un nombre bien trop faible de foyers. Le droit véritable pour chacun à l’énergie à un tarif abordable est encore bien loin d’être une réalité.

Avec aujourd’hui près de 6 millions de ménages en situation de vulnérabilité énergétique, nous ne pouvons plus nous permettre de ne pas être à la hauteur des enjeux. Rappelons également que les « passoires thermiques », qui sont bien souvent à l’origine de ces factures très lourdes, sont un désastre écologique, en plus d’être une catastrophe sociale. Le combat à mener contre la précarité énergétique est donc un combat global, qui appelle des réponses à sa mesure.

Bien entendu – sur ce point, nous ne pouvons partager la philosophie du Gouvernement –, mener ce combat implique de mobiliser des moyens humains et financiers, et donc d’engager des investissements importants.

Ainsi, alors que le chèque énergie constitue, il est vrai, une avancée incontestable pour améliorer les conditions de vie de nombre de nos concitoyens, nous regrettons qu’il vienne remplacer, et non compléter, le mécanisme des tarifs sociaux.

Nous ne pouvons également que regretter que les amendements que nous avions déposés à la suite de nos échanges avec le médiateur national de l’énergie, dont je tiens à saluer le travail, aient été rejetés par la commission des finances.

La mise en place d’un service universel de dernier recours pour l’électricité, tel que proposé par le médiateur national de l’énergie, M. Jean Gaubert, aurait en effet permis de créer un véritable « bouclier énergétique » en France et aurait assuré à chaque ménage la possibilité de couvrir ses besoins vitaux, y compris en période de grandes difficultés financières. La mission d’assurer ce service universel aurait pu être confiée aux gestionnaires publics de distribution, qui, dans les faits, assument déjà ce rôle en dehors de tout cadre légal.

Précisons d’ailleurs que non seulement cette mesure est expressément autorisée par les directives européennes, mais que, de surcroît, bon nombre des pays de l’Union ont déjà mis en œuvre cette solution depuis 2004 : je pense notamment à la Belgique et au Portugal.

En définitive, madame la ministre, nous considérons que cet article 60 relatif à la protection des consommateurs en situation de précarité énergétique est bien en deçà des besoins réels. En raison de son manque d’ambition et d’une volonté dogmatique de réduire sans cesse la dépense publique, il ne peut répondre aux exigences imposées par l’urgence de la situation.

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