Par cet amendement, monsieur Cambon, vous souhaitez rétablir les coupures d’eau pour impayés, coupures qui ont été rendues illégales par la loi du 15 avril 2013. Cet amendement vise à réduire la protection totale qui a été mise en œuvre – à la suite ou non d’une erreur, peu importe – aux seules personnes en difficulté, c'est-à-dire aux bénéficiaires du FSL et autres droits sociaux.
Or les personnes en difficulté ne se réduisent pas à celles qui bénéficient de dispositifs sociaux. En effet, nombreux sont ceux qui seraient en droit de bénéficier des aides sociales ou d’autres mesures et qui n’en profitent pas, soit parce qu’ils sont dans l’ignorance de cette possibilité, soit parce qu’ils ne souhaitent pas en bénéficier. Ce non-recours aux aides sociales est important : il concerne 35 % des bénéficiaires potentiels du RSA socle et près de 70 % de ceux qui ont droit au RSA activité. Ces personnes ne seraient donc plus protégées et s’exposeraient à des coupures d’eau, un bien de toute première nécessité s’il en est !
Et je ne parle pas des travailleurs pauvres, parmi lesquels beaucoup sont en grande difficulté. Eux non plus ne seraient plus protégés. Il faut encore ajouter à cette liste les personnes qui, du jour au lendemain, à la suite d’un accident de la vie, de la perte d’un emploi, d’un divorce, peuvent basculer dans la précarité la plus totale. Elles non plus ne seraient plus à l’abri des coupures.
Cette disposition de la loi de 2013 est devenue, qu’on le veuille ou non, le moyen le plus sûr de toucher toutes les personnes en difficulté. C’est bien la seule façon de s’assurer que toutes sont à l’abri d’une coupure d’eau. Pour ma part, je n’en connais pas d’autres !
A-t-on mesuré la violence que constitue pour une famille une coupure d’eau et l’humiliation que cela représente, sans compter les conséquences que cela peut avoir sur les enfants et les personnes âgées ?
Il existe donc aujourd'hui une sorte de bouclier, qui permet de protéger toutes ces personnes. Il faut le conserver.
Le dispositif que vous nous proposez avec cet amendement ressemble plutôt à un « bouclier passoire ». La couverture de protection est trop partielle. Vous prenez donc le risque d’exclure de nombreuses familles. Nous ne voterons pas cet amendement.