Intervention de Ségolène Royal

Réunion du 18 février 2015 à 14h30
Transition énergétique — Article 46 bis, amendement 934

Ségolène Royal, ministre :

Que M. le rapporteur ait déposé ce texte, sur ces questions qu’il connaît bien, est crucial.

Par sa précision, le dispositif proposé réduira les risques spéculatifs. Il faudra d'ailleurs être très vigilant, car le système envisagé génère des gains, donc dégage une marge. Les opérateurs s’y sont beaucoup intéressés ; il a fallu freiner leurs ardeurs, pour parler pudiquement, afin de garder la maîtrise de ce dispositif et conserver aux consommateurs le bénéfice de leurs efforts.

Les consommateurs doivent être bien informés. Or certains mécanismes d’effacement consistent à éteindre l’électricité sans qu’ils s’en aperçoivent. Par exemple, l’extinction d’un réfrigérateur pendant quelques secondes est imperceptible. Si l’opération est répétée à l’échelle de millions de consommateurs, cela représente beaucoup d’argent, donc beaucoup d’économies.

Voilà le fruit du marché de l’effacement : une revente de l’énergie, une baisse des factures et une redistribution de ce gain, au bénéfice de l’intérêt national, puisque, je le répète, l’effacement prévient soit des importations d’énergie, soit l’utilisation d’énergies thermiques.

Ce dispositif est très simple dans son organisation et dans les objectifs visés, mais il est aussi suffisamment complexe pour que sa régulation et son encadrement soient nécessaires.

Je considère que l’amendement n° 934 de M. le rapporteur, sur lequel j’émets un avis favorable, est suffisamment complet, et par conséquent je suggère le retrait de presque tous les autres amendements en discussion.

L’amendement n° 6 rectifié bis, tout d'abord, est satisfait. Il tend à apporter une réponse à une remarque pertinente. En effet, les appels d’offres qui se substituent à la prime pour les opérateurs d’effacement, permettront, notamment, de valoriser la capacité d’effacement.

En ce qui concerne l’amendement n° 7 rectifié bis, rien ne s’oppose, dans la rédaction actuelle, à ce que les consommateurs industriels jouent eux-mêmes le rôle d’opérateurs d’effacement, même s’il est plus souvent intéressant et moins contraignant pour eux de passer par un agrégateur. Il n’est donc pas nécessaire de modifier la définition d’un opérateur d’effacement, puisqu’ils en font partie.

Au regard de l’enjeu de sécurité d’approvisionnement, il est important de conserver l’agrément technique des opérateurs d’effacement, même si, je le répète, le Gouvernement sera très attentif à ce que la procédure d’agrément reste simple et proportionnée et ne crée pas de situation dominante sur ce nouveau marché.

L’amendement n° 891 rectifié vise à modifier le régime de versement au fournisseur.

Or le versement au fournisseur du site effacé est nécessaire, comme contrepartie à l’obligation d’injecter l’électricité sur le réseau. La question de son financement est plus complexe. Le Gouvernement considère qu’il ne doit pas nécessairement être supporté par le seul opérateur d’effacement et qu’une certaine mutualisation du versement est possible, et même souhaitable, pour les effacements générant d’importantes économies d’énergie, au regard des bénéfices qu’ils apportent à la collectivité. Par ce dispositif, il s’agit aussi d’encourager les effacements générant de réelles économies d’énergie.

C'est pourquoi il ne me semble pas souhaitable d’inscrire dans la loi la possibilité pour les effacements de bénéficier de certificats d’économies d’énergie. Il faut en effet s’interroger sur les risques induits par la multiplication des canaux de soutien pour cette filière.

En toute hypothèse, l’article L. 221-7 du code de l’énergie prévoit déjà la possibilité de délivrer des certificats d’économies d’énergie pour certaines opérations. Il serait donc assez redondant, et peut-être dangereux dans la perspective d’une recherche de cumul des avantages, de prévoir une disposition législative spécifique pour chaque système, puisque la portée des certificats d’économies d’énergie est générale.

Enfin, les effacements réalisés par des opérateurs tiers n’auront pas d’impact sur l’obligation de capacité du fournisseur du site : les règles du mécanisme de capacité prévoient en effet un mécanisme visant à assurer leur neutralité pour le fournisseur.

Je suggère donc le retrait de l’amendement n° 891 rectifié.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai pris le temps d’apporter ces précisions, qui figureront au Journal officiel, pour clarifier certaines interprétations et pour que les opérateurs, qui suivent attentivement nos débats, puissent se situer. Il était important de bien expliciter les enjeux techniques de ce texte.

L’amendement n° 8 rectifié bis a pour objet de supprimer le versement dû au fournisseur du site effacé ou de modifier son mode de financement.

Le cadre réglementaire de soutien aux effacements prévoit un versement au fournisseur du site effacé. Ce versement est nécessaire, car les règles de marché relatives aux effacements imposent à ce fournisseur de ne pas modifier la quantité d’électricité qu’il injecte ; c’est-à-dire qu’il est tenu d’injecter la même quantité d’électricité que celle qu’il aurait injectée si ses clients ne s’étaient pas effacés. L’énergie effacée est transférée à l’opérateur d’effacement, qui la valorise sur les marchés et qui, en contrepartie, paie un versement au fournisseur.

Je note que les dispositions de votre amendement semblent supprimer complètement le régime du versement de l’opérateur d’effacement au fournisseur, ce qui ne paraît pas justifié.

Le Gouvernement partage la préoccupation de ne pas créer de contribution supplémentaire sur l’électricité. L’amendement n° 934 tend à introduire un nouveau mode de financement du versement, qui évite la création d’une contribution spécifique, tout en continuant d’encourager les effacements qui permettent effectivement des économies d’énergie. À la lumière de ces explications, je propose donc aux auteurs de l'amendement n° 8 rectifié bis de bien vouloir le retirer.

J’émets un avis favorable sur l’amendement de précision n° 677 rectifié.

Les amendements identiques n° 466 rectifié et 878 rectifié ter tendent à supprimer la prime pour les opérateurs d’effacement et à prévoir un soutien dans le cadre des certificats d’économies d’énergie.

Je me suis déjà exprimée sur cette question tout à l’heure : avec les certificats d’économie d’énergie, les cumuls sont déjà possibles. Il serait problématique de répéter cette disposition, car cela indiquerait l’existence d’un statut particulier, plus favorable que pour l’utilisation des certificats d’économies d’énergie pour l’ensemble du dispositif.

Je sollicite donc le retrait de ces amendements identiques.

Les amendements identiques n° 245 rectifié bis, 328 rectifié ter et 608 rectifié quater tendent à préciser le rôle des gestionnaires de réseaux publics de distribution.

Ces gestionnaires ont effectivement un rôle à jouer dans le suivi des périmètres d’effacement pour les sites raccordés à leurs réseaux – tout cela est parfaitement légitime –, mais de telles dispositions sont de nature réglementaire. D’ailleurs, l’adoption de l’amendement n° 934 proposé par M. le rapporteur, qui vise à modifier l’alinéa 10 de l’article 46 bis, permettrait précisément de ne pas figer dans la loi la répartition des responsabilités et d’apporter les précisions qui s’imposent par voie réglementaire.

Enfin, le Gouvernement émet un avis favorable sur l’excellent sous-amendement n° 986 rectifié, dont les dispositions font figure de cerise sur le gâteau !

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