Intervention de Franck Montaugé

Réunion du 18 février 2015 à 21h30
Transition énergétique — Article 48

Photo de Franck MontaugéFranck Montaugé :

Il n’est pas de réussite sans vision, sans méthode comprise et partagée par tous, si l’on veut parvenir aux résultats attendus. Il n’est pas non plus de réussite sans la mobilisation des acteurs directement ou potentiellement concernés.

Le titre VIII, dernier titre de ce texte, répond à ces enjeux. Je voudrais vous remercier, madame la ministre, d’avoir placé la mobilisation des acteurs – entreprises, citoyens, territoires, État – au cœur de cette démarche au long cours.

Au travers de la stratégie bas-carbone et la programmation pluriannuelle de l’énergie, ce sont les mots de « planification » et de « programmation » qui reviennent sur le devant de la scène industrielle nationale.

On ne peut s’empêcher de penser aux grandes politiques industrielles des années 1960, que le même type d’approche à visée de long terme avait inspirées, dans un tout autre contexte, bien entendu, mais avec un succès certain. Les bases solides de ces politiques pour l’électricité et le gaz sont toujours là ; elles nous donnent un appui pour écrire aujourd’hui une nouvelle page de l’histoire de l’économie de notre pays, une économie que nous voulons à la fois compétitive et respectueuse de l’environnement.

À l’organisation verticale de l’époque, celle de l’État centralisé et de ses grandes entreprises, s’ajoute aujourd’hui une dimension horizontale, territoriale et participative, qui mobilisera de plus en plus les citoyens, les entreprises locales, les collectivités territoriales, et dont les initiatives, dans la durée, seront déterminantes pour atteindre les grands objectifs que s’assigne cette loi.

Les dispositions que nous avons votées hier, sur votre initiative, madame la ministre, et qui permettent de prolonger la durée des concessions hydrauliques jusqu’à 99 ans et même au-delà, en contrepartie d’investissements adaptés, illustrent ces formes rénovées d’implication de l’État et de ses partenaires dans le nouveau service public de l’énergie.

État stratège donc, fixant le cap et les objectifs, et mobilisant les acteurs : le titre VIII en témoigne, par le mode de gouvernance de l’ensemble du secteur de l’énergie qu’il prévoit.

Dans ce cadre modernisé, certains points méritent une attention particulière. Je les évoquerai brièvement, car le débat nous permettra d’y revenir.

Je veux souligner ici, madame la ministre – je tiens même à vous en remercier –, la dimension sociale que vous avez donnée à ce texte. La généralisation du chèque énergie à tous les modes de chauffage traduit votre souci d’une plus grande équité dans la prise en compte des difficultés quotidiennes des foyers les plus fragiles.

Pour autant, il nous paraît fortement souhaitable de préserver le caractère d’automaticité de l’aide au paiement des factures d’électricité ou de gaz naturel, en maintenant les mécanismes actuels des tarifs sociaux, le chèque énergie leur étant substitué seulement sur le plan de l’appellation, tout en impliquant également les autres sources d’énergie non couvertes aujourd’hui. Je pense notamment au bois ou au fioul.

Dans le même esprit, le principe de péréquation tarifaire doit faire l’objet d’une attention particulière de notre part. Les conditions d’accès à l’électricité doivent rester les mêmes pour les habitants des métropoles et pour ceux des campagnes. Un amendement relatif aux systèmes de flexibilité locale nous permettra de revenir sur ce point.

Toujours au plan social, l’article 60 nous permettra de réaffirmer notre attachement au texte de la commission, sans remise en cause des dispositifs de la loi Brottes garantissant l’interdiction de coupure d’alimentation de ce bien universel qu’est l’eau.

En outre, comme cela a été souligné hier à propos des personnels des sociétés d’économie mixte, les SEM, hydrauliques, existantes ou à venir, et parce que la compétitivité du secteur de l’énergie dépend aussi des conditions d’emploi et de vie des personnels, j’aurais souhaité – nous avions déposé un amendement en ce sens, Roland Courteau en a parlé – qu’une adaptation de la loi du 8 avril 1946 permette d’étendre le statut des industries électriques et gazières, les IEG, à tous les personnels des entreprises du renouvelable.

La commission des finances a rejeté cet amendement au titre de l’article 40 de la Constitution. J’avoue que je ne comprends pas pourquoi ce qui est possible, par exemple, pour les nouvelles sociétés d’économie mixte hydro-électriques ne le serait pas pour des sociétés de production éolienne, photovoltaïque ou de méthanisation. J’ai entendu vos engagements sur ce point, madame la ministre. Ils répondent à nos soucis, et je vous en remercie.

Je veux également le souligner, la question importante des évolutions de la contribution au service public de l'électricité, la CSPE, n’a pas été occultée. Là encore, la méthode retenue, qui consiste à créer un comité de gestion de la CSPE pour en renforcer la gouvernance et mieux en maîtriser l’évolution, est la bonne.

Par ailleurs, et cela concerne le rôle des collectivités territoriales, au-delà du succès immédiat de l’appel à projets que vous avez lancé pour les territoires à énergie positive, ayons le souci de la cohérence et de l’efficience dans l’articulation des schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie, les SRCAE, intégrés au schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire, et des plans climat-air-énergie territoriaux. Le succès de la stratégie bas-carbone dépendra également de cela.

Saisissons également l’occasion pour créer de la valeur, en emplois et en revenus, par la production d’énergies renouvelables sur les territoires ruraux défavorisés, en particulier agricoles.

Je voudrais souligner la pertinence du dispositif de « contribution climat énergie », introduit dans le projet de loi de finances pour 2015 et directement lié à la stratégie bas-carbone, me semble-t-il. Il faut donner des signes aux consommateurs d’énergies pour orienter leurs comportements vers des modes plus vertueux en matière d’émissions de gaz à effet de serre. Les dispositifs le permettent désormais pour les consommateurs.

Nous le savons, le pilotage s’effectuera par la variable stratégique du coût de la tonne carbone. Quoi qu’il en soit, au regard des enjeux universels que nous avons à relever, il s’agit bien d’une contribution positive, et non d’une fiscalité punitive.

Pour aller dans le même sens, je pense utile de bonifier les aides apportées par les partenaires publics aux investissements réalisés par les collectivités territoriales. Ce sera l’objet d’un amendement visant le bonus investissement climat que je vous proposerai au nom de mon groupe.

Telles sont les points essentiels que je voulais aborder préalablement à l’examen du titre VIII.

Madame la ministre, je vous remercie d’avoir ainsi donné une large place à la participation des acteurs locaux, dans un cadre prospectif et stratégique clair, dégageant les horizons des acteurs et adapté aux enjeux planétaires, dont la COP 21 de Paris traitera en fin d’année.

Pour ce rendez-vous, la France se doit d’être exemplaire aux yeux de ses partenaires. Votre texte y contribuera. Nous vous en remercions.

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