Monsieur le président, monsieur le vice-président de la commission des affaires étrangères, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de loi s’inscrit dans une tradition déjà longue : celle de l’engagement de la France dans les activités de l’Organisation internationale du travail, l’OIT.
La France est, avec l’Espagne, le pays qui a ratifié le plus grand nombre de conventions de l’OIT. Au-delà des chiffres, c’est notre attachement au respect et à la défense des règles internationales du travail que nous manifestons ainsi.
Dans un monde où les acteurs sont de plus en plus interdépendants, il est nécessaire de construire un cadre de travail et un cadre social internationaux auxquels des pays en nombre toujours plus grand puissent adhérer. C’est un rôle que l’OIT assume avec volonté dans un cadre original, celui du tripartisme. Je tiens à saluer la durée et l’importance des travaux menés par cette instance.
La convention n° 181 de l’OIT s’inscrit dans ce contexte. Elle prend acte du fait que, depuis deux décennies, de nombreux pays font participer des agences d’emploi privées à l’intermédiation des demandeurs d’emploi et fixent un cadre pour réguler à la fois leurs conditions d’intervention et les droits des salariés qu’elles emploient.
Il s’agit donc d’un texte protecteur, s’inscrivant pleinement dans la lignée de principes qui, pour la France, sont fondateurs dans le champ du service public de l’emploi.
Dans la pratique, les garanties prévues par cette convention existent déjà dans notre droit interne : il en va ainsi du principe de gratuité du service pour les demandeurs d’emploi et du respect du droit des travailleurs employés par ces agences et de ceux qui ont recours à leurs services, principe affirmé dès l’article 2 de la convention, aux termes duquel « la présente convention a, au nombre de ses objectifs, celui de permettre aux agences d’emploi privées d’opérer et celui de protéger, dans le cadre de ses dispositions, les travailleurs ayant recours à leurs services ».
Je veux également souligner le rappel, par la convention, des droits fondamentaux des travailleurs dont doivent bénéficier, comme tous les autres, les salariés des agences d’emploi privées. En voici quelques exemples, non exhaustifs : le droit à la liberté syndicale et à la négociation collective, posé à l’article 4, les garanties en matière de salaires minimaux et de conditions de travail, ou encore l’accès à la formation, visé à l’article 11.
La convention affirme aussi le principe de gratuité du service public de l’emploi, à l’article 7, ainsi que la promotion de l’égalité des chances et de traitement dans l’accès à l’emploi et la protection des données personnelles des personnes ayant recours aux agences d’emploi privées.
Ce socle de droits et de pratiques est aussi le nôtre. La France est attachée au rôle de la puissance publique comme acteur et régulateur du service public de placement des demandeurs d’emploi, ainsi qu’aux grands principes qui structurent ce service public, comme la gratuité.
Ce n’est donc pas un hasard si la France est souvent perçue comme un pays jouant un rôle moteur, au sein du Bureau international du travail, le BIT, pour la protection des droits des travailleurs.
La convention de l’OIT ne prend pas position pour ou contre le recours aux agences d’emploi privées : elle prend acte de leur existence dans un nombre croissant de pays, et fixe un cadre protecteur pour l’exercice de leur activité. À ce titre, le BIT joue pleinement son rôle de régulation des formes et des pratiques d’emploi, pour répondre au mieux à la réalité des pays qui sont ses parties prenantes.
Pour la France, ratifier la convention n° 181 de l’OIT ne modifiera pas le droit interne, l’intervention des opérateurs privés de placement dans le champ de l’intermédiation étant déjà encadrée par des règles nationales et communautaires, et la protection des travailleurs étant déjà garantie à un niveau élevé.
En revanche, ratifier cette convention permettra de mettre en cohérence nos pratiques et nos engagements internationaux, et de réaffirmer notre attachement aux principes de protection que prévoit l’OIT.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le 20 janvier dernier se tenait la dernière édition des entretiens entre la France et le BIT, qui ont concrétisé une nouvelle fois une communauté de valeurs et d’action, dans le champ normatif comme dans celui de la recherche. Cette organisation internationale est originale par son histoire et sa composition. Elle est la seule où se retrouvent dans un format tripartite les représentants des États, des employeurs et des travailleurs.
Cette originalité lui confère aussi un regard particulier sur la question des relations de travail et d’emploi. Dans le cas qui nous occupe aujourd’hui, le cadre que pose la convention n° 181 pour les pratiques des agences d’emploi privées constitue une nouvelle illustration concrète des principes que nous devons continuer de promouvoir dans tous les domaines de l’emploi. C’est la raison pour laquelle je vous demande de bien vouloir adopter le projet de loi autorisant la ratification de cette convention.