Intervention de Gilbert Bouchet

Réunion du 10 mars 2015 à 9h30
Questions orales — Situation critique du tribunal de valence

Photo de Gilbert BouchetGilbert Bouchet :

Madame la garde des sceaux, permettez-moi d’attirer votre attention sur la situation critique du tribunal de Valence, dans le département de la Drôme, qui n’est plus en mesure, compte tenu de la conjonction de plusieurs facteurs, de faire face dans des conditions satisfaisantes au traitement des contentieux qui lui sont soumis.

Tout d’abord, cette juridiction est en situation de sous-effectif : à Valence, le tribunal, qui est une juridiction de groupe 2, ne compte que 26 magistrats du siège, chiffre inférieur à l’effectif de certaines juridictions du groupe 3, qui dépasse souvent les 30 personnes. C’est ainsi que la charge de travail des magistrats non spécialisés valentinois est de 1 023 affaires, soit 33 % de plus par rapport à la moyenne du groupe.

Ce sous-effectif est compensé par la qualité de l’équipe des magistrats, qui se dépensent sans compter pour maintenir en bon état de fonctionnement la juridiction, mais c’est une situation qui pose problème : la moindre vacance de poste ponctuelle menace l’équilibre et la bonne organisation du tribunal.

Or tel est le cas depuis plusieurs mois, l’un des deux postes de magistrat de l’application des peines n’étant pas pourvu alors même que la loi du 15 août 2014, en créant la contrainte pénale, a renforcé la charge de travail et le rôle crucial de l’application des peines. Au surplus, un établissement pénitentiaire de 456 places va ouvrir ses portes à Valence au mois de septembre prochain.

La situation est identique au tribunal pour enfants, un poste sur les trois offerts étant vacant à la suite d’un congé parental. Cet emploi non remplacé va empêcher le fonctionnement normal de ce service.

Le deuxième facteur est l’augmentation du contentieux et du nombre de dossiers à traiter. Je vous livre ces quelques chiffres pour illustrer mes propos : en 2014, la juridiction a été saisie de 7 551 affaires civiles nouvelles, soit une augmentation de 5, 16 % par rapport à l’année passée ; l’âge moyen du stock est de dix mois et la durée de traitement des litiges de plus de quatre mois ; le tribunal correctionnel a, quant à lui, prononcé 1 967 jugements ; le tribunal pour enfants a été saisi de 485 dossiers d’assistance éducative, tandis que le service de l’application des peines a rendu 613 décisions.

À ces facteurs s’ajoute une spécificité pour le tribunal de Valence, qui est un pôle d’expérimentation de plusieurs projets de modernisation et d’amélioration du service public.

Ainsi, c’est le seul site qui emploie, en matière civile, les trois grands protocoles de communication électronique avec les avocats, les huissiers et les experts de justice. Combinés, ces outils technologiques aboutissent à une dématérialisation quasi complète de la procédure civile devant le tribunal de grande instance.

Ensuite, depuis le 22 juillet dernier, cette juridiction est, avec la cour d’appel de Limoges, site pilote pour essayer la signification électronique.

Valence lance également le protocole de dématérialisation de l’expertise judiciaire « Opalexe », premier outil de communication électronique qui donne une place pleine et entière au justiciable non représenté.

J’ajoute que votre ministère, madame la garde des sceaux, a confié à Valence l’expérimentation de la version 2 d’Opalexe, dont l’enjeu est la préparation du futur réseau privé virtuel des experts.

Dans ce contexte tendu en personnel, les magistrats sont inquiets. Ils devront faire des choix, car il n’est plus possible de faire fonctionner la totalité des services. Ils souhaitent ardemment que puissent être affectés aux tribunaux tous les moyens nécessaires pour leur permettre d’assurer la totalité des missions qui leur sont confiées par l’État.

Ma question, madame la garde des sceaux, est la suivante : puisque vous avez indiqué, dans un communiqué récent, que vous aviez obtenu le recrutement de 114 magistrats supplémentaires pour 2015, peut-on espérer que la juridiction de Valence bénéficie de ces nouveaux emplois afin de lui permettre de retrouver un effectif complet et de continuer, conformément à sa mission, à rendre une justice efficace et de qualité ?

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