Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, à l’heure où nous entamons nos débats, plus de deux cent cinquante communes françaises ont instauré la gratuité du stationnement pour les titulaires de la carte de stationnement pour personnes handicapées.
Ces initiatives sont très largement saluées, en ce qu’elles apportent une amélioration considérable à la vie quotidienne de nos concitoyennes et concitoyens en situation de handicap. En effet, trop souvent, l’accès à une place de stationnement relève, pour ces personnes, du parcours du combattant et peut constituer un obstacle à l’exercice d’une vie professionnelle, sociale et culturelle épanouie.
L’objet de la proposition de loi, que nous examinons aujourd’hui en deuxième lecture, est de généraliser ces initiatives en fixant dans la loi un principe général de gratuité et de non-limitation de la durée du stationnement sur les places réservées aux personnes en situation de handicap. Nous en devons la paternité – comme l’a rappelé Mme la secrétaire d’État – à M. Didier Guillaume, qui s’est beaucoup engagé sur ce sujet et qui a déposé ce texte le 1er octobre 2013, accompagné par l’ensemble des membres du groupe socialiste.
Les travaux du Sénat en première lecture, qui ont été menés en particulier par notre ancien collègue Ronan Kerdraon et qui se sont déroulés en décembre 2013, ont apporté plusieurs améliorations à la proposition de loi initiale.
Il s’agissait, notamment, d’éviter le risque de pratiques abusives et de préserver la libre administration des collectivités territoriales. Le texte issu de nos travaux permet ainsi aux communes de fixer une durée maximale de stationnement, tout en les obligeant à respecter un seuil de douze heures minimum. Le phénomène, que nous connaissons tous, des « voitures ventouses » devrait ainsi être évité et la fluidité du stationnement préservée, ce qui se révèle essentiel, surtout dans les plus grandes agglomérations.
Dans le même temps, le Sénat a étendu les règles de gratuité et de non-limitation de la durée du stationnement à l’ensemble des places, que celles-ci soient ou non réservées.
Cette souplesse par rapport au texte initial tient compte du fait que les personnes en situation de handicap sont parfois contraintes de stationner sur des places non réservées, lorsque ces dernières sont en nombre insuffisant ou lorsqu’il n’en existe aucune à proximité du lieu où elles souhaitent se rendre. Elle s’inscrit, de surcroît, dans la droite ligne des recommandations qui avaient été formulées dans son rapport d’octobre 2012 par l’Observatoire interministériel de l’accessibilité et de la conception universelle, l’OBIAçU, alors présidé par notre collègue Philippe Bas.
Les communes qui n’appliquent pas encore la gratuité devront disposer d’un laps de temps suffisant pour adapter leur politique de stationnement ; Mme la secrétaire d’État vient de le rappeler.
Un délai de deux mois a donc été fixé pour l’entrée en vigueur de ces nouvelles règles. S’agissant des parcs de stationnement gérés dans le cadre de délégations de service public, la gratuité et la non-limitation de la durée du stationnement s’appliqueront à compter du renouvellement des contrats. Le risque de contentieux lié à la signature d’avenants aux contrats en cours nous semble ainsi évité.
Enfin, grâce à une proposition de notre ancienne collègue Muguette Dini, la situation particulière des aires de stationnement qui disposent de bornes d’entrée et de sortie directement accessibles depuis le véhicule a été prise en compte. Pour ces dernières, l’obstacle physique que représente l’accès à un parcmètre n’existe pas. Les autorités compétentes seront donc libres d’y appliquer, ou non, la gratuité.
En novembre dernier, lorsqu’elle s’est prononcée en première lecture, l’Assemblée nationale a pleinement adhéré aux objectifs de la proposition de loi, ainsi qu’à son dispositif. Elle a malgré tout jugé nécessaire d’adopter trois modifications rédactionnelles au texte issu de nos débats en séance publique.
Ces évolutions, si elles apportent des améliorations de forme à la proposition de loi, n’en modifient aucunement le fond. Notre commission des affaires sociales n’y est pas revenue le 21 janvier dernier, et nous sommes par conséquent appelés à nous prononcer aujourd’hui sur un texte quasiment identique à celui qui avait fait l’objet d’un très large consensus au Sénat voilà un peu plus d’un an.
J’entends parfaitement les interrogations qui peuvent s’exprimer quant aux risques de pratiques de stationnement abusives. Je pense malgré tout qu’une solution équilibrée a été trouvée au Sénat en première lecture. J’estime également que le bilan des expériences menées sur nos territoires ne peut que nous encourager à adopter cette proposition de loi.
Si une ville comme Saint-Etienne parvient à appliquer les principes de gratuité et de non-limitation de la durée du stationnement sur l’ensemble des places depuis 1988, et si deux cent cinquante communes, souvent de grande taille, ont fait le choix de la suivre dans cette voie, c’est qu’il s’agit là d’une mesure à la fois raisonnable et bénéfique pour l’ensemble de nos concitoyens en situation de handicap.
En généralisant ces bonnes pratiques, nous rendons hommage à des collectivités qui ont su se montrer précurseurs en la matière et nous offrons aux personnes en situation de handicap l’assurance de pouvoir stationner dans les mêmes conditions pratiques sur l’ensemble du territoire national.
Ce texte, en effet, ne résoudra pas toutes les difficultés relatives au stationnement des personnes en situation de handicap. Je pense en particulier à la question d’une éventuelle augmentation du quota de places réservées, ainsi – vous venez de l’évoquer, madame la secrétaire d’État – qu’à la sécurisation du processus de fabrication de cartes de stationnement pour personnes handicapées.
Sur ce dernier point, madame la secrétaire d'État, les engagements pris par le Président de la République le 11 décembre dernier, lors de la conférence nationale du handicap, sont mis en perspective par vos propos d’il y a un instant. Ils aboutiront à la création d’une nouvelle carte « mobilité inclusion », personnelle et sécurisée, qui viendra remplacer les cartes de priorité et de stationnement. Des évolutions sont donc en cours ; elles nous permettent d’avancer en parallèle de l’examen de cette proposition de loi.
S’agissant des questions plus générales de mise en accessibilité de l’ensemble du cadre bâti et des transports, sur lesquelles, à vos côtés, je me suis personnellement beaucoup impliquée, le Parlement aura l’occasion de débattre au cours des semaines et des mois à venir. En attendant, sachons accueillir les avancées proposées par ce texte. Elles sont limitées au regard de l’ensemble des enjeux relatifs à l’accessibilité universelle, mais elles sont concrètes et certaines, et je remercie encore M. Didier Guillaume d’en avoir eu l’initiative.
Pour l’ensemble de ces raisons, je forme le vœu que cette proposition de loi puisse recueillir, comme en première lecture, le consensus le plus large possible au sein de notre Haute Assemblée.