Intervention de Nicole Duranton

Réunion du 11 mars 2015 à 14h30
Stationnement des personnes en situation de handicap — Adoption définitive en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Nicole DurantonNicole Duranton :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame la rapporteur, mes chers collègues, j’accueille avec satisfaction, mais aussi avec une certaine curiosité, cette proposition de loi de M. Didier Guillaume, qui reprend l’amendement du président Philippe Bas, déposé à l’article 36 bis du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, qui était en discussion au Sénat en novembre 2013, amendement sur lequel Mme Marylise Lebranchu avait émis un avis défavorable.

Je tiens à saluer le travail du Sénat : les modifications que notre assemblée a apportées au texte ont été intégralement conservées par l’Assemblée nationale. Cela va sans dire, mais cela va mieux en le disant...

Je profite de mon intervention pour attirer l’attention de chacune et de chacun d’entre nous sur l’orientation de notre réflexion quant aux questions d’accessibilité pour les personnes en situation de handicap, notamment en matière de stationnement. Je peux d’autant plus me le permettre que je suis vice-présidente du Grand Évreux Agglomération chargée de la mobilité et de l’accessibilité. Je salue cette proposition de loi, mais elle permet aussi d’élargir le débat. Il me semble nécessaire d’aller plus loin.

La loi du 11 février 2005 prévoit, à son article 2, et pour la première fois, une définition du handicap qui s’entend comme « toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions ».

Cette loi dresse ensuite la liste des champs sur lesquels peut porter la perturbation, ils sont au nombre de six : les fonctions physiques, c’est-à-dire le handicap moteur, les fonctions sensorielles, mentales, cognitives, psychiques ou le polyhandicap. Faciliter le stationnement des personnes en situation de handicap, à tout âge de la vie, c’est faciliter le stationnement de toutes ces personnes dont la limitation de déplacements est reconnue.

J’ai retenu en particulier une phrase de Jean-François Chossy, pour qui l’accessibilité est non pas la largeur des portes mais la grandeur d’esprit. Avec cette proposition de loi, allons-nous assez loin sur les questions d’accessibilité ? Allons-nous dans le sens voulu par une personne en situation de handicap ayant des déficiences auditives ou encore visuelles ? Respectons-nous sa volonté ?

Francine Maragliano, élue déléguée aux personnes en situation de handicap à la ville d’Évreux et représentante des usagers à l’observatoire régional de Normandie, avec qui je travaille en étroite collaboration sur les questions d’accessibilité au Grand Évreux, m’a fait part de ses réflexions. Ne serait-il pas plus approprié de faciliter en priorité le stationnement pour les personnes en situation de handicap à proximité des lieux d’accès aux soins, comme les pharmacies, les cabinets de médecin, les laboratoires ou tout autre point de santé ? Ne faudrait-il pas le faciliter également à proximité des lieux dont l’intérêt est grand dans la vie quotidienne, comme les banques, les assurances, les boulangeries ? Nous ferions alors un véritable pas en avant en faveur de l’accessibilité pour tous.

Nous devons avant toute chose entendre et écouter les personnes en situation de handicap. Ma collègue élue à Évreux m’a donné un exemple marquant : la signalétique. Lorsque l’on parle de stationnement pour personnes handicapées, nous pensons instantanément au logo bleu représentant une personne en fauteuil. Ce logo existe en France depuis les années soixante et a été créé par une étudiante danoise à l’occasion d’un concours de design. Plus de cinquante ans après, ce logo représente dans l’inconscient collectif l’ensemble des situations de handicap. Pourtant, aujourd’hui, les personnes en fauteuil ne représentent que 5 % de ceux qui sont en situation de handicap. Avoir une réflexion sur ce logo, c’est élargir le débat. Avoir une réflexion sur la notion de « personne en situation de handicap », c’est aussi élargir le débat.

Élargir le débat, c’est se préoccuper de tous les handicaps évoqués et définis dans la loi de 2005. Élargir le débat, c’est également retrouver le sens premier du droit en le rendant accessible à tout citoyen à tout âge de la vie. C’était d’ailleurs l’objectif initial de la loi du 11 février 2005 qui était sous-tendu par une seule et unique intention : « l’accès à tout pour tous ».

Élargir le débat, c’est aussi remettre les personnes en situation de handicap au cœur du débat. Souhaitent-elles vraiment être des citoyens à part ?

Je souhaite également aborder l’utilisation frauduleuse de cartes de stationnement pour personnes handicapées. Hélas ! la mise en place de la nouvelle carte européenne de stationnement n’a pas permis d’endiguer la circulation de faux documents, qui restent aisément accessibles sur internet. Les communes n’ont généralement pas les moyens de contrôler les titulaires de ces cartes, et ce sont finalement les titulaires de droit qui subissent ces incivilités ! Un vrai travail reste à faire concernant la sécurisation de ces cartes de stationnement.

Je souhaite sincèrement que cette proposition de loi nous permette d’aller plus loin, qu’elle soit l’occasion d’élargir le débat sur la prise en compte des six handicaps définis dans la loi de 2005.

Pour conclure, je citerai Marcel Proust : « le seul, le vrai, l’unique voyage c’est de changer de regard ».

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion