Intervention de Ségolène Neuville

Réunion du 12 mars 2015 à 9h00
Suppression des franchises médicales — Rejet d'une proposition de loi

Ségolène Neuville, secrétaire d'État :

Ce coût n’est malheureusement pas compatible avec les engagements pris par le Gouvernement en matière de maîtrise du rythme de croissance des dépenses d’assurance maladie, un rythme de croissance qui a été supérieur, ces dernières années, à celui de la croissance de la richesse nationale et qui sera en moyenne de 2 % pour 2015, 2016 et 2017.

Pour autant, le Gouvernement ne se résigne pas à ce que les plus modestes de nos concitoyens soient pénalisés, d’autant que les « retenues » en question sont forfaitaires, et donc indépendantes des revenus. C’est la raison pour laquelle il a décidé de supprimer les franchises à compter du 1er juillet prochain pour plus d’un million de personnes supplémentaires, plus précisément les bénéficiaires de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé, l’ACS, grâce à une mesure adoptée en loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 voilà quelques mois et soutenue par le groupe CRC, madame Cohen.

L’engagement de ce gouvernement en faveur de l’accès aux soins n’est pas seulement une intention ; ce sont des actes.

C’est, tout d’abord, refuser tout transfert de charges de l’assurance maladie vers les ménages : ni déremboursement, ni franchise, ni forfait supplémentaire ! Ce choix montre déjà ses effets : la part des dépenses de soins à la charge des ménages a reculé depuis 2011, passant de 9, 2 % des dépenses de soins à cette date à 8, 8% en 2013. Certes, cette amélioration de 0, 4 % est modeste, mais elle existe !

C’est aussi étendre à de nouveaux publics la couverture maladie universelle complémentaire, ou CMU-C, et l’ACS, en relevant les plafonds de ressources de ces prestations pour que toutes les personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté aient accès à l’un de ces dispositifs. Cette mesure représente un effort financier de 200 millions d’euros, qui permettra à terme à plus de 600 000 personnes supplémentaires de bénéficier de ces dispositifs.

C’est aussi améliorer le contenu de ces aides : en revalorisant la prise en charge de l’optique et des audioprothèses pour les bénéficiaires de la CMU-C ; en relevant le montant de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé pour les personnes âgées de plus de soixante ans, pour qui le coût de la complémentaire santé est le plus élevé ; en améliorant le rapport entre tarifs et prestations des contrats ACS, au travers d’une sélection de ces contrats, qui est en cours et entrera en vigueur le 1er juillet ; et en supprimant les franchises pour les bénéficiaires de l’ACS, comme je viens de le mentionner.

C’est aussi faciliter l’accès aux droits. Nous organisons une grande campagne d’information sur l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé. Parallèlement, le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement, que le Sénat examinera la semaine prochaine, prévoit de rendre automatique le renouvellement de cette aide pour les bénéficiaires du minimum vieillesse.

Mais notre action ne se limite pas à améliorer l’accès aux soins des personnes les plus démunies. Nous savons que, même pour les familles des classes moyennes, des situations difficiles peuvent exister du fait des dépassements d’honoraires. C’est pourquoi, là aussi, nous avons agi, avec un encadrement conventionnel des dépassements d’honoraires qui porte ses fruits.

On a constaté que, en 2012 puis en 2013, la part des dépenses de soins prises en charge par l’assurance maladie avait progressé de 0, 3 point et que celle qui reste à la charge des ménages avait reculé de 0, 4 point. Ce sont les premiers résultats tangibles : la charge pesant sur les ménages a diminué de plus de 700 millions d’euros. Encore faut-il souligner que ces chiffres de 2013 ne tiennent pas compte des montants investis depuis dans la réduction du reste à charge des ménages, au travers des mesures que j’ai présentées précédemment.

Nous nous situons donc dans une démarche de consolidation de la prise en charge collective du risque maladie, qui est la condition d’un accès équitable aux soins. Mais nous le faisons en utilisant nos ressources de façon plus ciblée, contrairement à la mesure plus large que vous défendez, madame la sénatrice.

Bien sûr, idéalement, nous souhaiterions supprimer ces franchises pour tout le monde. Il n’est d’ailleurs pas exclu que nous puissions le faire plus tard. Toutefois, pour permettre une telle évolution, il nous faut d’abord, par les réformes en cours, diminuer durablement les dépenses inutiles, qui existent. Je veux parler de la prescription et de la consommation de médicaments de marque plutôt que de génériques ; je pense aussi à la multiplication des actes inutiles du fait du mode de tarification. Lorsque nous aurons fait des progrès dans ces deux domaines précis, nous pourrons avancer sur la question des franchises.

Le Gouvernement est en effet résolu, mesdames, messieurs les sénateurs, à continuer à lever les freins financiers à l’accès aux soins. La semaine prochaine, la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale examinera le projet de loi relatif à la santé. Ce texte comportera, vous l’avez souligné, une mesure importante, attendue par les Français et déjà appliquée dans de nombreux pays étrangers, à savoir l’extension du tiers payant, lequel n’interdit malheureusement pas le prélèvement des franchises, le système étant déjà très organisé – vous l’avez souligné. Demain, les Français n’auront plus à avancer les frais de leurs consultations médicales.

Il s’agit d’une véritable avancée dans l’accès aux soins, au bénéfice de tous les Français. Je suis particulièrement satisfaite de vous entendre ici, dans cet hémicycle, défendre le tiers payant généralisé. Je l’avoue, on entend trop peu, ces derniers temps, un tel discours. Dans de nombreuses situations concrètes, le tiers payant généralisé peut faciliter l’accès aux soins, tout autant qu’une suppression complète des franchises.

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