Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées est, de l’avis de tous, une grande loi. Elle a permis de changer notre regard, les mentalités et notre réflexion sur un sujet trop longtemps négligé et elle a engagé de grandes avancées pour tous les citoyens en situation de handicap permanente ou temporaire. Le rapport d’information élaboré en 2012 par nos collègues Claire-Lise Campion et Isabelle Debré au nom de la commission pour le contrôle de l’application des lois l’a souligné.
La dépense publique pour la prise en charge des situations de handicap a connu entre 2005 et 2010 une croissance forte, de l’ordre de 22 %. Des avancées significatives ont été réalisées.
On peut notamment citer la scolarisation des enfants porteurs de handicap, qui concernait en 2010 plus de 200 000 élèves, soit 32 % de plus qu’en 2005. Le nombre d’AVS a doublé entre 2007 et 2010, pour représenter 23 261 équivalents temps plein travaillé, de même que les moyens consacrés à l’accompagnement de ces élèves, passés de 160, 3 millions d'euros à 342, 5 millions d'euros.
Je citerai encore la sécurisation des parcours des travailleurs en situation de handicap, la revalorisation de 25 % de l’AAH entre 2008 et 2012, l’amélioration de l’accès à la culture – télévision, audiodescription… –, les 51 450 places disponibles en établissements et services, la création d’un guichet unique pour les services aux personnes en situation de handicap avec la mise en place du dispositif des maisons départementales des personnes handicapées, le lancement du plan autisme et celui du plan handicap visuel, la création d’un observatoire et d’un comité.
C’est dire l’ampleur de la tâche qu’il a fallu accomplir. Tous ces progrès ont été permis par l’action du gouvernement précédent, dont cette loi symbolise la détermination.
Cependant, le rapport d’information de nos collègues a relevé des retards, sur le terrain, dans la mise en accessibilité du cadre bâti, des transports et de l’environnement des personnes en situation de handicap.
La loi avait en effet fixé deux dates butoirs pour que l’accessibilité devienne totalement effective : le 1er janvier 2015 pour les établissements publics et privés recevant du public ; le 13 février 2015 pour les transports publics. C’est à la suite de la remise, en mars 2013, des conclusions de la mission effectuée par notre collègue Claire-Lise Campion que le Gouvernement a déposé un projet de loi l’habilitant à adopter des mesures législatives pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d’habitation et de la voirie pour les personnes handicapées. Force est de constater que l’objectif d’une accessibilité universelle au 1er janvier 2015 était trop ambitieux.
Ainsi, le présent gouvernement a pris une ordonnance visant à adapter l’échéance fixée par la loi Handicap, au travers de la création des agendas d’accessibilité programmée, qui ouvrent de nouveaux délais de trois à neuf ans pour la mise aux normes et prévoient des sanctions en cas de non-engagement des travaux.
En tant que maire, je suis très concerné par la mesure. La mise en place de ces agendas apparaît comme une solution pragmatique et raisonnable. Cela met un peu de souplesse dans un dispositif indispensable, mais dont la mise en œuvre coûte cher.
Il faut souligner que, jusqu’à présent, les collectivités ont fait de leur mieux, malgré la crise qui a frappé le pays dès la mi-2008 et qui les a elles aussi touchées. Par exemple, une enquête en date du 1er juillet 2012 indique que 85 % de la population est couverte par un plan de mise en accessibilité de la voirie et des espaces publics, ou PAVE, adopté ou en cours d’élaboration. Ces plans concernent l’ensemble des circulations piétonnes et des aires de stationnement du territoire communal.
La mise en place de ces agendas est une mesure raisonnable, car aujourd’hui les collectivités doivent supporter une réduction drastique et sans précédent des dotations de l’État. Le Gouvernement a en effet décidé de diminuer de 11 milliards d'euros les aides aux collectivités territoriales sur les trois années à venir. Il faut en outre rappeler que, selon une étude réalisée en 2010 par la Fédération des associations pour adultes et jeunes handicapés, la Fédération française du bâtiment et Dexia, la réalisation des travaux de mise en accessibilité des établissements recevant du public représenterait un investissement de 17 milliards d’euros pour les collectivités.
Dans le détail, la facture est, sans surprise, plus élevée pour les communes où se concentre le plus grand nombre d’établissements recevant du public : elle atteint 1, 98 milliard d’euros pour les communes de moins de 3 000 habitants et 8, 33 milliards d’euros pour celles de plus de 3 000 habitants. L’étude évalue le budget moyen de la mise en accessibilité d’un établissement recevant du public à 11 000 euros pour les communes de moins de 3 000 habitants et à 73 000 euros pour celles de plus de 3 000 habitants. Le coût moyen par établissement recevant du public monte à 170 000 euros pour les départements et à 226 000 euros pour les régions.
La mise en place de ces agendas est une mesure raisonnable, car il faut se donner le temps de trouver les ressources nécessaires pour assurer la mise en œuvre d’un tel plan dans une situation budgétaire complexe, sans faire supporter la charge, une fois de plus, aux contribuables, alors même que les communes doivent faire face, avec des ressources et des dotations toujours plus rognées, à des dépenses supplémentaires, liées à la réforme des rythmes scolaires, à l’instruction des documents d’urbanisme, et j’en passe.
Bien sûr, nous sommes très attachés à cette loi d’une importance primordiale dont nous sommes les initiateurs et nous sommes conscients de l’impérieuse nécessité de respecter l’agenda d’accessibilité programmée, assorti d’un dispositif de suivi et de sanctions. Le processus devra être irréversible et nous veillerons à son application.
Ces mises aux normes sont essentielles pour le bien-vivre des personnes en situation de handicap et pour l’avenir de la société tout entière, confrontée au vieillissement de la population. Nous comprenons la colère des associations représentatives et nous tenons à saluer le rôle crucial qu’elles ont joué dans l’élaboration de cet édifice unique qu’est la loi du 11 février 2005.
En conclusion, je souhaiterais savoir quelles mesures financières et quel dispositif budgétaire, au-delà des ressources provenant de l’application des sanctions financières, le Gouvernement compte adopter pour assurer la mise en œuvre de l’accessibilité universelle dans les délais impartis.