Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’industrie agroalimentaire est un secteur clef de notre économie : 160, 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2013, plus de 500 000 emplois et un soutien à la balance commerciale de l’ordre de 8, 5 milliards d’euros.
Cette industrie, qui transforme les trois quarts de la production agricole française, est donc un important vecteur du dynamisme territorial et garantit une agriculture diversifiée. Toutefois, elle est menacée eu égard à l’internationalisation croissante des échanges. Pour preuve, la France est passée de la place de deuxième exportateur mondial de produits agroalimentaires au cinquième rang, derrière les États-Unis, les Pays-Bas, l’Allemagne et le Brésil.
L’excédent commercial français demeure cependant très fragile, dans la mesure où il repose essentiellement sur l’industrie des vins et des boissons alcooliques, secteur lui-même fortement soumis à la concurrence internationale.
Par conséquent, l’érosion des parts de marché françaises appelle une réponse forte et coordonnée de la part des pouvoirs publics et de tous les acteurs du marché.
À plusieurs reprises, le problème de la désindustrialisation de la France et du manque d’efficacité des dispositifs de soutien aux exportations a été relevé. Je pense notamment au travail mené récemment par nos collègues Martial Bourquin et Alain Chatillon sur la réindustrialisation de nos territoires, mais aussi à la mission de contrôle de la commission des finances du Sénat, qui, en 2013, faisait état de l’éparpillement des structures et de la nécessité de consolider une stratégie globale des intervenants.
Par la suite, le Gouvernement a engagé des réformes, notamment la création, au 1er janvier de cette année, de Business France, une structure issue de la fusion d’Ubifrance et de l’Agence française pour les investissements internationaux. Cette étape devrait permettre de mieux accompagner les industriels de l’agroalimentaire, entre autres, dans leur conquête des marchés à l’international.
Nous sommes tous d’accord, et vous en conviendrez, monsieur le ministre, pour affirmer qu’il est nécessaire d’encourager auprès de nos entreprises une véritable culture de l’exportation, qui pourrait passer, par exemple, par des regroupements de PME, afin de mutualiser les moyens et de favoriser l’accès aux marchés.
Par ailleurs, le rôle de l’Union européenne dans la protection des industries agroalimentaires de pays de l’Union est fondamental. Il est double.
Tout d’abord, il est nécessaire de prévenir les problèmes de compétitivité d’entreprises au sein de l’Union européenne, qui nuisent à l’économie de marché et au développement des entreprises nationales. Nous avons pu le déplorer en 2013 avec l’affaire des producteurs de volailles, qui a mis en évidence une distorsion de concurrence entre la France et l’Allemagne au sein de la filière d’abattage et de découpe.
En ce sens, il me semble opportun de procéder à une réflexion globale sur une éventuelle harmonisation des politiques sociales au sein des États membres. Pourquoi pas par l’instauration de minima sociaux à l’échelon européen ?
Ensuite, s’agissant de l’équilibre que souhaite garantir l’Europe entre la protection du marché intérieur et l’ouverture aux marchés de pays tiers à l’Union, il apparaît nécessaire que Bruxelles apporte des réponses adéquates au protectionnisme déguisé de certains de nos partenaires.
Les accords de libre-échange entre l’Europe et certains pays d’Amérique latine passés en 2013 sont symptomatiques d’une mise en danger de secteurs clefs de notre économie, plus particulièrement de l’économie antillaise. En effet, monsieur le ministre, le sucre, la banane et le rhum sont désormais concurrencés par ceux de ces pays qui les produisent à des coûts bien moindres, sans parler des conditions de travail.
Enfin, mes chers collègues, l’avenir de l’industrie agroalimentaire passe également par une meilleure transparence de la qualité des produits, ainsi que de leur traçabilité.
À ce sujet, deux points me semblent devoir être abordés, car ceux-ci posent question quant au respect des consommateurs.
Le premier a trait à la problématique des ajouts de sucre dans les produits agroalimentaires vendus dans les collectivités territoriales d’outre-mer, leur teneur en sucre étant souvent bien supérieure à celle des produits vendus en métropole, sous le seul prétexte que notre population y est plus sensible.
En 2013, M. Victorin Lurel, alors ministre des outre-mer, faisait adopter à l’unanimité une loi visant à interdire toute différence dans les taux de sucre entre les produits vendus outre-mer et en métropole. Mais alors, comment expliquer, au regard des enjeux de santé publique, que nous attendons toujours les arrêtés ministériels nécessaires à l’entrée en vigueur de ce texte ?
La seconde préoccupation, également issue de cette même loi du 3 juin 2013 visant à garantir la qualité de l’offre alimentaire en outre-mer, porte sur les dates limites de consommation et les dates limites d’utilisation optimale des produits.
En effet, les produits sont soumis à des dates plus tardives outre-mer. Un alignement des dates de péremption entre les produits qui sont vendus dans l’Hexagone et ceux qui le sont dans les territoires d’outre-mer était légitimement demandé. Là encore, nous sommes dans l’attente des textes d’application d’une loi consensuelle.
Voilà, mes chers collègues, les quelques remarques que je voulais formuler sur l’avenir de l’industrie agroalimentaire, dont le groupe RDSE souhaite qu’elle soit fermement soutenue, afin d’être plus compétitive et mieux armée pour conquérir de nouveaux marchés, le tout dans le respect des consommateurs, où qu’ils se trouvent.
Vos actions, monsieur le ministre, sont appréciées.